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Chris Phillipson. Ageing. Cambridge, UK: Polity Press (Key Concepts Series), 2013.

Published online by Cambridge University Press:  11 June 2014

Mario Paris*
Affiliation:
Université de Sherbrooke
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Abstract

Type
Book Reviews/Comptes rendus
Copyright
Copyright © Canadian Association on Gerontology 2014 

En juin 2013, pendant le Congrès international de gérontologie et de gériatrie à Séoul (Corée du sud), on a assisté à une conférence du sociologue Chris Phillipson, éminent chercheur dans son domaine : la gérontologie critique. La conférence portait sur les différentes formes de solidarités porteuses de justice sociale pour les aînés. Il n’en fallait pas plus pour attirer notre intérêt aux travaux récents de Phillipson.

Son dernier ouvrage intitulé « Ageing » - paru dans la collection « Key Concepts » de Polity Press - explore de multiples enjeux du vieillissement de la population, et cela, à partir des idées qu’il a développées depuis plusieurs années. L’ouvrage a trois objectifs : 1) essayer d’apporter une compréhension aux débats sur le vieillissement et, en particulier, aux questions traditionnelles liées au travail et à la retraite, ainsi qu’à la santé et aux services sociaux; 2) mener une analyse critique quant aux significations de la vieillesse, du vieillissement et des personnes âgées; et 3) présenter de nouvelles idées à propos des possibilités et des potentiels inhérents au vieillissement de la population. Ces trois objectifs représentent chacune une partie distingue de l’ouvrage qui, en tout, comporte huit chapitres au côté d’une introduction (chapitre 1) et d’une conclusion (chapitre 10).

La première partie est orientée sur les dimensions démographiques et sociales du vieillissement et vise à mieux comprendre son contexte sociohistorique. Le chapitre 2 examine l’évolution du vieillissement démographique, et ce, à partir d’une perspective internationale - soulignant du coup les disparités entre les pays développés et ceux en voie de développement. De plus, il est question des différences du genre et de la classe sociale dans la population âgée, ainsi que l’augmentation des centenaires. Le chapitre 3 traite des principales théories sociologiques sur le vieillissement, entre autres, les théories conventionnelles des rôles sociaux, de l’activité et du désengagement. Sans entrer dans les détails et les subtilités, il est aussi question de plusieurs théories dont celles de la modernisation, de l’échange social, de la stratification et du parcours de vie. Phillipson clôt le chapitre en exposant les trois approches associées à la gérontologie critique : économie politique, économie morale et gérontologie humaine. Le chapitre 4 apporte une explication sociologique au vieillissement de la population et à la construction sociale de la vieillesse. Pour ce faire, l’auteur met en lumière les changements modernes du 19e siècle et de l’institutionnalisation du parcours de vie autour du travail. Le chapitre 5 poursuit cette analyse en s’attardant maintenant sur le rôle et les effets des politiques publiques sur le parcours de vie et la vieillesse. Plus particulièrement, il est question de la mise en place de l’État-providence après la Deuxième guerre mondiale et des conséquences sur la retraite et la dépendance financière des aînés. Phillipson termine le chapitre en situant le vieillissement de la population et la vieillesse non plus dans la modernité, mais au cœur d’une modernité avancée (Giddens, Reference Giddens1991) ou fluide (Bauman, Reference Bauman2000) dont l’incidence se fait ressentir dans l’ambiguïté des structures et des normes sociaux.

La deuxième partie de l’ouvrage se penche exclusivement sur les enjeux d’inégalités et de répartitions sociales dans le parcours de vie et lors de la vieillesse. Le chapitre 6 met l’accent sur les pensions de vieillesse en insistant sur les enjeux qu’impliquent les politiques néo-libérales, tant économiques et que sociales, au sein des pays de l’Union Européenne et des États-Unis. Par exemple, il est question des modifications apportées aux fonds publics de pension et leurs impacts sur l’égalité et l’équité sociale des politiques publiques. Le chapitre 7 s’intéresse à la famille et aux enjeux intergénérationnels. L’auteur positionne le concept de génération à travers ses trois formes couramment reconnus : la famille, la cohorte et le groupe d’âge. Il dresse aussi un portrait global des transformations observées dans la famille, de même que dans différentes formes de liens sociaux - notamment les liens transnationaux. Le chapitre 8 se penche sur le grand âge, c’est-à-dire les personnes âgées de 80 ans et plus. Pour ce faire, Phillipson distingue les concepts de troisième et de quatrième âge afin de cibler les particularités du grand âge, mais aussi ses enjeux éthiques autour de la médicalisation et des soins en fin de vie.

La troisième partie est orientée vers de nouvelles avenues et solutions afin de répondre au vieillissement démographique. Le chapitre 9 suggère trois chantiers de réflexion et d’action pour le vieillissement de la population au 21e siècle qui s’appuie principalement sur les compétences et les aptitudes des aînés. D’abord, l’auteur fait ressortir les efforts contemporains par rapport à l’intégration des âgés de la vie (éducation, travail et retraite), mais critique l’intégration basée sur la consommation et la production. Ensuite, il identifie les enjeux liés au prolongement des carrières dont l’accent est ordinairement axé sur l’employabilité à tous les âges et suggère de porter une attention particulière sur les environnements de travail. Enfin, Phillipson identifie les limites de l’éducation fondée sur des exigences économiques et propose un programme sur l’apprentissage tout au long de la vie. Le chapitre 10 fait office de conclusion de l’ouvrage et met de l’avant différentes formes de solidarités (de réciprocité, de génération, d’amicalité, de sollicitude et de globalité) comme différents « chemins » pour répondre aux besoins provoqués par le vieillissement de la population.

Cet ouvrage se situe sans conteste dans une continuité des travaux antérieurs de Phillipson (Baars, Dannefer, Phillipson, & Walker, Reference Baars, Dannefer, Phillipson and Walker2005; Vincent, Phillipson, & Downs, Reference Vincent, Phillipson and Downs2006), mais suscite peu de nouvelles idées au débat en gérontologie. En effet, son appel à privilégier une gérontologie critique face aux enjeux du vieillissement de la population se limite à ce qu’on a largement connu depuis de nombreuses années : l’économie politique. Ce constat exhume un sévère jugement adressé par le sociologue Victor Marshall : « qu’est-ce qu’il y a de nouveau à propos de la gérontologie critique? » (Marshall, Reference Marshall2009). En réalité, cette question vient à l’esprit lorsqu’on ferme les pages de l’ouvrage « Ageing ». En fait, où l’ouvrage attire l’attention du jeune chercheur en gérontologie critique est à l’égard des différentes formes de solidarités proposées par Phillipson : de réciprocité, de génération, d’amicalité, de sollicitude et de globalité. Cependant, malgré cette nouveauté dans la littérature gérontologique - qui à notre sens rejoint les réflexions du jour de l’École de Francfort, entre autres en matière de reconnaissance sociale (Honneth, Reference Honneth2002, Reference Honneth2006), il reste que les idées de Phillipson ne sont pas très développées et se résument au bout du compte qu’à une brève conclusion.

Malgré tout, un pareil ouvrage de gérontologie critique - quasi inédit au sein de la gérontologie francophone - a la qualité d’apporter une réflexion sur les enjeux sociaux du vieillissement et d’offrir plus de questions que de réponses : attitude idéale pour le professeur et l’étudiant de gérontologie.

References

Références

Baars, J., Dannefer, D., Phillipson, C. & Walker, A. (2005). Aging, globalization, and inequality: The new critical gerontology. Amityville, NY: Baywood.Google Scholar
Bauman, Z. (2000). Liquid modernity. Cambridge, UK: Polity Press.Google Scholar
Giddens, A. (1991). Modernity and self-identity. Self and society in late modern age. Cambridge, UK: Polity Press.Google Scholar
Honneth, A. (2002). La lutte pour la reconnaissance. Paris: Cerf.Google Scholar
Honneth, A. (2006). La société du mépris. Vers une nouvelle théorie critique. Paris: La Découverte.Google Scholar
Marshall, V. W. (2009). What is new about critical gerontology? Ageing & Society, 29(4), 651653.Google Scholar
Vincent, J. A., Phillipson, C. & Downs, M. (2006). The futures of old age. Thousand Oaks, CA: Sage.Google Scholar