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AN AMBITIOUS HISTORY OF AFRICAN CITIES - The African City: A History. By Bill Freund. New York: Cambridge University Press, 2007. Pp. x+214. $55 (isbn978-0-521-82109-4); $19, paperback (isbn978-0-521-52792-7).

Published online by Cambridge University Press:  23 April 2008

ODILE GOERG
Affiliation:
Université Paris-Diderot/SEDET-CNRS (UMR 7135)
Rights & Permissions [Opens in a new window]

Abstract

Type
Book Review
Copyright
Copyright © Cambridge University Press 2008

Dans cet ouvrage, Bill Freund se propose de donner ‘a comprehensive picture of cities in Africa from early origins to the present’. Projet ambitieux s'il en est, en moins de 200 pages de texte, incluant des éléments bibliographiques, et complété par un index. Projet d'autant plus ambitieux que l'auteur se situe à l'échelle continentale (aucune raison intellectuelle ne légitime en effet la césure autour du Sahara) et que les études urbaines se sont multipliées de manière exponentielle depuis deux décennies environ, toutes disciplines confondues. De fait, l'auteur puise aussi bien dans l'histoire que dans la géographie, pour la période contemporaine notamment. B. Freund se situe résolument dans ce renouvellement historiographique, en affirmant le caractère endogène du phénomème urbain et en voulant placer les Africains au cœur de son étude: ces deux prises de position ne sont-elles pas toutefois devenues des évidences ?

Comment se situer face à ce qui est d'emblée une gageure, avec ses limites intrinsèques? On peut signaler, au niveau méthodologique, les selected readings en fin de chapitre, inhérent aux impératifs de la collection; ce système n'est guère satisfaisant alors que les références en notes sont épisodiques: difficultés à retrouver un ouvrage cité, bibliographie datée ne rendant pas compte de l'explosion actuelle des études, citation aléatoire … Sur le fond, l'ouvrage contraste entre le foisonnement d'informations ou d'analyses détaillées (par exemple la vision des urbains par les anthropologues britanniques des années 1950) et des allusions elliptiques, entre des généralisations hâtives et des études de cas approfondies ou encore entre l'énonciation de thématiques diversifiées et des enchaînements d'idées peu argumentés. Les contraintes sont d'autant plus vives que Bill Freund souhaite aborder les villes sous les angles les plus variés: aussi bien l'urbanisation et ses aspects démographiques, toile de fond rapidement dressé, que les politiques d'urbanisme, les catégories citadines, les cultures urbaines même s'il s'étend peu sur les gouvernements urbains, les réseaux ou les fondements économiques. Au final, l'ouvrage hésite entre le manuel, sans prétention exhaustive toutefois, et l'essai qui souhaite marquer la discipline. Un pari que l'auteur réussit, avec plus ou moins de bonheur, selon les périodes et les régions.

L'ouvrage est divisé en 6 chapitres, qui suivent une progression globalement chronologique. Vu le déséquilibre des sources et des études, l'essentiel porte cependant sur la période allant de la colonisation à nos jours en 4 chapitres (pp. 65–197). Ne souhaitant pas rajouter une définition de la ville de plus à celles qui circulent, B. Freund reste dans un certain flou, évoquant parfois la taille, parfois les matériaux, souvent les fonctions et les activités, de plus en plus les cultures, tout en prenant ces distances par rapport au modèle post-moderne.

Résumant les découvertes récentes de fouilles archéologiques, B. Freund souligne indirectement les lacunes qui marquent nos connaissances des villes anciennes. Dans les chapitres 1 et 2, il fait le distinguo entre des villes totalement endogènes et celles dont la naissance a partie liée avec des facteurs extérieurs. Il souhaite ainsi mettre en évidence le rôle des forces vives internes pour dépasser le stéréotype faisant de la croissance urbaine le résultat exclusif d'influences étrangères ou de contacts commerciaux. Mais ce clivage, classique, ne s'avère pas toujours satisfaisant: d'une part les changements au fil des siècles peuvent incorporer des éléments anciens, de l'autre les formes antérieures peuvent avoir disparu sans laisser de trace. Par ailleurs, comment isoler le facteur commercial, interface avec l'étranger plus ou moins lointain, des autres fonctions urbaines?

De même, dans le troisième chapitre, l'auteur cherche à séparer les villes anciennes, qui s'adaptent ou disparaissent, de celles créées ex nihilo par la colonisation. Evoquant la destruction de quartiers anciens, B. Freund inclut la Médina de Dakar, contre-sens total: ce quartier a été précisément conçu lors de la peste de 1914 pour expulser les Africains du centre européen, objectif partiellement atteint (p. 76). Fin connaisseur de l'Afrique du Sud, B. Freund lui consacre le chapitre 4 sous l'intitulé des ‘villes en révoltes’. Il y mobilise l'iconographie pour rendre plus palpable les cultures urbaines. Ces développements montrent bien que l'histoire urbaine est inséparable de l'histoire nationale d'autant que les villes s'affirment comme moteurs et enjeux des changements: les avatars puis l'élimination de l'apartheid sont marqués dans l'espace urbain. Le chapitre 5, très touffu, concerne les villes post-coloniales dans leur grande variété. Ce chapitre aurait particulièrement gagné à présenter des sous-parties pour mettre en évidence les grandes articulations ainsi qu'une périodisation: la croissance urbaine des années 1960–70, dans un contexte économique porteur, présente des caractéristiques différentes de celle du XXIème siècle tant en ce qui concerne le rôle de l'Etat, souligné par B. Freund, que celui des acteurs parapublics ou privés (investisseurs, associations, migrants). Finalement, B. Freund choisit trois villes aux allures contrastées (Touba, Abidjan, Durban) pour souligner la diversité des destins urbains. Il atteint ainsi ce qui semble être l'objectif majeur de l'ouvrage: mettre en valeur l'émergence en Afrique de cultures urbaines nouvelles et spécifiques, de capacités à réagir et à proposer face à l'adversité pour inventer le futur qui sera citadin.