Introduction
Le Canada, à l’instar d’autres pays, est confronté au vieillissement de sa population. Ainsi, en 2011, un Canadien sur sept était âgé de 65 ans et plus (Agence de la santé publique du Canada, 2011). Cette tendance s’applique également au Québec où le nombre d’aînés passera d’environ un à deux millions d’ici 2031 (Ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec, 2011). Quatre-vingt-dix pourcent des 65 à 85 ans vivent à domicile (Ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec, 2011), révélant ainsi un élément important pour la vie en communauté. Des projets ont été initiés pour s’adapter à ces changements sociaux, tels que le Guide mondial des villes-amies des aînés publié par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) en 2007. Ce guide encourage le vieillissement actif, optimisant la santé, la participation et la sécurité des citoyens âgés, pour améliorer leur vie en communauté (Organisation mondiale de la Santé, 2007). Une partie de ce guide traite spécifiquement de l’environnement extérieur et de l’accessibilité aux bâtiments, notamment des rampes d’accessibilité. Toutefois, même si des projets novateurs existent, l’environnement urbain n’est majoritairement pas adapté aux personnes à mobilité réduite, notamment les personnes fragiles ou celles vivant avec des incapacités. En l’occurrence, plusieurs études démontrent que l’environnement bâti est considéré comme l’un des principaux obstacles à la participation sociale (Abbott & McConkey, Reference Abbott and McConkey2006; Hammel, Jones, Gossett, & Morgan, Reference Hammel, Jones, Gossett and Morgan2006; Heo, Pietrobelli, Wang, Heymsfield, & Faith, Reference Heo, Pietrobelli, Wang, Heymsfield and Faith2010). Ces constats conduisent à la nécessité d’instaurer des espaces en communauté utilisables par tous.
Accessibilité universelle et design inclusif
En 2010, plus d’un milliard de personnes dans le monde vivaient avec un handicap, soit environ 15 pour cent de la population (Organisation mondiale de la Santé, 2011). Les images stéréotypées des personnes ayant des incapacités sont souvent représentées par des individus en fauteuil roulant, sourds ou aveugles. Cependant, les handicaps sont complexes et variés dû à l’interaction entre les problèmes de santé et les facteurs environnementaux et personnels (Organisation mondiale de la Santé, 2011). La diversité de ces incapacités souligne l’interdépendance entre la personne et son environnement et l’émergence de différents concepts, dont l’accessibilité universelle et le design inclusif. L’accessibilité universelle est définie comme « la conception de produits et d’environnements pouvant être utilisables par tout individu, sans adaptation ou conception spéciale » (Preiser & Smith, Reference Preiser and Smith2011, p. 4.3). Ainsi, l’accessibilité universelle impose une vision novatrice des conceptions pour en arriver à un résultat utilisable par les individus avec ou sans incapacité (Gossett, Mirza, Brands, & Feidt, Reference Gossett, Mirza, Barnds and Feidt2009). De 1994 à 1997, Center for Universal Design, State University of North Carolina a développé des lignes directrices pour l’établissement de critères d’accessibilité universelle (Gossett et al., Reference Gossett, Mirza, Barnds and Feidt2009) et sept principes en sont ressortis : utilisation par tous, utilisation flexible, utilisation simple et intuitive, accès à l'information, utilisation sécuritaire, utilisation exigeant peu d'effort physique puis, utilisation et espaces accessibles (Société canadienne d’hypothèques et de logement, 2007; Story, Reference Story, Preiser and Smith2011). Ces principes, largement diffusés, représentent des objectifs à atteindre lors de conceptions dites universelles. Pour sa part, le design inclusif est défini comme le design incluant l’étendue de la diversité humaine en respectant leur langue, culture, genre, âge et toute autre forme de différence (Inclusive Design Research Centre, 2012). À la lumière de ces deux définitions, il en ressort que, bien que l’accessibilité universelle et le design inclusif soient régulièrement utilisés comme des synonymes, il existe des nuances entre ces deux concepts, notamment la considération de la diversité humaine comme la culture ou la langue (Preiser & Ostroff, Reference Preiser and Ostroff2001).
Design inclusif et populations
Dans le présent article, le concept de design inclusif appliqué à un environnement bâti est favorisé dû à sa considération de toutes sphères humaines, dont les incapacités physiques, sensorielles et cognitives. Ces incapacités ont généralement un impact sur l’interaction entre la personne et son environnement et doivent être considérées pour favoriser l’inclusion et la participation sociale, incluant toute personne marginalisée, telles que les personnes fragiles ou présentant des problèmes de poids (ex. obésité). En effet, avec l’augmentation de la population vieillissante, il devient primordial de considérer la complexité du processus de vieillissement, qui implique bien souvent plusieurs incapacités (ex. combinaison d’incapacités motrices, cognitives, sensorielles). De plus, le design inclusif permet de considérer les personnes atteintes d’incapacités cognitives ou visuelles et présentant des problématiques de « wayfinding »; ce dernier est défini comme « spatial problem solving » (Arthur & Passini, Reference Arthur and Passini1992, p. 25) et est composé de trois processus : prise de décision ou plan d’action, exécution de la décision, traitement de l’information (Passini, Reference Passini and Frascara2002; Hallock, Reference Hallock2005). Le « wayfinding » favorise la stimulation de plusieurs sens (Abbott & McConkey, Reference Abbott and McConkey2006; Muhlhausen, Reference Muhlhausen2000; Preiser & Ostroff, Reference Preiser and Ostroff2001) et doit répondre à trois questions: quelle information est transmise? Où doit-elle être transmise? Sous quelle forme doit-elle être transmise? (Passini, Reference Passini and Frascara2002). Le défi du design inclusif est donc de proposer et concevoir des environnements qui conviendront à tous. L’instauration d’un environnement non-humain sécuritaire et accessible à tous les usagers, s’applique notamment aux rampes d’accessibilité.
Rampes d’accessibilité
Les rampes d’accessibilité sont des plans inclinés utilisés comme alternative aux escaliers (Société canadienne d’hypothèques et de logement, 2007); elles permettent d’éliminer les obstacles qui limitent l’accès à certains lieux ou bâtiments. Les rampes d’accessibilité sont bâties selon des cadres de références architecturaux [ex. Code national du bâtiment–Canada (Conseil national de recherches Canada, 2003)] considérant les personnes en fauteuil roulant. Toutefois, ces critères sont composés d’éléments de base et d’un minimum à la limite de l’acceptable pour être utilisé par un ensemble d’usagers (Société Logique, 2004a). Par exemple, les dimensions des paliers des rampes d’accessibilité ne permettent pas la mobilité de certaines aides techniques, notamment les quadriporteurs et triporteurs (Santé et Services sociaux du Québec, 2011). Ainsi, les normes devraient plutôt se baser sur les évidences scientifiques dans les domaines tels que l’architecture et la réadaptation, mais ces dernières sont rares. Dans la littérature, on note que les participants des études portant sur la force de propulsion nécessaire pour monter une pente, sont majoritairement de jeunes hommes en fauteuil roulant manuel (Boninger et al., Reference Boninger, Souza, Cooper, Fitzgerald, Koontz and Fay2002; Hurd, Morrow, Kaufman & An, Reference Hurd, Morrow, Kaufman and An2008) non représentatifs de la population générale ou âgée. Une étude de Rousseau, Aissaoui et Bourbonnais (Reference Rousseau, Aissaoui and Bourbonnais2005) portait sur la force de propulsion de participants âgés de 18 à 64 ans, lors de laquelle la force a été mesurée à l’aide de la roue SmartWheel (roue instrumentée pour mesurer les forces). Les résultats ont démontré qu’il n’y a pas de différence significative pour l’effort déployé entre une pente de ratio 1 :10 et 1 :12, mais cette différence est significative avec une pente 1 :20; pour ce ratio, l’effort déployé est moindre. Pourtant, ces résultats diffèrent des codes du bâtiment (Association canadienne de normalisation, 2007; Conseil national de recherches Canada, 2003; Régie du bâtiment du Québec, 2006) recommandant, généralement, des pentes de 1 : 12. Il est à noter que chaque pays a son propre code du bâtiment, pouvant apporter une richesse d’information mais amenant des disparités dans la morphologie de la rampe d’accessibilité. Par exemple, la différence de la distance maximale à parcourir avant un palier de repos, varie d’un mètre complet entre la norme canadienne (9 mètres) (Canadian Standards Association, 1995) et française (10 mètres) (Ministère de l’Écologie, du Développement durable, des Transports et du Logement, 2011). La norme australienne, quant à elle, diffère quant à la longueur du palier de repos, suggérant de la doubler (Australian Building Codes Board, 2013). Conséquemment, la présente étude vise à 1) faire le constat des normes établies quant aux critères de construction des rampes d’accessibilité et 2) proposer des recommandations dans une perspective de design inclusif.
Méthodologie
Une recension des écrits a permis d’explorer la littérature scientifique et non scientifique sur le thème des rampes d’accessibilité.
Critères d’inclusion
Les documents ont été sélectionnés selon les critères suivants : 1) la littérature scientifique traitant de la personne (ex. incapacités physiques), de l’environnement bâti (normes de constructions, exigence biomécanique et physique, accessibilité universelle, design inclusif) ou de leur interaction; 2) la littérature non scientifique, telle que des documents provinciaux, nationaux ou internationaux portant sur des normes (ex. codes du bâtiment); et 3) la langue (français ou anglais).
Stratégies de recherches
Deux stratégies de recherches ont été utilisées pour la littérature scientifique: 1) sélection d’articles à partir des bases de données scientifiques; 2) recherche dans les références des articles retenus. Les bases de données électroniques consultées entre mai et août 2013 sont Medline, OTseeker, PsycINFO et CINAHL sur un intervalle de 2000 à 2013. Des mots clés ont été combinés en sélectionnant les opérateurs boléens « AND » et « OR » (Tableau 1). Ils ont été choisis selon la pertinence du sujet et par recherche à l’aide des mots clés utilisés au sein de la littérature scientifique associée.
Tableau 1: Mots clés utilisés au sein des bases de données
![](https://static.cambridge.org/binary/version/id/urn:cambridge.org:id:binary-alt:20160921104817-31248-mediumThumb-S0714980815000161_tab1.jpg?pub-status=live)
Également, des recherches dans la littérature non scientifique ont été réalisées au sein de sites internet portant sur le design inclusif, la biomécanique, l’obésité, les personnes fragiles ainsi que les incapacités visuelles et cognitives. Cette littérature est en lien avec les règlements provinciaux et nationaux d’architecture et de logements : Association canadienne de normalisation (CSA), Code national du bâtiment–Canada (CNB) (Conseil national de recherches Canada, 2003), Code de construction du Québec (CCQ) (Régie du bâtiment du Québec, 2006), Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) (2007), Société d’habitation du Québec (SHQ) (2013), Société Logique (2004a; 2004b; 2012). De plus, des centres de recherches spécialisés ont été consultés par l’entremise de leurs sites internet ou d’articles les citant en référence : Centre de recherche sur la lumière de Rensselaer Polytechnic Institute (New York), Thomas Pocklington Trust Court (London), Institut Nazareth et Louis-Braille (Canada), Statewide Equipment Program (Australia), Illuminating Engineering Society of North America (New York), Conseil de recherche en sciences naturelles et en génie (CRSNG) (Canada), Centre de technologie des transports de surface (CTTS-CNRC) (Canada).
Analyse de données
Les titres et les résumés des articles répertoriés dans les bases de données ont été révisés et sélectionnés selon leur pertinence. Premièrement, les données de la recension des écrits ont été regroupées par thèmes : couleur, contraste, lumière, orientation spatiale, dimensions des fauteuils roulants motorisés, biomécanique, obésité, culture, personnes fragiles, esthétique, design inclusif, normes des rampes d’accessibilité, incapacités cognitives et visuelles. Pour chacun des thèmes, les informations ont été regroupées par catégories : titre, auteur, année de publication, revue, objectif, méthodologie, population et principaux résultats. Deuxièmement, des tableaux de constats ont été créés par regroupement des données en thèmes généraux : 1) incapacités visuelles, 2) incapacités cognitives, 3) obésité, 4) biomécanique, 5) aspects techniques et 6) personnes fragiles. Finalement, une dernière réduction des données a mené vers les thèmes exposés dans les résultats : rampes d’accessibilité et usagers, matériaux et climat, repérage visuel, « wayfinding », durabilité, esthétique et culture.
Résultats
1152 articles ont été répertoriés, mais peu documentent les normes selon une perspective de design inclusif. Trente-huit articles respectaient les critères d’inclusion et 20 ont été identifiés dans leurs références (total : 58). Ces articles sont regroupés sous les cinq thèmes mentionnés précédemment. Ces thèmes, incluant des sous-thèmes, sont exposés au Tableau 2.
Tableau 2: Thèmes principaux et sous-thèmes
![](https://static.cambridge.org/binary/version/id/urn:cambridge.org:id:binary-alt:20160921104817-59932-mediumThumb-S0714980815000161_tab2.jpg?pub-status=live)
Rampes d’accessibilité et usagers
La littérature scientifique met de l’avant que l’accessibilité est plus présente dans les bâtiments de santé que dans les lieux sociaux ou de loisirs (Hamzat & Dada, Reference Hamzat and Dada2005; Welage & Liu, Reference Welage and Liu2011) nuisant ainsi à l’intégration sociale (Evcil, Reference Evcil2009; McClain, Reference McClain2000; Rivano-Fischer, Reference Rivano-Fischer2004). Par conséquent, des questionnements émergent en lien avec les paramètres des rampes et l’accessibilité qu’ils permettent pour les différents usagers, par exemple, les personnes âgées. Plusieurs études font le lien entre les caractéristiques des personnes fragiles et l’augmentation du taux de chute (Faes et al., Reference Faes, Reelick, Joosten-Weyn, Gier, Esselink and Olde Rikkert2010; Mackintosh, Fryer, & Sutherland, Reference Mackintosh, Fryer and Sutherland2007; Theodos, Reference Theodos2004), ce qui rehausse l’importance d’un environnement sécuritaire, incluant les rampes d’accessibilité. Une étude rapporte que les aidants des personnes âgées fragiles perçoivent les facteurs environnementaux (ex. rues mal entretenues) comme un des problèmes majeurs pouvant causer des chutes (Mackintosh et al., Reference Mackintosh, Fryer and Sutherland2007), mettant l’emphase sur l’importance de l’aménagement de l’environnement bâti pour favoriser la mobilité (Rosso, Auchincloss, & Michael, Reference Rosso, Auchincloss and Michael2011) et l’intégration dans la communauté (Wahl, Iwarsson, & Oswald, Reference Wahl, Iwarsson and Oswald2012), comme dans les villes-amies des aînés (Organisation mondiale de la Santé, 2011).
L’environnement bâti est bien souvent source d’obstacle pour bien des usagers, tels que les personnes atteintes d’obésité. Étant donné leurs caractéristiques anthropométriques, la dimension de leurs fauteuils roulants est différente et conséquemment, les aires d’accès ne sont pas adaptées à leurs passages (Heywood, Reference Heywood2001) [ex. allées des magasins étroites (Pain & Wiles, Reference Pain and Wiles2006)]. Leur participation sociale est alors restreinte, les menant vers un mode de vie sédentaire (van der Woude, de Groot & Janssen, Reference van der Woude, de Groot and Janssen2006), favorisant l’isolement par la stigmatisation, puis limitant la mobilité et l’accessibilité (Heo et al., Reference Heo, Pietrobelli, Wang, Heymsfield and Faith2010).
Dans la littérature répertoriée, la difficulté d’accessibilité se reflète aussi au sein de sept études portant sur l’accessibilité aux bâtiments en fauteuil roulant, dont quatre mentionnaient des difficultés liées aux rampes (Meyers, Anderson, Miller, Shipp, & Hoenig, Reference Meyers, Anderson, Miller, Shipp and Hoenig2002; Welage & Liu, Reference Welage and Liu2011) résultant d’un manque ou du non respect des réglementations (Welage & Liu, Reference Welage and Liu2011) et de l’absence d’expertise interdisciplinaire (Useh, Moyo, & Munyonga, Reference Useh, Moyo and Munyonga2001). Pourtant, des normes pour la construction des rampes sont établies et ce, dans plusieurs pays. Les normes relatives aux dimensions des paliers d’une rampe d’accessibilité sont de 1500x1500 mm (∼4,92 pieds × ∼4,92 pieds) (Association canadienne de normalisation, 2007; Conseil national de recherches Canada, 2003; Régie du bâtiment du Québec, 2006). Toutefois, certaines normes établies pour les dimensions de paliers ne permettent pas la mobilité des quadriporteurs (rayon de braquage de 1720 mm) (Santé et Services sociaux du Québec, 2011) et triporteurs. Pour les quadriporteurs et triporteurs, la Société Logique (2012) conseille des paliers de 1800×1800 mm (∼5,91 pieds × ∼5,91 pieds), et la SCHL (Société canadienne d’hypothèques et de logement, 2007), de 2100×2100 mm (∼6,89 pieds × ∼6,89 pieds). Il existe également des disparités dans les normes en ce qui concerne la pente. Le Code de construction du Québec (Régie du bâtiment du Québec, 2006) préconise un ratio 1 :10 (sauf lorsque la rampe est inférieure à trois mètres; la norme est alors 1 :8). Le Code national du bâtiment–Canada (Conseil national de recherches Canada, 2003) recommande, de manière générale, un ratio 1 :12; toutefois, il conseille un ratio 1 :20, surtout lorsque la longueur de la rampe est supérieure à neuf mètres et ce, en raison de la fatigabilité. L’Association canadienne de normalisation (2007), quant à elle, suggère une pente dont le ratio se situe entre 1 : 12 et 1 :20. La Société Logique (2012) favorise une pente entre 1 :15 et 1 :20 ou un chemin plat en pente douce sans marches (Institut Nazareth et Louis-Braille, 2003a). Cependant, certains auteurs recommandent un ratio de 1 :12 (Association canadienne de normalisation, 2007; Régie du bâtiment du Québec, 2006; Société canadienne d’hypothèques et de logement, 2007), ce qui s’applique aussi lorsque la personne en fauteuil roulant est accompagnée d’un aidant (Kim, Lee, & Chung, Reference Kim, Lee and Chung2012).
D’un point de vue biomécanique (ex. force de propulsion), il y a similarité de la force physique exigée pour monter les pentes dont le ratio est 1 :10 et 1 :12, toutes deux difficiles à utiliser par des personnes en fauteuil roulant manuel (Rousseau, Aissaoui, et Bourbonnais, Reference Rousseau, Aissaoui and Bourbonnais2005). Une pente de 1 :20 faciliterait l'utilisation en raison de l'efficacité mécanique (Rousseau et al., Reference Rousseau, Aissaoui and Bourbonnais2005) car il y a diminution, à la fois, de la force déployée par les bras et de la vélocité (Kim et al., Reference Kim, Lee and Chung2012; Koontz et al., Reference Koontz, Cooper, Boninger, Yang, Impink and van der Woude2005). De plus des études indiquent que plus la vélocité de la propulsion et le poids de la personne dans le fauteuil roulant augmentent, plus la charge au niveau de l’épaule s’accroît (van der Woude, de Groot, & Janssen, Reference van der Woude, de Groot and Janssen2006; Veeger, Rozendaal, & van der Helm, Reference Veeger, Rozendaal and van der Helm2002), augmentant ainsi le risque de douleurs ou de blessures au membre supérieur (Boninger et al., Reference Boninger, Souza, Cooper, Fitzgerald, Koontz and Fay2002; Desroches, Aissaoui, & Bourbonnais, Reference Desroches, Aissaoui and Bourbonnais2008; Hwang, Kim, & Kim, Reference Hwang, Kim and Kim2012), auquel peut s’ajouter un stress cardio-pulmonaire (van der Woude, Dallmeijer, Janssen, & Veeger, Reference van der Woude, Dallmeijer, Janssen and Veeger2001). Toutefois, lorsqu’un aidant pousse un fauteuil roulant, il n’y aurait pas de variante de la vitesse du fauteuil même lors du changement de poids de l’utilisateur du fauteuil ou de la force de l’aidant poussant le fauteuil (Kim et al., Reference Kim, Lee and Chung2012). Finalement, une étude d’Arabi et ses collaborateurs (Arabi, Aissaoui, Rousseau, Bourbonnais, & Dansereau, Reference Arabi, Aissaoui, Rousseau, Bourbonnais and Dansereau2004) suggère de proscrire les pentes 1 :10 pour les aînés, étant donné l’effort musculaire requis.
Une autre composante des rampes d’accessibilité pour lesquelles les normes divergent sont les mains courantes. Leur hauteur, selon la SCHL (Société canadienne d’hypothèques et de logement, 2007) et la CSA (Association canadienne de normalisation, 2007; Société canadienne d’hypothèques et de logement, 2007), varie de 860 à 920 mm, tandis que le Code national du bâtiment–Canada (Conseil national de recherches Canada, 2003) propose 865 à 965 mm, et la Société Logique (2012) 760 mm pour les personnes en fauteuil roulant (920 mm pour les personnes debout). Toutefois, les auteurs s’entendent sur la forme (circulaire), mais pas sur le diamètre, qui varie : 30 à 40 mm (Société canadienne d’hypothèques et de logement, 2007), 30 à 50 mm (Conseil national de recherches Canada, 2003) et 35 à 40 mm (Société Logique, 2012). La CSA (Association canadienne de normalisation, 2007) et la Société Logique (2012) ajoutent que les mains courantes devraient être de couleur contrastante.
Matériaux et climat
Outre le ratio de la pente, les matériaux peuvent affecter la propulsion. Par exemple, le bois peint teinté ou non traité est à éviter, devenant glissant lorsque mouillé (Société canadienne d’hypothèques et de logement, 2007). Des études démontrent que la propulsion biomécanique d’un fauteuil est affectée par la résistance de la surface sur laquelle ce dernier circule (Hurd et al., Reference Hurd, Morrow, Kaufman and An2008; Koontz et al., Reference Koontz, Cooper, Boninger, Yang, Impink and van der Woude2005). Deux études démontrent que les valeurs cinétiques nécessaires pour la propulsion sont plus grandes sur les granulats que sur les tuiles, le béton lisse ou le tapis (Hurd et al., Reference Hurd, Morrow, Kaufman and An2008; Koontz et al., Reference Koontz, Cooper, Boninger, Yang, Impink and van der Woude2005). De plus, les forces cinétiques déployées et le temps requis sont plus grands pour monter une bordure de chemin de cinq degrés ainsi que sur les pavés de béton (bloc en béton formant le revêtement de la chaussée), blocs encastrés de chaussée et sur le gazon en comparaison au tapis, béton lisse et tuiles intérieures (Koontz et al., Reference Koontz, Cooper, Boninger, Yang, Impink and van der Woude2005); l’étude de Hurd et ses collaborateurs (2008) en arrive aux mêmes constats concernant les granulats et les tuiles. De surcroît, comparativement au sol plat, les forces déployées sont plus grandes, autant sur les plans inclinés (expérimentés avec un ratio de 8%) que sur les pentes transversales (une pente à laquelle une inclinaison latérale est ajoutée, provoquant ainsi une inclinaison perpendiculaire au sens du déplacement) (expérimentées avec un ratio de 3° à 6°) (Hurd et al., Reference Hurd, Morrow, Kaufman and An2008). Les changements climatiques affectent également l’utilisation des rampes d’accessibilité en raison de l’impact sur la surface. Une pente 1 : 10 est infranchissable en fauteuil roulant manuel lors d'accumulation de neige (Lemaire, Reference Lemaire2010) et la zone de transition des deux premiers mètres est difficile à franchir (Lemaire, Reference Lemaire2010). Lemaire (Reference Lemaire2010) suggère une pente 1 : 16 plus facile à franchir en hiver.
Afin de combler certaines lacunes dans la construction des rampes d’accessibilité, des auteurs proposent des solutions qui tendent vers une conception de design inclusif. Face aux intempéries, plusieurs solutions ressortent : couvrir les rampes d’accessibilité extérieures (Association canadienne de normalisation, 2007; Régie du bâtiment du Québec, 2006; Société canadienne d’hypothèques et de logement, 2007), utiliser une surface poreuse ou chauffée (Association canadienne de normalisation, 2007) et construire la rampe d’accessibilité à l’abri des accumulations (Société canadienne d’hypothèques et de logement, 2007). L’utilisation de pavés autobloquants, pavés conçus pour s’emboîter ou le remblai granulaire évacuent l'eau diminuant le risque de gel, peut être une autre solution face aux changements climatiques (Société canadienne d’hypothèques et de logement, 2007). Le matériau utilisé pour la construction de rampes d’accessibilité doit être durable (Société canadienne d’hypothèques et de logement, 2007), antidérapant, ferme (Association canadienne de normalisation, 2007; Régie du bâtiment du Québec, 2006; Société Logique, 2012), régulier (Association canadienne de normalisation, 2007) et sans motifs chargés (Association canadienne de normalisation, 2007; Institut Nazareth et Louis-Braille, 2003d; Passini, Pigot, Rainville, & Tétreault, Reference Passini, Pigot, Rainville and Tétreault2000). Le béton doit être balayé pour créer une surface résistante aux glissements et est utilisé pour de faibles changements de niveaux comme les pavés autobloquants, intéressants par leur variété de couleurs et textures (Société canadienne d’hypothèques et de logement, 2007), mais pouvant devenir raboteux ou s'affaisser (Société canadienne d’hypothèques et de logement, 2007). Une construction de bois doit être bâtie sur une base solide et l’espace entre les planches ne doit pas dépasser six mm. Preiser et Smith (Reference Preiser and Smith2011) abordent l’utilisation de matériaux différents pour émettre des sons au contact d’une canne, tels que les tuiles en polymère en comparaison à l’acier. Les personnes ayant une vision non fonctionnelle mentionnaient, comme moyen de détection par l’utilisation de leur canne, la différence entre les tuiles et la surface adjacente ainsi que la fermeté des surfaces. (Landry, Ratelle, & Overbury, Reference Landry, Ratelle and Overbury2010). De plus, la configuration d’une rampe d’accessibilité doit être simple [volée droite sans courbes, minimum de paliers de changement de direction (Société Logique, 2012)], sans seuil au haut et au bas des pentes (Figure 1) et doit également éviter les paliers intermédiaires pour changement de direction à 180° (Association canadienne de normalisation, 2007; Société Logique, 2012) [lorsque requis, il doit être de 2500×1800 mm (∼ 8,20 pieds × ∼ 5,91 pieds) (Société Logique, 2012)]. Finalement, deux éléments facilitent la reconnaissance des rampes d’accessibilité et des marches par les personnes atteintes de basse vision: l’approche à ces dernières doit permettre: 1) une vue de la pente ou des marches vers le haut et, 2) de les observer en position dynamique plutôt que statique (Boshsler, Legge, Gage, & Kallie, Reference Bochsler, Legge, Gage and Kallie2013).
![](https://static.cambridge.org/binary/version/id/urn:cambridge.org:id:binary-alt:20160921104817-78944-mediumThumb-S0714980815000161_fig1g.jpg?pub-status=live)
Figure 1: Un seuil au haut d’une rampe d’accessibilité empêche l’accès à une terrasse extérieure
Repérage visuel
Cette section comprend les aspects recensés en lien avec le repérage visuel regroupant la lumière, la couleur et le contraste.
Lumière. Trois aspects ont été documentés : luminosité, éclairage, éblouissement. Une intensité lumineuse d'au moins 100 lux au sol (Association canadienne de normalisation, 2007; Illuminating Engineering Society, 2003; Scheiman, Scheiman, & Whittaker, Reference Scheiman, Scheiman and Whittaker2007; van der Woude et al., Reference van der Woude, Dallmeijer, Janssen and Veeger2001), de 200 lux sur les rampes d’accessibilité extérieures (Institut Nazareth et Louis-Braille, 2003a) et de 400 lux sur les panneaux indicateurs est conseillée pour les besoins des personnes ayant une déficience visuelle (Institut Nazareth et Louis-Braille, 2003d). Le changement de luminosité sur une rampe d’accessibilité ne doit pas excéder 300 lux (Thomas Pocklington Trust, 2010). L’évitement de zones d’ombre, causées par des éléments architecturaux et environnementaux (ex. encombrement) (Figueiro, Reference Figueiro2001; Institut Nazareth et Louis-Braille, 2003c) permet d’optimiser l’éclairage sur une rampe d’accessibilité, la rendant accueillante et sécuritaire tout en améliorant son utilisation (ex. mobilité, lecture de signaux) (Servat, Risco, Nakasato, & Bernardino, Reference Servat, Risco, Nakasato and Bernardino2011) et en prévenant le risque de chute (Société canadienne d’hypothèques et de logement, 2007; Thomas Pocklington Trust, 2010). Par contre, une étude a démontré qu’un éclairage au-dessus de l’utilisateur ou rapproché de l’utilisateur ne facilite pas plus la reconnaissance de rampes d’accessibilité par des personnes atteintes de basse vision qu’un éclairage éloigné (Boshler et al., Reference Bochsler, Legge, Gage and Kallie2013). Pour favoriser l’uniformité de la lumière, un éclairage de soir, un auvent ou un pare-soleil peuvent être utilisés (Hassan, Lovie-Kitchin, & Woods, Reference Hassan, Lovie-Kitchin and Woods2002; Institut Nazareth et Louis-Braille, 2003c). L’éclairage fluorescent est recommandé pour l’éclairage général et ne dégage pas de chaleur, mais doit être recouvert d’un diffuseur (Institut Nazareth et Louis-Braille, 2003c). L’éclairage incandescent, quant à lui, est conseillé pour l’éclairage dirigé soulignant les éléments architecturaux (Institut Nazareth et Louis-Braille, 2003c), mais il peut éblouir et dégager de la chaleur (Institut Nazareth et Louis-Braille, 2003c); il est toutefois à noter que la lumière naturelle fournit un éclairage supérieur à tout autre éclairage (Institut Nazareth et Louis-Braille, 2003c). Certains de ces types d’éclairage peuvent créer de l’éblouissement qui survient lorsque des sources de lumière vive interfèrent avec la vision d’objets ou de surfaces créant un inconfort visuel (Brawley, Reference Brawley2009; Negron-Poblete et Séguin, Reference Negron-Poblete and Séguin2012). Selon Al-Sallal (Reference Al-Sallal2006) et Brawley (Reference Brawley2009), il est important de le réduire car il limite la réalisation d’activités (Institut Nazareth et Louis-Braille, 2003c). Il existe plusieurs astuces pour le contrer: modifier l’orientation d’un luminaire, favoriser un fini mat plutôt que réfléchissant (Brawley, Reference Brawley2009; Figueiro, Reference Figueiro2001; Institut Nazareth et Louis-Braille, 2003c) et utiliser des lumières translucides (Al-Sallal, Reference Al-Sallal2006).
Couleur et contraste. Plusieurs études soulèvent l’importance du contraste et l’utilité d’appliquer des bandes de couleur contrastante sur le sol, au sommet et au bas des pentes (largeur 50±10mm) (Association canadienne de normalisation, 2007; Conseil national de recherches Canada, 2003; Institut Nazareth et Louis-Braille, 2003d; Muhlhausen, Reference Muhlhausen2000; Régie du bâtiment du Québec, 2006; Scheiman et al., Reference Scheiman, Scheiman and Whittaker2007; Société canadienne d’hypothèques et de logement, 2007; Société Logique, 2012).
Pour en faciliter le repérage, l’utilisation de couleurs d’au moins 70 pour cent de contraste (Arthur, Reference Arthur1988) fait ressortir des éléments environnementaux comme moyen de repérage ou d’orientation (Dorsainvil, Reference Dorsainvil2012; Institut Nazareth et Louis-Braille, 2003d); par exemple la couleur sera appliquée sur des éléments environnementaux tels que les : marches, balustrades (Figueiro, Reference Figueiro2001), chemins de guidages (Preiser & Smith, Reference Preiser and Smith2001) et mains courantes (Association canadienne de normalisation, 2006; Société canadienne d’hypothèques et de logement, 2007). Toutefois, deux études ne démontrent pas de résultats significatifs quant à l’effet du contraste pour la reconnaissance : 1) d’une rampe d’accessibilité grise sur fond noir ou gris (Bochsler et al., Reference Bochsler, Legge, Gage and Kallie2013) et 2) de tuiles au sol (jaune, blanc et gris) sur un plancher en ciment extérieur dans des conditions hivernales (Landry et al., Reference Landry, Ratelle and Overbury2010) par des personnes atteintes de basse vision. Ceci apporte donc une nuance quant à l’utilité du contraste pour l’identification d’éléments environnementaux par cette population.
La couleur est composée de la teinte, la luminosité et la saturation. Par exemple, le jaune a une teinte plus visible et stimulante en comparaison aux couleurs pastel plus apaisantes, telles que le lilas (Dorsainvil, Reference Dorsainvil2012; Scheiman et al., Reference Scheiman, Scheiman and Whittaker2007); concernant la luminosité, le blanc s’avère plus lumineux que le noir alors que pour la saturation, le rouge vif présente une haute saturation comparé au mauve qui est plus grisâtre (Dorsainvil, Reference Dorsainvil2012; Scheiman et al., Reference Scheiman, Scheiman and Whittaker2007). Les couleurs sont chaudes (ex. jaune) ou froides (ex. bleu) et peuvent entraîner des réactions physiologiques, comportementales et émotionnelles; par exemple, le noir peut créer de l’anxiété chez les personnes atteintes de problèmes cognitifs (Dorsainvil, Reference Dorsainvil2012). La signification des couleurs influence également les individus selon leur âge, genre, environnement et culture (Dorsainvil, Reference Dorsainvil2012). De plus, le choix de couleur doit tenir compte de l’éblouissement. Pour contrer ce dernier, un indice élevé de réflexion doit être utilisé pour les murs et plafonds. Toute autre configuration architecturale doit avoir un indice de réflexion bas (Tableau 3) (Arthur, Reference Arthur1988).
Tableau 3: Indice de réflexion de la lumière et taux de contraste par jumelage de couleurs
![](https://static.cambridge.org/binary/version/id/urn:cambridge.org:id:binary-alt:20160921104817-56142-mediumThumb-S0714980815000161_tab3.jpg?pub-status=live)
« Wayfinding »
Parmi la documentation répertoriée, huit documents (cinq articles et trois livres) traitaient du « wayfinding ». Des problèmes résultant d’un « wayfinding » inadéquat sont soulignés par les personnes ayant des incapacités visuelles (Thapar et al., Reference Thapar, Warner, Drainoni, Williams, Ditchfield and Wierbicky2004) et cognitives (Rainville, Passini, & Marchand, Reference Rainville, Passini and Marchand2001). Il est mentionné, comme solution, l’application de stratégies d’orientation par le design menant à l’organisation de l’environnement bâti (Hammel et al., Reference Hammel, Jones, Smith, Sanford, Bodine and Johnson2008) et du système de circulation (Passini, Reference Passini and Frascara2002; Passini et al., Reference Passini, Pigot, Rainville and Tétreault2000). La signalisation contenant quatre informations : orientation, direction, identification et informations générales (Institut Nazareth et Louis-Braille, 2003b), fait partie du « wayfinding » et est interprétée selon la perception de chacun (Gouveia, Farias, & Gatto, Reference Gouveia, Farias and Gatto2009) [ex. perception de la signification d’une flèche (Figure 2)].
![](https://static.cambridge.org/binary/version/id/urn:cambridge.org:id:binary-alt:20160921104817-15294-mediumThumb-S0714980815000161_fig2g.jpg?pub-status=live)
Figure 2: La signalisation est interprétée selon la perception de chacun. Certains concevront que la flèche signale de se diriger tout droit, mais d’autres penseront qu’elle signifie de monter à l’étage supérieur
En respectant les principes du « wayfinding », il faut utiliser des informations cohérentes (Institut Nazareth et Louis-Braille, 2003b; Rooke, Tzortzopoulos, Koskele, & Rooke, Reference Rooke, Tzortzopoulos, Koskele and Rooke2009; Yuzhu, Reference Yuzhu2010) aux endroits stratégiques à intervalles réguliers (Institut Nazareth et Louis-Braille, 2003b; Muhlhausen, Reference Muhlhausen2000; Passini et al., Reference Passini, Pigot, Rainville and Tétreault2000; Rooke et al., Reference Rooke, Tzortzopoulos, Koskele and Rooke2009; Yuzhu, Reference Yuzhu2010) et ne nécessitant pas de capacités intellectuelles de niveaux supérieurs (Rainville et al., Reference Rainville, Passini and Marchand2001). De plus, la compréhension doit être favorisée (Arthur & Passini, Reference Arthur and Passini1992; Institut Nazareth et Louis-Braille, 2003b; Rooke et al., Reference Rooke, Tzortzopoulos, Koskele and Rooke2009; Yuzhu, Reference Yuzhu2010) lors de l’utilisation de la littératie; cette dernière étant la « capacité à lire et à écrire […] permettant d’analyser des problèmes, […] d’utiliser des symboles dans des contextes complexes » (Conseil canadien sur l’apprentissage, 2013, para.4). Ainsi, des polices de caractères simples et régulières (Institut Nazareth et Louis-Braille, 2003b; Yuzhu, Reference Yuzhu2010), et des langues et symboles universels (Figure 3) sont prescrits (Arthur & Passini, Reference Arthur and Passini1992).
![](https://static.cambridge.org/binary/version/id/urn:cambridge.org:id:binary-alt:20160921104817-66209-mediumThumb-S0714980815000161_fig3g.jpg?pub-status=live)
Figure 3: Application du « wayfinding » par l’utilisation de symboles universels favorisant la compréhension par un ensemble d’usagers
Durabilité, esthétique et culture
D’autres sujets sont abordés dans la littérature, tels que la durabilité, l’esthétique et la culture mais ce, à travers l’ensemble des thèmes traités dans la présente recension; toutefois, aucun document traitant spécifiquement de ces informations n’a été répertorié.
La durabilité est la conception d’objets ou bâtiments selon leur durabilité économique et écologique en respectant la conception « verte » et les produits locaux (Birkeland, Reference Birkeland2002). L’esthétique, abordée sous le terme « d’engagement esthétique », favorise l’utilisation de l’environnement (Blanc, Reference Blanc2008; Blanc & Lolive, Reference Blanc and Lolive2009) [ex. l’aménagement architectural paysagé met en valeur l’environnement bâti (Rosenberg, Huang, Simonovich, & Belza, Reference Rosenberg, Huang, Simonovich and Belza2013)]. Finalement, le concept de culture est la perception des personnes teintée de leurs croyances. Par exemple, chacun accordera une importance différente aux incapacités (Ripat & Woodgate, Reference Ripat and Woodgate2011) et sera influencé par son mode de vie [ex. limitation de l’utilisation d’aides techniques car non adaptées au mode de vie (Na Ayudhya, Reference Na Ayudhya2010)]. Un autre exemple est le retour en communauté d’autochtones en fauteuil roulant décrivant les difficultés d’accessibilité lors des cérémonies culturelles limitant leur participation (Wearmouth & Wielandt, Reference Wearmouth and Wielandt2009). La conception d’environnements, selon des aspects sociaux et culturels, résulte ainsi de l’importance de considérer la créativité, l’esthétique et l’architecture selon le paysage (Preiser & Ostroff, Reference Preiser and Ostroff2001) et le contexte.
Discussion
Le constat des normes établies pour les rampes d’accessibilité démontre que ces dernières ne s’intègrent pas dans la perspective du design inclusif. Bien que ce dernier soit de plus en plus omniprésent, les normes de conception prescrites par la réglementation (ex. rampes d’accessibilité) visent principalement les personnes jeunes et en bonne santé physique se déplaçant en fauteuil roulant, ne satisfaisant pas ou peu l’ensemble de la population (Société canadienne d’hypothèques et de logement, 2007).
À cet égard, en ce qui a trait à la thématique des rampes d’accessibilité et de ses usagers, aucune étude scientifique répertoriée ne porte spécifiquement sur l’utilisation de fauteuils roulants par des personnes obèses. Les recommandations sont limitées et portent plutôt sur les adaptations au fauteuil roulant pour favoriser le confort et l’intégrité de la peau (van der Woude et al., 2006). Toutefois, plusieurs aspects pertinents, tels que les matériaux à utiliser pour leurs fauteuils roulants, l’application du design inclusif pour soutenir cette population, ainsi que l’utilisation des rampes d’accessibilité et la biomécanique de la propulsion de leurs fauteuils roulants, ne sont pas abordés. Par ailleurs, les études recensées quant aux mesures de forces de propulsion de fauteuils roulants manuels n’ont pas de participants âgés (65 ans et plus). La plupart des études incluent des jeunes hommes (∼18 à 50 ans) présentant une lésion médullaire (Collinger et al., Reference Collinger, Boninger, Koontz, Price, Sisto and Tolerico2008; Hurd et al., Reference Hurd, Morrow, Kaufman and An2008; Koontz et al., Reference Koontz, Cooper, Boninger, Yang, Impink and van der Woude2005; Mercer et al., Reference Mercer, Boninger, Koontz, Ren, Dyson-Hudson and Cooper2006), ce qui représente une portion des utilisateurs des rampes d’accessibilité.
Quant aux études portant sur le repérage visuel, elles recrutent des participants ayant des diagnostics différents au sein d’une même étude. Ainsi, une différence quant à l’atteinte du champ visuel et de l’acuité visuelle entre les différents participants (Bochsler et al., Reference Bochsler, Legge, Gage and Kallie2013) est souvent notée, pouvant biaiser les résultats et diminuer la généralisation. Peu d’études considèrent la population atteinte de troubles visuels apparaissant avec l’âge (Hassan et al., Reference Hassan, Lovie-Kitchin and Woods2002; West et al., Reference West, Rubin, Broman, Muñoz, Bandeen-Rocher and Turano2002), ce qui est pourtant d’importance dû au vieillissement de la population. Également, pour les recommandations liées aux caractéristiques environnementales de l’aménagement (ex. éclairage), la majorité des études ne spécifient pas si leurs recommandations sont applicables à l’intérieur comme à l’extérieur. Par ailleurs, aucune étude scientifique répertoriée ne porte spécifiquement sur le réfléchissement de la lumière au sol pouvant causer de l’éblouissement. Ce manque d’études scientifiques s’applique aussi à différentes populations (ex. populations avec problèmes visuels ou utilisant certaines aides techniques, telles que les cannes ou marchettes).
En ce qui concerne le « wayfinding », la plupart des études répertoriées sont qualitatives, limitant ainsi leur généralisation. Les études quantitatives regroupent souvent un faible taux de participants ou des diagnostics spécifiques (ex. Alzheimer) menant à la difficulté de généraliser à d’autres pathologies affectant les capacités cognitives.
De nouveaux concepts sont abordés dans la littérature, tels que la durabilité, l’esthétique et la culture. Ces facteurs sont peu considérés par le design inclusif et les principes de l’accessibilité universelle, actuellement. Il s’avère essentiel de considérer que d’autres caractéristiques peuvent influencer l’utilisation de l’environnement bâti même si elles ne sont pas mentionnées par le design inclusif. À titre d’exemple, Hammel et ses collaborateurs (Reference Hammel, Jones, Smith, Sanford, Bodine and Johnson2008) suggèrent d’élargir ou réviser certains des principes du design inclusif puisqu’ils n’incluent pas tous les aspects sensoriels, physiques, cognitifs et sociaux. Ainsi, une utilisation simple et intuitive peut être interprétée différemment pour les personnes avec des incapacités intellectuelles (Hammel et al., Reference Hammel, Jones, Smith, Sanford, Bodine and Johnson2008). Par conséquent, la vigilance est requise dans l’application du design inclusif afin d’éviter la proposition de solutions paradoxales ; son application à l’environnement bâti est complexe dû aux limitations environnementales et à la diversité des utilisateurs. Par exemple, l’adaptation pour une population peut créer un obstacle pour un autre groupe d’individus (Gossett et al., Reference Gossett, Mirza, Barnds and Feidt2009). Ainsi, rehausser l’accessibilité aux personnes en fauteuil roulant, par le retrait des cabines entourant les téléphones publics diminue leur détection par les personnes atteintes d’incapacités visuelles utilisant une canne puisqu’il n’y a plus de repère au sol. En conséquence, le design inclusif doit être considéré comme un idéal à atteindre et employé comme cadre de référence pour maximiser l’utilisation par tous.
Implication pour la pratique
Cette recension des écrits a permis de dégager plusieurs pistes de recommandations pour l’aménagement d’une rampe d’accessibilité : 1) tendre vers l’utilisation du ratio 1 :20 pour la pente; 2) construire la rampe d’accessibilité sur une surface stable, et utiliser un matériau durable, antidérapant, ferme et sans motifs pouvant résister aux changements climatiques et présentant un minimum de résistance (ex. terrain plat sans inégalités) ; 3) privilégier une rampe d’accessibilité en ligne droite sans courbes et sans changement de direction. Si ce changement est nécessaire, éviter ceux à 180° et favoriser des paliers d’au moins 2100×2100 mm; 4) appliquer un éclairage uniforme, d’au moins 100 lux en diminuant les zones d’ombres et l’éblouissement ; 5) poser des bandes de texture ou de couleur contrastante sur le sol au sommet et au bas des pentes (largeur de 50±10 mm); 6) favoriser l’application de couleurs à la rampe d’accessibilité créant un contraste d’au moins 70 pour cent, ayant un indice de réflexion bas [ex. noir (8%)] et une longueur d’onde élevée [ex. rouge (620−700 nm)]. Les auteurs suggèrent l’utilisation de couleur blanche ou beige pour l’environnement adjacent et noir, rouge, bleu ou brun pour la rampe permettant un compromis entre le contraste, l’indice de réflexion et la longueur d’onde. Toutefois, rappelons que le noir peut créer de l’anxiété chez certaines populations (ex. personnes atteintes de problèmes cognitifs); 7) utiliser des panneaux de signalisation clairs et compréhensibles par tous, autant par les symboles que les polices de caractères, pour repérer la rampe d’accessibilité; 8) favoriser une rampe d’accessibilité esthétique et son intégration à l’environnement (ex. une rampe d’accessibilité extérieure intégrée au paysage).
Forces et limites de l’étude
Le nombre d’articles recensés suite aux recherches dans la littérature scientifique n’a pas été enregistré lors du jumelage des mots clés. La méthodologie fut réalisée une seconde fois pour trouver le nombre exact d’articles recensés et respectant les critères d’inclusion. Ceci a augmenté la rigueur scientifique et a permis de s’assurer que tout article pertinent soit considéré. De plus, bien que la recension des écrits considère différents thèmes et populations, il aurait été pertinent d’explorer d’autres avenues (ex. surdité, composantes environnementales autres que les rampes d’accessibilité). Enfin, l’utilisation de la littérature scientifique et non scientifique mène à une diversité des résultats, parfois divergents et même incompatibles, ce qui démontre la nécessité de faire de la recherche dans ce domaine. Toutefois, ceci enrichit la recension des écrits car les articles scientifiques portant sur l’application du design inclusif aux normes de construction sont rares. En effet, une recension exhaustive a été menée au sein de la littérature pour arriver aux résultats présentés.
Conclusion
La recension des écrits a démontré qu’il y a une rareté d’évidences scientifiques concernant la construction des rampes d’accessibilité. En outre, il ressort qu’un ajustement des normes de construction est nécessaire car elles intègrent peu les concepts du design inclusif. Considérer des suggestions des codes de bâtiments de différents pays pourrait enrichir le Code national du bâtiment–Canada. De plus, cette recension des écrits démontre la nécessité du travail interdisciplinaire, autant avec les usagers que les professionnels, tels les architectes et ergothérapeutes, favorisant une analyse inclusive. Plus largement, l’interdisciplinarité favorisera l’utilisation des rampes d’accessibilité par tous, avec ou sans incapacité, ainsi que l’intégration en société et la participation sociale par le retrait d’obstacles environnementaux et par l’accès aux bâtiments et installations. Par ailleurs, la recension des écrits a permis d’émettre des suggestions pour l’aménagement de rampes d’accessibilité. Ces pistes de solutions devront être soumises à des expérimentations scientifiques et ce, dans un contexte écologique; par exemple, en laboratoire vivant, pour tester leur validité lors d’expérimentations concrètes.