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Un nouveau “cheval de Troie”? Regard sur la codification des normes impératives du droit international général (jus cogens)

Published online by Cambridge University Press:  15 October 2021

Résumé

Depuis 2014, la Commission du droit international (CDI) étudie la question des normes impératives (jus cogens). Si ce projet a le mérite d’en éclaircir les aspects, cette contribution avance que certaines de ses observations peuvent aussi être assimilées à des “chevaux de Troie,” et pour deux raisons. Premièrement, certains principes entourant l’accès à l’impérativité pourraient favoriser la définition arbitraire de normes de jus cogens (rejet de la théorie de l’objecteur persistant en la matière, rôle des juridictions). Deuxièmement, certains effets attachés à l’impérativité pourraient être vecteurs de conséquences qui n’ont a priori pas été évaluées par la CDI (conformité des résolutions du Conseil de sécurité et des normes coutumières au jus cogens).

Abstract

Abstract

The International Law Commission (ILC) has worked on peremptory norms (jus cogens) since 2014. While this initiative must be praised — as some aspects of peremptory norms remain obscure — some conclusions reached by the ILC are more controversial. This article compares them to “Trojan horses” for two main reasons. First, some principles related to the evidence and recognition process of peremptory norms (rejection of persistent objector status vis-à-vis jus cogens, the role of courts) may favour the arbitrary definition of those norms. Second, some effects attributed to peremptory norms may result in consequences that have not — a priori — been considered by the ILC (conformity of United Nations Security Council resolutions and customary law with jus cogens).

Type
Articles
Copyright
© The Canadian Yearbook of International Law/Annuaire canadien de droit international 2021

Introduction

Alors que la Conférence de Vienne touchait à sa fin, la délégation française avait fait savoir au sujet du jus cogens qu’elle “refus[ait] de s’engager dans la nuit et d’accepter une disposition qui, faute d’établir des critères assez précis, ouvre la porte à la confusion et à la contrainte.”Footnote 1 Quelques années plus tôt, en 1953, le Rapport sur le droit des traités rédigé par Hersch Lauterpacht avait en effet introduit un concept qui allait devenir hautement controversé: celui de la “licéité de l’objet du traité.”Footnote 2 Le but de son article 15 était de frapper de nullité tout traité qui serait incompatible avec ces “principes supérieurs du droit international” considérés comme “étant les principes de l’ordre international public” et dont auraient fait partie les “règles de morale internationale.”Footnote 3 De l’aveu même de Lauterpacht, il n’existait aucune décision juridictionnelle à l’appui de cette vision.Footnote 4 Il n’en restait pas moins, de l’avis du juriste britannique, que “ce principe a[vait] sa place dans un code du droit des traités.”Footnote 5

Cette entaille à la liberté contractuelle des États fut conservée par les autres rapporteurs spéciaux — Gerald Fitzmaurice et Humphrey Waldock — et baptisée “jus cogens” (ou “normes impératives”). Selon le premier, il était “essentiel à la validité d’un traité que celui-ci soit conforme ou ne contrevienne pas aux principes et règles du droit international qui relèvent du jus cogens, ou que son exécution ne donne pas lieu à une infraction auxdits principes ou auxdites règles.”Footnote 6 Quant au second, qui développa une approche similaire, il estimait que “[s]i imparfait que soit l’ordre juridique international, la thèse selon laquelle il n’y aurait pas en dernière analyse d’ordre public international — c’est-à-dire de règle à laquelle les États ne puissent à leur gré déroger est de moins en moins soutenable.”Footnote 7 Si certains États étaient satisfaits de cet appel au jus naturalis,Footnote 8 un amendement proposé par l’Espagne, la Finlande et la Grèce — et prévoyant qu’une norme impérative devait être au préalable “reconnue par la communauté internationale” — fut adopté.Footnote 9 Ce dernier permit en fait de “renforcer le caractère positif des normes de jus cogens et ainsi, faire taire les voix qui estimaient que l’introduction du jus cogens en droit international équivalait à un retour du droit naturel.”Footnote 10 Comme le souligna Ceylan, l’article 50 permettrait de donner “une expression juridique à un principe moral.”Footnote 11 L’article 50, qui deviendra l’article 53 dans la version finale de la Convention de Vienne sur le droit des traités (Convention de Vienne), fut finalement adopté “par 72 voies contre 3, avec 18 abstentions.”Footnote 12 La formulation définitive de l’article 53 est donc la suivante:

Est nul tout traité qui, au moment de sa conclusion, est en conflit avec une norme impérative du droit international général. Aux fins de la présente Convention, une norme impérative du droit international général est une norme acceptée et reconnue par la communauté internationale des États dans son ensemble en tant que norme à laquelle aucune dérogation n’est permise et qui ne peut être modifiée que par une nouvelle norme du droit international général ayant le même caractère.Footnote 13

Le jus cogens, toutefois, n’avait pas livré tous ses secrets. Il restait ce concept “aussi flottant qu’absolu,” ainsi que l’avait dénoncé la délégation française.Footnote 14 Si bien qu’en 2014, la Commission du droit international (CDI) reconnut que “[l]es contours et les effets juridiques du jus cogens, en dépit de l’inclusion de celui-ci dans la Convention de Vienne, restent mal définis et donnent lieu à contentieux.”Footnote 15 Notant l’existence d’un certain nombre de décisions juridictionnelles et de “[p]lusieurs différends récents entre États metta[nt] en cause des normes de jus cogens existantes ou éventuelles,” la CDI décida d’inscrire cette question à son programme de travail afin de clarifier les règles applicables,Footnote 16 et Dire Tladi fut nommé rapporteur spécial.Footnote 17 Ces travaux ont permis d’éclaircir plusieurs points litigieux. Tout d’abord, ils ont permis d’écarter l’étude du jus cogens “régional,” qui soulevait plusieurs problèmes conceptuels,Footnote 18 et avait rencontré une certaine hostilité de la part des États.Footnote 19 Ils ont également permis de confirmer que l’indérogeabilité est une conséquence de la norme impérative, plutôt qu’un élément constitutif.Footnote 20

Le présent article soutient néanmoins que, malheureusement, certains aspects de ce projet de “codification” s’apparentent aussi à des “chevaux de Troie.” Dans la mythologie grecque, les Hellènes avaient, après dix ans d’un siège sans succès, offert à la ville de Troie un cheval en bois immense. Les Troyens firent entrer la statue dans leur cité. Mais ce n’était qu’une ruse, et ils allaient bientôt en subir les (insoupçonnées) conséquences. À la nuit tombée, les compagnons d’armes d’Ulysse, qui s’étaient préalablement dissimulés dans la statue, en émergèrent, ouvrirent les Portes Scées à l’armée grecque et lui permirent de piller la ville.Footnote 21 Si cette métaphore est appliquée au projet de la CDI, ce n’est bien sûr pas en raison d’une ruse ou d’une ambition destructrice de sa part, mais pour deux autres motifs. À l’instar du cheval de Troie — qui avait l’apparence d’une simple statue de bois — certaines dispositions risquent d’encourager l’assimilation de règles à des normes impératives, et ce dans des conditions litigieuses.Footnote 22 Ces aspects seront traités en premier lieu, dans une partie consacrée aux conditions d’accès d’une norme à l’impérativité. Ensuite — et comme le cheval de Troie, qui enfermait secrètement un groupe de soldats chargé d’ouvrir les portes de la ville — certaines normes identifiées à juste titre comme relevant du droit positif sont vectrices de conséquences qui n’ont pas été expressément envisagées ou résolues par la CDI. Ces éléments seront évoqués en second lieu, dans une partie consacrée aux effets attachés à l’impérativité.

À ce stade de l’introduction, il est nécessaire de faire mention des limites de la présente contribution. D’abord — pour des contraintes de temps et d’espace — elle ne se présente pas comme une analyse exhaustive des travaux de la CDI, mais expose davantage certaines “pièces choisies.” Ensuite, un certain nombre de décisions de justice nationales sont à l’étude dans cet article, en particulier lorsqu’il s’agit de discuter des preuves du caractère impératif d’une norme. Pour des motifs similaires — auxquels se joindront des contraintes linguistiques et matérielles — la présente étude n’a pu procéder qu’à un examen sélectif des décisions juridictionnelles nationales et internationales. Elle ne prétend pas mener une analyse systématique et universelle de la jurisprudence, mais prend appui sur certains cas afin d’illustrer les limites que peuvent parfois connaître les décisions de justice. Enfin, il n’échappera pas au lecteur que cette contribution présente une vision plutôt volontariste, raison pour laquelle il est régulièrement fait appel à la pratique étatique.

Une définition controversée de laccès à limpérativité

La CDI a pris un parti controversé: celui de considérer qu’une nouvelle norme impérative pouvait émerger alors même qu’un petit nombre d’États s’y oppose. Il s’agira en premier lieu de démontrer que ce soutien est discutable. Ensuite, la CDI a défini un certain nombre de modes de preuves qui permettraient de prouver l’existence d’une nouvelle norme impérative. Toutefois, elle accorde une place privilégiée aux décisions juridictionnelles, et il s’agira en second lieu d’expliquer en quoi le repos sur ces dernières est litigieux.

un soutien discutable de lapparition de normes de jus cogens en dépit dobjections étatiques

Dans son exercice de définition de la norme impérative, la CDI a — de son propre aveu — repris quasiment “mot pour mot” l’article 53 de la Convention de Vienne,Footnote 23 et précisé qu’une norme est “générale” en ce qu’elle va “s’appliquer dans des conditions égales à tous les membres de la communauté internationale.”Footnote 24 La CDI a également fait sienne la théorie classique,Footnote 25 selon laquelle c’est le “droit international coutumier” qui constitue “la manifestation la plus évidente du droit international général,” et “le fondement le plus commun des normes impératives du droit international général (jus cogens).”Footnote 26 De l’avis de la CDI, toutefois, la norme de jus cogens se distinguerait de la norme coutumière en deux points. Elle s’en distinguerait, premièrement, par le biais d’un opinio juris spécial (l’opinio juris cogens), c’est-à-dire “la question de savoir si la communauté internationale des États reconnaît une norme comme ayant un caractère impératif.”Footnote 27 Elle s’en distinguerait, deuxièmement, par le soutien que lui apporterait nécessairement une “très large majorité d’États.”Footnote 28 Cela signifie que l’établissement d’une norme coutumière requiert une “pratique générale, c’est-à-dire suffisamment répandue et représentative,” mais que la maturation d’une norme coutumière existante en une norme impérative nouvelle nécessite pour sa part le soutien d’une “très large majorité d’États.” Le jus cogens a d’ailleurs souvent été décrit comme une forme de “super coutume,”Footnote 29 une conception qui est acceptée par les États.Footnote 30

En revanche, en reconnaissant la possibilité pour une norme d’acquérir valeur impérative en dépit des objections étatiques, et de s’imposer même aux États ayant toujours protesté contre sa naissance, un premier “cheval de Troie” est introduit par les projets de la CDI. En effet, celle-ci considère que “la règle de l’objecteur persistant ne s’applique pas aux normes impératives du droit international général.”Footnote 31 Partant, la naissance d’une norme impérative ne serait subordonnée à “l’acceptation et la reconnaissance” que par “une très large majorité d’États,” et non par “tous les États.”Footnote 32 Or, si les évolutions du droit international admettent qu’un État se retrouve lié par une norme à laquelle il n’a pas expressément acquiescé,Footnote 33 la CDI considère comme de lege lata une théorie qui va beaucoup plus loin: celle selon laquelle un État peut se retrouver lié, contre sa volonté, par une norme à laquelle seule la (très large) majorité a adhéré.Footnote 34 L’opposition d’un État ne saurait, dès lors, faire échec à l’émergence d’une norme impérative.Footnote 35 C’est donc la possibilité pour une majorité d’États d’imposer sa volonté que la CDI semble prête à graver dans la pierre. Or, cette théorie n’a été accueillie favorablement que par une minorité de délégations,Footnote 36 et a finalement suscité une vague d’objections inédite de la part de certains États. C’est ainsi que la délégation russe “ne saurait souscrire à l’affirmation […] selon laquelle la règle de l’“objecteur persistant” ne s’applique pas aux normes du jus cogens.Footnote 37 En fait, “la question est plutôt de savoir si une norme du jus cogens peut survenir s’il existe un objecteur persistant.”Footnote 38 Selon le Bélarus, “l’idée selon laquelle l’acceptation et la reconnaissance d’une large majorité d’États suffiraient à identifier les normes du jus cogens pourrait créer des situations où certains États se retrouveraient liés par des normes à propos desquelles ils ont systématiquement formulé des réserves.”Footnote 39 Or, comme le Bélarus le fait valoir ensuite, “il apparaît clairement que, à l’inverse de ce qu’indique le projet de conclusion, l’acceptation et la reconnaissance par une large majorité d’États ne constituent pas des critères suffisants pour identifier les normes du jus cogens.Footnote 40 Quant à la délégation israélienne, elle estime “douteux qu’une norme de jus cogens puisse effectivement se développer et se cristalliser en cas d’objection persistante importante.”Footnote 41 Contrairement à ce qui est avancé par la CDI, donc, il n’est absolument pas certain qu’une norme impérative puisse s’imposer — ni même naître — en présence d’objection étatique.Footnote 42

De plus, la théorie d’une invalidité des objections persistantes en matière de jus cogens ne s’ancre pas dans une pratique étatique ou jurisprudentielle univoque. Durant la Conférence de Vienne, il n’y a guère que Mustafa Kamil Yasseen (au moment même du vote final),Footnote 43 et la délégation du Venezuela, qui soutinrent une telle approche.Footnote 44 Si les auteurs font souvent référence à la prohibition de l’apartheid pour défendre la vision selon laquelle il est impossible d’objecter à une norme impérative,Footnote 45 cet exemple demeure en fait controversé. Premièrement, dans le cadre de l’affaire du Sud-Ouest africain, l’Éthiopie et le Libéria — qui étaient les parties requérantes — “n’ont pas placé leur argumentation sur ce terrain [du jus cogens].”Footnote 46 Ces derniers n’ont pas ouvertement invoqué la nature impérative de l’apartheid, l’affaire étant par ailleurs antérieure à la finalisation de la Convention de Vienne. Il est utile de prendre note de leur argumentaire:

[E]n ce qui concerne l’institution du mandat, toutefois, le défendeur ne se présente pas devant la Cour en tant que souverain mais comme mandataire, et même si le défendeur en tant que souverain pouvait exercer un véto à l’encontre des processus créatifs de normes internationales, ce dont les demandeurs ne conviennent pas, le défendeur ne pouvait toutefois pas, en tant que mandataire, être dispensé d’une norme juridique qui a été créée par le consensus écrasant de la communauté internationale, un consensus tendant vers l’unanimité.Footnote 47

L’Afrique du Sud, pour sa part, avait fait valoir:

En ce qui concerne les autres sources potentielles de droit, nous avons souligné que, même s’il était possible de dire qu’une norme, telle qu’invoquée par les requérants, a évolué au cours des dernières années […] alors une telle norme ne serait pas contraignante pour le défendeur, dans la mesure où les principes élémentaires de droit international impliquent que les règles juridiques ne sont pas opposables aux États qui, durant la période où la règle en question [a acquis] acceptation générale, ont fait valoir leur désaccord de manière expresse et constante.Footnote 48

Si, à l’heure actuelle, une large acceptation est une condition sine qua non pour qu’une norme accède à l’impérativité, il n’est pas fait référence au jus cogens ou à une forme d’opinio juris cogens dans les plaidoiries, et celles-ci pourraient tout aussi bien se placer sur le simple terrain du droit coutumier. Si objection persistante de l’Afrique du Sud il y eut, il est plausible que celle-ci ne portait pas sur la naissance d’une norme impérative.Footnote 49 Il est d’ailleurs fait référence dans les plaidoiries aux “sources potentielles du droit” et aux “processus créatifs de normes,” alors même que le jus cogens n’est, contrairement à la coutume, pas considéré comme une source additionnelle du droit.Footnote 50 Deuxièmement, l’Afrique du Sud était de toute façon tenue de mettre fin à sa politique d’apartheid en vertu d’obligations annexes — et notamment celles découlant de la Charte des Nations Unies — dont elle n’aurait pu se libérer, même en protestant.Footnote 51 L’argumentation retenue par les résolutions de l’Assemblée générale repose ainsi sur l’incompatibilité des politiques discriminatoires avec l’article 56 de la Charte. Footnote 52

Un autre “précédent,” auquel se réfèrent volontiers les partisans d’une neutralisation de l’objection persistante, est l’affaire Domingues v United States. Washington faisait en effet valoir qu’aucune norme juridique n’interdisait aux États-Unis d’exécuter les mineurs de moins de dix-huit ans. Les États-Unis estimaient que, dans l’hypothèse où une norme coutumière interdisait un tel acte, ils avaient toujours protesté contre celle-ci, devaient être considérés comme objecteurs persistants, et n’étaient donc pas liés par cette norme. La Commission interaméricaine des droits de l’homme (CIDH) dût en convenir. Mais pour contourner cette difficulté et neutraliser l’argumentaire américain, elle considéra que cette interdiction était une norme de jus cogens. En effet, de l’avis de la CIDH, les normes impératives “lient la communauté internationale dans son ensemble, indépendamment de toute protestation, reconnaissance ou tout acquiescement”Footnote 53 — et ce, même si “un petit nombre d’États proteste.”Footnote 54 Toutefois, le raisonnement mis en œuvre dans cette décision n’est pas exempt de défauts, loin s’en faut.Footnote 55 En effet, la CIDH n’apporta pas la preuve d’un opinio juris cogens, c’est-à-dire le fait que l’écrasante majorité des États reconnaissait bien que l’interdiction d’exécuter des mineurs de moins de dix-huit ans constituait une norme impérative.Footnote 56 Contrairement à ce qu’allègue la CIDH, le fait que tel ou tel comportement soit interdit par nombre d’États et “choque la conscience de l’humanité”Footnote 57 ne suffit pas à qualifier une norme d’impérative.Footnote 58 De surcroît, il convient de noter que les décisions de la CIDH ne sont pas formellement contraignantes,Footnote 59 et que la cour suprême américaine ne fit aucunement référence à l’affaire Domingues ou à l’existence de normes impératives lorsque — quelques années plus tard — elle jugea inconstitutionnelle l’exécution de mineurs.Footnote 60

Ainsi, il n’existe aucun cas d’État ayant été clairement lié, contre sa volonté, par une norme impérative. La théorie contraire ne semble pas refléter l’état du droit international positif actuel, ce qui a d’ailleurs été signalé par plusieurs délégations à la lecture des travaux de la CDI. Certes, les effets pratiques d’une telle théorie sont sans doute à relativiser, dans la mesure où ce sont les graves atteintes aux droits de la personne humaine qui revêtent généralement les habits de l’impérativité,Footnote 61 et constituent souvent des pratiques interdites par ailleurs.Footnote 62 Il n’en reste pas moins que les implications théoriques sont pour leur part bien réelles.Footnote 63 À partir de là, deux issues sont envisageables.

La première consiste à aménager la possibilité, pour les États, d’être objecteur persistant en matière de normes impératives. Dans ce cas, tous les États n’ayant pas protesté contre la naissance de celle-ci peuvent être liés par une nouvelle règle de jus cogens. En fait, cette option se rapprocherait de celle imaginée par la délégation française durant la Conférence de Vienne. La France avait alors travaillé sur un projet d’amendement à l’article 50 prévoyant qu’une norme impérative “n’est pas opposable à un État qui peut faire la preuve qu’il ne l’a pas acceptée expressément en tant que telle.”Footnote 64 Il semblerait que ce projet, “soumis officieusement à certaines délégations, n’avait pas manqué d’intéresser quelques-unes de celles-ci,” qui “étaient prêtes à le soutenir.”Footnote 65 Paris renonça toutefois à déposer l’amendement, les autres nations craignant vraisemblablement “qu’une telle initiative favorise une remise en jeu des modifications […] obtenues à la première session.”Footnote 66 Cette première approche aurait l’avantage de prévenir la contraction d’engagements contraires au jus cogens par les États ayant reconnu l’existence d’une telle norme, sans pour autant donner un “droit de véto” aux États réticents. Toutefois, elle risquerait aussi de dénaturer l’essence même du jus cogens: celle de l’universalité. Or, comme cela a été évoqué en introduction, les travaux de la CDI ont permis aux États de faire part de leur méfiance à l’idée d’un jus cogens régional, qui n’engagerait qu’une partie de la communauté internationale.

Il semble donc plus logique de s’orienter vers une seconde solution, qui paraît désormais avoir le soutien d’un certain nombre d’États: celle selon laquelle une norme impérative ne saurait émerger tant qu’elle rencontre une objection de la part d’au moins un État.Footnote 67 Une fois qu’elle aurait vu le jour, la norme impérative lierait bien la communauté internationale dans son ensemble. On peut avancer que cela ne reviendrait qu’à retarder l’échéance: comme la pratique de l’objecteur persistant en droit international coutumier le démontre, les États récalcitrants finissent généralement par rallier la position majoritaire.Footnote 68

un repos litigieux sur les décisions juridictionnelles en matière de preuve de lexistence dune norme impérative

Les normes impératives ont, depuis leur apparition dans la Convention de Vienne, fait l’objet de multiples références dans les décisions juridictionnelles nationales.Footnote 69 Prenant note que ces dernières constituaient “elles aussi l’expression des vues des États,”Footnote 70 elles ont été classées par la CDI parmi les moyens de preuves que l’on pourrait qualifier de “principaux,” aux côtés des “déclarations publiques faites au nom des États,” des “publications officielles,” des “avis juridiques gouvernementaux,” de “la correspondance diplomatique,” des “actes législatifs et administratifs,” ainsi que des “dispositions conventionnelles” et des “résolutions adoptées par une organisation internationale ou lors d’une conférence intergouvernementale.”Footnote 71 Il serait en effet aujourd’hui difficile de nier aux cours la qualité d’organe de l’État, et donc leur capacité à créer de la pratique étatique. La théorie en vogue durant la première moitié du XXe siècle, selon laquelle la pratique étatique ne pourrait émaner que des organes compétents pour contracter au nom de l’État,Footnote 72 est désormais largement remise en question.Footnote 73

Toutefois, et contrairement à ce que laisse entendre la CDI, une analyse plus approfondie de la jurisprudence nationale révèle qu’une approche empirique purement quantitative — un “inventaire” des décisions allant dans tel ou tel sens — pourrait ne pas être entièrement satisfaisante lorsqu’il s’agit d’établir l’existence d’une norme de jus cogens. À vrai dire, les cours n’hésitent plus à invoquer le jus cogens,Footnote 74 et tendraient à désavouer Ian Brownlie, selon lequel il s’apparentait à un “véhicule qui ne quitte pas souvent le garage.”Footnote 75  Toutefois, il s’avère que les cours ne procèdent pas systématiquement à une analyse complète de la pratique étatique et de l’opinio juris cogens, ce qui se vérifie tant dans des systèmes de common law (fondés sur le mécanisme du précédent) que dans ceux de tradition civiliste.

Aux États-Unis, par exemple, la décision phare en matière de jus cogens est l’arrêt de 1989, Committee of US Citizens Living in Nicaragua v Reagan (CUSCLIN). Celle-ci qualifia de normes impératives les interdictions du recours à la force, du génocide, de l’esclavage, du meurtre, de la torture, des détentions arbitraires prolongées et de la discrimination raciale.Footnote 76 Mais pour ce faire, elle reposa essentiellement sur le Restatement,Footnote 77 c’est-à-dire une publication de l’American Law Institute qui vise à synthétiser les approches de la diplomatie et de la jurisprudence américaines en matière de droit international.Footnote 78 Une autre décision d’importance est l’arrêt Siderman de Blake v Republic of Argentina, qui porte sur l’interdiction de la torture. S’il fut bien fait appel à des instruments multilatéraux pour démontrer que celle-ci avait valeur coutumière,Footnote 79 c’est au Restatement, à la décision CUSCLIN, et à un “accord général parmi les experts” que la Cour fit référence pour conclure à l’existence d’un “consensus extraordinaire” et partant, à la nature impérative de la prohibition de la torture.Footnote 80

Il est désormais fréquent — non seulement pour les juridictions américaines,Footnote 81 mais aussi pour des juges étrangersFootnote 82 — de faire référence au Restatement, ou aux décisions CUSCLIN et Siderman de Blake à l’appui de l’existence de telle ou telle norme de jus cogens. Dans plusieurs décisions rendues en Australie, au Canada ou au Royaume-Uni, l’existence d’une norme de jus cogens a été évaluée sur la base d’un précédentFootnote 83 ou de la doctrine,Footnote 84 et plus rarement sur la base de conventions et déclarations internationales.Footnote 85 La Cour constitutionnelle fédérale d’Allemagne a pu elle aussi privilégier l’usage de la doctrine en la matière.Footnote 86 En Suisse, la situation est particulière, puisque le Conseil fédéral a eu l’occasion de souligner dans un message que l’interdiction de la torture et du génocide, ainsi que l’obligation du non-refoulement, relevaient du jus cogens. Footnote 87 En revanche, il a aussi précisé que certaines règles — notamment en ce qui concerne le droit à un recours effectif — ne relevaient pas, à son sens, du droit impératif.Footnote 88 C’est souvent à ces messages que le Tribunal fédéral a fait référence lorsqu’il s’agissait de déterminer si une norme était ou non impérative.Footnote 89 Les normes de jus cogens sont également parties intégrantes de plusieurs arrêts rendus par la Cour suprême d’Argentine, qui apporte en général une grande attention aux conventions et jurisprudences internationales. Dans la décision Priebke, la prohibition des crimes contre l’humanité et du génocide est décrite comme relevant du jus cogens, une conclusion qu’elle semble justifier par l’existence de plusieurs traités en la matière.Footnote 90 Dans la décision Arancibia Clavel, la Cour fit appel à la liste d’obligations erga omnes établie par la Cour internationale de Justice (CIJ) dans l’affaire relative à la Barcelona Traction,Footnote 91 et assimile “les règles concernant les droits fondamentaux de la personne humaine” à des normes de jus cogens. Footnote 92 Plus généralement, la Cour suprême argentine semble considérer que les atrocités de la seconde guerre mondiale ont généré “un processus de transformation de la conscience juridique mondiale” et la “formation progressive d’un corpus juris de caractère impératif.”Footnote 93 Cette conclusion s’ancre notamment dans l’analyse de plusieurs conventions internationales et régionales, décisions de la Cour interaméricaine des droits de l’homme (CIADH) et pratique des organisations internationales. Ce processus aurait permis à l’interdiction de la torture, des disparitions forcées et des crimes contre l’humanité d’acquérir la valeur de jus cogens. Footnote 94 Pour des raisons similaires, la Cour suprême argentine a également considéré comme impératifs les principes d’égalité et d’interdiction des discriminations.Footnote 95

Les contraintes pesant sur les juridictions sont bien connues, et certaines limites ne sont pas exclusives au jus cogens. Elles avaient ainsi été dénoncées dans un champ connexe: celui de la formation coutumière. Dans ce cadre, on avait pu souligner l’existence de contraintes matérielles (accès à la pratique), temporelles et linguistiques, voire reprocher aux juges de procéder à un examen incomplet de la pratique étatique, de privilégier l’étude des systèmes juridiques proches, ou d’être peu formés à certaines subtilités du droit international.Footnote 96 On notera d’ailleurs que, dans le cadre de ses travaux relatifs au droit international coutumier, les “décisions des juridictions nationales relatives à l’existence et au contenu de règles de droit international coutumier” ont été considérées comme un “moyen auxiliaire de détermination de telles règles.”Footnote 97 Si une telle relégation n’est peut-être pas indispensable en matière de jus cogens — et s’il ne revient sans doute pas au droit international de corriger ces défauts de façon matérielle — une attention spécifique doit a minima être portée à leur substance. Ainsi, l’existence de décisions nationales identifiant telle ou telle norme de jus cogens ne devrait pas constituer une forme d’“irréfutabilité empirique.”Footnote 98 En ce qui concerne le poids à accorder à la doctrine, la CDI avait ainsi estimé qu’elle devait varier “en fonction de la qualité du raisonnement et de la mesure dans laquelle ces travaux sont étayés par la pratique des États et les décisions de juridictions internationales.”Footnote 99 Une telle solution mériterait d’être transposée aux décisions de justice nationales. Si ces dernières doivent être considérées comme “l’expression des vues des États,” alors elles ne sauraient se contenter de relayer des écrits doctrinaux ou une décision étrangère, au risque de favoriser une détermination arbitraire des normes de jus cogens — ce qui constituerait un deuxième “cheval de Troie.”

Ces limites sont malheureusement en grande partie partagées par les juridictions internationales, et on ne saurait faire grief à la CDI de les avoir rattachées aux “moyens auxiliaires” de preuve.Footnote 100 Il est d’ailleurs assez infortuné que deux des arrêts les plus influents en matière de jus cogens (Furundžija et Al-Adsani) n’aient identifié une interdiction impérative de pratiquer la torture qu’au terme d’un raisonnement vaporeux. Dans l’affaire Furundžija, le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) se contenta de souligner qu’il existait “toute une série de règles conventionnelles et coutumières,” qui avaient une “place élevée dans le système normatif international,”Footnote 101 et de faire référence à la position du Comité des droits de l’homme, à un rapport de Pieter Kooijmans, ainsi qu’aux décisions des juridictions américaines.Footnote 102 Ainsi, “[e]n raison de l’importance des valeurs qu’il protège, ce principe est devenu une norme impérative ou jus cogens.Footnote 103 Quant à l’arrêt Al-Adsani, la Cour europénne des droits de l’homme (Cour EDH) invoqua “plusieurs décisions de justice” pour justifier du fait que “l’interdiction de la torture a désormais valeur de norme impérative.”Footnote 104 Mais en fait, seuls deux arrêts furent cités à l’appui: Furundžija et Pinochet. Footnote 105

Ce phénomène se retrouve dans les décisions et avis d’autres organes, à l’instar de la Commission d’arbitrage pour l’ex-Yougoslavie,Footnote 106 ou la Grande Chambre des recours de l’Office européen des brevets.Footnote 107 La CIADH a confirmé à plusieurs reprises l’existence de normes impératives, avec une étude de la pratique et de l’opinio juris cogens inégale.Footnote 108 En fait, elle ancre souvent l’identification de ces normes — à l’instar de l’interdiction de la torture et des disparitions forcées — dans l’existence de conventions internationales ou interaméricaines.Footnote 109 En ce qui concerne la première approche, on peut observer que l’existence d’une pratique universelle doit être complétée par la preuve de l’opinio juris cogens; en ce qui concerne la seconde, une convention régionale ne saurait systématiquement signifier qu’une norme est reconnue de manière universelle. Lorsqu’elle s’était penchée sur le principe d’égalité, d’égale protection devant la loi et de non-discrimination, la CIADH avait estimé qu’il relevait du jus cogens car “l’entière structure juridique de l’ordre public national et international repose sur celui-ci; il s’agit d’un principe fondamental qui imprègne toutes les lois.”Footnote 110 Elle avait au préalable reçu les observations écrites de plusieurs États, dont la majorité s’était apparemment abstenue — contrairement à la CIDH et à des organisations non-gouvernementalesFootnote 111 — de se prononcer sur la nature impérative du principe de non-discrimination. Seule la CIJ semble avoir, à une reprise, rompu avec la turbidité ambiante: en ce qui concerne la torture, elle avait invoqué l’existence “de nombreux instruments internationaux à vocation universelle,” d’une interdiction “dans le droit interne de la quasi-totalité des États,” et le fait que de tels actes soient “dénoncés régulièrement au sein des instances nationales et internationales.”Footnote 112 Sa pratique en la matière, toutefois, n’a pas toujours été convaincante, puisque c’est au terme d’une formule beaucoup plus brève qu’elle avait conclu à l’interdiction du génocide.Footnote 113

Une définition problématique des effets de limpérativité

La Convention de Vienne ne prévoit les effets des normes impératives qu’en matière de droit des traités, mais la CDI a estimé qu’ils allaient désormais bien au-delà de la nullité conventionnelle.Footnote 114 Selon cette dernière, tant les résolutions du Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations Unies (ONU) que les normes coutumières se doivent d’être conformes au jus cogens. Il sera toutefois démontré, en premier lieu, que la nullité des résolutions du Conseil de sécurité pour cause de contrariété au jus cogens est un scénario incertain. Il sera souligné, en second lieu, que la conformité des normes coutumières à la norme impérative mène à un résultat contestable: l’irréversibilité du jus cogens.

une nullité incertaine des résolutions du conseil de sécurité en raison dune contradiction avec une norme impérative

Dans le projet de conclusion 17 joint à son troisième rapport, Dire Tladi avançait que “[l]es résolutions contraignantes des organisations internationales, y compris celles du Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations Unies, n’établissent pas d’obligations contraignantes si elles sont en conflit avec une norme impérative du droit international général (jus cogens).”Footnote 115 Cette référence au Conseil fut controversée,Footnote 116 et retirée du texte même de ce qui est devenu le projet de conclusion 16.Footnote 117 Toutefois, son application au Conseil de sécurité n’a pas réellement été remise en question par la Commission,Footnote 118 ce qui revient à introduire un troisième “cheval de Troie.”Footnote 119 Cela tient davantage aux conséquences éventuelles d’une telle exigence — aucun mécanisme permettant d’évaluer la légalité des résolutions du Conseil n’ayant été clairement défini — que d’une réelle opposition de la part des États. En effet, certains États pourraient refuser de mettre en œuvre ces dernières en invoquant une contrariété au jus cogens, mettant en péril le bon fonctionnement des mécanismes de sécurité collective.

Il est clair que la Convention de Vienne n’entendait pas conférer aux normes impératives une existence autonome, c’est-à-dire au-delà du droit des traités. Cette lecture ne ressort pas du dispositif même de la convention, qui peut faire l’objet de lectures contradictoires,Footnote 120 mais des travaux préparatoires.Footnote 121 Néanmoins, la CDI avait — a priori avec la vision concordante de certains États — envisagé l’incompatibilité d’un acte d’une organisation internationale en raison d’une contrariété au jus cogens dans le projet d’articles de 2011.Footnote 122 À supposer que ce soit bien le cas, son application aux résolutions du Conseil de sécurité reste toutefois sujette à controverse. C’est par une opinion dissidente du Juge Elihu Lauterpacht datant de 1993 qu’une telle primauté avait d’abord été soutenue,Footnote 123 puis par le Juge Milenko Kreća,Footnote 124 et par le TPIY.Footnote 125 Quelques années plus tard, le Tribunal et la Cour de justice des Communautés européennes [CJCE] avaient partagé cette approche.Footnote 126

À l’heure actuelle, un grand nombre d’États abonde dans ce sens.Footnote 127 Certains — à l’instar de la Chine, des Pays-Bas, du Royaume-Uni, de la Russie, et des États-Unis — se sont toutefois montrés plus réservés, et leurs griefs sont de deux ordres. Premièrement, tant Pékin que Moscou doutent de la pertinence pratique d’une telle disposition, et ont même appelé à retirer toute référence au Conseil de sécurité. Selon la délégation chinoise, “[i]l [serait] tout simplement inconcevable que ces résolutions soient en conflit avec le jus cogens.Footnote 128 En effet, les résolutions du Conseil, “dont l’autorité découle de la Charte, doivent satisfaire à des exigences procédurales strictes et être conformes aux buts et principes des Nations Unies, comme prévu dans la Charte.Footnote 129 Selon la délégation russe, “la question de savoir si les résolutions du Conseil de sécurité sont conformes aux normes du jus cogens reste essentiellement théorique, faute de cas concrets dans la pratique.”Footnote 130 Or, si les buts et principes de la Charte peuvent constituer une barrière contre l’adoption d’une résolution contraire au jus cogens, il n’est pas garanti que celle-ci soit imperméable. Certaines situations ont montré que la légalité des résolutions du Conseil pouvait bien être mise à l’épreuve en pratique, à l’instar de la résolution 713 (qui aurait empêché la Bosnie d’exercer son droit à la légitime défense en imposant un embargo sur les armes),Footnote 131 ou de la Résolution 661 (qui aurait contribué à affamer des populations civiles).Footnote 132 Si l’on admet que le Conseil de sécurité est tenu de respecter le jus cogens, la question de la conformité serait sans aucun doute amenée à se poser de manière concrète à l’avenir. Deuxièmement, Moscou, Washington, Londres et Amsterdam craignaient qu’une telle conformité ne serve de prétexte pour se soustraire à l’autorité des résolutions du Conseil. La délégation russe s’inquiétait que les travaux de la CDI ne puissent “être interprété[s] par un État comme l’autorisant à refuser de mettre en œuvre une résolution du Conseil.”Footnote 133 Les États-Unis redoutaient que cela ne puisse “inciter les États, nonobstant l’article 103 de la Charte des Nations Unies, à ne pas tenir compte des résolutions contraignantes du Conseil ou à les contester en invoquant le jus cogens sans même en apporter la preuve.”Footnote 134 Le Royaume-Uni estimait qu’il y avait “un manque de pratique étatique supportant l’argument qu’un État puisse refuser de se conformer aux résolutions du Conseil” en cas d’invocation d’une contrariété au jus cogens, et craignait qu’une telle référence ne “puisse saper la légalité et l’effectivité des résolutions contraignantes du Conseil de sécurité” et en “affaiblir le respect.”Footnote 135 Quant à la délégation néerlandaise, elle exprimait des griefs similaires,Footnote 136 bien qu’elle ait convenu qu’“en principe, les décisions contraignantes des organisations internationales en général, et les décisions du Conseil de sécurité en particulier, ne peuvent créer des obligations qui contreviennent à une norme impérative.”Footnote 137 Ainsi, il semble que la pratique étatique en soit arrivée au point paradoxal où nul ne conteste réellement le fait que le Conseil de sécurité soit tenu de respecter le jus cogens, mais où chacun s’inquiète des conséquences de cette position.

Selon Mark Weisburd, une action du Conseil de sécurité dans tel ou tel sens constitue un bon indicateur du fait que les États le composant “n’estiment pas que cette action viole une règle ‘à laquelle aucune dérogation n’est permise’” et partant que “la communauté internationale dans son ensemble” voit cette question sous un autre angle.Footnote 138 Il ne faudrait en effet pas que l’action du Conseil de sécurité soit trop aisément paralysée.Footnote 139 Toutefois, comme cela vient d’être évoqué, la contrariété d’une résolution onusienne avec une norme impérative pourrait bien être soulevée par un ou plusieurs États.Footnote 140 Une telle question en soulève nécessairement une autre: celle de la possibilité de contrôler des résolutions du Conseil, et de qui serait habilité à le faire.Footnote 141

Le silence de l’article 38 du Statut de la Cour internationale de Justice (Statut de la CIJ) à l’égard des normes impératives n’empêcherait sans doute pas celle-ci de se prononcer sur les questions de conformité avec le jus cogens. Footnote 142 Il est en effet admis que cette liste n’est pas exhaustive,Footnote 143 et comme les normes impératives émanent d’autres sources — à l’instar des règles coutumières, mentionnées à l’article 38 — rien n’empêcherait la CIJ de passer par ce prisme pour régler un litige.Footnote 144 La vraie difficulté réside ailleurs, dans le fait qu’elle n’a pas reçu mandat pour se prononcer sur la légalité des actions entreprises par les organes de l’ONU. Bien que ni la Charte, ni le Statut de la CIJ ne se prononcent ouvertement sur ce point, cela ressort tant des travaux préparatoires que de la pratique ultérieure de la CIJ. Durant la conférence de San Francisco, des amendements tendant à soumettre la légalité des actions du Conseil de sécurité à la CIJ furent rejetés.Footnote 145 La position de principe de la CIJ est qu’elle ne peut se prononcer sur la légalité des actes adoptés par les organes onusiens,Footnote 146 et plusieurs de ses juges ont eu l’occasion d’exprimer leur réticence quant à une forme quelconque de contrôle des résolutions du Conseil.Footnote 147 Selon la plupart des auteurs, toutefois, la Cour jouirait d’une compétence “accessoire” ou “incidente,” c’est-à-dire la possibilité d’évaluer la légalité d’une résolution lorsque ce point conditionne l’issue d’un litige entre des parties.Footnote 148 Mais en fait, elle ne s’est livrée à de rares écarts que dans des situations où elle avait été saisie par ces mêmes organes ou pour mieux réaffirmer la légitimité de leurs activités.Footnote 149 La CIJ évite, et continuera sans nul doute d’éviter, le choc frontal.Footnote 150

Bien qu’elle ne dispose en aucun cas du pouvoir d’annuler des résolutions onusiennes, il est également possible de s’interroger sur le rôle que pourrait jouer la Cour pénale internationale (CPI) à cet égard. Comme le montre l’exemple de la résolution 661,Footnote 151 il n’est pas exclu qu’en se pliant à des obligations imposées à l’origine par le Conseil de sécurité, un individu commette un crime relevant de la compétence de la CPI.Footnote 152 Le Conseil, toutefois, dispose de la possibilité de bloquer la procédure, comme l’y autorise l’article 16 du Statut de Rome. Footnote 153 In fine, il peut donc décider de laisser (ou non) la justice suivre son cours, notamment dans des situations où la conformité de ses résolutions avec le jus cogens pourrait être évoquée.Footnote 154

En tout état de cause, il n’appartient pas aux autorités ou aux juridictions nationales de révoquer une décision du Conseil.Footnote 155 À l’heure actuelle, c’est donc principalement aux organes eux-mêmes que revient la tâche d’apprécier les limites de leurs propres pouvoirs.Footnote 156 Il pourrait être bénéfique que cette question soit soumise par la CDI à l’attention des États, afin d’éclaircir à quel niveau et selon quelles modalités une éventuelle contrariété au jus cogens doit être évaluée.

une irréversabilité contestable des normes impératives en raison de leur primauté sur les normes coutumières

Selon la CDI, les normes impératives priment non seulement sur les résolutions des organisations internationales, mais aussi sur les règles du droit international coutumier.Footnote 157 Ainsi, en cas de contradiction avec une norme de jus cogens, une nouvelle règle coutumière ne saurait se former,Footnote 158 tandis qu’une règle coutumière existante cesserait immédiatement d’exister.Footnote 159 Il est clair que cette vision, qui avait été promue par Alfred Verdross dès 1937,Footnote 160 n’avait absolument pas été partagée par les États durant la Conférence de Vienne. Aucune délégation n’entendait en fait étendre les effets du jus cogens au-delà de la nullité des traités. C’est ainsi que le Représentant de Ceylan avança qu’avec l’article 50, “les États reconnaîtraient pour la première fois qu’il existe des règles de droit d’une importance telle qu’on ne peut y déroger par voie d’accord.”Footnote 161 La délégation grecque fit valoir que “le jus cogens international circonscrit les limites de la volonté contractuelle des États.”Footnote 162 Toutefois, ce n’est pas nécessairement dans l’affirmation même d’une supériorité du jus cogens sur les règles coutumières que réside le “cheval de Troie.”Footnote 163 Au-delà du fait que cette conception soit partagée par un grand nombre de juridictionsFootnote 164 — dont on a pu évoquer le rôle précédemment — il est surtout significatif que cette vision ait été approuvée par la majorité des États lors des récents débats relatifs aux rapports de la CDI. La délégation grecque a ainsi fait valoir que “la portée et les effets du jus cogens vont désormais bien au-delà des articles 53 et 64 de la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969.”Footnote 165 Par conséquent, “les traités et autres normes internationales, tels que celles qui découlent de la coutume ou de déclarations unilatérales ou d’actes contraignants d’organisations internationales, ne devraient pas voir le jour ou produire d’effets juridiques s’ils entrent en conflit avec une norme de jus cogens.Footnote 166 Ce constat a été partagé par un certain nombre de délégations.Footnote 167 Il n’est donc pas surprenant que le troisième rapport rédigé par Dire Tladi ait noté:

[C]e qui est clair sur la base de la pratique est que, si un tel conflit survient, la norme du jus cogens l’emportera et la norme du droit international coutumier en conflit avec elle sera nulle. Cela vaut s’agissant tant des normes préexistantes du jus cogens que des normes survenant après l’apparition de la règle du droit international coutumier. Aux termes de l’article 53 de la Convention de Vienne de 1969, il n’en va autrement que si la règle du droit international coutumier en question est elle-même une nouvelle norme du jus cogens capable de modifier la norme du jus cogens préexistante.Footnote 168

Israël — qui “s’inquièt[ait] des tentatives visant à attacher des conséquences à la violation des normes de jus cogens qui vont au-delà de la fonction du jus cogens visée à l’article 53 de la Convention de Vienne” — est peut-être l’une des seules exceptions.Footnote 169 On peut alors se demander si une situation paradoxale ne risque pas de naître, puisqu’un État pourrait tout à fait admettre qu’une norme relève du jus cogens, tout en s’opposant à certains de ses effets (en l’occurrence, sa primauté sur les normes coutumières).

Toutefois, le quatrième et véritable “cheval de Troie” réside ailleurs, dans les effets qu’a une telle position. Elle soulève en réalité un problème conceptuel majeur: celui de l’irréversibilité des normes de jus cogens. Footnote 170 Ces dernières sont, comme l’a souligné la CDI, “essentiellement des normes de droit international coutumier exigeant une forme spéciale d’opinio juris, à savoir la conviction de l’existence d’un droit ou d’une obligation juridique à caractère péremptoire.”Footnote 171 Or, si l’on considère qu’une nouvelle règle coutumière ne saurait émerger si elle est contraire à une norme impérative, si l’on considère comme nulle tout déclaration unilatérale des États allant à l’encontre de cette dernière,Footnote 172 on risque de bloquer ipso facto toute possibilité de renverser une norme de jus cogens existante.Footnote 173 Et ce, à moins que l’on admette en matière de jus cogens un équivalent de la “coutume instantanée,”Footnote 174 l’expression concomitante et universelle d’une pratique accompagnée de son opinio juris cogens — ce qui demeure hautement hypothétique. Or, une telle conception est incompatible avec celle du jus cogens initialement promue durant la Conférence de Vienne, qui se voulait flexible et entendait le placer sous contrôle des États.Footnote 175 Comme le faisait valoir l’Inde à l’époque, “[l]e concept de norme impérative n’est pas dépourvu de souplesse, puisqu’une norme impérative existante peut être modifiée par une nouvelle norme ayant le même caractère.”Footnote 176 Il convient également de rappeler que la vision promue par la Tanzanie n’avait pas été partagée par les autres États. Selon celle-ci, “une règle de jus cogens ne peut être modifiée […] il y aura de nouvelles normes de jus cogens dans l’avenir, mais elles ne pourront que s’ajouter aux anciennes normes et ne pourront jamais déroger aux normes existantes.”Footnote 177 La CDI n’a pas souhaité rompre avec la vision partagée durant la Conférence de Vienne, et reconnait qu’une norme impérative “ne peut être modifiée que par une norme ultérieure du droit international général (jus cogens) ayant le même caractère.”Footnote 178 Mais en reconnaissant d’une part que la norme impérative prime sur la norme coutumière, et d’autre part que la norme impérative ne pourra être modifiée que par une règle du droit international général (et donc d’inspiration essentiellement coutumière), la CDI risque de s’enfermer dans une certaine contradiction.Footnote 179

Une solution avait bien été envisagée durant la Conférence de Vienne, mais a été relativement passée sous silence par les conclusions de la CDI: celle selon laquelle “une modification d’une règle impérative” peut tout à fait s’effectuer “par voie de traité multilatéral général.”Footnote 180 D’ailleurs, comme l’avait souligné la délégation grecque, “[u]ne règle de jus cogens, au sens de l’article 50, l’emporte, en principe, sur un traité. Cependant, il y a une exception: le traité l’emportera s’il s’agit d’un traité multilatéral général. Le trait essentiel du jus cogens international réside donc dans la généralité de son acceptation par la communauté des États.”Footnote 181 La nature contractuelle de celui-ci n’exclut pas ipso facto sa capacité à amender une norme impérative,Footnote 182 puisque tant le traité que la coutume se fondent sur l’idée d’un accord (le premier étant plus formel que la seconde).Footnote 183 Toutefois, dans la mesure où “[u]n traité ne crée ni obligations ni droits pour un État tiers sans son consentement”Footnote 184 — ledit consentement devant être expressément formulé lorsqu’une obligation naît pour un État tiersFootnote 185 — l’amendement d’une norme impérative (qui est nécessairement universelle) par la voie conventionnelle pourrait requérir l’adhésion de l’ensemble des États. De surcroît, il faudrait que de manière simultanée, les États souhaitent insuffler à une norme donnée le caractère impératif. Et ce, au risque que la norme conventionnelle nouvelle ne soit considérée comme contraire à une norme impérative existante, et donc passible de nullité. Le changement d’une norme de jus cogens pourrait, par la suite, passer lui-même par un amendement du traité originel, à condition qu’il réunisse une nouvelle fois l’ensemble des États.Footnote 186 Alternativement, on pourrait envisager l’émergence d’un nouveau type de clause, spécifique au jus cogens, sur le modèle suivant: “en cas de conflit entre les obligations mentionnées dans ce traité et des normes impératives existantes, et sous réserve de remarques contraires émises par les États non-parties dans un délai [X], les premières prévaudront.” Il serait également concevable de recourir à une formulation du type: “les dispositions relatives à [la norme impérative nouvelle Y] ne pourront entrer en vigueur si elles font l’objet de réserves des États parties ou d’opposition des États non-parties.” De tels moyens — qui ne relèvent bien sûr pas du droit positif aujourd’hui — permettrait de relayer la position de la grande majorité des États, tout en ménageant la souveraineté des États tiers.

Réflexions conclusives

Selon la résolution 174(II) de l’Assemblée générale de l’ONU, qui créa la CDI, celle-ci avait deux rôles principaux: le “développement progressif du droit international” et sa “codification.”Footnote 187 D’un côté, le développement progressif s’entendait des “cas où il s’agit de rédiger des conventions sur des sujets qui ne sont pas encore réglés par le droit international ou relativement auxquels le droit n’est pas encore suffisamment développé dans la pratique des États.”Footnote 188 D’un autre côté, la codification s’entendait des “cas où il s’agit de formuler avec plus de précisions et de systématiser les règles du droit international dans des domaines dans lesquels il existe déjà une pratique étatique considérable, des précédents et des opinions doctrinales.”Footnote 189 Pour la CDI, cette frontière était nécessairement poreuse: il était ainsi inenvisageable que cette mission de codification “se bornât […] à un simple enregistrement systématique du droit existant, c’est-à-dire du droit pour lequel il existe un ensemble de règles acceptées.”Footnote 190 Une telle approche eut été compliquée à l’égard d’un concept aussi controversé et fluctuant que le jus cogens, ce “mélange de principes et de politiques.”Footnote 191 Ainsi que le soulignait le Juge John Dugard, les normes impératives “énoncent les principes supérieurs du droit international, qui consacrent les droits les plus importants de l’ordre international,” mais “donnent une forme juridique aux politiques et objectifs les plus fondamentaux de la communauté internationale.”Footnote 192 Dire Tladi se montra d’ailleurs lucide au moment où la CDI s’apprêtait à se pencher sur la question du jus cogens, mentionnant que “la Commission pourrait apporter une contribution significative à la codification et au développement progressif du droit international.”Footnote 193 La CDI a sans doute réussi une partie de son pari: ses travaux ont stimulé les réactions étatiques, et montré que certains principes qui n’allaient pas forcément de soi étaient désormais (relativement) bien acceptés. Il en va ainsi de la conformité des règles coutumières et des actes des organisations internationales avec le jus cogens. Toutefois, les effets de ces positions n’ont pas été évalués systématiquement, et pourraient avoir des conséquences peu désirables, que la présente contribution a assimilé à des “chevaux de Troie”: refus d’exécuter les résolutions du Conseil de sécurité, irréversibilité des normes impératives. Elle a appliqué la même métaphore à certains principes retenus par la CDI, soit parce que leur entrée dans le droit positif était contestée, soit parce qu’ils risquaient de favoriser la définition arbitraire de normes impératives: rejet de la théorie de l’objecteur persistant à l’égard du jus cogens, approche à l’égard des juridictions nationales.

Il apparait essentiel que ces aspects soient envisagés et corrigés, d’autant plus à la lumière des modes de travaux retenus par la CDI. En effet, la Commission n’aspire plus nécessairement à créer un instrument qui servira de base à la négociation d’un traité multilatéral, et qui sera donc nécessairement amendé par les États.Footnote 194 Elle se réoriente vers la définition de principes et conclusions, qui n’auront pas vocation à être rediscutés une fois qu’ils auront été adoptés.Footnote 195 L’objectif est en fait d’obtenir une consolidation du droit “ascendante,” en cherchant à faire des rapports de la CDI un “guide de référence” quotidien, à destination d’un public plus large: administrations publiques, institutions privées, et juridictions.Footnote 196 Ce sera sans doute le cas pour le projet relatif aux normes impératives, puisque Dire Tladi a recommandé que le projet prenne la forme de “projets de conclusion assortis de commentaires.”Footnote 197 Mais, si ces rapports sont appelés à devenir un compagnon de route pour ces acteurs, il est essentiel que certains points litigieux soient désamorcés. Et ce, au risque de les accentuer sans avoir le potentiel de les résoudre.

References

1 Antonio Gomez-Robledo, “Le ius cogens international: sa genèse, sa nature, ses fonctions” (1981) 172 Rec des Cours 9 à la p 68.

2 “Rapport sur le droit des traités par H. Lauterpacht, Rapporteur Spécial,” Doc off AG NU, 5e sess, Doc NU A/CN.4/63 (1953) à la p 216.

3 Ibid à la p 218.

4 Ibid.

5 Ibid.

6 “Troisième rapport de G.G. Fitzmaurice, Rapporteur spécial” (Doc NU A/CN.4/115) dans Annuaire de la Commission du droit international 1958, vol 2, New York, Organisation des Nations Unies (ONU), 1958, 20 à la p 27.

7 “Deuxième rapport sur le droit des traités, par Sir Humphrey Waldock, Rapporteur spécial” (Doc NU A/CN.4/156) dans Annuaire de la Commission du droit international 1963, vol 2, New York, ONU, 1963, 36 à la p 54. Pour une critique de cette approche, voir Georg Schwarzenberger, “International Jus Cogens” (1965) 43:4 Texas L Rev 455 aux pp 476–77.

8 En ce sens la position de l’Équateur, voir Conférence des Nations Unies sur le droit des traités, Doc off NU A/CONF.39/11 (1968) à la p 347, para 43 [CNUDT].

9 Conférence des Nations Unies sur le droit des traités, Doc off NU A/CONF.39/11/Add.2 (1969) à la p 187 [CNUDT (Add.2)].

10 Delphine Hayim, Le concept d’indérogeabilité en droit international: Une analyse fonctionnelle, thèse de doctorat, IHEDI, 2012 à la p 78. Voir aussi Mark Retter, “Jus cogens: Towards an International Common Good” (2011) 2:4 Transnational Leg Theory 537.

11 CNUDT, supra note 8 à la p 347, para 37. Voir aussi la position exprimée par la Hongrie. Ibid à la p 338, para 46.

12 Ibid à la p 514, para 16. Convention de Vienne sur le droit des traités, 23 mai 1969, 1155 RTNU 331 (entrée en vigueur: 27 janvier 1980) [Convention de Vienne].

13 L’article est intitulé: “Traité en conflit avec une norme impérative du droit international général (jus cogens).”

14 Gomez-Robledo, supra note 1 à la p 68.

15 Rapport de la Commission du droit international, Doc off AG NU, 66e sess, supp n°10, Doc NU A/69/10 (2014) à la p 285–86 [Rapport CDI (2014)].

16 Ibid à la p 293.

17 Plusieurs rapports furent rendus entre 2016 et 2018: Premier rapport sur le jus cogens, Doc off AG NU, 68e sess, Doc NU A/CN.4/693 (2016); Deuxième rapport sur le jus cogens, Doc off AG NU, 69e sess, Doc NU A/CN.4/706 (2017) [Deuxième rapport]; Troisième rapport sur les normes impératives du droit international général (jus cogens), Doc off AG NU, 70e sess, Doc NU A/CN.4/714 (2018) [Troisième rapport]; Quatrième rapport sur les normes impératives du droit international général (jus cogens), Doc off AG NU, 71e sess, Doc NU A/CN.4/727 (2019) [Quatrième rapport]. Pour le texte des projets de conclusion et leurs commentaires, voir Projet de rapport de la Commission du droit international sur les travaux de sa soixante et onzième session, Doc off AG NU, 71e sess, Doc NU A/CN.4/L.929/Add.1 (2019) [Projet de rapport].

18 Quatrième rapport, supra note 17 aux pp 11–20.

19 Voir, pour respectivement l’Australie, la France, l’Inde, la Malaisie, et la Roumanie, Doc off AG NU, 74e sess, 24e séance, Doc NU A/C.6/74/SR.24 (2019) à la p 20, para 97; Doc off AG NU, 74e sess, 23e séance, Doc NU A/C.6/74/SR.23 (2019) à la p 17, para 93; Doc off AG NU, 74e sess, 26e séance, Doc NU A/C.6/74/SR.26 (2019) à la p 3, para 7; Doc off AG NU, 74e sess, Doc NU A/C.6/73/SR.27 (2018) à la p 17, para 104; Doc off AG NU, 74e sess, 23e séance, Doc NU A/C.6/74/SR.23 (2019) à la p 14, para 75.

20 Deuxième rapport, supra note 17 aux pp 34–35.

21 Voir Virgile, Énéide, livre II aux paras 2.1 et s; Danièle Thibault, “La Guerre en deçà et au-delà de l’épopée,” en ligne: BNF <expositions.bnf.fr/homere/arret/07.htm>.

22 Selon Pavel Sturma, la distinction entre “codification” et “développement progressif” ne doit pas être confondue avec la distinction entre “lex lata” et “lex ferenda.” En effet, la première distinction décrit les méthodes de travail de la Commission du droit international (CDI), tandis que la seconde fait référence au statut des règles. Voir Pavel Sturma, “The International Law Commission between Codification, Progressive Development, or a Search for a New Role” (2019) 13:6 Florida Intl U L Rev 1125 à la p 1133.

23 Projet de rapport, supra note 17 à la p 4. La définition envisagée est toujours la suivante: “Une norme impérative du droit international général (jus cogens) est une norme acceptée et reconnue par la communauté internationale des États dans son ensemble en tant que norme à laquelle aucune dérogation n’est permise et qui ne peut être modifiée que par une norme ultérieure du droit international général (jus cogens) ayant le même caractère.” Voir aussi Textes des projets de conclusion et du projet d’annexe provisoirement adoptés par le Comité de rédaction en première lecture, Doc off AG NU, 71e sess, Doc NU A/CN.4/L.936 (2019) à la p 1, n 2 [Textes des projets de conclusion].

24 Projet de rapport, supra note 17 à la p 15.

25 À ce sujet, voir Jean d’Aspremont, “Jus Cogens as a Social Construct without Pedigree” (2015) 46 Netherlands YB Intl L 85 à la p 101.

26 Deuxième rapport, supra note 17 à la p 43; Projet de rapport, supra note 17 à la p 15. Cette dernière mention a été retenue pour le projet de conclusion 5. Textes des projets de conclusion, supra note 23 à la p 2.

27 Projet de rapport, supra note 17 à la p 20. Le projet de conclusion 4 souligne aujourd’hui qu’“[e]lle est acceptée et reconnue par la communauté internationale des États dans son ensemble en tant que norme à laquelle aucune dérogation n’est permise et qui ne peut être modifiée que par une norme ultérieure du droit international général ayant le même caractère.” Textes des projets de conclusion, supra note 23 à la p 2.

28 Ibid à la p 21.

29 L’expression a été utilisée par les auteurs suivants. Michael Reisman, “Unilateral Action and the Transformations of the World Constitutive Process: The Special Problem of Humanitarian Intervention” (2000) 11 EJIL 3 à la p 15, n 29; Pamela Stephens, “A Categorical Approach to Human Rights Claims: Jus Cogens as a Limitation on Enforcement” (2004) 22:2 Wis Intl LJ 245 à la p 250; Jens-David Ohlin, “In Praise of Jus Cogens’ Conceptual Incoherence” (2018) 63:4 McGill LJ 701 à la p 713. Voir aussi Erika de Wet, “Sources and the Hierarchy of International Law: The Place of Peremptory Norms and Article 103 of the UN Charter within the Sources of International Law” dans Jean d’Aspremont, Samantha Besson, et Séverine Knuchel, dir, The Oxford Handbook of the Sources of International Law, Oxford, Oxford University Press, 2017, 157.

30 Selon le représentant de la délégation allemande, M. Eick, “[l]’expression ‘très large majorité’ doit être interprétée, conformément à la jurisprudence pertinente de la Cour internationale de Justice, comme signifiant ‘majorité écrasante’.” Voir Doc off AG NU, 74e sess, 25e séance, Doc NU A/C.6/74/SR.25 (2019) à la p 2, para 5. Pour le soutien de l’Argentine, du Bélarus, du Brésil, voir Doc off AG NU, 74e sess, 24e séance, Doc NU A/C.6/74/SR.24 (2019) à la p 3, para 7; 17, para 82; 20, para 93. Pour le soutien de l’Espagne, voir Doc off AG NU, 74e sess, 26 séance, Doc NU A/C.6/74/SR.26 (2019) à la p 3, para 12. C’était également l’approche privilégiée par la Commission interaméricaine des droits de l’homme (CIDH). Dans l’affaire Domingues, elle avait d’abord constaté qu’il existait une norme coutumière interdisant l’exécution des mineurs, avant de considérer dans un second temps qu’elle avait de surcroît valeur impérative. Michael Domingues v United States (2002), Inter-Am Comm HR, No 62/02 aux paras 40–50 [Michael Domingues].

31 Textes des projets de conclusion, supra note 23 à la p 4, para 3, n 14. Voir aussi Projet de rapport, supra note 17 à la p 12.

32 Ibid à la p 21.

33 Comme l’a formulé Théodore Christakis: “L’observation du Lotus doit être lue correctement aujourd’hui. Il ne doit pas être considéré comme impliquant le ‘pouvoir absolu’ de la volonté des États ou qu’ils sont les seuls sujets du droit international. Il ne doit pas non plus mener à la vision extrémiste selon laquelle les États ne sont liées que ce par quoi ils ont expressément consenti. L’observation du Lotus doit plutôt être lue de manière négative: les États ne doivent pas être liés contre leur volonté, par ce à quoi ils n’ont pas explicitement ou implicitement consenti.” Voir Théodore Christakis, “Human Rights from a Neo-Voluntarist Perspective” dans Jean d’Aspremont et Jörg Kammerhofer, dir, International Legal Positivism in a Post-Modern World, Cambridge, Cambridge University Press, 2014 à la p 423 [nous traduisons].

34 L’impossibilité d’être “objecteur persistant” en matière de normes impératives est partagée par la doctrine majoritaire. Voir Patrick Dumberry, “Incoherent and Ineffective: The Concept of Persistent Objector Revisited” (2010) 59:3 ICLQ 779 à la p 799; Lynn Loschin, “The Persistent Objector and Customary Human Rights Law: A Proposed Analytical Framework” (1996) 2:2 UC Davis J Intl L & Pol’y 147 à la p 163; David Fidler, “Challenging the Classical Concept of Custom: Perspectives on the Future of Customary International Law” (1996) 39 German YB Intl L 198 à la p 210; Curtis Bradley et Mita Gulati, “Withdrawing from International Custom” (2010) 120:2 Yale LJ 202 à la p 213; Maarten Bos, “The Identification of Custom in International Law” (1982) 25 German YB Intl L 9 à la p 43; David Weissbrodt, “Execution of Juvenile Offenders by the United States Violates International Human Rights Law” (1988) 3:2 Am U Intl L Rev 339 à la p 370.

35 Dinah Shelton, “Normative Hierarchy in International Law” (2006) 100:2 AJIL 291 à la p 300.

36 C’est le cas, par exemple, de l’Iran. Voir Doc off AG NU, 68e sess, 26e séance, Doc NU A/C.6/68/SR.26 (2013) à la p 2, para 4.

37 Doc off AG NU, 73e sess, 26e séance, Doc NU A/C.6/73/SR.26 (2018) à la p 20, para 131.

38 Ibid. Voir aussi Alexander Orakhelashvili, “Audience and Authority: The Merit of the Doctrine of Jus Cogens” (2015) Netherlands YB Intl L 115 à la p 124.

39 Doc off AG NU, 73e sess, 26e séance, Doc NU A/C.6/73/SR.26 (2018) à la p 13, para 85.

40 Ibid.

41 Doc off AG NU, 74e sess, 24e séance, Doc NU A/C.6/74/SR.24 (2019) aux pp 5–6, para 21.

42 Pour une vision contraire, voir Michael Byers, “Conceptualising the Relationship between Jus Cogens and Erga Omnes Rules” (1997) 66 Nordic J Intl L 211 à la p 228. Selon ce dernier, les États qui participent au processus coutumier admettent qu’une norme puisse devenir de jus cogens, même s’ils se sont opposés à ce développement en particulier.

43 Selon le président du Comité de rédaction, M. Yasseen, “il ne s’agit pas d’exiger qu’une règle soit acceptée et reconnue comme impérative par l’unanimité des États. Il suffit d’une très large majorité, ce qui signifie que, si un État refuse isolément de reconnaître la nature impérative d’une règle, ou s’il est soutenu par un très petit nombre d’États, cela ne peut affecter l’acceptation et la reconnaissance du caractère impératif de cette règle par la communauté internationale dans son ensemble.” Voir CNUDT, supra note 8 à la p 514, para 12. Selon la délégation australienne, “[l]’unanimité absolue peut n’être pas exigée, mais l’assentiment de nombreux États appartenant à tous les principaux systèmes juridiques est nécessaire. S’il y a désaccord de la part d’un nombre important d’États, la reconnaissance d’une règle comme règle de jus cogens devra être ajournée. Comme dans le cas du développement des règles ordinaires du droit international coutumier, le développement des règles impératives n’est pas une question de vote à la majorité.” Voir ibid à la p 422, para 16.

44 Selon son représentant, “[l]e Venezuela n’acceptera pas, sauf s’il s’agit de règle du jus cogens, des obligations qu’il n’a pas acceptées formellement et encore moins des obligations qu’il a expressément rejetées.” 74eme séance de la Commission plénière, Doc off NU A/CONF.39/C.1/SR.74 (1968) à la p 483, para 49. Voir, a contrario, la position des États-Unis, selon laquelle “[u]ne règle de droit international n’est impérative que si elle a un caractère universel et est approuvée par la communauté internationale tout entière. Ne pas préciser ce point dans le texte de la Commission du droit international, c’est ouvrir la porte à des abus.” Voir CNUDT, supra note 8 à la p 320, para 17.

45 Louis Henkin, “International law: Politics, Values and Functions” (1989) 216 Rec des Cours 9 à la p 60. Voir aussi Ted Stein, “The Approach of the Different Drummer: The Principle of the Persistent Objector in International Law” (1985) 26:2 Harv Intl LJ 457 à la p 463; Curtis Bradley, “The Juvenile Death Penalty and International Law” (2002) 52:3 Duke LJ 485 à la p 539, n 253; Thomas Wheatherall, Jus Cogens: International Law and Social Contract, Cambridge, Cambridge University Press, 2015 aux pp 150, 238. Pour d’autres écrits invalidant la théorie de l’objecteur persistant, voir Karen Parker et Lyn Neylon, “Jus Cogens: Compelling the Law of Human Rights” (1989) 12:2 Hastings Intl & Comp L Rev 411 à la p 418; Christos Rozakis, The Concept of Jus Cogens in the Law of Treaties, Amsterdam/Oxford/New York, North Holland, 1956 à la p 78.

46 Ludovic Chan-Tung, L’opposabilité en droit international, Paris, Mare & Martin, 2016 à la p 265.

47 Sud-Ouest africain (Éthiopie c Afrique du Sud; Libéria c Afrique du Sud), “Argument of Mr Gross” (7–19 mai 1965), [1966] CIJ Mémoires (vol 9) 4 à la p 305 [nous traduisons].

48 Sud-Ouest africain (Éthiopie c Afrique du Sud; Libéria c Afrique du Sud), “Argument of Mr De Villiers” (30 mars – 14 avril 1965), [1966] CIJ Mémoires (vol 8) 3 à la p 676 [nous traduisons]. Voir aussi Richard Falk, Status of Law in International Society, Princeton, Princeton University Press, 2015 aux pp 156–57.

49 On peut d’ailleurs noter que, dans une affaire ultérieure, l’Afrique du Sud convint qu’une norme impérative pouvait s’appliquer contra volontaem. Afrique du Sud, “Written Statement” (13 novembre 1970), en ligne: Cour internationale de Justice (CIJ) <www.icj-cij.org/files/case-related/53/9365.pdf> à la page 575, para 68.

50 Stefan Kadelbach, “Genesis, Function and Identification of Jus Cogens Norms” (2015) 46 Netherlands YB Intl L 147 à la p 167; Samantha Besson, “Theorizing the Sources of International Law” dans Samantha Besson et John Tasioulas, dir, The Philosophy of International Law, Oxford, Oxford University Press, 2010 à la p 171.

51 Charte des Nations Unies, 26 juin 1945, RT Can 1945 no 7 (entrée en vigueur: 24 octobre 1945); Question relative à la situation en Union sud-africaine, Rés CS 134 (1960); Question relative à la politique d’apartheid du Gouvernement de la République sud-africaine, Rés CS 181 (1963); Question relative à la politique d’apartheid du Gouvernement de la République sud-africaine, Rés CS 182 (1963). Voir aussi Oscar Schachter, “International Law in Theory and Practice” (1982) 178 Rec des Cours 9 à la p 119. Certains auteurs doutent que l’Afrique du Sud ait pu revendiquer la qualité d’objecteur persistant un jour: James Green, The Persistent Objector Rule in International Law, Oxford, Oxford University Press, 2016 à la p 203; Daniel Costelloe, Legal Consequences of Peremptory Norms in International Law, Cambridge, Cambridge University Press, 2018 à la p 22.

52 Question du conflit racial en Afrique du Sud provoqué par la politique d’apartheid du Gouvernement de l’Union sud-africaine, Rés AG 917 (1955). Voir aussi Question du conflit racial en Afrique du Sud, provoqué par la politique d’apartheid du Gouvernement de l’Union sud-africaine, Rés AG 1178 (1957); Question du conflit racial en Afrique du Sud provoqué par la politique d’apartheid du Gouvernement de l’Union sud-africaine, Rés AG 1598 (1961); Falk, supra note 48 aux pp 143–44.

53 Michael Domingues, supra note 30 au para 45.

54 Ibid au para 50.

55 Certains auteurs ont exprimé ouvertement leur doute quant au rattachement de l’interdiction d’exécuter les mineurs aux normes de jus cogens. Bradley, supra note 45 aux pp 537–38.

56 On pourrait adresser un grief similaire à une précédente décision, qui de surcroît n’évoquait que la pratique régionale. James Terry Roach and Jay Pinkerton v United States (1987), Inter-Am Comm HR, No 3/87 au para 56.

57 Michael Domingues, supra note 30 au para 45.

58 Des pratiques comme les exécutions publiques ou la pêche à la baleine industrielle ne sont ainsi pratiquées que par une poignée d’États, sans pour autant être interdites par une norme de jus cogens. Les premières n’auraient désormais lieu que dans quatre États: l’Arabie saoudite, la Corée du Nord, l’Iran et la Somalie. Voir “Iran: exécution publique d’un homme accusé du meurtre d’un imam,” Le Figaro (28 août 2019), en ligne: <www.lefigaro.fr/flash-actu/iran-execution-publique-d-un-homme-accuse-du-meurtre-d-un-imam-20190828>; Armin Arefi, “L’Arabie saoudite décapite en masse,” Le Point (25 avril 2019), en ligne: <www.lepoint.fr/monde/l-arabie-saoudite-decapite-en-masse-24-04-2019-2309365_24.php#>; Olad Mohamed Hassan, “Somalia Military Executes 6 Militants without Trial,” Voice of America (1er janvier 2019), en ligne: <www.voanews.com/africa/somalia-military-executes-6-militants-without-trial>; Victoria Kim, “Eyewitnesses Help Document Public Executions in North Korea for a Day of Reckoning,” Los Angeles Times (10 juin 2019), en ligne: <www.latimes.com/world/la-fg-north-korea-public-executions-20190610-story.html>. À l’exception de quelques populations locales, la seconde ne serait pratiquée que par l’Islande, la Norvège et le Japon. Voir Melissa Hogenboom, “Why Do Some Countries Still Hunt Whales?” British Broadcasting Corporation (3 décembre 2015), en ligne: <www.bbc.com/earth/story/20151203-why-do-some-countries-still-hunt-whales>. Nous noterons, toutefois, que la Convention internationale pour la règlementation de la chasse à la baleine, 2 décembre 1946, 161 RTNU 72 (entrée en vigueur: 10 novembre 1948) ne compte qu’environ quatre-vingt-dix États parties.

59 Eugenio Matibag, “Inter-American Commission on Human Rights” (2012) 2 Encyclopedia of United States-Latin American Relations 479. Voir aussi Icelandic Human Rights Centre, “Inter-American Commission on Human Rights and the Inter-American Court of Human Rights,” en ligne, IHRC <www.humanrights.is/en/human-rights-education-project/complaints-procedures-of-the-international-human-rights-supervisory-bodies/how-to-bring-a-complaint/inter-american-commission-on-human-rights-and-the-inter-american-court-of-human-rights>.

60 Elle prit néanmoins note que les États-Unis demeuraient le seul pays du monde à officiellement exécuter les mineurs, et du “poids de l’opinion internationale” à l’encontre de cette pratique. Roper v Simmons, 543 US 551 (2005). Comme le constatait Nadia Bernaz: “[O]n ne trouve pas de référence [dans Roper v Simmons] à cette jurisprudence [de la CIDH], ce qui est regrettable dans le sens où … la Cour a fait le choix de ne considérer le droit international qu’à titre illustratif, en ne s’appuyant que sur des textes qui ne lient pas les États-Unis et sur la pratique internationale.” Voir Nadia Bernaz, “L’abolition de la peine de mort pour les mineurs aux États-Unis: Quelques remarques à propos de l’arrêt Roper v Simmons du 1er mars 2005” (2006) 66 Rev fr dr constl 437 à la p 448.

61 La CDI a dressé la liste indicative suivante: l’interdiction de l’agression, de la torture, du génocide, des crimes contre l’humanité, de l’apartheid et de la discrimination raciale, de l’esclavage, le droit à l’autodétermination et les règles fondamentales du droit international humanitaire. Voir Quatrième rapport, supra note 17.

62 À ce sujet, voir Dinah Shelton, “Sherlock Holmes and the Mystery of Jus Cogens” (2015) 46 Netherlands YB Intl L 23 à la p 44.

63 On notera, toutefois, qu’un État a expressément soutenu l’approche naturaliste du droit international en 2019: il s’agit de l’Arménie. Ainsi, elle a fait remarquer que “[d]ans la conclusion 4 du projet de conclusions adopté par la CDI en première lecture, les critères permettant de déterminer les ‘super-coutumes’ ou normes impératives sont manifestement fondés sur le droit positif (jus dispositivum). L’Arménie aurait préféré que ces critères soient fondés sur le droit naturel (jus naturale) […] L’Arménie n’est pas d’accord avec l’idée que le consentement des États a traditionnellement été nécessaire à la reconnaissance d’une norme de jus cogens.” Voir Doc off AG NU, 74e sess, 26e séance, Doc NU A/C.6/74/SR.26 (2019) à la p 10, para 64. Voir aussi Fraucke Lachenmann, “International Positivism,” Max Planck Encyclopedia of Public International Law (2011) au para 35; Olufemi Elias, “Persistent Objector,” Max Planck Encyclopedia of Public International Law (2006) au para 18.

64 Olivier Deleau, “Les positions françaises à la Conférence de Vienne sur le droit des traités” (1969) 15 AFDI 7 à la p 19.

65 Ibid.

66 Ibid aux pp 19–20.

67 Selon Gennady Danilenko, l’appel à la communauté des États dans son ensemble se rapprochait d’une exigence de l’unanimité. Gennady Danilenko, “International Jus Cogens: Issues of Law-Making” (1991) 2:1 EJIL 42 à la p 55. Voir aussi J Brock McClane, “How Late in the Emergence of a Norm of Customary International Law May a Persistent Objector Object” (1989) 13 Intl Law Students Association J Intl L 1 à la p 25; Martti Koskenniemi, From Apology to Utopia, Cambridge, Cambridge University Press, 2005 aux pp 323–24. On peut avancer qu’un acquiescement exprès ne serait pas requis: il suffirait que les États s’abstiennent de protester. Comme l’a souligné la CDI à l’égard des normes coutumières: “La condition exigeant que l’objection soit maintenue de manière persistante s’applique à la fois avant et après la formation de la règle du droit international coutumier. Pour déterminer si cette condition est remplie, il faut faire preuve de pragmatisme et tenir compte des circonstances propres à chaque cas. Cette condition signifie, premièrement, que l’objection devrait être réaffirmée lorsque les circonstances sont telles que cette réaffirmation s’impose (c’est-à-dire, lorsque le silence ou l’inaction pourraient raisonnablement amener à conclure que l’État a abandonné son objection). Il est clair, toutefois, qu’on ne peut pas attendre des États qu’ils manifestent leur objection en toute occasion, en particulier lorsque leur position est déjà bien connue. Deuxièmement, les réaffirmations successives de l’objection doivent être globalement cohérentes, c’est-à-dire ne pas présenter de contradictions notables.” Voir Projets de conclusion sur la détermination du droit international coutumier et commentaires y relatifs, Doc off CDI, Doc NU A/73/10 (2018) à la p 163. Comme le notait également Paulina Starski: “[S]’ils sont confrontés à une revendication juridique intelligible et déterminée, les États ne peuvent pas ignorer le fait que le droit pourrait potentiellement être en train de se construire ou dans un processus de changement, et la formation du droit pourrait être favorisée par leur silence.” Voir Paulina Starski, “Silence within the Process of Normative Change and Evolution of the Prohibition on the Use of Force: Normative Volatility and Legislative Responsibility” (2017) 4:1 J Use of Force & Intl L 14 à la p 36 [nous traduisons].

68 Olivier Barsalou, “La doctrine de l’objecteur persistant en droit international” (2006) 19:I RQBDI 1 à la p 16. Dinah Shelton montrait par ailleurs que la plupart des normes considérées comme impératives avaient été acceptées par les États dans des conventions internationales: “Par conséquent, dans la plupart des cas, le problème est d’assurer le respect par les États d’obligations auxquelles ils ont librement consenti et non d’imposer des obligations à des États dissidents” [nous traduisons]. Voir Shelton, supra note 62 à la p 47.

69 À ce sujet, voir Alina Miron, “International ius cogens in National Law,” Max Planck Encyclopedia of Comparative Constitutional Law (2018); Shelton, supra note 62.

70 Projet de rapport, supra note 17 à la p 24 (conclusion 8).

71 Textes des projets de conclusion, supra note 23 à la p 3, n 8.

72 Karl Strupp, “Les règles générales du droit de la paix” (1934) 47 Rec des Cours 259 aux pp 313–15.

73 Michael Akehurst, “Custom as a Source of International Law” (1977) 42 Br YB Intl L 1 aux pp 8–10.

74 À ce sujet, voir Raphaële Rivier, Droit impératif et juridiction internationale, thèse de doctorat, Paris II, 2001 à la p 353.

75 Ian Brownlie, “Comments” dans Antonio Cassese et Joseph Weiler, dir, Change and Stability in International Law-Making, Berlin, De Gruyter, 1988, 108 à la p 110.

76 Committee of US Citizens Living in Nicaragua v Reagan, 859 F (2d) 929 à la p 941 (1989) [CUSCLIN].

77 La Cour fit également référence à deux articles doctrinaux. Ibid.

78 Paul B Stephan, “Courts, the Constitution, and Customary International Law: The Intellectual Origins of the Restatement (Third) of the Foreign Relations Law of the United States” (2003) 44:1 Va J Intl L 33.

79 Siderman de Blake v Republic of Argentina, 965 F (2d) 699 au para 717 (1992).

80 Ibid [nous traduisons].

81 United States v Matta-Ballesteros, 71 F (3d) 754 à la p 764, n 5 (1995); Abdullahi v Pfizer, Inc, 562 F (3d) 16364 à la p 179 (2009); Sarei v Rio Tinto, PLC, 487 F (3d) 1193 aux pp 1209–10 (2007); United States v Emmanuel, WL 2002452 à la p 10 (2007); Yousuf v Samantar, 699 F (3d) 763 à la p 775 (2012); Hirsh v State of Israel, 962 F Supp à la p 381 (2007); Al Shimari v CACI Premier Technology, Inc, 368 F Supp (3d) 935 à la p 956 (2019); Philipp v Federal Republic of Germany, 925 F (3d) 1349 aux pp 1354–55 (2019). Voir aussi Doe I v Unocal Corp, 395 F (3d) 932 à la p 945 (2002) (référence à United States v Matta Ballesteros); Warfaa v Ali, 33 F Supp (3d) 653 à la p 662 (2014) (référence à Doe I et Siderman de Blake). À ce sujet, voir aussi Alina Miron, “International ius cogens in National Law,” Max Planck Encyclopedia of Comparative Constitutional Law (2018) au para 12.

82 Dans la décision Pinochet, Lord Hope of Craighead a renvoyé à Siderman de Blake et à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, pour conclure que l’interdiction de la torture était une norme de jus cogens. R v Bow Street, [2000] 1 AC 147 à la p 246, para 53 [Pinochet]. Voir aussi Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, 10 décembre 1984, 1465 RTNU 85 (entrée en vigueur: 26 juin 1987). La décision Pinochet sera reprise dans A v Secretary of State for the Home Department, [2006] 2 AC 221 à la p 242. Le Restatement américain fut invoqué par Lord Steyn afin de qualifier les règles relatives au recours à la force de jus cogens. Kuwait Airways Corp v Iraqi Airways Co, [2002] WL 819941 à la p 24.

83 Lord Hoffmann fit référence à Furundžija pour conclure que l’interdiction de la torture était une norme de jus cogens. Jones v Saudi Arabia, [2006] UKHL 26 au para 53. La décision Jones sera ensuite reprise dans Al-Malki v Reyes, [2015] WL 376101 à la p 13. La jurisprudence Pinochet fut mentionnée par le Juge Wilkins en 2012. Certain Employees of Sidhu & Sons Nursery Ltd v Sidhu & Sons Nursery Ltd, [2012] BCLRB No B28/2012 aux paras 44–45.

84 Nevsun Resources Ltd c Araya, 2020 CSC 5 au para 100 [Nevsun]; Steen Estate v Iran (Islamic Republic), [2013] ONCA 30 au para 30; Nulyarimma v Thompson, [1999] 96 FCR 153 au para 81; R v Tang, [2008] 237 CLR 1 au para 111.

85 Nevsun, supra note 84 aux paras 101–02; Kazemi (Estate) c Islamic Republic of Iran, 2014 CSC 62 aux paras 47–49 [Kazemi]; Habib v Commonwealth, [2010] 183 FCR 62 au para 108. On peut noter que dans Cuiying Zhang v Jiang Zemin, la Cour fit appel à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme [Cour EDH] et à des décisions canadiennes et britanniques. Cuiying Zhang v Jiang Zemin, [2010] 243 FLR 299 au para 121.

86 Cour constitutionnelle fédérale [2004] 2 BvR 955/00 – 2 BvR 955/00 au para 97; Cour constitutionnelle fédérale [2000] 2 BVR 1290/99 au para 17.

87 Conseil fédéral, Message concernant les initiatives populaires “pour une politique d’asile raisonnable” et “contre l’immigration clandestine” (22 juin 1994) aux pp 1482, 1486.

88 Conseil fédéral, Message relatif à l’initiative populaire fédérale “pour des naturalisations démocratiques” (25 octobre 2006) à la p 8490.

89 Tribunal fédéral, L gegen Bezirksanwaltschaft IV für den Kanton Zürich, Staatsanwaltschaft des Kantons Zürich, Obergericht des Kantons Zürich, [2002] 1A.124/2001/sta au para 3.5; Tribunal fédéral, Nada gegen seco, Staatssekretariat für Wirtschaft, sowie Eidgenössisches Volkswirtschaftsdepartement, [2007] BGE 133 II 450 au para 7.3. Dans ce dernier arrêt, il a également cité la doctrine et constaté l’existence de clauses dérogatoires dans les traités existants. Le caractère indérogeable a pu être pris en compte. 1ère Cour de droit public, X c Office fédéral de la police [1996] 122 II 373 au para 2d. Il lui arrive de mentionner des textes de soft law. 1ère Cour de droit public, X c Office fédéral de la police [1995] 121 II 296 au para 5a.

90 Il est notamment fait référence à la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, 9 décembre 1948, 78 RTNU 277 (entrée en vigueur: 12 janvier 1951) ainsi que la Convention sur l’imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, 26 novembre 1968, 754 RTNU 73 (entrée en vigueur: 11 novembre 1970). Voir Cour suprême de justice de la nation, Priebke, Erich s/ solicitud de extradición, [1995] P/457/XXXI aux paras 75–77.

91 Barcelona Traction, Light and Power Company, Limited (Belgique c Espagne)(Nouvelle requête: 1962), arrêt, [1970] CIJ Rec 3 à la p 32, paras 33–34. Ce raisonnement, en soi, est critiquable: il n’y a en effet pas de parfaite identité entre les normes de jus cogens et les obligations erga omnes. Voir Shelton, supra note 62 à la p 43, n 104.

92 Cour suprême de justice de la nation, Arancibia Clavel, Enrique Lautaro s/ homicidio calificado y asociación ilícita y otros, [2004] A/533/XXXVIII au para 11.

93 Cour suprême de justice de la nation, Simón, Julio Héctor y otros s/ privación ilegítima de la libertad, etc, [2005] S/1767/XXXVIII aux pp 25–26 [nous traduisons].

94 Ibid aux pp 25–26, 34.

95 Cour suprême de justice de la nation, Álvarez, Maximiliano y otros c/ Cencosud SA s/ acción de amparo, [2010] A/1023/XLIII à la p 6.

96 Philip M Moremen, “National Court Decisions as State Practice: A Transnational Judicial Dialogue” (2006) 32 NC J Intl L & Com Reg 259 aux pp 304–08; Patrick Kelly, “The Twilight of Customary International Law” (2000) 40 Va J Intl L 449 aux pp 506–07.

97 Rapport de la Commission du droit international, Doc NU A/73/10 (2018) à la p 158, n 13 [Rapport CDI (2018)]. Voir aussi ibid à la p 160. Il convient de noter toutefois que les “décisions des juridictions nationales” apparaissent également dans les “formes de preuve de l’acceptation comme étant le droit (opinio juris)” (n 10, para 2). Les commentaires mentionnent: “La législation nationale, bien qu’elle découle dans la plupart des cas d’un choix politique, peut démontrer l’acceptation d’une pratique comme étant le droit, en particulier lorsqu’il est précisé (par exemple à l’occasion de l’adoption de la législation) qu’elle a été prescrite par le droit international coutumier ou vise à donner effet à celui-ci. Il arrive également que les décisions de juridictions nationales portant sur des questions de droit international contiennent pareilles précisions” (ibid à la p 150).

98 D’Aspremont, supra note 25 à la p 87.

99 Projet de rapport, supra note 17 à la p 30.

100 Ibid à la p 26; Textes des projets de conclusion, supra note 23 à la p 3, n 9, para 1). Dans une formulation qui s’inspire sans aucun doute de l’Article 38(1)(d) du Statut de la Cour internationale de Justice, 26 juin 1945, RT Can 1945 no 7 (entrée en vigueur: 24 octobre 1945) (Statut de la CIJ), la CDI a donc décidé d’attribuer à la doctrine le caractère de moyen auxiliaire de détermination des règles impératives. Les auteurs soutiennent régulièrement l’existence de nouvelles normes impératives, comme la non-prolifération des armes nucléaires, le recours aux mines anti-personnel, l’égalité de genre, l’exportation de pesticides interdits, la peine de mort, le terrorisme, les exécutions extrajudiciaires, la non-discrimination, le non-refoulement. Voir Gaela Normile, “The Non-Proliferation of Nuclear Weapons as Jus Cogens” (2019) 124 Penn St L Rev 277; RJ Araujo, “Anti-Personnel Mines and Peremptory Norms of International Law: Argument and Catalyst” (1997) 30 Vand J Transnatl L 1 aux pp 22–30; Ladan Askari, “Girls’ Rights under International Law: An Argument for Establishing Gender Equality as a Jus Cogens” (1998) 8 S Cal Rev L & Women’s Stud 3; Beth Gammie, “Human Rights Implications of the Export of Banned Pesticides” (1994) 25 Setton Hall L Rev 558 (dans la mesure où cela viole le droit à la vie et à la santé); Geoffrey Sawyer, “The Death Penalty Is Dead Wrong: Jus Cogens Norms and the Evolving Standard of Decency” (2004) 22 Penn St Intl L Rev 459; Thomas Weatherall, “The Status of the Prohibition of Terrorism in International Law: Recent Developments” (2015) 46 Geo J Intl L 589; Steve D Shadowen, “US Border Patrol’s Policy of Extrajudicial Killing” (2018) 28 Berkeley La Raza LJ 1 aux pp 10–17; Joan Fitzpatrick, “The Human Rights of Migrants” dans Alexander Aleinikoff et Vincent Chetail, dir, Migration and International Legal Norms, La Haye, TMC Asser Press, 2003 à la p 171; Jean Allain, “The Jus Cogens Nature of Non-Refoulement” (2001) 13 Intl J Refugee L 533. Pour des écrits en faveur de l’interdiction de détruire des biens culturels, la commission des actes de cyber-terrorisme, et la protection de l’habeas corpus, voir Corinne Brenner, “Cultural Property Law: Reflecting on the Bamiyan Buddhas’ Destruction” (2006) 29 Suffolk Transnatl L Rev 237; Christopher Lentz, “A State’s Duty to Prevent and Respond to Cyberterrorist Acts” (2010) 10 Chinese J Intl L 799; Larry May, “Habeas Corpus as Jus Cogens in International Law” (2020) 4 Crim L & Phil 249.

101 Le Procureur c Anto Furundžija, IT-95-17/1-T, Jugement (10 décembre 1998) au para 147 [Anto Furundžija].

102 Ibid au para 153, n 170.

103 Ibid au para 153. Les autres jurisprudences du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) ne sont pas forcément plus complètes à cet égard. Dans la décision Jelisic, le TPIY fit référence à l’avis consultatif de la CIJ relatif aux Réserves à la Convention sur le Génocide, qui aurait “pla[cé] ce crime au rang de jus cogens en raison de son extrême gravité.” Or, cette interprétation n’est pas réellement justifiée. Premièrement, l’avis consultatif date de 1951 et l’existence des normes de jus cogens n’était pas encore ancrée dans le droit positif à cette époque. Deuxièmement, il ne fait pas expressément référence à des normes impératives, indérogeables ou supérieures. Il est vrai que la CIJ a considéré que l’ONU avait souhaité, par cette convention, “condamner et réprimer” un “crime de droit des gens,” qui “bouleverse la conscience humaine,” “qui est contraire à la fois à la loi morale et à l’esprit et aux fins des Nations Unies,” et qui “oblig[e] les États même en dehors de tout lien conventionnel.” Toutefois, c’est de “principe reconnu par les nations civilisées” que l’interdiction du génocide a été qualifiée, et pour la Cour, il s’agissait uniquement d’en tirer les conclusions concernant son caractère erga omnes. Voir Le Procureur c Goran Jelisic, IT-95-10-T, Jugement (14 décembre 1999) au para 60; Réserves à la Convention sur le Génocide, Avis consultatif, [1951] CIJ rec 15 aux pp 23–24. Quant à la décision Kupreskic, elle affirma que “la plupart des normes du droit international humanitaire, notamment celles qui prohibent les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité et le génocide, sont des normes impératives du droit international ou jus cogens,” mais ne prit ouvertement en compte que l’arrêt Furundžija et l’impossibilité de formuler des réserves à certaines conventions protégeant les droits de l’homme. Le Procureur c Zoran Kupreskic et autres, IT-95-16-T, Jugement (14 janvier 2000) au para 520.

104 Al-Adsani c Royaume-Uni, [GC] n° 35763/97, [2001] 34 EHRR 273 au para 60.

105 Anto Furundžija, supra note 101; Pinochet, supra note 82.

106 Elle a estimé, sans aucune preuve concordante, qu’“en vertu de normes, désormais impératives, du droit international général, il appartient aux États d’assurer le respect des droits des minorities.” Population serbes de Croatie et Bosnie-Herzégovine (1992) au para 2.

107 Elle n’a cité que deux ouvrages doctrinaux pour estimer qu’étaient concernés par des normes de jus cogens les droits de l’homme, le génocide, la non-discrimination raciale, les crimes contre l’humanité, et la vente d’esclaves. Priorities from India/AstraZeneca, [2004] EPOR 39 au para 7.1.

108 Dinah Shelton notait que la reconnaissance de l’existence d’une norme de jus cogens n’avait pas nécessairement eu de conséquences pratiques dans les affaires à l’étude, puisque chacune des normes identifiées appartient en général également au droit conventionnel, et souvent au droit international coutumier. Partant, les règles et pratiques contradictoires vont à l’encontre du droit international et d’accords interaméricains. Voir Shelton, supra note 62 à la p 44.

109 Dans plusieurs décisions, elle avait pris note de différentes conventions interdisant la torture et de leur indérogeabilité, avant de souligner qu’elle relevait du jus cogens. Case of Maritza Urrutia v Guatemala (2003), Cour IDH (sér C) n° 103 aux paras 89–93; Case of Bueno-Alves v Argentina (2007), Cour IDH (sér C) n° 164 aux paras 76–77. Ces précédents sont désormais régulièrement repris par la Cour. Case of the Gómez-Paquiyauri Brothers v Peru (2004), Cour IDH (sér C) n° 110 au para 113; Case of Tibi v Ecuador (2004), Cour IDH (sér C) n° 114 au para 143. L’interdiction des exécutions extra-judiciaires fut décrite comme appartenant au jus cogens dans la décision Gómez-Paquiyauri, mais une étude de cette nature y est moins apparente: Case of the Gómez-Paquiyauri Brothers v Peru au para 76. Dans une décision ultérieure (Goiburú et al), elle estimera que c’est du préambule de la Convention interaméricaine sur la disparition forcée des personnes, de la particulière gravité et de la nature des droits atteints que découlent non seulement le caractère impératif de l’interdiction des disparitions forcées, mais également de celle d’enquêter et d’en punir les responsables: Case of Goiburú et al v Paraguay (2006), Cour IDH (sér C) n° 153 au para 84. Ces précédents apparaissent eux aussi dans des décisions ultérieures: Case of Tiu Tojín v Guatemala (2008), Cour IDH (sér C) n° 190 au para 91; Case of Perozo et al v Venezuela (2009), Cour IDH (sér C) n° 195 au para 298. Voir aussi Convention interaméricaine sur la disparition forcée des personnes, 9 juin 1994, OAS TS 68 (entrée en vigueur: 28 mars 1996).

110 Juridical Condition and Rights of the Undocumented Migrants (2003), Avis consultatif OC-18/03, Cour IDH (sér A) n° 18, au para 101 [nous traduisons].

111 Ibid. Étaient en faveur de la qualification de jus cogens: the students of the Law Faculty of the Universidad Nacional Autónoma de México (UNAM), the Central American Council of Ombudsmen with the support of its Technical Secretariat (the Inter-American Institute of Human Rights).

112 Questions concernant l’obligation de poursuivre ou d’extrader (Belgique c Sénégal), [2012] CIJ Rec 422 à la p 457, para 99.

113 Activités armées sur le territoire du Congo (nouvelle requête: 2002) (République démocratique du Congo c Rwanda), [2006] CIJ Rec 6 à la p 32, para 64. Voir aussi Shelton, supra note 35 à la p 306. Comme le montre Paul Tavernier: “On peut donc dire que l’on trouve dans la jurisprudence de la CIJ […] des éléments qui montrent que la Cour n’ignore pas les problèmes posés par l’identification et la détermination des règles fondamentales et du jus cogens. Elle s’aventure cependant avec précaution sur ce terrain miné.” Voir Paul Tavernier, “L’identification des règles fondamentales, un problème résolu?” dans Christian Tomuschat et Jean-Marc Thouvenin, dir, The Fundamental Rules of the International Legal Order: “Jus Cogens” and Obligations “Erga Omnes,” Leyden, Brill, 2006, 1 à la p 7. La jurisprudence de la CIJ est d’ailleurs ponctuée de formules ambiguës, qui ont alimenté les débats doctrinaux: “principes intransgressibles du droit international coutumier,” “caractère impératif des obligations juridiques,” “caractère erga omnes.” Voir Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, [1996] CIJ Rec 226 à la p 257, para 79; Personnel diplomatique et consulaire des États-Unis à Téhéran (États-Unis d’Amérique c Iran), [1980] CIJ Rec 3 à la p 41, para 88; Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, [2004] CIJ Rec 136 aux pp 199–200, paras 155–59.

114 Il convient de noter que l’étude de certains effets des normes impératives a été limitée, à l’instar du rapport entre jus cogens et immunités. L’ancien projet de conclusion 23 était ainsi relatif à la “[n]on-pertinence de la position officielle et inapplicabilité de l’immunité ratione materiae.” Rapport CDI (2018), supra note 97 à la p 241. Toutefois, “[t]enant compte du débat et après avoir répondu aux critiques formulées, le Rapporteur spécial a proposé de remplacer ces projets de conclusion par une clause ‘sans préjudice’.” Quatrième rapport, supra note 17 aux pp 5–6.

115 Troisième rapport, supra note 17 à la p 66.

116 Quatrième rapport, supra note 17 à la p 5.

117 Textes des projets de conclusion, supra note 23 à la p 5.

118 Quatrième rapport, supra note 17 à la p 5.

119 La CDI avait pris note, dans le cadre des travaux de codification relatifs à la responsabilité des États, que “diverses juridictions, nationales et internationales, ont affirmé l’idée de normes impératives dans des contextes ne se limitant pas à la validité de traits.” “Projet d’articles sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite et commentaires y relatifs” dans Annuaire de la Commission du droit international, 2001, vol 2, partie 2, New York, NY, 2001, 61 à la p 223.

120 D’un côté, la première partie de l’article 53, ainsi que l’article 64, semblent indiquer qu’une norme de jus cogens ne saurait invalider qu’un traité. Selon la première, “[e]st nul tout traité qui, au moment de sa conclusion, est en conflit avec une norme impérative du droit international général.” Selon le second, “[s]i une nouvelle norme impérative du droit international général survient, tout traité existant qui est en conflit avec cette norme devient nul et prend fin.” D’un autre côté, la seconde partie de l’article 53 indique: “[a]ux fins de la présente Convention, une norme impérative du droit international général est une norme acceptée et reconnue par la communauté internationale des États dans son ensemble en tant que norme à laquelle aucune dérogation n’est permise.” Cette disposition peut faire l’objet d’interprétations contradictoires. On peut en effet considérer qu’en définissant la norme impérative “aux fins de la présente Convention,” les États n’ont pas souhaité lui conférer une existence indépendante au droit des traités. A contrario, on peut également estimer que la Convention de Vienne permet d’ancrer la naissance du jus cogens en droit international positif, de lui conférer une existence, pour ne détailler ensuite ses effets que dans le champ du droit des traités.

121 La CDI considérait “qu’en codifiant le droit des traités,” elle “devait partir du fait qu’il y a de nos jours certaines règles auxquelles les États ne sauraient en aucune façon déroger par des arrangements conventionnels.” CNUDT (Add.2), supra note 9 à la p 73.

122 Selon l’Article 26, “[a]ucune disposition du présent chapitre n’exclut l’illicéité de tout fait d’une organisation internationale qui n’est pas conforme à une obligation découlant d’une norme impérative du droit international général.” Voir aussi “Projet d’articles sur la responsabilité des organisations internationales et commentaires y relatifs” dans Annuaire de la Commission du droit international, 2011, vol 2, partie 2, New York, NY, 2011, 83.

123 Il avait ainsi estimé que “la solution” offerte par “l’article 103 de la Charte” de l’ONU en cas de conflit de normes “ne p[ouvai]t aller jusqu’au point où une résolution du Conseil de sécurité entrerait en conflit avec le jus cogens.” Il joint à cette observation une formule demeurée célèbre: “il suffit de formuler la proposition inverse en disant qu’une résolution du Conseil de sécurité pourrait même exiger une participation à un génocide — pour voir clairement qu’une telle proposition serait inacceptable.” Voir Application de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-et-Herzégovine c Yougoslavie (Serbie-et-Monténégro)), [1993] CIJ Rec 407 aux pp 440, para 100, Opinion individuelle de M. Lauterpacht [Application de la Convention de genocide, Opinion individuelle de M Lauterpacht]. Une telle position attira l’attention de nombreux auteurs à l’époque. Jordan Paust, “Peace-Making and Security Council Powers: Bosnia-Herzegovina Raises International and Constitutional Questions” (1994) 19:1 S Ill ULJ 131 aux pp 139–40; Craig Scott et al, “A Memorial for Bosnia: Framework of Legal Arguments Concerning the Lawfulness of the Maintenance of the United Nations Security Council’s Arms Embargo on Bosnia and Herzegovina” (1994) 16:1 Mich J Intl L 1 à la p 85–91; Christian Dominicé, L’ordre juridique international entre tradition et innovation, Genève, Graduate Institute Publications, 1997 à la p 211. Cette approche est soutenue par une importante part de la doctrine aujourd’hui. Alain Pellet, “Peut-on et doit-on contrôler les actions du Conseil de sécurité ?” dans Société française pour le droit international, dir, Le chapitre VII de la Charte des Nations Unies et les nouveaux aspects de la sécurité collective, Paris, Pedone, 1995, 221 aux pp 236–37; Thomas Kleinlein, “Jus Cogens as the ‘Highest Law’? Peremptory Norms and Legal Hierarchies” (2015) 46 Netherlands YB Intl L 173 à la p 186; Costelloe, supra note 51 à la p 136. Voir également Joe Verhoeven, “Sur les ‘bons’ et les ‘mauvais’ emplois du jus cogens” (2008) 1 ABDI 133 à la p 154. Selon ce dernier, “[o]n comprend que le Conseil de sécurité ne puisse normalement pas déroger au jus cogens, ce qui ne pourrait logiquement se concevoir que s’il était en mesure de donner à ses décisions un caractère de jus cogens.” Voir aussi Miguel Lemos, “Jus Cogens versus the Chapter VII Powers of the Security Council: With Particular References to Humanitarian Intervention and Terrorism” (2020) 19:1 Chinese J Intl L 1.

124 Opinion dissidente de M. Kreća dans Licéité de l’emploi de la force (Yougoslavie c États-Unis d’Amérique), [1999] CIJ Rec 951 à la p 965, para 10.

125 Le TPIY a considéré que le Conseil avait latitude d’agir “sous respect de respecter les normes impératives du droit international (jus cogens).” On notera au passage qu’une nouvelle fois, aucune justification ne fut apportée à l’appui de cette conclusion. Le Procureur c Duško Tadić, IT-94-1-A, Jugement (15 juillet 1999) au para 296.

126 Yusuf et Al-Barakaat c Conseil et Commission, [2005] T-306/01 aux paras 279–81. Après avoir rappelé que l’article 24(2) de la Charte oblige les organes de l’ONU à agir “conformément aux buts et principes des Nations Unies,” qui “ont notamment pour but d’encourager le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales,” il souligna: “Le droit international permet ainsi de considérer qu’il existe une limite au principe de l’effet obligatoire des résolutions du Conseil de sécurité: elles doivent respecter les dispositions péremptoires fondamentales du jus cogens. Dans le cas contraire, aussi improbable soit-il, elles ne lieraient pas les États membres de l’ONU ni, dès lors, la Communauté.” Il ajouta: “Le contrôle juridictionnel incident exercé par le Tribunal, dans le cadre d’un recours en annulation d’un acte communautaire adopté, sans exercice d’une quelconque marge d’appréciation, en vue de mettre en œuvre une résolution du Conseil de sécurité, peut donc très exceptionnellement s’étendre à la vérification du respect des règles supérieures du droit international relevant du jus cogens et, notamment, des normes impératives visant à la protection universelle des droits de l’homme, auxquelles ni les États membres ni les instances de l’ONU ne peuvent déroger parce qu’elles constituent des ‘principes intransgressibles du droit international coutumier’.” Voir aussi Kadi et Al Barakaat c Conseil et Commission, [2008] C-402/05 P et C-415/05 P aux paras 228–31.

127 On compte par exemple l’Argentine, le Brésil, l’Égypte, la Grèce, l’Iran et le Togo. Voir Doc off CS NU, 62e année, 5679e séance, Doc NU S/PV.5679 (2007) à la p 38; Doc off AG NU, 74e sess, 24e séance, Doc NU A/C.6/74/SR.24 (2019) à la p 20, para 94; Doc off AG NU, 73e sess, 25e séance, Doc NU A/C.6/73/SR.25 (2018) à la p 7, para 36; Doc off AG NU, 73e sess, Doc NU A/C.6/73/SR.27 (2018) aux pp 2–3, para 8; 19, para 117; Doc off AG NU, 74e sess, 26e séance, Doc NU A/C.6/74/SR.26 (2019) à la p 6, para 27. Voir aussi Doc off CS NU, 61e année, 5474e séance, Doc NU S/PV.5474 (2006) à la p 21; Doc off CS NU, 61e année, 5446e séance, Doc NU S/PV.5446 (2006) à la p 30.

128 Doc off AG NU, 74e sess, 23e séance, Doc NU A/C.6/74/SR.23 (2019) à la p 11, para 54. L’article 24(2) de la Charte prévoit que “[d]ans l’accomplissement de ces devoirs, le Conseil de sécurité agit conformément aux buts et principes des Nations Unies.” Or, ces “buts et principes” incluent “le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales.” Cette hypothèse avait d’ailleurs été envisagée par le Tribunal de l’Union européenne. Yusuf et Al-Barakaat, supra note 126 aux paras 279–80. Peu avant la décision Yusuf et Al-Barakaat, Évelyne Lagrange avait émis à ce sujet une hypothèse intéressante: “En soumettant l’action du Conseil de sécurité aux ‘buts et principes des Nations Unies’,” estimait-elle, “la Charte lui impose de ne porter aux principes des Nations Unies que les atteintes nécessaires à l’accomplissement de sa fonction.” Par conséquent, le Conseil de sécurité pourrait porter des atteintes aux normes impératives “qui soient justifiées par l’accomplissement de sa fonction.” Voir Évelyne Lagrange, “Le Conseil de sécurité des Nations Unies peut-il violer le Droit International” (2004) 2 RBDI 568 aux pp 587–90.

129 Doc off AG NU, 74e sess, 23e séance, Doc NU A/C.6/74/SR.23 (2019) à la p 11, para 54.

130 Doc off AG NU, 74e sess, 25e séance, Doc NU A/C.6/74/SR.25 (2019) aux pp 7–8, para 48.

131 Application de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-et-Herzégovine c Serbie-et-Monténégro), “mesures conservatoires” (13 septembre 1993), [1993] CIJ Rec 325; Scott et al, supra note 123 à la p 70.

132 La résolution 661 décrétait un embargo sur “tous produits de base et de toute marchandises en provenance d’Iraq ou du Koweït,” et contenait une disposition controversée, qui interdisait “[l]a vente ou la fourniture par leurs nationaux ou depuis leur territoire ou par l’intermédiaire de navires battant leur pavillon de tous produits de hase ou de toutes marchandises, y compris des armes ou tout autre matériel militaire, que ceux-ci proviennent ou non de leur territoire, mais non compris les fournitures à usage strictement médical et, dans les cas où des considérations d’ordre humanitaire le justifient, les denrées alimentaires, à toute personne physique ou morale se trouvant en Iraq ou au Koweït ou à toute personne physique ou morale aux fins de toute activité commerciale menée sur ou depuis le territoire de l’Iraq ou du Koweït ainsi que toutes activités menées par leurs nationaux ou sur leur territoire qui auraient pour effet de favoriser ou sont conçues pour favoriser la vente ou la fourniture dans les conditions sus-indiquées de tels produits de base ou de telles marchandises.” Certains auteurs avaient montré que cette résolution aurait contribué à affamer des populations civiles, ce qui est contraire au droit international humanitaire. Or, dans la mesure où les “règles fondamentales de droit international humanitaire” seraient impératives, il apparaît que de telles mesures pourraient être contraires au jus cogens. Pour chacun de ces points, voir respectivement. La situation entre l’Iraq et le Koweït, Rés CS 661 (1990); René Provost, “Starvation as a Weapon: Legal Implications of the United Nations Food Blockade against Iraq and Kuwait” (1992) 30 Colum J Transnatl L 577. Voir note 61 discutée ci-dessus. Il est possible de noter que la résolution 666 visait à corriger ce point, puisqu’elle déléguait à un Comité le soin de garder “constamment à l’étude la situation alimentaire en Iraq et au Koweït,” d’accorder une attention spéciale “aux catégories de personnes qui risquent plus particulièrement de souffrir, telles que les enfants de moins de 15 ans, les femmes enceintes ou en couches, les malades et les personnes âgées,” d’alerter le Conseil et de prendre des mesures lorsque “les circonstances sont telles qu’il est indispensable, pour des raisons d’ordre humanitaire, de fournir d’urgence des denrées alimentaires à l’Iraq ou au Koweït pour alléger les souffrances.” La situation entre l’Iraq et le Koweït, Rés CS 666 (1990). Voir aussi Irène Couzigou, “Le Conseil de sécurité doit-il respecter les Droits de l’Homme dans son action coercitive de maintien de la paix?” (2007) 20:1 RQDI 107 à la p 120; Michael Sklaire, “The Security Council Blockade of Iraq: Conflicting Obligations under the United Nations Charter and the Fourth Geneva Convention” (1991) 6:4 Am U J Intl L & Pol’y 609 aux pp 620–21; Lily Leishman, “A Compelling Idea: Jus Cogens and the Power of the United Nations Security Council” (2019), en ligne: University of Otago <www.otago.ac.nz/law/research/journals/otago734243.pdf>.

133 Doc off AG NU, 73e sess, 26e séance, Doc NU A/C.6/73/SR.26 (2018) à la p 20, para 131.

134 Doc off AG NU, 74e sess, 24e séance, Doc NU A/C.6/74/SR.24 (2019) à la p 14, para 65. La délégation américaine “se réjoui[ssai]t de l’affirmation faite dans le commentaire selon laquelle les résolutions, décisions ou actes du Conseil de sécurité appellent des considérations supplémentaires,” mais “s’inquiét[ait] vivement des conséquences très graves que pourrait avoir le projet de conclusion, ne serait-ce que parce qu’il n’y a pas de consensus clair sur les normes ayant la qualité de jus cogens.

135 Mission du Royaume-Uni à l’ONU, Statement by Mr Iain MacLeod (28–30 octobre 2019) aux pp 9–10, en ligne: ONU <statements.unmeetings.org/media2/21999917/-e-united-kingdom-statement.pdf> [nous traduisons].

136 Elle craignait que cette conclusion “affaiblisse la primauté du Conseil de sécurité dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales,” et “pourrait être utilisée pour ne pas respecter les obligations imposées” par ses résolutions. Voir Mission des Pays-Bas à l’ONU, Observations and Comments (2020) aux pp 15–16, en ligne: ONU < legal.un.org/ilc/sessions/73/pdfs/english/jc_netherlands.pdf> [nous traduisons].

137 Ibid [nous traduisons].

138 Mark Weisburd, “Emptiness of the Concept of Jus Cogens, as Illustrated by the War in Bosnia- Herzegovina” (1995) 17 Mich J Intl L 1 à la p 36 [nous traduisons].

139 L’interdiction de l’agression (voire du recours à la force) étant souvent considérée comme une norme impérative, il ne faudrait pas — par exemple — que toute action coercitive prise en vertu du chapitre VII soit contestée. Voir Maziar Jamnejad et Michael Wood, “The Principle of Non-Intervention” (2009) 22 LJIL 345 à la p 358; Michael Scharf, “Aut dedere aut iudicare,” Max Planck Encyclopedia of Public International Law (2008) au para 16; Olivier Corten, The Law against War: The Prohibition on the Use of Force in Contemporary International Law, Londres, Hart, 2010 aux pp 201–13; Alexander Orakhelashvili, Peremptory Norms in International Law, Oxford, OUP, 2006 aux pp 50–51. Pour une vision contraire, voir André De Hoogh, “Jus Cogens and the Use of Armed Force” dans Mark Weller, dir, The Oxford Handbook of the Use of Force in International Law, Oxford, OUP, 2015 aux pp 1161–86. Voir aussi Franck Hoffmeister et Thomas Kleinlein, “International Public Order,” Max Planck Encyclopedia of Public International Law (2013) au para 14 (sur le recours à la force).

140 L’hypothèse selon laquelle la Charte des Nations Unies devrait être invalidé, de ce fait, pour contrariété avec une norme de jus cogens, ne saurait tenir en raison de l’Article 4 de la Convention de Vienne, supra note 12. Celui-ci est intitulé “Non-Rétroactivité de la Présente Convention” et prévoit: “Sans préjudice de l’application de toutes règles énoncées dans la présente Convention auxquelles les traités seraient soumis en vertu du droit international indépendamment de ladite Convention, celle-ci s’applique uniquement aux traités conclus par des États après son entrée en vigueur à l’égard de ces États.”

141 Sur la question du contrôle, voir plus généralement Pellet, supra note 123 aux pp 223–58.

142 Statut de la CIJ, supra note 100.

143 Karl Zemanek, “The Legal Foundations of the International System” (1997) 266 Rec des Cours 1 aux paras 238–40; Joost Pauwelyn, Conflict of Norms in Public International Law, Cambridge, CUP, 2003 à la p 90; Alain Pellet, “Article 38” dans Andreas Zimmermann et al, dir, The Statute of the International Court of Justice, Oxford, OUP, 2003 à la p 700.

144 Statut de la CIJ, supra note 100, art 38(1)(b).

145 La Belgique avait ainsi proposé un amendement qui aurait permis aux États de saisir la Cour au cas où “l’existence des intérêts essentiels” viendraient à être méconnue par le Conseil. En cas d’irrégularité, le Conseil aurait dû réviser sa position ou renvoyer l’affaire devant l’Assemblée. Voir Documents de la Conférence des Nations Unies sur l’organisation internationale, vol 4 aux pp 476–77 [UNCIO]. L’amendement ne fut pas retenu, notamment en raison des réticences de la France, de l’URSS, du Royaume-Uni, des États-Unis et de la Biélorussie. UNCIO, vol 12 aux pp 54–55, 66–67. Pour les États-Unis et l’URSS, le Conseil était de toute façon tenu de respecter les principes des Nations Unies; pour la Biélorussie et le Royaume-Uni, cela risquait de ralentir l’action du Conseil au moment où des mesures rapides étaient requises. Il fut néanmoins admis que les organes de l’ONU puissent la saisir pour avis, afin de s’enquérir de l’interprétation correcte de la Charte. UNCIO, vol 13 aux pp 831–32.

146 Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c États-Unis d’Amérique), [1984] CIJ rec 392 à la p 436, para 98; Conséquences juridiques pour les États de la présence continue de l’Afrique du Sud en Namibie (Sud-Ouest africain) nonobstant la résolution 276 (1970) du Conseil de sécurité, Avis consultatif, [1971] CIJ rec 16 à la p 33, para 89 [Conséquences juridiques pour Sud-Ouest africain]. Voir aussi Mark Weisburd, Failings of the International Court of Justice, Oxford, OUP, 2016 aux pp 169–76.

147 Opinion dissidente de M. Weeramantry dans Questions d’interprétation et d’application de la convention de Montréal de 1971 résultant de l’incident aérien de Lockerbie (Jamahiriya arabe libyenne c Royaume- Uni), [1992] CIJ rec 50 à la p 66; Opinion dissidente de M. Schwebel dans Questions d’interprétation et d’application de la convention de Montréal de 1971 résultant de l’incident aérien de Lockerbie (Jamahiriya arabe libyenne c Royaume- Uni), [1992] CIJ rec 64 aux pp 64–76; Opinion dissidente de M. Jennings dans Questions d’interprétation et d’application de la convention de Montréal de 1971 résultant de l’incident aérien de Lockerbie (Jamahiriya arabe libyenne c Royaume- Uni), [1998] ICJ rec 99 à la p 110.

148 Antonios Tzanakopoulos, Disobeying the Security Council, Oxford, OUP, 2011 aux pp 105–07; Bernd Matenczuk, “The Security Council, the International Court and Judicial Review: What Lessons from Lockerbie?” (1999) 10:3 EJIL 517 à la p 527; Enzo Cannizzaro, “A Machiavellian Moment: The UN Security Council and the Rule of Law” (2006) 3:2 Intl Organizations L Rev 189 à la p 194; David Schweigman, The Authority of the Security Council under Chapter VII of the UN Charter: Legal Limits and the Role of the International Court of Justice, La Haye, Kluwer à la p 304; Jaemin Lee, “The United Nations Security Council and the International Court of Justice: Co-operation, Co-existence, and Co-involvement” (2005–06) 12 Asian YB Intl L 57 aux pp 65–66.

149 Certaines dépenses des Nations Unies (article 17, paragraphe 2, de la Charte), [1962] ICJ rec 151; Conséquences juridiques pour Sud-Ouest africain, supra note 146. Pour la pratique d’autres cours, voir Le Procureur c Duško Tadić, [2005] IT-94-1-T aux paras 23–25; Bosphorus c Minister for Transport, Energy and Communications e.a, [1996] C-84/95 aux paras 24–26.

150 Dans l’affaire du Génocide, par exemple, elle s’est abstenue de prononcer sur la question du droit à la légitime défense, tel que revendiqué par la Bosnie-et-Herzégovine, car elle craignait d’entrer en conflit avec le Conseil de sécurité concernant ledit embargo sur les armes. Brigitte Stern, 20 ans de jurisprudence de la Cour internationale de Justice: 1975–1995, La Haye, Martinus Nijhoff, 1998 à la p 755.

151 Voir note 132 discutée ci-dessus.

152 En l’occurrence, il s’agirait de l’article 8(2)(b)(xxv), selon lequel relève des crimes de guerre “[l]e fait d’affamer délibérément des civils comme méthode de guerre, en les privant de biens indispensables à leur survie, y compris en empêchant intentionnellement l’envoi des secours prévus par les Conventions de Genève.” Statut de Rome de la Cour pénale internationale, 17 juillet 1998, 2187 RTNU 3 (entrée en vigueur 1er juillet 2002) [Statut de Rome].

153 Selon cette disposition, “[a]ucune enquête ni aucune poursuite ne peuvent être engagées ni menées en vertu du présent Statut pendant les douze mois qui suivent la date à laquelle le Conseil de sécurité a fait une demande en ce sens à la Cour dans une résolution adoptée en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies; la demande peut être renouvelée par le Conseil dans les mêmes conditions.” Statut de Rome, supra note 152.

154 La doctrine s’émeut parfois de ce véto. Voir, par ex, Neha Jain, “A Separate Law for Peacekeepers: The Clash between the Security Council and the International Criminal Court” (2005) 16:2 EJIL 239; Hemi Mistry et Deborah Ruiz Verduzco (rapporteurs), “The UN Security Council and the International Criminal Court” (2012) aux pp 14–15, en ligne: Chatham House <https://www.pgaction.org/pdf/Chatham-ICC-SC.pdf>.

155 Pour la vision contraire, voir André Nollkaemper et Erika de Wet, “Review of Security Council Decisions by National Courts” (2002) German YB Intl L 166.

156 Marc Angher, “The International Court of Justice’s Advisory Jurisdiction and the Review of Security Council and General Assembly Resolutions” (2009) 103:2 NW UL Rev 1007 à la p 1023.

157 Projet de rapport, supra note 17 aux pp 6, 10; Textes des projets de conclusion, supra note 23 à la p 4, n 14.

158 Troisième rapport, supra note 17 à la p 66; Textes des projets de conclusion, supra note 23 à la p 4, n 14, para 1.

159 Troisième rapport, supra note 17 à la p 66; Textes des projets de conclusion, supra note 23 à la p 4, n 14, para 2.

160 Alfred Verdross estimait qu’il existait des “principes obligatoires de droit international” — c’est-à-dire des équivalents du jus cogens – et en a identifié deux groupes. Les premières sont certaines normes de droit international coutumier. Deux États ne pourraient pas contracter pour priver d’autres États de l’exercice de certains droits. Il y aurait ensuite un deuxième groupe, qui consisterait en un “principe général interdisant les États de conclure des traités contra bonos mores.” Partant, non seulement les traités allant à l’encontre de ces principes obligatoires de droit international seraient nuls, mais de plus, “une norme générale de droit international coutumier en contradiction avec un principe général de droit ne p[ourrait] pas naître, car le droit coutumier doit être formé d’une coutume constante, basée sur une conviction juridique générale.” Voir Alfred von Verdross, “Forbidden Treaties in International Law: Comments on Professor Garner’s Report on ‘The Law of Treaties’” (1937) 31:4 AJIL 571 aux pp 572–73.

161 CNUDT, supra note 8 à la p 347, para 37.

162 Ibid à la p 320, para 19.

163 À ce sujet, voir Andrea Bianchi, “Human Rights and the Magic of Jus Cogens” (2008) 19:3 EJIL 491 à la p 496.

164 Application de la Convention de genocide, Opinion individuelle de M. Lauterpacht, supra note 123 à la p 440, para 100; Procureur c Anto Furundžija, supra note 101 au para 153; R (Mohamed) v Foreign Secretary, [2009] 1 WLR à la p 2634; Kazemi, supra note 85 au para 86; CUSCLIN, supra note 76 à la p 929 (mention de la headnote). Voir aussi Antônio Augusto Cançado Trindade, The Construction of a Humanized International Law, Londres, Hart, 2014 à la p 443; Kennedy Gastorn, “Defining the Imprecise Contours of Jus Cogens in International Law” (2018) 16:4 Chinese J Intl L 643.

165 Doc off AG NU, 74e sess, 24e séance, Doc NU A/C.6/74/SR.24 (2019) à la p 9, para 35.

166 Ibid.

167 Pour respectivement le Chili et le Salvador: Doc off AG NU, 74e sess, 26e séance, Doc NU A/C.6/74/SR.26 (2019) à la p 16, para 115; Doc off AG NU, 74e sess, 25e séance, Doc NU A/C.6/74/SR.25 (2019) à la p 6, para 30. L’Estonie semblait aussi approuver cette orientation: Doc off AG NU, 73e sess, 26e séance, Doc NU A/C.6/73/SR.26 (2018) à la p 8, para 48.

168 Troisième rapport, supra note 17 à la p 57. Voir également Fragmentation du droit international: Difficultés découlant de la diversification et de l’expansion du droit international, Doc NU A/CN.4/L.682 (2006) à la p 202, para 367.

169 L’État “s’oppos[ait] à l’incorporation dans le projet de conclusions d’éléments qui ne reflètent pas suffisamment le droit existant.” Voir Doc off AG NU, 74e sess, 24e séance, Doc NU A/C.6/74/SR.24 (2019) à la p 5, para 18.

170 Ohlin, supra note 29 à la p 714.

171 Doc off AGNU, 71e sess, supp n°10, Doc NU A/71/10 à la p 316, para 115. La CDI ajoute: “La norme du jus cogens n’était donc autre qu’une pratique générale acceptée comme étant une règle de droit péremptoire, c’est-à-dire, en d’autres termes, une pratique générale accompagnée d’une opinio juris cogens.

172 Weisburd, supra note 138 à la p 19.

173 À ce sujet, voir Vladimir Paul, “The Legal Consequences of Conflict between a Treaty and an Imperative Norm of General International Law (jus cogens)” (1971) 22 Österreichische Zeitschrift für Öffentliches Recht 19 à la p 43; NG Onuf et Richard K Birney, “Peremptory Norms of International Law: Their Source, Function and Future” (1974) 4:2 Denv J Intl L & Pol’y 187 à la p 192.

174 Voir Bin Cheng, “United Nations Resolutions on Outer Space. ‘Instant’ International Customary Law?” (1965) 23 Indian J Intl L 23; René-Jean Dupuy, “Coutume sage et coutume sauvage” dans Mélanges offerts à Charles Rousseau: la communauté internationale, Paris, Pedone, 1974, 75.

175 Pour une opinion différente, voir Mark Janis, “Nature of Jus Cogens” (1988) 3:2 Conn J Intl L 359 à la p 362.

176 CNUDT, supra note 8 à la p 334, para 14.

177 Ibid à la p 349, para 2.

178 Projet de rapport, supra note 17 à la p 4; Textes des projets de conclusion, supra note 23, n 2.

179 Cet écueil n’avait apparemment pas échappé à certains membres de la Commission, mais la formulation actuelle de la conclusion ne permet pas de désamorcer ce problème. Voir Statement of the Chair of the Drafting Committee (2019) à la p 6, en ligne: ONU <legal.un.org/ilc/documentation/english/statements/2019_dc_chairman_statement_jc.pdf> [nous traduisons].

180 CNUDT (Add.2), supra note 9 à la p 73, para 4. Voir aussi Deuxième rapport, supra note 17 aux pp 25–29, paras 54–59.

181 CNUDT, supra note 8 aux pp 320–21, para 19.

182 Cette position a par exemple été soutenue par Thomas Weatherall, Jus Cogens: International Law and Social Contract, Cambridge, Cambridge University Press, 2015 aux pp 125–26. Pour une position contraire, voir Verhoeven, supra note 123 aux pp 136, 139.

183 Janis, supra note 175 à la p 360.

184 Convention de Vienne, supra note 12, art 34. À ce sujet, voir Ulf Linderfalk, “The Source of Jus Cogens Obligations: How Legal Positivism Copes with Peremptory International Law” (2013) 82 Nordic J Intl L 369 à la p 379.

185 Convention de Vienne, supra note 12, art 35.

186 Certains auteurs estiment toutefois que le caractère amendable du traité en fait un instrument peu propice à l’émergence d’une norme indérogeable. Byers, supra note 42 à la p 221. En vertu du principe de la lex posterior, un changement pourrait également avoir un fondement coutumier. À ce sujet, voir Rebecca Crootof, “Change without Consent: How Customary International Law Modifies Treaties” (2016) 41 Yale J Intl L 237.

187 Création d’une Commission du droit international, Rés AG 174(II) (1947), art 15.

188 Ibid.

189 Ibid.

190 Cette marge de manœuvre du codificateur se voulait toutefois limitée: il ne pouvait que suggérer la meilleure façon d’interpréter une “loi imprécise,” de combler une “lacune” ou une “fissure.” Voir Examen d’ensemble du droit international en vue des travaux de codification de la Commission du droit international (mémorandum du Secrétaire général), Doc NU A/CN.4/1/Rev.1 (1949) au para 3. Voir aussi Charles Jalloh, “Introduction” (2019) 13 Florida Intl U L Rev 975 à la p 977.

191 Les principes “décrivant des droits” et les politiques décrivant “des objectifs.” Opinion individuelle de M. Dugard dans Activités armées sur le territoire du Congo (nouvelle requête: 2002) (République démocratique du Congo c Rwanda), [2006] ICJ Rep 6 à la p 89.

192 Ibid.

193 Rapport CDI (2014), supra note 15 à la p 294, para 20. Certains États ont fait le reproche à la CDI de ne pas distinguer suffisamment entre les propositions relevant de la codification ou du développement du droit. Tel était le cas pour le Royaume-Uni et le Soudan. Voir Doc off AG NU, 74e sess, 23e séance, Doc NU A/C.6/74/SR.23 (2019) à la p 20, para 109; Doc off AG NU, 74e sess, 24e séance, Doc NU A/C.6/74/SR.24 (2019) à la p 11, para 48.

194 Jacob Katz Cogan, “The Changing Form of the International Law Commission’s Work” dans Roberto Virzo et Ivan Ingravallo, dir, Evolutions in the Law of International Organizations, Leiden, Hotei Publishing, 2015, 275 à la p 284.

195 Ibid.

196 Elena Baylis, “The International Law Commission’s Soft Law Influence” (2019) 13:6 Florida Intl U L Rev 1007 à la p 1013; Danae Azaria, “The International Law Commission’s Return to the Law of Sources of International Law” (2019) 13:6 Florida Intl U L Rev 989 à la p 1006. Voir aussi Christian Tomuschat, “The International Law Commission: An Outdated Institution” (2006) 49 German YB Intl L 77 à la p 97.

197 Rapport CDI (2014), supra note 9 à la p 81.