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Acquisition de la morphographie flexionnelle du français: Retard de jeunes adultes en formation professionnelle

Published online by Cambridge University Press:  06 December 2011

TIPHAINE MOUT*
Affiliation:
Université Stendhal-Grenoble 3, laboratoire Lidilem
CATHERINE BRISSAUD*
Affiliation:
Université Joseph Fourier-Grenoble 1, laboratoire Lidilem
*
Adresses pour correspondance: Tiphaine Mout, Laboratoire Lidilem, Université Stendhal, Grenoble 3, Avenue centrale, 38400 Saint-Martin-d'Hères, France e-mail: Tiphaine.Mout@u-grenoble3.fr
Adresses pour correspondance: Catherine Brissaud, Laboratoire Lidilem, Université Joseph Fourier, Grenoble 1, Avenue centrale, 38400 Saint-Martin-d'Hères, France e-mail: catherine.brissaud@ujf-grenoble.fr
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Résumé

Cet article présente une analyse comparative des compétences orthographiques de jeunes adultes français en formation professionnelle, âgés de 15 à 18 ans et présentant de grandes difficultés en orthographes, et d'élèves français tout-venant âgés de 8 à 15 ans. Ces élèves ont été testés sur un des points orthographiques du français les plus difficiles à maitriser: les finales verbales homophones en /E/. L'objectif de cette recherche est de savoir si les jeunes adultes en difficulté orthographique se situent sur des chemins d'apprentissage identiques aux élèves tout-venant, mais avec un retard; ou bien s'ils construisent des procédures différentes de celles des apprentis scripteurs.

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Articles
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Copyright © Cambridge University Press 2011 

1 INTRODUCTION

La question de l'orthographe représente un véritable enjeu social. Dans une société où l'on écrit de plus en plus, les difficultés orthographiques constituent en effet un obstacle à la satisfaction des attentes scolaires et vraisemblablement un frein à l'insertion professionnelle. Les discours institutionnels et politiques, régulièrement relayés par la presse, sont volontiers alarmistes à ce sujet. Une étude récente montre par exemple une régression du niveau orthographique: plus précisément, le niveau des élèves de 3e d'aujourd'hui serait celui des élèves de 5e il y a vingt ans (Chervel et Manesse, Reference Chervel and Manesse1989; Manesse et Cogis, Reference Manesse and Cogis2007). L'institution elle-même nous fournit la preuve des difficultés que rencontrent les élèves dans le domaine de l'orthographe grammaticale et de la détérioration des performances orthographiques (DEP, 1996; DEP, 2008). Par ailleurs, les difficultés orthographiques sont pointées à l'université, quelles que soient les disciplines ainsi que dans le monde du travail.

L'orthographe du français est source de difficultés pour les adolescents et parfois aussi pour des adultes ayant fait des études (Lucci et Millet, Reference Lucci and Millet1994; Brissaud, Jaffré et Pellat, Reference Brissaud, Jaffré and Pellat2008). Certes, l'orthographe du français n'est pas une exception si l'on se réfère aux deux principes qui régissent les orthographes du monde, nécessaires à leur fonctionnement: 1/ le principe phonographique, qui met en relation les unités non significatives de l'oral (phonèmes et syllabes) et les unités de l'écrit (les graphèmes) pour transcrire les sons du langage; 2/ le principe sémiographique qui note le sens linguistique à travers des procédés graphiques, le plus souvent sans relation avec l'oral (Coulmas, Reference Coulmas1989, Reference Coulmas2003; Fayol et Jaffré, Reference Fayol and Jaffré2008).

L'orthographe du français reste néanmoins complexe comparativement à d'autres, telles celle du turc ou celle du coréen, qui ont une base phonographique capable d'assurer la représentation sémiographique. Dans ce cas, on parle de sémiographie mineure. Lorsque cette base phonographique n'assure pas la représentation sémiographique, les orthographes ont alors recours à des éléments typiquement graphiques. On parle alors de sémiographie majeure. L'orthographe du français en fait partie et elle est considérée comme l'une des plus difficiles au monde (Jaffré et Fayol, Reference Jaffré, Galan and Filjalkow2006; Jaffré, Reference Jaffré and Brissaud2006).

Si l'on s'en tient à l'une des composantes de la sémiographie, la morphographie flexionnelle du français, c'est-à-dire l'écriture des morphèmes grammaticaux, celle-ci n'a d'équivalent dans aucune autre orthographe, alphabétique ou non. Et cette complexité a des conséquences sur son usage aussi bien que sur son apprentissage. La difficulté provient du fait que la plupart des marques morphologiques écrites du nombre ne se prononcent pas: les correspondances entre configurations de sons et configurations de lettres y sont peu systématiques (Catach, Reference Catach1992). Le caractère silencieux de la morphologie écrite exige des apprenants scripteurs qu'ils apprennent un nouveau système de marques en se référant à la seule forme écrite du langage (Cogis, 2007; Fayol et Jaffré, Reference Fayol and Jaffré2008). Par exemple, face à une forme phonologique telle que /truv/, le scripteur dispose de trois formes graphiques différentes: trouve, trouves, trouvent. Pour /truvEFootnote 1/, on ne compte pas moins de dix formes graphiques différentes: trouver, trouvé, trouvés, trouvée, trouvées, trouvez, trouvait, trouvais, trouvaient, trouvai. Le scripteur, face à l'écriture des finales verbales en /E/, se trouve donc confronté aux multiples facettes morphologiques d'une seule et même réalisation phonique. La connaissance de la morphologie verbale orale ne suffit pas à l'apprenti scripteur pour prédire les formes écrites. Les finales verbales homophones en /E/ constituent indéniablement une des difficultés orthographiques majeures du français.

En outre, la complexité de l'acquisition des formes verbales en /E/ provient du fait de la double sélection qu'impliquent ces finales (Totereau et Brissaud, Reference Totereau and Brissaud2006): sélection d'un morphogramme dans un paradigme indépendant de l'accord (-ai, , -e), puis sélection possible d'une marque de mode (-r), ou d'accord en nombre (-s, -nt), en genre (-e) ou personne (-s, -t, -z), si le paradigme le permet. D'un point de vue linguistique, ces deux choix ne sont pas indépendants car la première sélection annule ou restreint la seconde: ainsi -er exclut tout morphogramme, empêche -ent, -ai- exclut -e, etc.

Lucci et Millet (Reference Lucci and Millet1994) nous renseignent sur la difficulté de ces unités pour les adultes: les finales verbales en /E/ demeurent un secteur de très grande fragilité qui entraine de nombreuses formes erronées. Les plus fréquentes sont des substitutions de l'infinitif par le participe passé et vice versa. Mais peu nombreuses sont les études consacrées au traitement de ces unités homophoniques.

Cette difficulté majeure du français a par ailleurs fait l'objet de travaux expérimentaux qui ont permis d'éclairer des aspects développementaux de l'apprentissage de l'écriture, d'illustrer les savoirs en construction et les représentations cognitives des apprenants (Jaffré et Brissaud, Reference Jaffré, Fayol, Joshi and Aaron2006). Brissaud et Chevrot (Reference Brissaud and Chevrot2011) ont entrepris une exploration systématique du traitement de ces unités homophoniques. À partir d'une étude transversale menée auprès d'élèves français et québécois du CE2 à la classe de 4e de collège, ils ont identifié les types d'erreurs les plus fréquents et ont permis de préciser les étapes développementales de la production des formes verbales en /E/ (forme infinitive en -er et forme participiale en ) chez les apprenants tout-venant de 8 à 15 ans. Leurs travaux ont permis de montrer: 1/ une amélioration continue du nombre de réponses correctes, dès la fin de l'apprentissage formel de la lecture et jusqu'à la fin du collège; 2/ un évitement de séquences de lettres incompatibles avec le sous-système des formes verbales en /E/: par exemple, l'évitement des combinaisons impossibles ou improbables telles que -ers ou -éent; 3/ une évolution remarquable d'erreurs très récurrentes.

Ce travail a abouti au scénario développemental suivant: au niveau CE2, la graphie -er (infinitif) est plus disponible que -é (participe passé) chez la plupart des élèves. Ils commettent ainsi des erreurs sur -é qu'ils remplacent par -er et réussissent donc -er par défaut. Au niveau CM1, la graphie -é devient plus disponible que -er chez une majorité d'élèves et cette disponibilité croît en même temps que le marquage de l'accord. Quelle que soit la cible (-é ou -er), une importante augmentation numérique des erreurs en -é porteuse d'un faux accord avec le sujet est présente aux niveaux CM1 et CM2. Brissaud et Chevrot (à paraitre) font l'hypothèse que cette tendance à l'accord avec le sujet favorise le choix du -é lorsque la cible est -er car le morphogramme -é a l'avantage de se combiner avec les marques du genre et du nombre (-e, -s) sans obtenir une séquence improbable de type jouers. Ils ont interprété ce type de réponse comme le recyclage d'une réponse phonographique (le -é qui transcrit le phonème /e/) pour atteindre un objectif morphosyntaxique, à savoir la réalisation de l'accord. Ainsi, les élèves semblent s'éloigner progressivement des traitements purement phonographiques pour explorer par diverses voies les traitements morphographiques. Quant aux procédures utilisées par les collégiens, elles peuvent s'envisager comme une réponse économique à des règles dont l'application est couteuse.

Ce scénario développemental est une pierre de plus à l'édifice de la recherche sur l'acquisition des compétences orthographiques. Nous avons donc une idée assez précise des procédures des élèves tout-venant âgés de 8 à 15 ans. En revanche, nous ne savons pas quelles sont les procédures utilisées par les élèves présentant de grandes difficultés en orthographe (Brissaud et Barré-De-Miniac, Reference Brissaud and Barré-De-Miniac2009). Afin de mieux les connaitre, nous avons exploré les graphies produites par des élèves de lycée professionnel (Mout, Reference Mout2009), souvent stigmatisés pour leurs difficultés langagières.

Notre question principale est la suivante: les élèves en difficulté orthographique sont-ils sur des chemins d'apprentissage identiques à ceux des élèves tout-venant, mais avec un retard? Ou construisent-ils des procédures différentes de celles des apprentis scripteurs?

Dans un premier temps, nous préciserons notre protocole expérimental. Puis nous présenterons nos résultats et nous proposerons les analyses que nous en avons tiré. Nous conclurons enfin par une discussion qui résumera les principaux résultats.

2 MÉTHODOLOGIE

2.1 Participants

Notre échantillon est composé de 138 élèves de Brevet d'études professionnelles (désormais BEP) de classe de 2nde et de terminale, de lycées professionnels de deux départements français, l'Isère et le RhôneFootnote 2: 46 filles et 92 garçons âgés de 15,6 ans à 21,6 ans et dont l'âge moyen est 17,5 ans. Neuf classes ont participé au test.

Certaines spécialités sont composées exclusivement de garçons (BEP électronique, maçonnerie) ou bien de filles (métiers de la mode). Comme nous avons deux sections à dominante féminine contre cinq sections à dominante masculine et deux sections équilibrées filles-garçons, notre échantillon se compose donc de deux fois plus de lycéens garçons que de filles.

Dans la suite de notre article, la variable sexe ne sera pas prise en compte car nos analyses n'ont montré aucune différence entre les performances des filles et celles des garçons.

2.2 Procédure et matériel

Nous avons réutilisé le test construit par Brissaud et Chevrot (à paraitre). Ce test se présente sous forme de 48 courtes phrases lacunairesFootnote 3 de structure sujet-verbe-complément d'objet direct où le sujet apparait sous quatre modalités différentes: Quentin, Capucine, les filles et les garçons. La cible est soit un passé composé avec un participe passé non marqué (24 phrases; par exemple, Quentin a montré le chemin; Les garçons ont facilité le travail), soit un semi-auxiliaire suivi d'un infinitif (24 phrases; par exemple, Capucine va garder le secret; Les garçons doivent gagner le match). La longueur et la fréquence des verbes ont été contrôléesFootnote 4. Chaque élève reçoit un carnet comportant 48 phrases, à raison d'une phrase par page pour éviter les retours en arrière et les corrections. Les formes verbales doivent être écrites par l'élève sous la dictée de l'enseignant. Les 48 phrases sont présentées dans 2 ordres différents afin de neutraliser les effets éventuels de la fatigue.

2.3 Variables observées

L'objectif principal de nos analyses est de déterminer s'il est possible de situer les performances des élèves de lycée professionnel par rapport au scénario développemental établi par Brissaud et Chevrot (à paraitre), à partir du même test passé à l'école élémentaire et au début du secondaireFootnote 5.

Sept indicateurs permettront de situer les performances des élèves de lycée professionnel par rapport à celles d'élèves tout-venant: le nombre total d'erreurs; le nombre d'erreurs quand la cible est ; le nombre d'erreurs quand la cible est -er; le nombre d'erreurs qui consistent à remplacer par -er (s); le nombre d'erreurs qui consistent à remplacer -er par (e)(s); le nombre d'erreurs d'accord sujet-verbe quand la cible est ; le nombre d'erreurs d'accord sujet-verbe quand la cible est -er.

Nous avons utilisé un test d'inférences statistiques, le test «t» ou test de Student, qui permet d'estimer le risque que l'on prend à généraliser à la population dont ils sont issus une comparaison entre des moyennes de nos échantillons.

3 ANALYSE DES DONNÉES: RÉSULTATS

Nous avons comparé les résultats des élèves de lycée professionnel avec ceux des autres niveaux scolaires: tout d'abord globalement puis en fonction de la cible ( et -er).

3.1 Nombre total d'erreurs

La figure 1 permet de visualiser le nombre moyen d'erreurs (sur 48) pour chacun des niveaux scolaires.

Figure 1. Nombre total d'erreurs (sur 48).

Un test de Student permet d'établir que les élèves de BEP produisent moins d'erreurs que les élèves de CE2 (t = -5,984; p < 0,0001) et plus d'erreurs que les élèves de 4e (t = 5,673; p < 0,0001). Leurs performances ne sont pas significativement différentes de celles des élèves de CM1, CM2, 6e et 5e.

3.2 Nombre total d'erreurs en fonction de la cible (-é et -er)

Rappelons que nous avons limité notre exploration à deux flexions susceptibles de s'insérer dans des environnements proches: la flexion du participe passé après l'auxiliaire avoir et la flexion -er de l'infinitif après les semi-auxiliaires devoir et aller.

La figure 2 représente le nombre moyen d'erreurs par niveau de scolarité pour chacune des deux cibles. Nous comptabilisons comme formes erronées les finales verbales homophones en /E/ qui ne correspondent pas à la cible attendue: par exemple, -és, -ée, -ées, -er, -ers quand la cible est , et , -és, -ée, -ées, -ers quand la cible est -er.

Figure 2. Nombre moyen d'erreurs pour la cible (à gauche) et pour la cible -er (à droite) (sur 24).

Nombre d'erreurs quand la cible est -é

Un test de Student permet d'établir que les élèves de BEP font moins d'erreurs que les élèves de CE2 (t = -5,742; p < 0,0001), et davantage d'erreurs que les CM1 (t = 2,923; p = 0,003), les CM2 (t = 3,982; p < 0,0001), les 5e (t = 3,138; p = 0,001) et les 4e (t = 6,215; p < 0,0001). En revanche, le test n'a pas permis de déceler de différence entre le nombre d'erreurs des élèves de BEP et celui des élèves de 6e.

Nombre d'erreurs quand la cible est -er

Un test de Student montre que les élèves de BEP font moins d'erreurs que les élèves de CE2 (t = −2,044; p = 0,042), CM1 (t = -3,407; p = 0,0008), CM2 (t = −2,393; p = 0,017), 6e (t = −2,311; p = 0,021) et plus d'erreurs que les 4e (t = 2,967; p = 0,003). En revanche, les résultats des élèves de BEP ne sont pas significativement différents de ceux des 5e.

En résumé, concernant les erreurs réalisées sur la cible , la performance des lycéens de lycée professionnel est proche de celle des élèves de 6e; concernant la cible -er, les performances des élèves de BEP sont proches de celles des élèves de 5e du collège.

3.3 Évolution de la compétition entre -er et -é: remplacement «-é par -er» et «-er par -é»

Afin de préciser davantage le niveau d'acquisition des élèves de BEP par rapport à celui des autres niveaux scolaires, nous allons nous attacher à l'observation des types d'erreurs et en particulier aux erreurs en quand la cible est -er (Quentin va *manqué le train. Capucine doit *danséun tango) et aux erreurs en -er quand la cible est (Quentin a *aiderson copain). Dans la figure 3, nous avons donc représenté le nombre moyen de réponses et de réponses -er quand la sélection des finales verbales en /E/ est erronée.

Figure 3. Sélection de la flexion -er (sur 24) et (sur 24), dans les contextes où elle est erronée.

Remplacement cible -er par -é (à gauche)

Un test de Student montre que les élèves de BEP font moins d'erreurs que les élèves de CM1 (t = -4,301; p < 0,0001), CM2 (t = -3,507; p = 0,0005) et 6e (t = -3,091; p = 0,002); et plus d'erreurs que les élèves de 4e (t = 2,452; p = 0,0149). Cependant, les performances des élèves de BEP ne sont pas significativement différentes de celles des élèves de CE2 et de 5e.

Remplacement cible -é par -er (à droite)

Les élèves de BEP font moins d'erreurs que les CE2 (t = -12,914; p < 0,0001), CM1 (t = −2,414; p = 0,0165), et plus d'erreurs que les 6e (t = 1,929; p = 0,05) et 4e (t = 2,498; p = 0,0131). En revanche, leurs performances ne sont pas significativement différentes de celles des CM2 et des 5e.

En outre, les élèves de BEP produisent plus d'erreurs de type « remplace -er » (5,5) que d'erreurs de type « -er remplace » (2,5). Un test de Student sur séries appariées montre que ces nombres moyens d'erreurs sont significativement différents (t(1,96) = 3,786; p = 0,0002). Il en est de même pour les autres niveaux scolaires, à l'exception des élèves de CE2 pour qui c'est l'inverse.

En résumé, pour ce qui est des erreurs de type « remplace -er », les résultats des élèves de BEP sont proches de ceux des CE2 et des 5e. Quant aux erreurs de type « -er remplace », les résultats en BEP ne sont pas significativement différents de ceux des CM2 et des 5e.

3.4 Surgénéralisation de l'accord du verbe avec le sujet

Nous nous intéresserons dans cette section au choix des morphogrammes qui permettent de marquer l'accord en genre et en nombre. Plus précisément, nous cherchons à savoir si les élèves surgénéralisent l'accord sujet-verbe au participe passé employé avec l'auxiliaire avoir (cible ; par exemple Capucine a *cachée le chat du voisin) et s'ils le font également quand la cible est -er (en sélectionnant la flexion à la place de -er; par exemple Les garçons doivent *gagnés le match).

Figure 4. Sélection des flexions -ée, -és et -ées compatibles avec le genre et le nombre des sujets Capucine, les filles, les garçons (sur 18 pour chaque cible).

Nous avons travaillé sur 36 phrases du test dont le sujet peut entrainer un accord marqué en genre ou en nombre: sujet féminin singulier (Capucine), masculin pluriel (les garçons) ou féminin pluriel (les filles). Nous avons comptabilisé le nombre moyen d'erreurs manifestant un accord avec le sujet: adjonction de -e avec le sujet Capucine, de -s avec les garçons, de -es avec les filles. Nous l'avons fait pour chacune des deux cibles. Nous avons donc comptabilisé les erreurs du type Capucine doit *analysée le problème pour la cible -er, et du type Capucine a *rencontrée un ami pour la cible .

Un test de Student montre que globalement, la différence entre le nombre d'erreurs «accord sujet-verbe» selon que la cible est -er ou , est significative (t (1,96) = -10,054; p < 0,0001). Les élèves de tous les niveaux scolaires accordent davantage le verbe avec le sujet lorsque la cible est en que lorsqu'elle est en -er (les élèves de CE2 sont cependant moins concernés par cette propension à l'accord). Et les élèves de BEP n'y échappent pas.

Accord sujet-verbe quand la cible est -é

Les élèves de BEP sont ceux qui accordent le plus le verbe avec le sujet (7,5) quand la cible est . Ainsi, ils sont ceux qui commettent le plus d'erreurs d'accord du participe passé employé avec l'auxiliaire avoir avec les sujets les filles, Capucine, les garçons. Les scores d'erreurs des BEP manifestent une différence significative avec tous les autres niveaux scolaires: CE2 (t = 9,338; p <0,0001), CM1 (t = 5,036; p <0,0001), CM2 (t = 3,710; p = 0,0003), 6e (t = 2,016; p = 0,0449), 5e (t = 2,856; p = 0,0047) et 4e (t = 5,192; p <0,0001). Les BEP se singularisent donc par rapport aux autres niveaux: leur propension à faire l'accord du participe passé avec le sujet est plus forte que chez les élèves plus jeunes.

Accord sujet-verbe quand la cible est -er

Un test de Student montre que les BEP font plus d'erreurs que les élèves de CE2 (t = 4,115; p < 0,0001) et les 4e (t = 2,049; p = 0,0415). En revanche, les BEP sont proches de tous les autres niveaux scolaires: leur performance n'est pas significativement différente de celle des CM1, CM2, 6e et 5e.

Pour résumer, à tous les niveaux scolaires, l'accord à l'aide des flexions -ée, -és et -ées est plus fréquent lorsque la cible est (Capucine a *analysée le problème) que lorsqu'elle est -er (Capucine doit *analysée le problème). En d'autres termes, la majorité des élèves accordent préférentiellement le verbe avec le sujet lorsque la cible est , et produisent de nombreux accords erronés en ajoutant au participe passé précédé de l'auxiliaire avoir les marques du pluriel ou du féminin compatibles avec le genre et le nombre du sujet. Quand la cible est , le taux d'erreurs des élèves de BEP est élevé par rapport aux autres niveaux. Les BEP se différencient de tous les autres élèves sur ce point-là.

Lorsque l'on attend une réponse -er, tous les niveaux scolaires commettent des erreurs d'accord du verbe avec le sujet. La performance des BEP est proche de celle des CM1, des CM2, des 6e et des 5e. Ainsi, ces niveaux contrôlent relativement bien la sélection juste du morphonogramme quand la cible est -er, mais réalisent tout de même des accords erronés sujet-verbe.

3.5 Pour résumer

Les résultats obtenus nous ont permis de situer les productions des élèves de lycée professionnel concernant les finales verbales en /E/ par rapport à celles d'élèves de l'école primaire et de collégiens. Nous aboutissons aux tendances suivantes.

En ce qui concerne le nombre moyen d'erreurs réalisées sur les 48 formes verbales en /E/, le nombre d'erreurs des élèves de BEP est proche de celui des élèves de CM1, CM2, 6e et 5e. Ils se situent donc à l'articulation primaire-collège. Tout se passe comme si les élèves de lycée professionnel n'étaient pas parvenus à passer le seuil d'amélioration observé entre la classe de 5e et celle de 4e (Brissaud et Chevrot, à paraitre). Quand la cible est , leur score est très proche de celui des élèves de 6e. Quand la cible est -er, leur niveau est proche de celui des élèves de 5e.

Pour ce qui est des erreurs de type « remplace -er », les élèves de BEP font plus d'erreurs que les élèves de classe de 4e et moins d'erreurs que les élèves de CM1, CM2 et 6e. Quant aux erreurs de type « -er remplace », les lycéens de BEP font moins d'erreurs que les élèves de CE2 et de CM1; et plus d'erreurs que les élèves de 6e et de 4e collège.

Si l'on observe globalement les résultats, nous sommes amenées à situer les élèves de BEP à l'articulation de l'école élémentaire et du collège. Si l'on prend en compte les performances pour les deux cibles ( et -er), c'est plutôt en début de scolarité au collège qu'il convient de situer les élèves de BEP: 6e pour la cible et 5e pour la cible -er. Compte tenu du fait que les BEP se distinguent davantage par leurs erreurs sur la cible que sur la cible -er, qu'ils réussissent beaucoup mieux, nous faisons l'hypothèse qu'ils se situent davantage au niveau des élèves de 6e de collège.

3.6 Pour une comparaison fine des résultats des lycéens et des collégiens

Pour vérifier notre hypothèse, nous avons décidé de comparer les performances des BEP d'une part avec celles des élèves de 6e, d'autre part avec celles des élèves de 5e. Pour ce faire, nous avons procédé à deux appariements entre les lycéens de BEP et les collégiens. Après avoir ordonné les élèves de chacun des groupes en fonction de leur nombre global d'erreurs, nous avons formé des couples d'élèves manifestant des performances égales ou voisines, et nous n'avons gardé que les élèves qui pouvaient être appariés. Au départ, nous avions 100 élèves de 6e et 138 élèves de BEP et nous avons formé deux groupes homogènes de 97 élèves chacun dont les performances étaient comparables.

L'appariement a été moins facile avec les élèves de 5e, qui font moins d'erreurs que les élèves de 6e, ce qui nous a conduites à écarter un grand nombre d'élèves et à ne retenir que 52 élèves pour chacun des deux niveaux. Nous n'avons pas poursuivi la comparaison, estimant que celle-ci aurait une validité toute relative. Par conséquent, nous avons comparé les performances des BEP avec celles des élèves de 6e seulement.

Le tableau 2 donne les résultats des comparaisons BEP- 6e pour les sept variables testées précédemment.

Tableau 1. Nombre de sujets testés par spécialité selon le lieu, la spécialité, le sexe et l'âge moyen (années, mois).

Tableau 2. Nombre moyen d'erreurs en BEP et en 6e appariés sur les variables testées.

Au total, les tests de Student ne révèlent aucune différence notable sur aucune variable entre le profil des lycéens de BEP et des élèves de 6e. L'appariement effectué permet donc de conclure que les lycéens de lycée professionnel se comportent comme des élèves de classe de 6e pour les variables observées.

4 éléments de conclusion et perspectives didactiques

Ce travail de recherche a permis de voir si les tendances constitutives du scénario développemental établi par Brissaud et Chevrot (Reference Brissaud and Chevrot2011) sont présentes chez des élèves caractérisés par leurs grandes difficultés en orthographe. L'objectif était de savoir si les élèves de lycée professionnel sont sur des chemins d'apprentissage identiques à ceux des autres élèves tout-venant, mais avec un retard, ou bien s'ils construisent des procédures différentes des apprentis scripteurs qui sont plus jeunes. L'exploration des graphies produites par ces élèves a permis d'aboutir à plusieurs conclusions.

1/ Les élèves de BEP maitrisent relativement bien la forme infinitive en -er. On aurait pu penser que les élèves en difficulté orthographique sur-utilisent le graphème simple compatible avec le statut du verbe, mais nos résultats montrent qu'il n'en est rien. Ces résultats sont à rapprocher de ceux de Brissaud et al. (Reference Brissaud, Chevrot and Lefrançois2006), qui ont montré que les collégiens réussissaient relativement bien à écrire la forme infinitive dans les écrits scolaires, notamment quand la forme verbale suivait un autre verbe (75% de réussite en début de la classe de 6e; 90% en fin de 5e; 98% en fin de 3e). Les élèves de lycée professionnel ne réussissent donc pas -er par défaut mais ils semblent maitriser cette flexion en relation avec son contexte.

2/ Dans le cas du participe passé employé avec l'auxiliaire avoir, les élèves de BEP accordent le participe passé avec le sujet. Si les élèves de BEP contrôlent la scription de la forme infinitive en -er, on ne peut pas en dire autant de la production de la forme participiale en . En effet, la tendance des élèves de BEP est de produire la flexion marquée de l'accord en genre et en nombre du sujet quand la cible est . Ce phénomène concerne un tiers des graphies produites, ce qui nous amène à conclure que la forme participiale en n'est pas maitrisée dans le cas du non-accord, contrairement à la forme infinitive en -er. Tout se passe comme si les élèves n'arrivaient pas à contrôler cet accord. Cependant, cette tendance à l'accord avec le sujet ne favorise pas la sélection de lorsque la cible est -er.

La question est de savoir pourquoi cet accord est généralisé. Brissaud et al. (Reference Brissaud, Chevrot and Lefrançois2006) émettent l'hypothèse qu'un schéma général pluriel__ pluriel émergerait à partir de rencontres de type ils__ és, elles__ées. Ce schéma général transcenderait les catégories et expliquerait les erreurs d'accord entre le sujet et le participe passé employé avec l'auxiliaire avoir. Il se pourrait donc que les élèves de BEP appliquent ce cadre d'accord de gauche à droite de façon systématique quand ils sélectionnent la forme .

En définitive, les élèves de lycée professionnel se comportent ainsi: en ce qui concerne la scription des formes infinitives en -er, ils se situent sur un parcours d'apprentissage proche de celui des élèves de 5e; en revanche, pour ce qui est des formes participiales en , ils semblent en être restés à une tendance qui pouvait passer pour provisoire dans le scénario développemental de Brissaud et Chevrot (Reference Brissaud and Chevrot2011) – à savoir que la tendance à sélectionner une forme verbale en accordée en genre et en nombre avec le sujet diminue entre la 5e et 4e de collège. Les élèves de lycée professionnel ne construiraient en définitive pas de procédures différentes des apprentis scripteurs tout-venant. Ils connaissent un retard d'au moins quatre années scolaires et ils n'ont pas franchi l'étape de fin de 5e de collège, qui marque une amélioration quantitative et qualitative des performances. Ils sont en retard scolaire et ils le sont également en ce qui concerne l'acquisition de l'orthographe.

D'un point de vue didactique, nous tirons au moins deux pistes du présent travail.

1/ La première a trait à la formation des enseignants de lycée professionnel: il apparait à la fois nécessaire et précieux de fournir aux enseignants des éléments de type psycholinguistique sur les réussites des élèves (notamment sur les formes infinitives en -er) et de les informer des tendances fortes repérées dans la production des erreurs chez ces jeunes adultes en formation professionnelle.

2/ La deuxième piste concerne les pratiques de classe et le travail sur les conceptions des élèves: quand des erreurs sont à ce point récurrentes (par exemple, celles qui consistent à faire l'accord avec le sujet, quelle que soit la configuration syntaxique), la pratique des entretiens métagraphiques – fenêtre ouverte sur la manière dont les élèves se représentent le fonctionnement du système écrit –, ou encore la parole donnée à l'élève dans le cadre de la classe afin qu'il justifie ses choix graphiques, permettent de démonter avec les élèves les mécanismes qui provoquent des erreurs.

Finalement, si une zone du système orthographique est à ce point difficile qu'elle semble inaccessible à un grand nombre d'élèves «fragiles», ne conviendrait-il pas d'envisager sérieusement de la simplifier?

ANNEXE

Footnotes

1 L'homophonie dont nous traitons dans cet article est celle des formes se terminant par l'archiphonème /E/. Nous parlons d'archiphonème car l'opposition /e/ fermé et /ϵ/ ouvert est très instable et ainsi souvent neutralisée en français contemporain. Le phénomène est connu depuis longtemps et semble s'accentuer (Walter, Reference Walter1982; Lucci, Reference Lucci1983).

2 Nous remercions les 138 élèves de BEP du lycée professionnel Argouges de Grenoble et du lycée professionnel André Cuzin de Bron qui ont participé à l'expérimentation. Nous remercions également leurs enseignants pour le temps qu'ils ont consacré à la passation du test auprès de leurs élèves.

3 Les 48 phrases du test sont présentées en annexe de l'article.

4 Ce test a été construit à partir des fréquences données par Brulex, base de données lexicales informatisée pour le français écrit et parlé (Content, Mousty et Radeau, Reference Content, Mousty and Radeau1990).

5 L'expérimentation a été conduite en fin d'année scolaire auprès de 621 élèves sur six niveaux de scolarité (318 en France et 303 au Québec), de la troisième année (CE2 en France, 3e année du primaire au Québec) à la huitième année (classe de 4e du collège en France, 2e secondaire au Québec). Les élèves sont âgés de 8 à 15 ans et l'âge moyen des élèves est de 11 ans et 8 mois.

Liste des 48 phrases du test selon la cible du verbe ( ou -er)

References

RÉFÉRENCES

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Figure 0

Figure 1. Nombre total d'erreurs (sur 48).

Figure 1

Figure 2. Nombre moyen d'erreurs pour la cible (à gauche) et pour la cible -er (à droite) (sur 24).

Figure 2

Figure 3. Sélection de la flexion -er (sur 24) et (sur 24), dans les contextes où elle est erronée.

Figure 3

Figure 4. Sélection des flexions -ée, -és et -ées compatibles avec le genre et le nombre des sujets Capucine, les filles, les garçons (sur 18 pour chaque cible).

Figure 4

Tableau 1. Nombre de sujets testés par spécialité selon le lieu, la spécialité, le sexe et l'âge moyen (années, mois).

Figure 5

Tableau 2. Nombre moyen d'erreurs en BEP et en 6e appariés sur les variables testées.