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Réflexions épistémologiques sur l’illicéité résultant de l’incompatibilité du droit interne par rapport au droit international

Published online by Cambridge University Press:  30 September 2022

EMMANUEL SIMO*
Affiliation:
Emmanuel Simo, Docteur en droit public, Université de Yaoundé II, Cameroun (simo.fils@yahoo.com).

Résumé

La schématisation de l’obligation juridique sous la forme d’une obligation de comportement ou de résultat poursuit un objectif cognitif tendant à en déterminer l’objet et l’exécution. Toutefois, en droit international, la démarche informe très souvent une logique de catégorisation. Or, dans les rapports de systèmes, le droit interne n’est pas seulement l’objet de l’obligation internationale, il est dans certains contextes la condition de son exécution. Par ailleurs, du fait de l’insuffisant accommodement de la schématisation à l’ontologie de l’obligation internationale, les doctrines dualiste et civiliste qui inspirent ses cadres de pensée en obèrent la valeur heuristique. Après avoir relevé l’incidence de ce porte-à-faux sur la saisie phénoménologique de l’illicéité, l’auteur suggère d’envisager l’obligation juridique sous la forme d’une proposition hypothétique. Cette démarche permet, en amont, d’identifier la position logique du droit interne dans l’obligation internationale; en aval, de mettre en lumière la part que prend son incompatibilité dans la concrétisation de l’illicéité.

Abstract

Abstract

Conceptualizing a legal obligation as one of means or of result is a cognitive approach that aims to identify its object and scrutinize its performance. In international law, however, such an approach often informs a logic of categorization. Yet, when considering the relationship between systems of law, municipal law is not only the object of the international obligation but can also be, in certain contexts, the condition of its execution. Moreover, the failure of this conceptual approach, in keeping with the dualist and civilist schools of thought that have inspired it, to take sufficient account of the ontology of the international obligation undermines its heuristic value. After noting the impact of these shortcomings on the phenomenological understanding of wrongfulness, the author suggests considering a legal obligation in the form of a hypothetical proposition. This approach makes it possible to identify the role of municipal law in the logical structure of the international obligation and to highlight the part played by their incompatibility in the crystallization of wrongfulness.

Type
Articles
Copyright
© The Canadian Yearbook of International Law/Annuaire canadien de droit international 2022

Introduction

Les rapports entre le droit international et le droit interne de l’État constituent encore aujourd’hui l’une des questions lancinantes de la théorie du droit international.Footnote 1 Si la doctrine demeure grandement affairée au soin de schémas préposés à l’interprétation de l’articulation entre les deux systèmes juridiques, l’examen des questions que celle-ci soulève sur le terrain de la responsabilité internationale attire de manière soutenue l’attention d’une littérature spécialisée.Footnote 2 Or, si les constructions théoriques posent toutes l’hypothèse d’un “conflit” entre le droit interne et le droit international, sa problématisation et la manière d’envisager ses conséquences n’ont pas été suffisamment élucidées. En tant que “schéma d’interprétation,”Footnote 3 la norme rend seule possible la connaissance juridique d’un fait; partant, c’est elle qui donne de savoir si, comment et quand un comportement peut être caractérisé comme un fait illicite. Aussi, l’idée que l’étude de l’obligation juridique constitue le vestibule de l’étude de l’illicéité est sans doute l’une des conquêtes précieuses de la pensée juridique moderne.Footnote 4

On comprend dès lors sans grande difficulté que la doctrine dominante fasse de la distinction des obligations internationales à raison de leur objet, c’est-à-dire de la distinction entre les obligations de comportement et les obligations de résultat, la pierre de touche pour déterminer l’illicéité résultant de la manière d’être du droit interne de l’État. Il apparaît toutefois que le droit interne n’est pas seulement l’objet de l’obligation internationale, il est dans certaines situations la condition de son exécution. Par ailleurs, les conceptions doctrinales qui inspirent cette schématisation, révélant son insuffisant accommodement à l’ontologie de l’obligation internationale, ne permettent pas de rendre pleinement compte de la complexité de la matière.

À l’opposé, les présentes recherches suggèrent d’embrasser une analyse qui envisage l’obligation juridique comme la formalisation d’une proposition hypothétique. En s’attelant à dégager la position logique du droit interne en tant qu’objet et/ou condition d’exécution de l’obligation internationale, cette démarche met en lumière la part que prend son incompatibilité à la concrétisation de l’illicéité. La même démarche révèle enfin que c’est la position logique du droit interne qui oriente la sélection des critères de solution mobilisables et la compréhension des interactions que suscite la question de fond. Il en résulte donc l’élucidation tant de la structure normative de l’obligation internationale que de la structure phénoménologique de l’illicéité, ensemble le lien fonctionnel qui unit l’une à l’autre.

La mise en cause de la logique de catégorisation

Le but de cette première partie est de vérifier si, comme le suggère la doctrine dominante, la distinction des obligations à raison de leur objet constitue un schéma opératoire pour étudier la spécificité de l’illicéité résultant de l’incompatibilité de la norme interne en rapport avec l’obligation internationale. Il sera alors démontré que la logique de catégorisation et les cadres de pensée qui inspirent généralement cette distinction en droit international, ainsi que les données singulières que font voir les rapports de systèmes, étalent des contradictions et des insuffisances qui ne peuvent manquer d’entamer sa fonction logique. Aussi, après avoir relevé les incidences qui résultent de l’inadéquation de la schématisation dans la mobilisation qu’en fait la doctrine, on montrera combien il convient de la dépasser.

linadéquation de la schématisation

Une obligation qui exige de l’État d’aménager son ordre juridique (soit au point de vue spécifique, par l’adoption ou l’élimination d’une norme juridique; soit au point de vue global, en en assurant la conformité avec le droit international) définit un comportement spécifié par son caractère normatif. Il y aurait dès lors quelque objection à élever contre une démarche mettant en opposition la conclusion tirée de cette proposition avec la prémisse posée. Par ailleurs, le discours clivant de la doctrine quant à la saisie du comportement répréhensible de l’État fera accuser en d’autres circonstances un tel déphasage. Les césures provoquées par la schématisation ont donc un double ancrage épistémologique prescriptif et descriptif.Footnote 5

Sous l’angle de l’épistémologie prescriptive

La vérification de l’exécution d’une obligation internationale telle que décrite ci-dessus nécessite non pas que l’on contemple le comportement des organes de l’État en soi, il ne s’agit pas de s’intéresser à l’État strictement en tant que personne juridique; il s’agit beaucoup plus de considérer l’ordre juridique étatique en soi, de s’intéresser à l’État en tant qu’il est la personnification d’un ordre juridique.Footnote 6 Cette importante nuance dévoile ainsi sous un jour cru la réalité même des rapports de systèmes. En effet, c’est l’ordre juridique étatique qui est appelé à être scruté, soit particulièrement, à travers une norme spécifique, soit globalement, en tant que système de normes. Il faut apporter toutefois deux précisions en guise de corollaires. Il se peut que sans être l’objet d’une obligation internationale, le droit interne en conditionne la mise en œuvre; sans appeler à amender la proposition principale, une telle situation informera néanmoins la structure de l’illicite comme on aura à le montrer.Footnote 7 Il se peut aussi que la prise en compte du comportement des organes de l’État apparaisse pertinente en tant qu’expression d’une norme interne.Footnote 8

En droit international, la distinction entre les obligations de comportement et les obligations de résultat est traversée par une conception disparate redevable à sa transposition de la doctrine civiliste et à une construction dogmatique inspirée des préceptes du dualisme. Ainsi, d’une part, la distinction civiliste tend ontologiquement à l’identification de l’objet de l’obligation juridique et par ricochet à la détermination de sa réalisation ou violation,Footnote 9 et est grandement accueillie en ce sens en droit international;Footnote 10 d’autre part, la conception dualiste a été originellement pensée comme schéma explicatif de la séparation des ordres juridiques international et étatique,Footnote 11 et a été grandement sollicitée sur le terrain de la responsabilité internationale par Roberto Ago pour structurer une systématique du fait illicite ratio temporis. Footnote 12 Quel que soit néanmoins le pont d’accès utilisé pour introduire ce schéma dans la pensée juridique internationaliste, des inconséquences nées de sa pure transposition ou de son insuffisante conceptualisation s’accusent au regard de l’ontologie de l’obligation internationale tant dans sa substance que dans sa structure.

Des inconséquences révélées par la substance de l’obligation internationale

Nonobstant les attributs définis du point de vue cognitif pour tenter de déterminer l’objet de l’obligation, la substance de celle-ci, c’est-à-dire sa réalité permanente — laquelle sert précisément de support à tout attribut — porte fondamentalement sur l’ordre juridique étatique. Or, certaines postures doctrinales tendent à méconnaître ce principe cardinal du rapport liant la substance à ses attributs ou prédicats.

Dans la doctrine d’inspiration dualiste, le principe qui structure la distinction entre les obligations de comportement et les obligations de résultat est relatif au degré de liberté que le droit international accorde aux États quant à leur exécution, en tant qu’il se fait plus intrusif en déterminant spécifiquement un comportement exigé ou, en tant qu’il l’est moins ou pas du tout en fixant juste le cap à atteindre et en laissant l’État libre dans le choix des moyens devant y concourir.Footnote 13 On considère ainsi, selon une conception du reste différente de l’approche originelle promue par ses fondateurs,Footnote 14 que les conventions de “droit uniforme” consacrent des obligations de comportement déterminé, puisqu’elles ne se contentent pas d’exiger une activité législative mais fixent en plus le contenu exact de la législation exigée;Footnote 15 alors que toute norme interne non expressément visée par une obligation de résultat déterminé, ne peut engendrer la violation de celle-ci par sa simple existence.Footnote 16 Partant, dans le premier cas de figure, il faudra vérifier si le comportement requis est conforme au comportement adopté; dans le second, c’est l’évaluation de l’atteinte du résultat par rapport à celui fixé dont il sera question.Footnote 17 Devant une telle schématisation, la déroute vient de ce que, en se focalisant non pas sur l’état de l’ordre juridique mais sur le comportement des organes de l’État, il se peut que même sans l’adoption d’une nouvelle norme, l’ordre juridique soit déjà en état de répondre aux attentes exprimées par l’obligation internationale;Footnote 18 alors que, en sens inverse, l’adoption d’une norme juridique, même non expressément requise, peut concrétiser ipso jure ipso facto la violation d’une obligation internationale.Footnote 19

Dans le courant doctrinal civiliste, la même déviation est souvent perceptible. Ici, le principe qui structure la distinction des obligations à raison de leur objet est lié au caractère aléatoire ou certain de sa réalisation. Parti de ce schéma, certains auteurs considèrent qu’une obligation qui exige l’adoption d’une norme interne sans l’assortir d’un délai ou qui exige en des termes généraux la mise en conformité du droit interne, est une obligation de comportement; alors qu’une obligation qui réclame une norme interne non pas pour régir la sphère des relations interindividuelles mais pour s’appliquer à l’action des organes de l’État est une obligation de résultat.Footnote 20 À partir de cette prémisse, on regarde certaines obligations spécifiques comme de pures obligations de comportement, et certaines obligations générales comme des obligations de due diligence. Footnote 21 Il suffit ici de rappeler qu’une obligation qui impose de créer une norme ou une institution juridiques, ou d’assurer leur conformité par rapport au droit international, nécessite qu’on évalue non pas le comportement de l’État dans le chef de ses organes, mais la situation de son ordre juridique.Footnote 22

Des inconséquences révélées par la structure de l’obligation internationale

Deux postures doctrinales rendent compte de la disharmonie de la schématisation avec la structure de l’obligation internationale. Selon une première manière de voir, la nature coutumière de l’obligation internationale regimbe à l’application de la schématisation. Il apparaît que, en reposant initialement la distinction sur un principe normatif, correspondant respectivement pour le dualisme à la précision du moyen d’exécution de l’obligation et, pour la théorie civiliste, à la précision du résultat à atteindre par l’obligation, les deux conceptions en font finalement un principe analytique qui se ramène de part et d’autre à la précision de l’énoncé prescriptif. Pour préserver l’entreprise de catégorisation des obligations, la doctrine est alors amenée à exclure les obligations coutumières de sa grille d’analyse. Évoquée en son temps de manière sibylline par Roberto Ago,Footnote 23 cette démarche, ontologiquement dictée par les préceptes de la doctrine dualiste,Footnote 24 a été embrassée par d’autres auteurs.Footnote 25

Il faut pourtant reconnaître que la pratique ne conforte pas cette posture théorique. Invitée dans l’affaire de l’Échange des populations grecques et turques à se prononcer sur l’article 18 de la Convention VI de Lausanne du 30 janvier 1923 qui dispose que “[l]es Hautes Parties contractantes s’engagent à apporter à leurs législations respectives les modifications qui seraient nécessaires pour assurer l’exécution de la présente Convention,” la Cour permanente de Justice internationale faisait noter que cette disposition “ne fait que mettre en relief un principe allant de soi, d’après lequel un État qui a valablement contracté des obligations internationales est tenu d’apporter à sa législation les modifications nécessaires pour assurer l’exécution des engagements pris.”Footnote 26 La question de la source coutumière d’une obligation imposant à l’État d’apporter quelque aménagement à son ordre juridique s’est aussi posée récemment devant la Cour europénne des droits de l’homme (CEDH) à l’occasion de l’examen de l’affaire Naït-Liman c Suisse. Dénonçant la violation de son droit d’accès à un tribunal tel que consacré par l’article 6, paragraphe 1 de la Convention européenne des droits de l’homme, le requérant faisait grief aux tribunaux suisses d’avoir décliné leur compétence pour connaître du fond de son action civile dirigée contre la Tunisie et un certain A.K., responsables, selon lui, des actes de torture qui lui auraient été infligés sur le territoire tunisien.Footnote 27 Eu égard à ce que le droit d’accès à un tribunal n’est pas absolu et se prête à des limitations étatiques implicitement admises, dès lors que l’État jouit en la matière d’une certaine marge d’appréciation, la cour a dit qu’elle devait, pour déterminer l’étendue de la marge d’appréciation dont jouissaient en l’espèce les autorités judiciaires suisses, examiner si ces autorités “étaient juridiquement tenues d’ouvrir leur for au requérant, en vertu soit d’une compétence universelle civile pour torture, soit du for de nécessité.”Footnote 28 Elle étudia notamment le droit comparé des États afin de déceler l’existence d’une coutume internationale. Elle conclura respectivement que: “les États qui reconnaissent une compétence universelle en matière civile opérant de manière autonome pour des actes de torture constituent à l’heure actuelle l’exception. Malgré le fait que la pratique des États évolue, sa densité à ce jour n’est pas suffisante pour pouvoir y déceler l’émergence, voire la consolidation d’une coutume internationale qui aurait obligé les juridictions suisses à se déclarer compétentes pour connaître de l’action du requérant”Footnote 29 et “du fait que le for de nécessité n[e soit] pas généralement accepté par les États, l’on ne saurait conclure à l’existence d’une coutume internationale consacrant la notion de for de nécessité.”Footnote 30 Ainsi, si cet exercice s’est conclu négativement quant à l’existence d’une coutume internationale consacrant chacune des deux institutions examinées par la cour, il confirme sur le principe que la pratique tient pleinement compte du droit coutumier lorsqu’elle est amenée à connaître des contestations ayant trait à l’aménagement de l’ordre juridique étatique.Footnote 31

Selon une seconde manière de voir, la dualité prédicative de certaines obligations internationales résiste davantage à l’application du schéma. En effet, en proposant une logique de catégorisation des obligations en deux files hermétiques, les auteurs excluent nécessairement de la grille d’analyse les obligations qui sont prédiquées à la fois comme obligation de comportement et de résultat, puisque déterminant tant l’objectif à atteindre par l’État que le comportement ou les moyens à adopter. Or, si, à titre exemplatif, l’obligation de négocier est habituellement classifiée comme une obligation de comportementFootnote 32 et l’obligation de conclure comme une obligation de résultat,Footnote 33 elles peuvent toutefois être aménagées sous une forme unifiée. Ayant constaté, dans son avis consultatif relatif à la Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, que la communauté internationale demeure divisée quant au statut juridique d’une arme aussi meurtrière que l’arme nucléaire et estimé qu’il s’avérait important “de mettre fin à cet état de choses,” la Cour internationale de Justice (CIJ) a affirmé que “le désarmement nucléaire complet promis de longue date se présente comme le moyen privilégié de parvenir à ce résultat.Footnote 34 Interprétant l’obligation de négocier de bonne foi un désarmement nucléaire consacrée par l’article VI du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, la cour fera noter que “[l]a portée juridique de l’obligation considérée dépasse celle d’une simple obligation de comportement; l’obligation en cause ici est celle de parvenir à un résultat précis — le désarmement nucléaire dans tous ses aspects — par l’adoption d’un comportement déterminé, à savoir la poursuite de bonne foi de négociations en la matière.”Footnote 35 Il s’agit alors, ainsi que la cour le confessera ratio scripta, d’une “double obligation de négocier et de conclure.” Aussi, sur le terrain particulier de la présente étude, peut-on remarquer que “l’obligation de protéger le droit à la vie par la loi” ou l’“obligation positive de mettre en place et d’appliquer de manière effective un système réprimant toutes les formes de violence familiale et offrant aux victimes des garanties suffisantes,” respectivement consacréeFootnote 36 ou interprétéeFootnote 37 aux termes des instruments de protection des droits de l’homme, déterminent à la fois l’objectif imparti aux États parties, à savoir la protection d’un droit humain, et l’un des moyens jugés nécessaires à sa réalisation, à savoir l’aménagement d’un cadre législatif ou réglementaire approprié.Footnote 38 Devant un tel ficelage, si l’absence de la législation peut handicaper la mise en œuvre de l’obligation, elle n’emporte pas par elle-même sa violation définitive.Footnote 39

Sous l’angle de l’épistémologie descriptive

Lorsqu’elle mobilise la schématisation dans l’étude de l’illicéité découlant de l’incompatibilité du droit interne par rapport à l’obligation internationale, la doctrine militante s’éloigne elle-même de sa fonctionnalité. L’écart du schéma par rapport à sa fonction de prédilection et le renfort des schémas tiers sont explicatifs de cette tournure.

La dysfonction du schéma analytique de métier

Ayant transformé un schéma normatif, parce que reflet de l’ontologie de la norme juridique, de son stade initial de principe distinctif des obligations à raison de leur objet pour celui d’un principe analytique, la doctrine franchit souvent le stade ultime; elle fait d’un schéma de vérification de l’exécution des obligations, un schéma de classification, de catégorisation. Ainsi, dans sa thèse, Hélène Raspail soutient qu’elle entreprendra sa “propre classification des obligations internationales de l’État, selon leur objet, afin de déterminer si elles sont, ou non, susceptibles d’être violées du fait du droit interne.”Footnote 40 Affinant le même schéma, Carlo Santulli affirme, face à l’hypothèse du contentieux nécessitant l’épuisement des recours internes, qu’il entend “opposer systématiquement obligations ‘non facultatives’ et obligations ‘facultatives’ uniquement sous l’angle de la nécessité qu’engendrent ces dernières de mettre l’État en mesure de rattraper dans son ordre juridique le manquement qu’annonce un premier produit légal étatique,”Footnote 41 lesquelles obligations correspondent respectivement, selon l’auteur, “aux obligations de comportement déterminé de Ago” et “aux obligations de résultat déterminé de Ago.”Footnote 42 On fera remarquer néanmoins que l’auteur s’est gardé de faire de précision similaire s’agissant de l’hypothèse où la condition de l’épuisement des recours internes n’est pas de mise. Usant de la même schématisation, Yves Nouvel défend la nécessité, dans son étude, “de classer les obligations en fonction du degré de conformité qu’elles imposent à l’ordre juridique interne.”Footnote 43

Si on considère que la distinction entre obligation de comportement et obligation de résultat remplit par principe une fonction logique qui sert à prédiquer l’objet d’une obligation juridique pour renseigner par la suite les circonstances de son (in)exécution, on s’étonnera de sa reconduction comme schéma explicatif face aux données spécifiques servies par les rapports de systèmes. Puisque, comme on s’en est aperçu, une telle entreprise oblige à une vue essentiellement partielle compte tenu des contingences dont le phénomène juridique se nourrit en cette matière. Le droit interne pouvant être objet ou/et condition d’exécution de l’obligation internationale. Mais aussi de la complexité de cette dernière. L’obligation internationale pouvant être prédiquée comme obligation de comportement ou/et de résultat. Sans oublier, on s’en est également aperçu, les déviations générées par le fait de recourir à un outil innervé par des rationalités en totale inadéquation avec l’explication des résultats.

La digression des schémas analytiques d’appoint

Il arrive encore que des auteurs, censés illustrer la fonctionnalité de la schématisation, recourent plutôt à d’autres fondations pour asseoir la démonstration. Or, leur caractère digressif dissout finalement l’intégrité ou la cohérence de la schématisation et, par voie de conséquence, sa vertu heuristique. Le recours au jus cogens l’illustre fort à propos. Du côté du courant de pensée civiliste, on estime que la valeur de cette norme impérative peut avoir un effet transformateur au point de vue de la structure des obligations internationales, elle ferait passer une obligation de la catégorie de comportement à celle de résultat. Il est alors soutenu que “[d]ès lors qu’un instrument international tend à l’interdiction d’un comportement particulièrement grave, tel un crime de droit international ou la violation, par les personnes privées, de règles de jus cogens, l’obligation de comportement normatif à la charge de l’État doit être considérée comme stricte.Footnote 44 Du côté du courant de pensée dualiste, le même effet est mis en évidence, on affirme qu’une norme de jus cogens, contrairement à une norme ordinaire est de beaucoup plus intrusive dans l’ordre juridique interne. On en veut pour preuve, au point de vue de la structure de l’illicite, ceci que “la simple promulgation d’une loi qui, suite à l’interprétation de la norme primaire ordinaire, ne viole pas per se une obligation de résultat, enfreint ipso jure l’obligation contenue dans [la] norme de jus cogens.Footnote 45

Le reproche majeur que l’on pourrait faire à cette manière de voir est de ne pas davantage argumenter, d’un point de vue pratique, sur l’incidence qu’elle retire de l’autorité du jus cogens sur le terrain des présentes analyses. Or, sur ce terrain précisément, et pour au moins deux raisons, on ne peut pas dire que res ipsa loquitur. D’une part, et comme l’a fort bien relevé la CIJ, la question de l’appartenance d’une règle au jus cogens a trait à la “nature juridique de cette règle.”Footnote 46 Il faut donc, au-delà de l’affirmation de principe, montrer comment cette norme interagit avec l’objet de l’obligation internationale sur lequel la distinction doit normalement s’appesantir. D’autre part, la protection des valeurs essentielles ou fondamentales poursuivie par le jus cogens n’autorise pas davantage d’étendre sa fonction outre-mesure. C’est ainsi que la juridiction mondiale a réitéré, s’agissant par exemple des rapports entre les normes impératives du droit international général et l’établissement de sa compétence, que “le fait qu’un différend porte sur le respect d’une norme possédant un tel caractère […] ne saurait en lui-même fonder la compétence de la Cour pour en connaître. En vertu du Statut de la Cour, cette compétence est toujours fondée sur le consentement des parties.”Footnote 47

En réalité, tous ces atermoiements révèlent une chose: c’est qu’il est impossible, d’un point de vue systématique, de vouloir faire expliquer la typologie des états dans lesquels le droit interne entre en conflit avec le droit international par une typologie de l’objet de l’obligation internationale. Cette conclusion appelle sans doute à réfléchir sur une démarche intellectuelle différente, susceptible d’offrir plus d’accointances avec la spécificité de la matière.

le dépassement de la schématisation

Pour sous-tendre sérieusement l’option d’une nouvelle démarche intellectuelle, il faut apporter tour à tour des réponses convenables aux préoccupations en sourdine dont les difficultés soulevées ci-dessus ne sont que l’excroissance, à travers une élucidation épistémologique et de la question fondamentale et de la démarche discursive éveillée par son traitement.

La question fondamentale

On doit convenir qu’en cette matière la question fondamentale que la doctrine est appelée à examiner, et à l’objectif de laquelle elle déploie ses meilleurs soins à travers les constructions théoriques proposées, ne consiste pas juste à se demander si le droit interne peut constituer un fait internationalement illicite — certainement qu’il le peut comme tout autre fait— mais est celle de savoir: le droit interne étant l’objet de l’obligation internationale ou la condition de son exécution, dans quelle mesure la manière d’être de ce droit détermine la constitution d’un fait internationalement illicite? Si la doctrine s’affaire à considérer la première formulation,Footnote 48 elle sera portée à envisager les hypothèses dans lesquelles le droit interne peut être à l’origine de la responsabilité internationale et d’en rendre compte à travers une typologie des obligations internationales susceptibles d’être violées en pareil cas.Footnote 49

Or, une telle démarche a d’ordinaire comme incidence de désunir l’hypothèse juridique que consacre l’obligation internationale avec la conclusion inférée de la confrontation des faits analysés. Ainsi, il n’est pas rare que des auteurs qui, ne s’étant pas mis en état de considérer le droit interne différemment en tant qu’il serait l’objet d’une obligation internationale ou le moyen de son exécution, arrivent à des conclusions uniformes, ne distinguant pas les situations dans lesquelles l’incompatibilité du droit interne constitue seulement la source incidente de la responsabilité internationale de celles où elle en serait la source principale.Footnote 50

Aussi, la démarche invite-t-elle à retourner à l’ontologie même de l’obligation juridique qui est conçue sous la forme logique d’une proposition hypothétique pour vérifier si la condition qu’elle pose a été exécutée, c’est-à-dire impliquer la conséquence qu’elle engendre. En déterminant préalablement la position logique du droit interne, il faut ensuite s’attacher à étudier la structure propre de l’illicéité, en mettant alors en lumière la part que prend l’incompatibilité du droit interne vis-à-vis de l’obligation internationale à sa concrétisation.

La démarche discursive

Au cours de l’examen des divergences de vues renvoyées par les travaux doctrinaux, une donnée a été constante: le souci que peut générer l’imprécision du contenu de l’obligation internationale. Le problème majeur sur la question résulte de ce que, l’on s’est un peu trop laissé convaincre par l’idée que cette imprécision n’est affaire que de la seule obligation de comportement et que le résultat que fixe une obligation éponyme est toujours aussi clairement défini. Cette manière de voir, peut-être évidente en droit interne, a été reproduite servilement en droit international sous l’influence de la pensée de Paul Reuter.Footnote 51 Le souci qu’éveille l’énoncé de l’obligation internationale se rajoute ainsi au besoin de la détermination de l’illicéité, préoccupations sur lesquelles la schématisation entend apporter des réponses respectives. Or, ces préoccupations étant clairement balisées, et s’étant approprié la mesure du jugement hypothétique, il faut plutôt s’atteler à systématiser les critères qui ont précisément pour fonction d’aider à déterminer la violation d’une obligation internationale du fait du droit interne eu égard à sa position logique.

Il convient alors de faire des précisions fondamentales à ce sujet. D’abord, la démarche ne se résume pas à choisir de manière exclusive entre les deux critères intrinsèques de la norme interne, à savoir entre l’existence de la législation/réglementation et son application/exécution.Footnote 52 Ensuite, la démarche ne se limite pas à ces critères, elle appelle en d’autres circonstances la mobilisation des critères extrinsèques pouvant par exemple être inférés de l’ordre juridique étatique lui-même.Footnote 53 Enfin, le recours aux critères sous-jacents aux critères intrinsèques en vue de l’explicitation de ceux-ci par ceux-là, à savoir par exemple la distinction entre pouvoir discrétionnaire et compétence liée,Footnote 54 n’opère pas à sens unique. Leur mobilisation doit être flexible, oscillant entre prise en compte à titre principalFootnote 55 ou dérogatoire.Footnote 56

Il faut alors convenir qu’aucune règle générale, ainsi qu’on peut s’en apercevoir, ne peut être formulée s’agissant du caractère opératoire de ces critères.Footnote 57 L’idée maîtresse est dès lors que les critères appelés à orienter l’analyse en vue de déterminer la constitution de l’illicéité ne valent pas en eux-mêmes, ils ne sont que l’outil prédicatif du jugement hypothétique que donne de formuler l’obligation internationale. Il faut ainsi, eu égard au problème de fond précisé ci-dessus, tenir grand cas, à la fois de la position logique du droit interne à l’égard de l’obligation internationale et de sa manière d’être, révélée à travers les divers critères rappelés ci-dessus. Tout juste, est-il possible de soutenir que la détermination de la position logique du droit interne informe la mobilisation des critères caractéristiques de sa manière d’être, ensemble elles substantifient le raisonnement sur la constatation de l’illicéité. En cela, se justifie pleinement l’intérêt d’approcher cette matière par le biais d’une logique propositionnelle, dont la flexibilité analytique contraste avec le rigoureux formalisme accompagnant la catégorisation des obligations internationales à raison de leur objet, lequel regimbe par cela même à maints égards aux sinuosités de la réalité phénoménologique ici considérée.

Telles sont problématisées à la lumière des rapports de systèmesFootnote 58 les recherches sur le fait internationalement illicite. On doit désormais s’évertuer à en formaliser les principes et les conséquences respectives.

La mise en valeur de la logique de proposition

Les données que charrient les rapports de systèmes entre le droit international et le droit interne sur le terrain de l’illicéité causée par les normes du second à l’égard de celles du premier, informent l’existence de deux principes ou propositions fondamentales. D’une part, selon que le droit interne constitue l’objet ou la condition d’exécution de l’obligation internationale, son incompatibilité génère uniquement la responsabilité internationale de l’État: c’est la proposition hypothétique simple. D’autre part, selon que le droit interne constitue l’objet d’une première obligation et, en tant que tel, la condition d’exécution d’une seconde obligation, son incompatibilité génère doublement la responsabilité internationale de l’État: c’est la proposition hypothétique complexe.Footnote 59

la proposition hypothétique simple: le droit interne comme objet ou condition dexécution de lobligation internationale

La proposition hypothétique simple est substantifiée par deux jugements hypothétiques différents. Lorsque le droit interne est l’objet de l’obligation internationale, son incompatibilité constitue le fait générateur principal de la responsabilité internationale de l’État; lorsqu’il se présente par contre comme la condition d’exécution de l’obligation internationale, son incompatibilité constitue le fait générateur incident de la responsabilité internationale de l’État. Aussi, la consistance des critères à mobiliser pour déterminer la constitution de l’illicéité se ressentira de la position logique occupée par le droit interne.

L’incompatibilité du droit interne par rapport à l’obligation internationale comme fait générateur principal de la responsabilité internationale de l’État

Lorsqu’une obligation internationale prescrit à l’État l’adoption ou l’élimination d’une norme interne, l’incompatibilité de celle-ci, contemplée en soi ou à travers l’ordre juridique, constitue per se un fait internationalement illicite. Il sera démontré que du fait que l’objet de l’obligation internationale porte sur la norme interne emporte comme incidence que la constatation de la constitution de l’illicéité doit se déduire, au plan du principe, des seuls critères intrinsèques de la norme interne. Il s’agit en pareil cas de dire si l’illicéité est constituée par la seule existence ou absence de la norme interne ou par son application ou exécution. On s’attèlera dans un premier temps à mettre en lumière la fonction de chacun de ces deux critères avant de soulever l’hypothèse particulière où leur combinaison est nécessaire pour adresser la question posée.

L’analyse fonctionnelle

La fonction de détermination de l’illicéité inférée des propriétés de la norme interne tient compte, dans l’hypothèse où l’objet de l’obligation internationale porte effectivement sur la norme interne, autant de l’existence ou absence de celle-ci que de son application ou exécution. Lorsque le comportement imposé à l’État ne laisse place à aucun doute quant à la consistance de la norme interne à adopter ou à éliminer, ou quant à sa disponibilité, l’édiction et le maintien en vigueur d’une norme contraire ou l’absence de la norme voulue emportent en soi violation de l’obligation internationale. Ainsi, le fait de ne pas adopter, dans le délai imparti, les dispositions législatives, réglementaires ou administratives nécessaires pour se conformer notamment au droit communautaire,Footnote 60 ou au droit de l’Organisation mondiale du commerce (OMC)Footnote 61 est internationalement illicite. De même, le fait de ne pas créer, de créer un organe national ou de le rendre non conforme aux critères définis par l’obligation internationale constitue un fait internationalement illicite.Footnote 62 Enfin, le fait d’adopter une norme non conforme aux prévisions de l’obligation internationale amène à une conclusion similaire.Footnote 63 Ces conclusions valent également pour une norme individuelle.Footnote 64

À l’opposé, lorsque l’objet de l’obligation internationale laisse en suspens certains détails tels que la disponibilité de la norme interne, il se peut alors que seule son application s’impose comme critère déterminant. Ainsi, à la différence notamment de la Convention contre la torture Footnote 65 au sujet de laquelle la CIJFootnote 66 et le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY)Footnote 67 ont estimé que l’obligation d’incrimination qu’elle consacre doit être mise en œuvre par l’État dès qu’il est lié par la convention, l’action requise de l’État en direction de son droit interne au titre de plusieurs instruments juridiques internationaux n’est souvent pas enfermée dans des délais prédéfinis.Footnote 68 De sorte que c’est la circonstance de la mise en œuvre du droit interne qui cristallisera l’inexécution de l’obligation internationale. Toutefois, si le défaut de l’ordre juridique ne peut être rapporté en pareille hypothèse qu’au seuil de la survenance d’un événement venant manifester le manque de proactivité de l’État, cette circonstance n’invite nullement à se demander si les autorités de l’État ont fait preuve de diligence dans l’exercice de leur pouvoir normatif, mais à constater tout simplement la non-adoption de la norme attendue ou la non-élimination de celle proscrite. Par comparaison, la différence entre cette proposition et celle qu’on examinera ci-dessous — la norme interne envisagée comme condition d’exécution de l’obligation internationale — tient à ce que le droit interne est ici l’objet spécifique d’une obligation internationale. Elles partagent toutes deux cependant une filiation conceptuelle par le fait que c’est un événement extérieur qui vient mettre en exergue les déficiences de l’ordre juridique interne. Sans toujours clairement cerner cette nuance,Footnote 69 des auteurs interprètent l’obligation de l’État ici considérée sous l’angle du principe de due diligence. Footnote 70 Or, s’agissant d’une obligation imposant un comportement normatif à l’État, sa vérification n’invite pas, comme on l’a déjà fait remarquer, à apprécier le comportement factuel de l’État, mais son ordre juridique pour faire constater sa conformité ou non. En effet, lorsque l’obligation a pour objet de prévenir un événement quelconque pouvant fonder comme telle la nécessité d’adapter le droit interne, on ne peut l’assimiler à l’obligation de mettre en conformité le droit interne laquelle permettrait ce faisant de prévenir la survenance d’un événement. On ne peut transposer pour le cas de la seconde, le schéma mis au point pour interpréter la première.

L’analyse combinatoire

Si la fonction des critères intrinsèques de la norme interne est pensée d’ordinaire dans une logique exclusive, l’existence d’une catégorie d’obligations avec un objet doublement structuré impose en pareil cas de les mobiliser de manière alternative. Un exemple très illustratif peut être fourni à travers l’interprétation que la Cour interaméricaine des droits de l’homme (CIADH) donne de l’obligation de créer un recours effectif et d’en assurer la mise en œuvre par les autorités compétentes telle que déduite de l’article 25 de la Convention américaine relative aux des droits de l’homme. Footnote 71 La cour estime à propos, d’une part, que “[t]he inexistence of an effective remedy for the violations of the rights recognized in the Convention entails a violation of the Convention by the State Party in which this situation occurs” et, d’autre part, que “the State must also take positive measures to ensure that such remedies are effective to decide whether there has been a human rights violation and, eventually, to provide redress.”Footnote 72 Ainsi, si l’absence d’un recours conforme peut emporter seule violation de l’obligation, l’illicéité peut aussi ne résulter que de la mise en œuvre du recours. Aussi, est-il apparu que la cour tienne l’illicéité pour constituée autant par la seule absence du recours qu’à l’occasion de sa mise en œuvre.Footnote 73 De même, et exceptionnellement, la simple existence du recours peut suffire à justifier l’exécution de l’obligation, lorsque le requérant n’en aurait pas provoqué sa mise en œuvre par devant les autorités compétentes.Footnote 74 Cette interprétation peut être rapprochée de la disposition similaire de l’article 13 de la Convention européenne des droits de l’homme. Footnote 75 La CEDH affirme à ce sujet que “The scope of the Contracting States’ obligations under Article 13 varies depending on the nature of the applicant’s complaint; however, the remedy required by Article 13 must be ‘effective’ in practice as well as in law.Footnote 76

On remarquera que cette hypothèse est toute différente de celle où l’obligation internationale détermine en même temps que l’objectif à atteindre, les moyens notamment législatifs de sa réalisation.Footnote 77 Malgré cette double détermination, le droit interne demeure seulement la condition d’exécution de l’obligation internationale. Cette dernière hypothèse rentre ainsi dans la proposition suivante sur laquelle on doit maintenant s’appesantir.

L’incompatibilité du droit interne par rapport à l’obligation internationale comme fait générateur incident de la responsabilité internationale de l’État

Lorsqu’une obligation internationale n’impose pas à l’État, mais implique de sa part, l’adoption ou l’élimination d’une norme interne, l’incompatibilité de celle-ci, contemplée en soi ou à travers l’ordre juridique, constituera seulement la catalyse du fait illicite.Footnote 78 Il sera démontré que du fait que l’objet de l’obligation ne porte pas sur la norme interne emporte comme incidence que si la constatation de la constitution de l’illicéité peut se satisfaire des seuls critères intrinsèques inférés de la norme interne, elle exige par ailleurs d’avoir recours à des critères extrinsèques pour tenir compte des circonstances qu’implique l’exécution de l’obligation. Ainsi, en plus de dire ici également si l’illicéité est constituée par la seule existence ou absence de la norme interne ou par son application ou exécution, il faut voir jusqu’à quel point la réponse à cette préoccupation est conditionnée par la mobilisation supplémentaire des critères extrinsèques.

L’analyse fonctionnelle

Même non imposée par l’obligation internationale, la simple existence d’une norme interne peut concrétiser un fait illicite. Jadis renié dans son principe, ce critère tient sa place aux côtés du critère de l’application de loin le plus représentatif de la proposition. Devant l’obligation internationale d’enquêter et de poursuivre les responsables de crimes internationaux par exemple, l’incompatibilité d’une loi d’amnistie inconditionnelle ne constitue pas la source autonome de la responsabilité internationale de l’État. Une telle loi ne s’apparente non plus à une ratification tacite par l’État des faits de personnes privées comme donnaient à l’entendre la doctrineFootnote 79 et la pratiqueFootnote 80 classiques. Mais, puisque cette loi est un empêchement dirimant à l’exécution de l’obligation internationale mise à la charge de l’État, elle doit être regardée simplement comme la catalyse du fait internationalement illicite.Footnote 81 De même, en matière de liberté d’expression, la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP) a considéré dans l’affaire Lohé Issa Konaté c Burkina Faso que “l’État défendeur a[vait] violé l’article 9 de la Charte, l’article 19 du Pacte et l’article 66 du Traité révisé de la CEDEAO du fait de l’existence dans sa législation de sanctions privatives de liberté en matière de diffamation.”Footnote 82 Enfin, la Cour de justice de l’Union européenne a estimé que “le caractère général” de la condition prévue à l’article 242, paragraphe 1, du Code [belge] des impôts sur le revenu 1992,Footnote 83 refusant la déduction des rentes alimentaires ou des capitaux tenant lieu de telles rentes et des rentes complémentaires du revenu imposable aux débirentiers non-résidents de Belgique et y percevant moins de 75 pour cent de leurs revenus professionnels qui ne peuvent pas bénéficier de la même déduction dans leur État membre de résidence en raison du faible montant de leurs revenus imposables dans cet État, était incompatible avec la liberté de circulation des travailleursFootnote 84 en vertu de l’article 45 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne Footnote 85 et de l’article 28 de l’Accord sur l’Espace économique européen.Footnote 86Ainsi, dans ces différents cas de figure, l’édiction de la norme interne compromettante cristallise ipso jure ipso facto l’illicéité.

De son côté, le besoin d’application d’une norme interne concrétisera l’effet de son absence sur l’exécution de l’obligation internationale; en d’autres circonstances, c’est son application effective qui révélera des défaillances inhérentes à la norme ou au système juridique dans son ensemble. S’agissant de la première branche de cette proposition, il apparaît qu’une carence normativeFootnote 87 ou institutionnelle, cette dernière pouvant prendre la forme organiqueFootnote 88 ou fonctionnelle,Footnote 89 peut handicaper l’exécution d’une obligation internationale. Ainsi, bien que la CIJ ait estimé dans l’affaire des Questions concernant l’obligation de poursuivre ou d’extrader que l’obligation d’incriminer la torture et de pourvoir ses organes judiciaires des compétences répressives s’imposait à l’État partie dès la ratification de l’acte conventionnel, et ayant constaté que le Sénégal avait manqué à cette obligation, elle va pour statuer sur la violation de l’obligation d’enquêter prendre en compte la date à laquelle une plainte avait été déposée au Sénégal contre M. Hissène Habré. Selon la cour, “les autorités sénégalaises n’ont pas immédiatement engagé une enquête préliminaire dès le moment où elles ont eu des raisons de soupçonner M. Habré, qui se trouvait sur leur territoire, d’être responsable d’actes de torture. Ce moment se situe, au plus tard, à la date du dépôt de la première plainte contre l’intéressé en 2000.Footnote 90 Comme on le sait, les autorités de ce pays ne pouvaient agir, et se sont d’ailleurs déclarées incompétentes, du fait de l’absence d’une législation d’habilitation appropriée.Footnote 91

L’application d’une norme interne concrétise ses défaillances intrinsèques. Pour mettre en évidence l’incompatibilité de la norme interne en pareille circonstance, des points de repères peuvent être sollicités comme étalon de valeur à l’instar des principes de “qualité” et de “nécessité” de la loi dégagés, comme c’est par exemple le cas, par les juridictions officiant en matière de protection des droits de l’homme. Ces principes permettent de relever le caractère vague ou imprécis de la législation,Footnote 92 le “vide juridique”Footnote 93 ou le silence de la loi,Footnote 94 l’inadéquation de la nature d’une réglementation,Footnote 95 l’illégitimité de son but ou enfin son manque de proportionnalité.Footnote 96 La démarche est à l’identique de celle employée en droit communautaire.Footnote 97

L’application d’une norme interne concrétise des défaillances extrinsèques, inhérentes au système juridique même. Dans l’affaire LaGrand, la CIJ devait conclure à la violation du paragraphe 2 de l’article 36 de la Convention de Vienne sur les relations consulaires Footnote 98 du fait de la règle de la “carence procédurale” qui ne permettait pas un réexamen du dossier judiciaire par les tribunaux américains, compte tenu de la violation initiale de l’obligation de notifier aux autorités consulaires allemandes l’incarcération des frères LaGrand. Il fallait selon la cour établir une “distinction entre cette règle en tant que telle et son application en l’espèce.” La juridiction mondiale affirmera alors qu’“[e]n elle-même, cette règle ne viole pas l’article 36 de la Convention de Vienne. Le problème se pose lorsque la règle de la carence procédurale ne permet pas à une personne détenue de faire recours contre sa condamnation et sa peine en prétendant, sur la base du paragraphe 1 de l’article 36 de la convention, que les autorités nationales compétentes ne se seraient pas acquittées de leur obligation d’informer ‘sans retard’ les autorités consulaires compétentes, empêchant par là même cette personne de solliciter et d’obtenir l’assistance consulaire de l’État d’envoi.”Footnote 99 Le raisonnement a été repris tel quel dans l’affaire Avena et autres ressortissants mexicains. Footnote 100 Dans l’affaire Molla Sali c Grèce, c’est l’existence d’un double système juridique inspirant le droit des successions grec qui était à la base du litige caractérisé comme suit par la CIJ: “[L]a question qui se pose est avant tout celle de l’existence d’une différence de traitement assimilable à une discrimination par rapport à l’application du droit des successions, tel qu’énoncé dans le code civil, aux personnes cherchant à se prévaloir d’un testament dont l’auteur n’est pas de confession musulmane.”Footnote 101 La cour était ainsi, selon ses propres termes, “appelée à dire si la différence de traitement litigieuse, qui prenait sa source dans l’application du droit interne, avait une justification objective et raisonnable.”Footnote 102 Elle conclura que tel n’était pas le cas et qu’il y avait violation de l’article 14 de la Convention européenne des droits de l’homme combiné avec l’article 1 du Protocole n° 1 à la convention.Footnote 103

L’analyse combinatoire

Les circonstances particulières qui président à l’exécution d’une obligation internationale peuvent justifier une démarche dérogatoire consistant à admettre qu’une législation, dont seule l’application doit pouvoir déclencher la recherche de l’incompatibilité, soit à considérer en elle-même. Il est fort logique que la prise en compte de l’existence de la législation soit conditionnée par des critères extrinsèques. L’examen de la pratique jurisprudentielle permet de dégager l’opérationnalité d’un double critère subjectif, lié au risque encouru par le sujet de droit, et objectif, lié à l’absence dans l’ordre juridique étatique d’un recours ou mécanisme de mise en œuvre du droit. Leur mobilisation peut se faire de manière exclusive ou inclusive.

L’hypothèse où, pour constituer en elle-même la source incidente de l’illicéité, l’existence de la norme interne est conditionnée par la prise en compte ou du critère du risque encouru par le sujet de droit ou du critère de l’absence d’un recours ou mécanisme pertinent de mise en œuvre du droit interne

La simple existence d’une norme interne peut être constitutive de la violation d’une obligation internationale lorsqu’elle fait déjà peser sur le sujet de droit des effets corroborables. La jurisprudence de la CEDH peut être sollicitée. Dans l’affaire Dudgeon c Royaume-Uni, la cour a considéré que: “Par son maintien en vigueur, la législation attaquée représente une ingérence permanente dans l’exercice du droit du requérant au respect de sa vie privée (laquelle comprend sa vie sexuelle) au sens de l’article 8 par. 1 (art. 8-1). Dans la situation personnelle de l’intéressé, elle se répercute de manière constante et directe, par sa seule existence, sur la vie privée de celui-ci.”Footnote 104 Elle s’est faite plus précise dans l’affaire Norris c Irlande, en disant pour droit que l’article 34 de la Convention européenne des droits de l’homme “habilite les particuliers à soutenir qu’une loi viole leurs droits par elle-même, en l’absence d’acte individuel d’exécution, s’ils risquent d’en subir directement les effets.”Footnote 105 Cette position uniforme guide ainsi le traitement des affaires sur le terrain de différents articles de la convention.Footnote 106 On doit bien se garder néanmoins de toute assimilation trompeuse. Dire qu’une loi viole un droit individuel “par elle-même,” entendu “en l’absence d’acte individuel d’exécution,” ne se ramène pas à la proposition énonçant qu’une loi constitue par elle-même le fait générateur de la responsabilité internationale. Par la première proposition, la loi tenue pour incompatible avec la convention réalise la violation médiate d’une obligation ordinaire; par la seconde, pour constituer un fait illicite autonome, il faut qu’existe une obligation internationale visant l’aménagement de l’ordre juridique interne. Le Comité des droits de l’homme voit aussi dans le risque une modalité pour faire de la simple existence de la législation la source incidente de l’illicite. Sa position se lit comme suit:

toute personne se disant victime d’une violation d’un droit protégé par le Pacte doit démontrer soit que l’État partie a déjà, par action ou par omission, porté atteinte à l’exercice de ce droit, soit qu’il est sur le point de le faire, compte tenu par exemple de la législation en vigueur ou de telle ou telle décision ou pratique judiciaire ou administrative. Si la loi ou pratique en question n’a pas encore été concrètement appliquée au détriment de l’intéressé, il faut en tout état de cause qu’il soit plus que théoriquement possible qu’elle le soit. Toute personne qui se prétend victime d’une violation par un État partie de l’article 6 du Pacte doit donc démontrer que les actes de l’État partie ont déjà entraîné une violation de son droit à la vie ou représentent une menace actuelle ou imminente à l’exercice de ce droit.Footnote 107

La simple existence d’une norme interne peut être constitutive de la violation d’une obligation internationale lorsque l’absence d’un recours ou mécanisme pertinent de mise en œuvre du droit interne concrétise directement ses effets dans le chef du sujet de droit. Sur la question de la compressibilité des peines perpétuelles, la CEDH considère qu’“une peine perpétuelle n’est compatible avec l’article 3 de la [Convention européenne des droits de l’homme] que s’il existe à la fois une chance d’élargissement et une possibilité de réexamen” au profit de la personne condamnée.Footnote 108 Aussi, a-t-elle dit pour droit, dans l’affaire Harakchiev et Tolumov c Bulgarie, que “dans le cas où le droit national ne prévoit aucun mécanisme ni aucune possibilité de réexamen des peines de perpétuité réelle, l’incompatibilité avec l’article 3 en résultant prend naissance dès la date d’imposition de la peine perpétuelle et non à un stade ultérieur de la détention.”Footnote 109

L’hypothèse où, pour constituer en elle-même la source incidente de l’illicéité, l’existence de la norme interne est conditionnée par la prise en compte à la fois des critères du risque encouru par le sujet de droit et de l’absence d’un recours ou mécanisme pertinent de mise en œuvre du droit interne

La surveillance secrète ou l’interception des communications électroniques est un terrain de prédilection pour illustrer la praticabilité de ce raisonnement. S’étant très tôt interrogée sur le point de savoir “s’il faut priver quelqu’un de la faculté d’introduire une requête devant la Commission parce que le caractère secret des mesures litigieuses l’empêche de signaler une mesure concrète qui le toucherait spécifiquement,” la CEDH a été amenée à admettre “qu’un individu puisse, sous certaines conditions, se prétendre victime d’une violation entraînée par la simple existence de mesures secrètes ou d’une législation en permettant, sans avoir besoin d’avancer qu’on les lui a réellement appliquées.”Footnote 110 La CEDH a au fil du temps suffisamment affiné sa jurisprudence qu’elle a réussi à stabiliser, semble-t-il, dans l’arrêt Kennedy c Royaume-Uni Footnote 111 et, pour en assurer l’uniformité et la prévisibilité pour les requérants, harmoniser dans l’arrêt Roman Zakharov c Russie.Footnote 112 Ainsi, tenant compte de la portée de la législation incriminée et de la disponibilité d’un recours effectif au niveau national, la CEDH structure le raisonnement par lequel elle tient la simple existence d’une norme interne comme source de l’illicéité autour des deux critères extrinsèques ci-dessus développés substantifiés dans deux propositions distinctes.

Le critère objectif pose que:

[L]orsque l’ordre interne n’offre pas de recours effectif à la personne qui pense avoir fait l’objet d’une surveillance secrète, les soupçons et les craintes de la population quant à l’usage abusif qui pourrait être fait des pouvoirs de surveillance secrète ne sont pas injustifiés.[…] Dans ces circonstances, on est fondé à alléguer que la menace de surveillance restreint par elle-même la liberté de communiquer au moyen des services des postes et télécommunications et constitue donc, pour chaque usager ou usager potentiel, une atteinte directe au droit garanti par l’article 8. […] En pareil cas, la personne concernée n’a pas besoin d’établir l’existence d’un risque que des mesures de surveillance secrète lui aient été appliquées.Footnote 113

Le critère subjectif pose que:

Si en revanche l’ordre interne comporte des recours effectifs, des soupçons généralisés d’abus sont plus difficiles à justifier. Dans ce cas de figure, l’intéressé peut se prétendre victime d’une violation entraînée par la simple existence de mesures secrètes ou d’une législation permettant de telles mesures uniquement s’il est à même de montrer qu’en raison de sa situation personnelle il est potentiellement exposé au risque de subir pareilles mesures.Footnote 114

Cette double démonstration, appelée à établir la réalité de l’ingérence de l’État dans les droits des individus du fait de la simple existence d’une mesure d’interception ou d’une législation afférente, précède ainsi les démarches suivantes affairées au contrôle de leur conformité à la Convention européenne des droits de l’homme eu égard aux principes généraux dégagés par la jurisprudence de la cour.Footnote 115

En somme, il est apparu qu’en cette matière, ce n’est pas selon que l’obligation internationale est prédiquée comme une obligation de comportement ou de résultat qui oriente le jugement sur la détermination de l’illicéité, c’est-à-dire quant à la question de savoir par quels critères doit se constater la constitution de l’illicéité. Mais c’est la position logique du droit interne, c’est-à-dire selon qu’il constitue l’objet ou la condition d’exécution de l’obligation internationale, qui oriente la sélection desdits critères. C’est encore elle qui justifie en fin de compte de considérer respectivement l’incompatibilité du droit interne avec l’obligation internationale comme le fait générateur principal de la responsabilité internationale de l’État, dans le premier cas, et incident, dans le second, puisque venant simplement catalyser ou cristalliser l’illicéité. Relativement à cette dernière considération, la position dans laquelle le droit interne, parce que moyen de mise en œuvre du droit international, se présente en tant que moyen de prévention de la violation d’une obligation internationale, se différencie de la proposition suivante. Ici, cette prévention n’était nullement l’objet d’une obligation internationale; là-bas, sans en être formellement l’objet non plus, elle est néanmoins fonctionnellement impliquée par la première obligation de la série, dont la méconnaissance est constitutive d’un fait internationalement illicite distinct.

la proposition hypothétique complexe: le droit interne comme objet et condition dexécution dobligations internationales

La proposition hypothétique complexe réalise le rapport d’implication entre la vérité de deux propositions hypothétiques simples. Elle suppose ainsi maîtrisé le raisonnement prédicatif qui vise à identifier les critères et les enchaînements nécessaires à la constatation de l’illicéité générée par l’incompatibilité de la norme interne en rapport avec l’obligation internationale. On cherche maintenant à questionner, à un stade supérieur, les interactions qui se nouent entre les propositions et dans quelle mesure elles contribuent à jeter plus de lumière sur la connaissance de l’illicéité.

On se retrouve ici dans une situation où le droit interne constitue l’objet d’une première obligation et, en tant que tel, la condition d’exécution d’une seconde obligation. L’implication des deux propositions vient dès lors de ce que, si la compatibilité du droit interne avec le droit international réalise en soi la prémisse de la première, elle permet en même temps de préserver l’exécution de la seconde, c’est-à-dire d’en prévenir la violation.Footnote 116 Le lien fonctionnel qui unit la seconde à la première devient ainsi déterminant pour en déduire la constitution de l’illicite.

Il apparaît alors que, au plan de la structure normative, l’unité des propositions hypothétiques est assurée par la compatibilité du droit interne avec le droit international, qu’impose la première obligation et qu’implique la seconde. Au plan de la structure de l’illicite, deux données entrent en ligne de compte. Dans la première hypothèse, la violation de la seconde obligation impliquera nécessairement que la première obligation n’a pas été remplie, alors que la violation de celle-ci emportera par ce fait même la violation de celle-là dans la seconde hypothèse. Il en résultera donc, dans chacun des cas, au moins deux faits internationalement illicites à l’avènement desquels l’incompatibilité de la norme interne vis-à-vis de l’obligation internationale en sera l’élément conjonctif ou disjonctif.

L’incompatibilité du droit interne par rapport à l’obligation internationale comme fait générateur disjonctif de la responsabilité internationale de l’État

Après avoir posé la structure du raisonnement, on s’attèlera à montrer dans quelle mesure la pratique lui rend témoignage.

Le principe

Le principe qui structure cette proposition est en tout point la résultante du lien logique qui rattache, en certaines circonstances, une norme générale à une norme spéciale en faisant de celle-ci la rationalisation de celle-là. Cette situation crée une interdépendance d’où il résulte que l’exécution de la première garantit l’exécution de la seconde, alors que l’inexécution de celle-ci révèlera automatiquement l’inexécution de celle-là. L’interprétation que donne la CIADH du droit à la liberté de la personne objet de l’article 7 de la Convention américaine relative aux droits de l’homme illustre parfaitement cette démarche intellectuelle.Footnote 117 En posant que “this article contains two types of rules, one general and the other specific. The general type is defined in paragraph 1, while the specific type is found in paragraphs 2 to 7,” la cour déduit selon toute bonne logique que “[a]ny violation of the latter paragraphs necessarily results in the violation of Article 7(1) of the American Convention.”Footnote 118 On doit alors rechercher si cette construction logique générale se vérifie sur le terrain particulier de l’étude de l’illicéité résultant de l’incompatibilité du droit interne à l’égard d’une obligation internationale et dans quelle mesure elle en éclaire l’analyse.

La pratique

Il est possible de rapprocher la relation qui vient d’être décrite avec celle qui existe entre une obligation générale qui impose de mettre l’ordre juridique étatique en conformité avec le droit international et une obligation spéciale qui impose/implique d’adopter ou d’éliminer une norme juridique particulière.Footnote 119 Aussi, l’incidence au plan de l’illicite du lien fonctionnel noué au plan de la structure des obligations suscite deux lignes de lecture.

D’un point de vue matériel, l’incidence tient en l’enchaînement dans la constitution de l’illicite. Ainsi, dans le droit de l’OMC, les organes de règlement des différends considèrent au sujet de l’article XVI:4, qu’on peut rapprocher des dispositions sectorielles similaires,Footnote 120 que “lorsqu’une loi, une réglementation ou une procédure administrative d’un Membre a été jugée incompatible avec les obligations incombant à ce Membre dans le cadre de l’OMC en vertu de l’un quelconque des accords annexés à l’Accord instituant l’OMC, ce Membre manque aussi à ses obligations au titre de l’article XVI:4.”Footnote 121 Suivant ce principe, le constat de la violation d’une disposition spécifique invite à conclure à la violation subséquente de l’obligation générale;Footnote 122 la démarche inverse s’impose en cas de non violation d’une disposition spécifique.Footnote 123

En droit international des droits de l’homme, les organes juridictionnels tirent des conclusions identiques.Footnote 124 Ainsi, en relation avec l’article 2 de la Convention américaine relative aux droits de l’homme intitulé précisément “obligation d’adopter des mesures de droit interne,” la CIADH affirme que les États parties “may not adopt legislative or any other type of measures that violate the rights and freedoms therein recognised, because this would violate not only the conventional rules that enshrine the respective rights, but Article 2 of the Convention as well.”Footnote 125 Sur cette base, il est admis qu’à chaque violation d’une obligation spécifique, s’en déduit automatiquement celle de l’obligation générale.Footnote 126 Dans le système africain, c’est l’article 1er de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples Footnote 127 qui joue le même rôle et la CADHP considère sur son fondement que lorsqu’elle “constate que l’un quelconque des droits, des devoirs ou des libertés inscrits dans la Charte a été restreint, violé ou non appliqué, elle déduit que l’obligation énoncée à l’article 1 de la Charte n’a pas été respectée ou qu’elle a été violée. Cela signifie nécessairement que l’État n’a pas respecté ses obligations internationales, à raison du non-respect ou de la violation de celles-ci.”Footnote 128 Pareille constatation est enfin régulièrement dressée par le Comité des droits de l’homme.Footnote 129

D’un point de vue formel, l’incidence tient en l’impossibilité d’alléguer la violation autonome de l’obligation générale. En effet, si l’obligation générale a un contenu distinct et peut effectivement faire l’objet d’une violation distincte, sa démonstration ne peut pour autant qu’être déduite de la violation de l’obligation spécifique. Cette donnée est mise en lumière par le Comité des droits de l’homme qui considère que “the provisions of article 2 cannot be invoked as a claim in a communication under the Optional Protocol in conjunction with other provisions of the Covenant, except when the failure by the State party to observe its obligations under article 2 is the proximate cause of a distinct violation of the Covenant directly affecting the individual claiming to be a victim.”Footnote 130 Aussi, le Comité a-t-il pour principe de déclarer irrecevables les communications dans lesquelles les demandeurs allèguent la violation de l’obligation générale à titre autonome et non subsidiaire.Footnote 131 Dans une vision pragmatique, le Comité est par ailleurs porté à déclarer irrecevables celles des communications qui tout en étant bien fondées ne suscitent pas de constatations particulières.Footnote 132

La démarche de la CIADH ne s’en éloigne pas; elle a considéré dans une espèce que “the facts examined by this Court in cases similar to this one cannot be analyzed autonomously in this case based on Article 2 of the Convention.”Footnote 133 La pratique des organes de règlement des différends de l’OMC n’est pas des restes non plus. En vertu du principe de l’économie jurisprudentielle, ces organes, très souvent, “ont estimé qu’il n’était pas nécessaire de se prononcer sur [l]es allégations subordonnées lorsque les allégations auxquelles elles étaient subordonnées étaient bien fondées.”Footnote 134 Cette posture a été explicitée par le Groupe spécial États-Unis–Mesures antidumping visant les produits tubulaires pour champs pétrolifères, qui a rejeté l’argument du Mexique qui voudrait que “toute constatation … selon laquelle les États-Unis ont agi d’une manière incompatible avec l’une quelconque de leurs obligations au titre de l’Accord antidumping nécessite une constatation corollaire selon laquelle ils ont également agi d’une manière incompatible avec les articles 1er, 18.1 et 18.4 de l’Accord antidumping, l’article XVI:4 de l’Accord sur l’OMC et l’article VI du GATT de 1994.”Footnote 135 Le Groupe spécial s’est ainsi justifié:

Les allégations du Mexique au titre des articles 1er, 18.1 et 18.4 de l’Accord antidumping, de l’article XVI:4 de l’Accord sur l’OMC et de l’article VI du GATT de 1994 sont, comme le reconnaît le Mexique, des allégations corollaires. Autrement dit, toute constatation de violation au titre de ces allégations serait entièrement fondée sur une constatation de violation de l’une ou l’autre des dispositions spécifiques de l’Accord antidumping invoquée. Il n’y a pas de fondements indépendants pour ces allégations. Par conséquent, le fait d’examiner ces allégations corollaires ne fournirait pas aux parties ni aux autres Membres des indications additionnelles pour ce qui est de comprendre les obligations établies par l’Accord antidumping. Cela n’aiderait pas non plus à la mise en œuvre d’une quelconque recommandation de l’ORD si l’existence d’une violation de l’une de ces obligations était constatée. Par conséquent, nous n’estimons pas qu’il soit nécessaire ou approprié d’examiner ces allégations et, en application du principe d’économie jurisprudentielle, nous ne formulons aucune constatation en ce qui les concerne.Footnote 136

Sous cette base, les organes de règlement des différends peuvent ainsi en soupesant l’intérêt des prétentions et des arguments développés, renoncer à se prononcer sur les allégations corollaires.Footnote 137

On pourrait, peut-être inspiré par une approche pragmatique du droit, se demander ce qu’une déduction de la violation de l’obligation générale ajoute et ce que son absence enlèverait au constat de la violation de l’obligation spécifique.Footnote 138 Par contre, si on adhère à la conception aujourd’hui dominante en droit de la responsabilité internationale, qui considère que “toute” violation d’une obligation internationale constitue une atteinte à l’ordre juridique internationalFootnote 139 et que “tout” fait internationalement illicite engage la responsabilité de l’État aux termes de l’article 1er du Projet d’articles sur la responsabilité des États, il est fort logique que le constat de la violation de l’obligation générale soit d’ordinaire dressé.Footnote 140 Évidemment, cette problématique ne trouve pas à se poser lorsque la première obligation de la série est spécifique et porte alors sur une norme juridique particulière. Il convient de préciser et d’étayer la structure de ce nouveau raisonnement.

L’incompatibilité du droit interne par rapport à l’obligation internationale comme fait générateur conjonctif de la responsabilité internationale de l’État

Le principe

Une série d’obligations peut être inaugurée par une obligation spécifique dont l’objet est l’adoption ou l’élimination d’une norme juridique interne particulière, en faisant de cette dernière la condition d’exécution des obligations subséquentes. Le lien logique qui structure cette relation amène alors à faire dépendre l’exécution des obligations subséquentes de l’exécution de la première obligation, d’une part, et de l’inexécution de celle-ci, générée par l’incompatibilité de la norme interne, la nexus casus de la violation des obligations subséquentes, d’autre part. C’est donc de cette double relation logique, aux plans de la structure des obligations et de la structure de l’illicéité, qu’il convient de vérifier l’assise pratique.

La pratique

En portant le dossier Hissène Habré à l’attention de la CIJ, dans le cadre de l’affaire des Questions concernant l’obligation de poursuivre ou d’extrader, la Belgique souhaitait voir la cour reconnaître le Sénégal responsable de la violation de l’obligation de poursuivre pénalement ou d’extrader vers son sol l’ancien président tchadien accusé de plusieurs crimes internationaux. Bien que l’établissement de la compétence universelle soit l’objet d’une obligation distincte aux termes de la Convention contre la torture (paragraphe 2 de l’article 5), la cour ne pouvait l’examiner faute d’avoir elle-même la compétence nécessaire.Footnote 141 Pour autant, elle s’est attelée à spécifier et la fonction de la première obligation et ses liens avec les obligations subséquentes. Elle a souligné que, l’obligation de l’État d’incriminer la torture et d’établir sa compétence pour en connaître a “un caractère préventif et dissuasif puisque, en se dotant de l’arsenal juridique nécessaire pour poursuivre ce type d’infraction, les États parties garantissent l’intervention de leur système judiciaire à cet effet”;Footnote 142 ayant dès avant relevé que “la mise en œuvre par l’État de son obligation d’établir la compétence universelle de ses juridictions pour connaître du crime de torture est une condition nécessaire pour pouvoir procéder à une enquête préliminaire (article 6, paragraphe 2) et soumettre l’affaire à ses autorités compétentes pour l’exercice de l’action pénale (article 7, paragraphe 1).”Footnote 143

On peut estimer fort logiquement que si la CIJ se prononça sur le respect de la première obligation, elle aurait immanquablement établi la même connexité au point de vue de l’illicite. Elle ne put cependant manquer de relever cette implication, nécessaire comme telle pour mettre en lumière l’inexécution des obligations subséquentes:

76. La Cour estime que, en adoptant seulement en 2007 la législation requise, le Sénégal a retardé la soumission de l’affaire à ses autorités compétentes pour l’exercice de l’action pénale. En effet, la cour d’appel de Dakar a été amenée à considérer que les juridictions sénégalaises étaient incompétentes pour connaître des poursuites contre M. Habré, inculpé de complicité de crimes contre l’humanité, d’actes de torture et de barbarie, faute d’une législation appropriée qui permette de telles poursuites dans l’ordre juridique interne. […]

77. Ainsi, le fait que la législation requise ait été adoptée seulement en 2007 a nécessairement affecté l’exécution par le Sénégal de ses obligations découlant du paragraphe 2 de l’article 6 et du paragraphe 1 de l’article 7 de la convention.Footnote 144

Il apparaît alors que l’inexécution de la première obligation, relative à l’établissement de la compétence universelle, a irréversiblement mis en cause l’exécution des obligations subséquentes, d’enquêter et de juger, à partir du moment où les autorités judiciaires sénégalaises avaient à connaître de la plainte portée contre M. Hissène Habré.

Dans l’affaire Actions pour la Protection des Droits de l’Homme (APDH) c République de Côte d’Ivoire, la requérante avait saisi la CADHP aux fins de constater que la Loi n° 2014-335 modifiant la Loi n° 2001-634 du 9 octobre 2001 portant composition, organisation, attributions et fonctionnement de la Commission électorale indépendante violait l’engagement de l’État défendeur de créer un organe électoral indépendant et impartial ainsi que son engagement de protéger le droit à l’égalité devant la loi et à la protection égale par la loi, pris aux termes de plusieurs instruments internationaux.Footnote 145 Au sujet du premier grief qu’illustre ce propos, et prenant en compte la composition de l’organe électoral ivoirien et le système de représentation et de désignation de ses membres, la cour conclut à son incompatibilité à un double point de vue:

135. La Cour conclut, en conséquence, qu’en adoptant la loi contestée, l’État défendeur a violé son obligation de créer un organe électoral indépendant et impartial, prévu par l’article 17 de la Charte africaine sur la démocratie et l’article 3 du Protocole de la CEDEAO sur la démocratie.

136. La Cour conclut également que, par voie de conséquence, la violation de l’article 17 de la Charte africaine sur la démocratie affecte le droit, pour chaque citoyen ivoirien, de participer librement à la direction des affaires publiques de son pays, garanti par l’article 13 de la Charte des droits de l’homme.Footnote 146

De manière probante, la cour a déduit la violation du droit de chaque citoyen de participer à la gestion des affaires publiques de son pays, de celle liée à l’établissement par l’État d’un organe électoral qui satisfasse aux règles internationales uniformément définies.Footnote 147

En somme, il apparaît très nettement qu’au point de vue des interactions entre les propositions, ce n’est non plus la distinction des obligations internationales selon leur objet qui oriente le jugement en vue d’établir la constitution de l’illicéité, mais bel et bien la position logique occupée par le droit interne dans l’obligation internationale. Au sujet de l’obligation générale, la question de l’appréciation du comportement de l’État en termes de diligence ou d’atteinte d’un quelconque objectif ne trouve même pas à se poser dès lors que la constatation de sa violation opère strictement de manière déductive. Si pour le cas de l’obligation spécifique dans le cadre de la seconde proposition, l’établissement de sa propre violation implique de mobiliser le raisonnement prédicatif, s’agissant de sa relation avec les obligations subséquentes la même logique déductive ne manque pas de s’imposer in fine. Aussi, la différence entre les deux propositions est-elle explicative de cette trajectoire. Alors que la démonstration de la violation de la première obligation n’influence pas celle de la seconde dans le premier cas de figure, elle est indispensable dans le second. Ainsi, s’explique-t-on dans la pratique le caractère respectivement contingent et nécessaire attaché à l’établissement de l’une et l’autre.

Conclusion

Apprécier l’incompatibilité d’une norme interne par rapport à une norme internationale s’éloigne de l’exercice similaire consistant à vérifier l’inconstitutionnalité d’une loi ou l’illégalité d’un acte réglementaire. Il en va précisément ainsi parce qu’on ne peut tenir les deux normes, en regard du principe de validité,Footnote 148 sous un rapport de subordination. Si la doctrine a suffisamment avancé dans la quête d’une théorie explicative des rapports entre les ordres juridiques étatiques et international, et qu’on semble aujourd’hui d’accord pour dire que les deux ordres juridiques se distinguent plus qu’ils ne se confondent, il reste qu’on n’est pas définitivement sorti de l’ornière. L’existence de théories concurrentes en porte témoignage. En plus de la théorie, héritée de la doctrine dualiste classique, de l’indépendance réciproqueFootnote 149 ou celle contemporaine de l’indétermination réciproque,Footnote 150 il faut encore faire place à la théorie de la dépendance réciproqueFootnote 151 des deux ordres juridiques. Quoi qu’il en soit, il paraît à tout le moins court de lire la relation que formalise l’obligation internationale entre les deux ordres juridiques d’un point de vue perfectif, c’est-à-dire en suivant exclusivement de l’amont le sens tracé par le commandement que le droit international adresse au droit interne,Footnote 152 alors qu’il y a tout lieu de considérer qu’ils opèrent davantage sous un jour corrélatif. La présente réflexion a ainsi démontré que si le droit interne se façonne à certains égards selon la prescription du droit international, l’exécution de celle-ci peut être conditionnée en retour par la manière d’être du droit interne.

C’est pourquoi, appelé à saisir l’illicite empêtré dans ces rapports de systèmes, on ne peut se contenter de catégoriser l’obligation internationale sous le prisme de son objet. La conclusion quant à l’incompatibilité de la norme interne par rapport à l’obligation internationale s’infère non seulement de la vérification de son objet, mais aussi de l’implication de la condition de son exécution. Partant, elle réfléchit sous ses aspects, respectivement, formel (prescription) et matériel (exécution), la relation réciproque que manifestent les deux ordres juridiques. Aussi, pour mener à bien cette étude, la démarche doit-elle consister à identifier la position logique du droit interne dans la proposition hypothétique que formalise l’obligation internationale. En orientant la sélection des critères mobilisables et leurs enchaînements et en mettant en exergue les interactions entre les propositions, une telle démarche permet ce faisant de maîtriser la question de savoir si, et dans quelles circonstances, la contrariété du droit interne vis-à-vis de l’obligation internationale génère la responsabilité internationale de l’État.

Or si cette préoccupation fondamentale, qui a suscité l’ardeur de la doctrine dès les premières heures, n’a jamais reçu une solution qui satisfasse sa réalité systémique, c’est faute de soumettre la substantialité et la fonctionnalité des schémas explicatifs proposés à cet effet à l’ontologie de l’obligation internationale et à l’orthodoxie de la matière singulière des rapports de systèmes.

Telle était l’ambition de cette recherche que d’envisager et suggérer une démarche scientifique qui réconcilie la connaissance juridique des réalités que livre l’expérience du droit international avec un outil cognitif apte à en décrire les courbes sinueuses et difficultueuses. Structurant les lignes de réflexion sur une question qui n’a pas été suffisamment élucidée jusque-là, elle apporte, sous l’angle du droit de la responsabilité internationale, une contribution à la compréhension de la théorie des rapports de systèmes qui continue d’éprouver la sagacité des internationalistes.

Footnotes

L’auteur tient à remercier le professeur Alain Didier Olinga pour ses remarques sur la mouture initiale de cet article.

References

1 Voir notamment sur la question Carl Heinrich Triepel, “Les rapports entre le droit interne et le droit international” (1923) 1 RCADI 77; Hans Kelsen, “Les rapports de système entre le droit interne et le droit international public” (1926) 14 RCADI 227 [Kelsen, “Les rapports de système”]; Dionisio Anzilotti, Cours de droit international, tome 1: Introduction – Théories générales, traduction française de la 3e éd italienne par Gilbert Gidel, Paris, Recueil Sirey, 1929 aux pp 50–65 [Anzilotti, Cours de droit international]; GA Walz, “Les rapports du droit international et du droit interne” (1937) 61 RCADI 375; Guiseppe Sperduti, “Le principe de la souveraineté et le problème des rapports entre le droit international et le droit interne” (1976) 153 RCADI 319; Gaetano Arangio-Ruiz, “Le domaine réservé: L’organisation internationale et le rapport entre droit international et droit interne” (1990) 225 RCADI 9 aux pp 435–79; Michel Virally, “Sur un pont aux ânes: les rapports entre droit international et droits internes” dans Mélanges offerts à H. Rolin. Problèmes de droit des gens, Paris, Pedone, 1964, 488 [Virally, “Sur un pont aux ânes”]; A Decencière-Ferrandière, “Considérations sur le droit international dans ses rapports avec le droit de l’État (À propos de deux ouvrages récents)” (1933) 40 RGDIP 45. Voir aussi Robert Kolb, “The Relationship between the International and the Municipal Legal Order: Reflections on the Decision no 238/2014 of the Italian Constitutional Court” (2014) 1 Questions Intl L 5; Jacques Dehaussy, “Particularités essentielles de la personne morale État et rapports entre ordres étatiques et ordre international: observations critiques sur certaines théories doctrinales et conceptions proposées” (2021) 125 RGDIP 481.

2 Voir notamment au rang des études générales et au-delà des études classiques à l’instar de l’article de Lazare Kopelmanas, “Du conflit entre le traité international et la loi interne. Quelques remarques au sujet des rapports du droit interne et du droit international” (1937) 18 RDILC 88; Hélène Raspail, Le conflit entre droit interne et obligations internationales de l’État. Point de vue du droit international, Paris, Dalloz, 2013; Carlo Santulli, Le statut international de l’ordre juridique étatique. Étude du traitement du droit interne par le droit international, Paris, Pedone, 2001 aux pp 363–442. Au rang des monographies sectorielles, pour le droit de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), voir notamment Hervé Agbodjan Prince et Marwa Semhat, “De l’obligation de conformité en droit de l’OMC: au-delà du respect des engagements commerciaux multilatéraux” (2016) 50 RJTUM 903; Yves Nouvel, “Aspects généraux de la conformité du droit interne au droit de l’O.M.C.” (2002) 48 AFDI 657. Pour le droit international pénal, voir Djamchid Momtaz, “De l’incompatibilité des amnisties inconditionnelles avec le droit international” dans Marcelo G Kohen, dir, Promoting Justice, Human Rights and Conflict Resolution through International Law / La promotion de la justice, des droits de l’homme et du règlement des conflits par le droit international: Liber Amicorum Lucius Caflisch, Leiden, Martinus Nijhoff, 2007, 353.

3 Hans Kelsen, Théorie pure du droit, traduit par Charles Eisenmann, 2e éd, Paris, Bruylant/Librairie générale de droit et de jurisprudence (LGDJ), 1999 aux pp 12–13 [Kelsen, Théorie pure du droit]. Pour une réinterprétation critique de cette conception, voir Michel Virally, “Le phénomène juridique” (1966) 82:1 RDP 5 aux pp 15–18.

4 Voir notamment René Capitant, Introduction à l’étude de l’illicite. L’impératif juridique, Paris, Librairie Dalloz, 1928 à l’avant-propos et à la p 93.

5 On a coutume dans la théorie du droit d’entendre l’épistémologie juridique dans une double acception. Selon Michel Troper, elle est prescriptive, lorsqu’elle vise à renseigner sur “comment la science du droit doit procéder” et descriptive, lorsqu’elle “se borne à décrire la manière dont la science du droit procède en fait pour connaître son objet.” Voir Michel Troper, “Tout n’est pas perdu pour le positivisme” (1987) 11 Déviance et Société 195 aux pp 195–96.

6 Kelsen, Théorie pure du droit, supra note 3 à la p 309.

7 Voir ci-dessous l’intitulé “L’incompatibilité du droit interne par rapport à l’obligation internationale comme fait générateur incident de la responsabilité internationale de l’État,” pour les développements réservés à cette question.

8 Ainsi, en matière de compressibilité des peines perpétuelles, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) considère que les États parties doivent “offrir aux détenus à vie des conditions de détention et des traitements propres à leur donner une possibilité réaliste de s’amender et de nourrir ainsi un espoir d’être remis en liberté” et que “[l]’absence de pareille possibilité pour un détenu peut par conséquent rendre sa peine perpétuelle incompressible de facto” et donc incompatible avec les exigences de l’article 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 4 novembre 1950, 213 RTNU 221 (entrée en vigueur: 3 septembre 1953) [Convention européenne des droits de l’homme]. Voir Murray c Pays-Bas [GC], n° 10511/10 (26 avril 2016) aux paras 112–13, 125.

9 Voir notamment Paul Reuter, “Principes de droit international public” (1961) 103 RCADI 424 à la p 472 [italiques ajoutés] (“[d]ans [les obligations de comportement] on s’oblige à une certaine conduite déterminée tendant vers le résultat, dans [les obligations de résultat] on s’oblige directement au résultat lui-même. Le médecin qui soigne le malade n’est pas obligé de le guérir, mais de faire tout ce qui peut le mener à la guérison; le vendeur d’immeubles s’oblige au contraire à remettre la propriété d’un immeuble déterminé, et non pas d’adopter simplement une ligne de conduite tendant vers ce résultat. Cette distinction est également fondamentale en droit international et entraîne de multiples conséquences, notamment en matière de responsabilité”).

10 Voir notamment “Rapport de la Commission à l’Assemblée générale sur les travaux de sa cinquante-troisième session” (Doc NU A/56/10) dans Annuaire de la Commission du droit international 2001, tome 2, partie 2, Doc NU A/CN.4/SER.A/2001/Add.1 à la p 59, para 11 [“Rapport de la cinquante-troisième session”]. La Commission du droit international (CDI) reconnaît ainsi qu’“on fait couramment une distinction entre les obligations de comportement et les obligations de résultat” et que “[c]ette distinction peut aider à déterminer s’il y a eu violation.”

11 Voir notamment Dionisio Anzilotti, “La responsabilité internationale des États à raison des dommages soufferts par des étrangers” (1906) 13 RGDIP 5 à la p 26 [Anzilotti, “La responsabilité”] (“[o]n doit observer aussi qu’en règle générale le droit international n’établit pas les moyens par lesquels l’État doit assurer l’exécution de ses devoirs. C’est que ces moyens, surtout dans les cas qui nous occupent, sont si étroitement liés à l’organisation intérieure de l’État que le droit international, le plus souvent, ne pourrait pas les déterminer, sans pénétrer dans un domaine qui lui est absolument fermé. Le besoin de respecter, comme de raison, la liberté intérieure de l’État veut que les commandements du droit international soient d’ordinaire assez indéterminés: ils doivent indiquer le résultat à obtenir, tout en laissant à l’État le choix des moyens propres à l’atteindre. C’est pour cela que, la plupart du temps, l’État fait moins des actes prescrits par le droit international que des actes qu’il a lui-même librement choisis comme étant les plus propres à assurer l’exécution de son devoir envers les autres États”).

12 En règle générale, selon l’illustre auteur, on peut établir dans le droit international “la possibilité de deux types différents d’obligations juridiques, suivant qu’il est nécessaire ou non d’user de moyens spécifiquement déterminés pour leur exécution” et “la possibilité de deux modes différents de réalisation d’un fait illicite international.” Roberto Ago, “Le délit international” (1939) 68 RCADI 415 à la p 508 [italiques ajoutés] [Ago, “Le délit”]. La corrélation que l’auteur établit entre la structure de l’obligation et la structure de l’illicite au principal (voir ibid à la p 508) se double d’une relation secondaire interne à l’obligation de résultat déterminé où il associe les deux espèces du délit international simple et du délit international complexe (voir ibid aux pp 509–14). Mais en réalité, tout l’intérêt de cette construction théorique résidait surtout dans la figure du fait illicite complexe censé résoudre nombres de difficultés identifiées et offrir à l’État de s’exécuter presque ad infinitum en correction des manquements précédemment enregistrés (voir ibid aux pp 512–19). Du moment où la conclusion que l’auteur déduit au plan du tempus commissi delicti (voir ibid à la p 517) pâtissait d’une considération équivoque des propriétés attachées à l’obligation de résultat, tout le système qui en résultait a été remis en question. Conséquence, le projet d’article dédié à cette figure de l’illicite dans le cadre des travaux de la CDI a fait long feu.

13 Triepel, supra note 1 à la p 112; Anzilotti, “La responsabilité,” supra note 11 à la p 26; Anzilotti, Cours de droit international, supra note 1 aux pp 474–75. Pour l’utilisation/l’évocation explicite ou implicite du schéma dualiste, voir Gabriele Salvioli, “Les règles générales de la paix” (1933) 36:4 RCADI 5 à la p 107; Michel Virally, “Panorama du droit international contemporain. Cours général de droit international public” (1983) 183:5 RCADI 9 à la p 211; Raspail, supra note 2 à la p 30; Prince et Semhat, supra note 2 à la p 920; Nouvel, supra note 2 aux pp 658–59; James Crawford, Brownlie’s Principles of Public International Law, 8e éd, Oxford, Oxford University Press, 2012 à la p 548Google Scholar; Patrick Daillier, Mathias Forteau et Alain Pellet, Droit international public, 8e éd, Paris, LGDJ, 2009 à la p 865. Voir aussi Santulli, supra note 2 à la p 399.

14 Triepel, supra note 1 aux pp 112–13; Anzilotti, “La responsabilité,” supra note 11 aux pp 7, 294.

15 Voir “Rapport de la Commission à l’Assemblée générale sur les travaux de sa vingt-neuvième session” (Doc NU A/32/10) dans Annuaire de la Commission du droit international 1977, tome 2, partie 2, Doc NU A/CN.4/SER.A/1977/Add.l aux pp 15–16, para 10 [“Rapport de la vingt-neuvième session”].

16 Roberto Ago, “Sixième rapport sur la responsabilité des États. Le fait internationalement illicite de l’État, source de responsabilité internationale (suite)” (Doc NU A/CN.4/302 et Add 1 à 3) dans Annuaire de la Commission du droit international 1977, tome 2, partie 1, Doc NU A/CN.4/SER.A/1977/Add.l, 3 à la p 17, para 33; Eduardo Jiménez De Aréchaga et Attila Tanzi, “La responsabilité des États” dans Mohammed Bedjaoui, dir, Droit international. Bilan et perspectives, tome 1, Paris, Pedone, 1991, 367 à la p 387; Prince et Semhat, supra note 2 à la p 922.

17 Voir “Rapport de la vingt-neuvième session,” supra note 15 à la p 12, arts 20, 21 (respectivement intitulés “violation d’une obligation internationale requérant d’adopter un comportement spécifiquement déterminé” et “violation d’une obligation internationale requérant d’assurer un résultat déterminé” tels que proposés en son temps par le rapporteur spécial Roberto Ago).

18 Tel était par exemple le sens de l’argumentaire de l’Irlande dans une procédure qui l’a récemment opposé à la Commission européenne au sujet de l’adoption par les États membres des dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la décision-cadre 2008/909/JAI du Conseil, du 27 novembre 2008, concernant l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux jugements en matière pénale prononçant des peines ou des mesures privatives de liberté aux fins de leur exécution dans l’Union européenne. L’Irlande a avancé qu’elle disposait déjà d’une législation prévoyant le transfèrement des personnes condamnées entre États membres, adoptée sur la base de la Convention [du Conseil de l’Europe] sur le transfèrement des personnes condamnées, 21 mars 1983, STE no 112 (entrée en vigueur: 1er juillet 1985). Or, c’est seulement l’absence de la communication des mesures de transposition de la décision-cadre et les insuffisances de la Convention qui ont fait dire à la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) que l’État irlandais n’avait pas rempli son obligation. Voir Commission européenne c Irlande, C-125/21 (24 mars 2022) aux points 19–23.

19 Il faut aussi souligner l’hypothèse relative à la mise en œuvre de la règle de l’épuisement des recours internes, qui ne fait pas toujours l’objet d’une interprétation uniforme chez les auteurs. Hélène Raspail exclut ainsi la possibilité d’un conflit avec le droit interne (Raspail, supra note 2 à la p 33). Carlo Santulli estime pour sa part une telle idée plausible, et bien qu’il identifie le dernier acte juridique et un autre acte — s’il rendait la situation litigieuse irrattrapable — comme fait générateur éventuel de la responsabilité internationale de l’État, il est cependant obligé de conclure que c’est le premier acte qui est directement mis en relation avec le droit international (Santulli, supra note 2 aux pp 403–04). Il faut enfin relever, de manière générale, que dans l’hypothèse envisagée par Roberto Ago, la production d’un acte juridique interne peut emporter immédiatement violation d’une obligation de résultat déterminé.

20 Voir notamment Raspail, supra note 2 aux pp 194–206, 264–70.

21 Ibid aux pp 201–03; Samantha Besson, “La due diligence en droit international” (2020) RCADI 153 aux pp 254–55.

22 Il y a une nuance à faire dans l’interprétation des obligations positives relatives à l’aménagement normatif ou institutionnel de l’État et les obligations positives de due diligence quant à la mise en œuvre des normes juridiques posées ou au fonctionnement des institutions créées. Comme l’ont reconnu pertinemment certains auteurs, commis par l’International Law Association, les premières “are obligations of result and must be immediately upheld: the State will be in violation if it does not possess these institutions. However, how these institutions function is a matter of due diligence, ie., these institutions must function diligently.” Voir Duncan French et Tim Stephens, “ILA Study Group on Due Diligence in International Law: First Report” (7 mars 2014) à la p 16, en ligne: <www.ila-hq.org/index.php/study-groups?study-groupsID=63>. Dans le même sens, voir Marco Longobardo, “The Relevance of the Concept of Due Diligence for International Humanitarian Law” (2019) 37 Wisconsin Intl LJ 44 à la p 64; Eric De Brabandere, “Host States’ Due Diligence Obligations in International Investment Law” (2015) 42 Syracuse J Intl L & Commerce 319 aux pp 342–43; et les auteurs classiques, Triepel, supra note 1 aux pp 112–13; Anzilotti, “La responsabilité,” supra note 11 aux pp 7, 294.

23 Voir “Rapport de la vingt-neuvième session” supra note 15 à la p 14, para 6.

24 Comme l’affirme fort pertinemment Robert Kolb, “dualism is upheld essentially for written law (treaties). It is unpractical and thus not applied to customary international law. Unwritten rules cannot be ‘transformed’ by a piece of legislation. Moreover, they remain moving the whole time according to shifts of international practice.” Voir Kolb, supra note 1 à la p 8.

25 Voir notamment Raspail, supra note 2 aux pp 88 et 255–60.

26 Échange des populations grecques et turques (1925), Avis consultatif, CPJI (sér B) n° 10 à la p 20.

27 Naït-Liman c Suisse [GC], n° 51357/07 (15 mars 2018) au para 94 [Naït-Liman c Suisse]; Convention européenne des droits de l’homme, supra note 8, art 6(1).

28 Naït-Liman c Suisse, supra note 27 au para 181.

29 Ibid au para 187.

30 Ibid au para 201.

31 Voir également les hypothèses avancées par Dehaussy, supra note 1 à la p 491.

32 Dans une décision récente, la Cour interaméricaine des droits de l’homme (CIADH) a réaffirmé que “[t]he obligation to negotiate does not entail the obligation to reach an agreement.” Voir Environment and Human Rights (States Obligations in Relation to the Environment in the Context of the Protection and Guarantee of the Rights to Life and to Personal Integrity: Interpretation and Scope of Articles 4(1) and 5(1) in Relation to Articles 1(1) and 2 of the American Convention on Human Rights) (2017), Avis consultatif OC-23-17, Inter-Am Ct HR (sér A) n° 23 au para 205.

33 Demande en révision et en interprétation de l’arrêt du 24 février 1982 en l’affaire du Plateau continental (Tunisie/Jamahiriya arabe libyenne) (Tunisie c Jamahiriya arabe libyenne), [1985] CIJ Rec 192 à la p 219, para 48.

34 Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, Avis consultatif, [1996] CIJ Rec 226 aux pp 263–64, para 98 [Licéité de la menace] [italiques ajoutés].

35 Ibid aux pp 263–64, para 99 [italiques ajoutés]; Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, 1er juillet 1968, 729 RTNU 161 (entrée en vigueur: 5 mars 1970).

36 Pacte international relatif aux droits civils et politiques, 19 décembre 1966, 999 RTNU 190, art 6, para 2, alinéa 2 (entrée en vigueur: 23 mars 1976) [PIDCP].

37 Convention européenne des droits de l’homme, supra note 8, art 2.

38 Voir Opuz c Turquie, n° 33401/02 (9 juin 2009) aux paras 145–46 [Opuz c Turquie]; Comité des droits de l’homme, Observation générale n° 36 sur l’article 6 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, concernant le droit à la vie, Doc NU CCPR/C/GC/36, octobre–novembre 2018 aux paras 22–23.

39 Ainsi, dans l’affaire Opuz c Turquie, “[a]yant constaté que le cadre législatif constituait un obstacle à la protection effective des victimes de violences domestiques, la Cour [a dit] d[evoir] par ailleurs rechercher si les autorités locales [avaie]nt fait preuve de la diligence voulue pour protéger le droit à la vie de la mère de la requérante par d’autres voies.” Opuz c Turquie, supra note 38 au para 146.

40 Raspail, supra note 2 à la p 28.

41 Santulli, supra note 2 à la p 400.

42 Ibid à la p 399.

43 Nouvel, supra note 2 à la p 659.

44 Raspail, supra note 2 aux pp 199–200. Voir aussi Riccardo Pisillo Mazzeschi, “Responsabilité de l’État pour violation des obligations positives relatives aux droits de l’homme” (2008) 333 RCADI 174 à la p 314.

45 Giovanni Distefano, “Fait continu, fait composé et fait complexe dans le droit de la responsabilité” (2006) 52 AFDI 1 à la p 40.

46 Licéité de la menace, supra note 34 à la p 258, para 83.

47 Activités armées sur le territoire du Congo (nouvelle requête: 2002) (République démocratique du Congo c Rwanda), Compétence et recevabilité, [2006] CIJ Rec 6 aux pp 31–32, para 64; Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Croatie c Serbie), [2015] CIJ Rec 3 à la p 47, para 88. Voir aussi Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine c Serbie-et-Monténégro), [2007] CIJ Rec 43 à la p 104, para 147.

48 Voir notamment Carlo Santulli qui estime que “la pratique doit répondre à deux questions différentes: un produit légal peut-il constituer un fait internationalement illicite ou faut-il attendre son exécution ? une règle peut-elle constituer un fait internationalement illicite ou faut-il attendre son application ?” Santulli, supra note 2 à la p 365.

49 Ibid aux pp 365–410; Raspail, supra note 2 aux pp 27–276.

50 Voir par ex Santulli, supra note 2 aux pp 377–79.

51 Selon Paul Reuter, “[l]orsque l’on est en présence d’une obligation de résultat, la responsabilité est encourue du fait que le résultat n’est pas atteint et la règle qui est violée indique toujours clairement ce résultat; lorsqu’au contraire on est seulement en présence d’une obligation de comportement il faut déterminer quel est le contenu de ce comportement et le problème est infiniment plus délicat.” Paul Reuter, La responsabilité internationale: Problèmes choisis, Cours de DES droit public, 1955–56 à la p 57, cité par Jean Salmon, “Le fait étatique complexe — une notion contestable” (1982) 28 AFDI 709 à la p 725.

52 Voir ci-dessous les développements sous l’intitulé “L’incompatibilité du droit interne par rapport à l’obligation internationale comme fait générateur principal de la responsabilité internationale de l’État.”

53 Voir ci-dessous les développements sous l’intitulé “L’incompatibilité du droit interne par rapport à l’obligation internationale comme fait générateur incident de la responsabilité internationale de l’État.”

54 On peut ajouter à cela, celle entre norme générale et norme individuelle qui permet également de dénouer la problématique en d’autres circonstances. Voir notamment Commission européenne c Belgique, C-60/21 (10 mars 2022) aux points 32–34.

55 Dans certains cas, l’existence d’un pouvoir discrétionnaire concédé aux autorités publiques par une législation ou une réglementation est jugée compatible avec l’obligation internationale, de sorte que seule l’application de la norme pourra mettre en évidence son incompatibilité. Voir par ex États-Unis – Article 129 c) 1) de la loi sur les Accords du cycle d’Uruguay (Plainte du Canada) (2002), OMC Doc WT/DS221/R à la p 21, para 3.72 (Rapport du Groupe spécial) (“la législation d’un Membre constitue un manquement aux obligations contractées par ce Membre dans le cadre de l’OMC uniquement si elle prescrit une action qui est incompatible avec ces obligations ou empêche une action qui est compatible avec ces obligations. Si une telle législation accorde un pouvoir discrétionnaire aux autorités administratives leur permettant d’agir d’une manière compatible avec les règles de l’OMC, en tant que telle, elle ne constitue pas un manquement aux obligations contractées dans le cadre de l’OMC. L’Organe d’appel a expliqué que ce concept ‘a[vait] été élaboré par un certain nombre de groupes spéciaux du GATT comme étant une considération fondamentale pour déterminer quand une législation en tant que telle – plutôt qu’une application particulière de cette législation – était incompatible avec les obligations d’une partie contractante dans le cadre du GATT de 1947’”). Voir aussi États-Unis – Article 211 de la loi générale de 1998 portant ouverture de crédits (Plainte des communautés européennes) (2002), OMC Doc WT/DS176/AB/R aux pp 82-83, para 259–61 (Rapport de l’Organe d’appel); Case of Urrutia Laubreaux (Chile) (2020), Inter-Am Ct HR (sér C) n° 409 au para 130 [Laubreaux]; Case of Petro Urrego (Colombia) (2020), Inter-Am Ct HR (sér C) n° 406 au para 112 [Urrego].

56 Dans d’autres cas, l’existence d’un pouvoir discrétionnaire concédé aux autorités publiques par une législation ou une réglementation ou l’indétermination de son étendue et ses modalités de mise en œuvre peuvent être jugées en soi comme incompatibles avec l’obligation internationale. Voir par ex États-Unis – Articles 301 à 310 de la loi de 1974 sur le commerce extérieur (Plainte des Communautés européennes) (1999), OMC Doc WT/DS152/R à la p 356, para 7.54 (Rapport du Groupe spécial). Dans cette affaire, le Groupe spécial a souligné fort à propos que même en faisant droit au postulat rappelé à la note précédente et en tenant compte du fait que le Représentant des États-Unis pour les questions commerciales internationales jouit d’une latitude absolue lorsqu’il décide de la teneur de la détermination, il n’en résulterait pas pour autant, sur la base de ces seules considérations, que l’article 304 de la loi litigieuse soit compatible avec l’article 23 du Mémorandum d’accord. Puisque, selon le Groupe spécial, “l’article 23 peut prohiber des lois comportant certains éléments discrétionnaires et que, par conséquent, le fait même que la loi confère un tel pouvoir discrétionnaire pourrait en effet l’empêcher d’être compatible avec les règles de l’OMC. […] [C]e critère n’a tout simplement pas comme corollaire, comme on le prétend parfois, que les lois conférant un pouvoir discrétionnaire ne peuvent jamais contrevenir à l’Accord sur l’OMC.” Voir aussi États-Unis – Mesures compensatoires concernant certains produits en provenance des Communautés européennes (Plainte des Communautés européennes) (2002), OMC Doc WT/DS212/R à la p 101, para 7.123 (Rapport du Groupe spécial) [États-Unis – Mesures compensatoires]; Pologne c Parlement et Conseil, C-157/21 (16 février 2022) au point 321. Ainsi, les faits illicites en pareils cas résulteront de l’indétermination ou d’une détermination imparfaite de l’étendue et des modalités d’exercice d’un tel pouvoir. Voir dans ce sens De Tommaso c Italie [GC], n° 43395/09 (23 février 2017) au para 118; Magyar Kétfarkú Kutya Párt c Hongrie [GC], n° 201/17 (20 janvier 2020) au para 111; Ahmet Yıldırım c Turquie, n° 3111/10, [2012] VI CEDH 465 à la p 490, para 68.

57 Voir également l’avis de la CDI à ce sujet: “La question se pose souvent de savoir si l’adoption d’une loi par un État peut violer une obligation, dans les cas où il existe un conflit apparent entre le contenu de cette loi et ce qui est requis par l’obligation internationale, ou si la loi en question doit avoir été appliquée en l’espèce avant que la violation soit réputée s’être produite. Encore une fois, aucune règle générale, qui soit applicable dans tous les cas, ne peut être établie.” Voir “Rapport de la cinquante-troisième session,” supra note 10 à la p 60, para 12. Voir aussi Applicabilité de l’obligation d’arbitrage en vertu de la section 21 de l’accord du 26 juin 1947 relatif au siège de l’Organisation des Nations Unies, Avis consultatif, [1988] CIJ Rec 12 aux pp 29–30, para 42.

58 Le conflit entre les obligations internationales et le droit interne constitue bel et bien un aspect, pourrait-on dire contentieux, des rapports de systèmes entre l’ordre juridique international et l’ordre juridique étatique. Selon Jean Hostert, “[l]a mise en œuvre [des traités] par des mesures nationales concerne en premier lieu le droit des traités et par voie de conséquence seulement la responsabilité des États.” Jean Hostert, “Droit international et droit interne dans la Convention de Vienne sur le droit des traités du 23 mai 1969” (1969) 15 AFDI 92 à la p 115. Paraphrasant l’auteur, on est amené à dire qu’on ne peut chercher à résoudre le problème spécifique de la responsabilité internationale de l’État résultant de la violation d’une obligation internationale par le droit interne, sans se préoccuper des rapports qui structurent et en orientent la compréhension. Aussi, les auteurs classiques (voir notamment Triepel, supra note 1, correspondant à l’ensemble du chapitre III intitulé “Les prescriptions du droit international et le droit interne”; Walz, supra note 1 aux pp 433–35; Sperduti, supra note 1 à la p 392; Kelsen, “Les rapports de système,” supra note 1 aux pp 280, 286, 317) ont-ils toujours envisagé le conflit entre le droit interne et l’obligation internationale comme un pan des problèmes que les rapports de systèmes suscitent et en suggèrent les pistes de solution. La même démarche étant d’ailleurs reprise par la littérature contemporaine (voir Santulli, supra note 2).

59 Dans la théorie générale du droit, la proposition de droit vise à décrire la norme juridique selon la syntaxe “si, […] alors,” elle permet ce faisant d’établir un rapport d’implication entre deux faits, le fait-condition et le fait-conséquence; il est alors d’usage d’employer la formule ‘proposition hypothétique’ pour en rendre compte. Voir notamment Kelsen, Théorie pure du droit, supra note 3 aux pp 78–82. Pour autant, si cette démarche peut servir la première démonstration (A), elle paraîtra vite courte pour les fins de la seconde (B) dès lors qu’il y sera question du rapport d’implication entre la vérité de deux propositions (hypothétiques). Aussi, pour marquer l’attachement au vocabulaire courant dans la théorie du droit tout en en étendant le spectre conceptuel, on s’est inspiré de la distinction proposée par Keynes (Formal Logic, partie II, chap IX, cité par André Lalande, Vocabulaire technique et critique de la philosophie, 3e éd, Paris, Quadrige/PUF, 2010 aux pp 430–31) entre les propositions “conditionnelles,” qui correspondent aux propositions hypothétiques du droit, et les propositions “hypothétiques,” ou “proprement hypothétiques,” qui correspondent à la démonstration de la seconde branche de la seconde partie, en empruntant leur modalité respective de jugement “simple” et “complexe.” D’où la distinction proposée entre la proposition hypothétique simple et la proposition hypothétique complexe.

60 Voir notamment Commission européenne c Irlande, C-125/21 (24 mars 2022) aux points 16, 23; Commission européenne c Irlande, C-126/21 (22 mars 2022) au point 31; Commission des Communautés européennes c Espagne, C-147/94, [1995], CJCE Rec I-1018.

61 Voir notamment Guatemala – Enquête antidumping concernant le ciment Portland en provenance du Mexique (Plainte du Mexique) (1998), OMC Doc WT/DS60/R à la p 171, para 7.25 (Rapport du Groupe spécial).

62 Oumar Mariko c Mali, n° 029/2018 (24 mars 2022) aux paras 121–26 [Mariko]; Suy Bi Gohore Emile et autres c Côte d’Ivoire, n° 044/2019 (15 juillet 2020) aux paras 228–29.

63 Voir notamment Commission européenne c Italie, C-341/20 (16 septembre 2021) aux points 34–40; Commission européenne c Hongrie [GC], C-821/19 (16 novembre 2021) aux points 33–42 [Commission européenne c Hongrie].

64 Voir Cotesworth & Powell (Grande Bretagne c Colombie) (1875), dans H. Lafontaine, Pasicrisie Internationale. Histoire documentaire des arbitrages internationaux (1794–1900), Berne, Stämpfli & Cie, 1902, 173 à la p 189 (Arbitres: Scruggs, Eustorijio Salgar) [Cotesworth & Powell]; Affaire Fabiani (France c Venezuela) (1896), dans Lafontaine, ibid, 344 aux pp 355–56 (Arbitre: Président de la Confédération Suisse); Affaire Martini (Italie c Venezuela), [1930], 2 RSA 978 aux pp 1000–01 (Arbitres: Östen Undén, F. A. Guzman Alfaro, Cesare Tumedei).

65 Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, 10 décembre 1984, 1465 RTNU 122 (entrée en vigueur: 26 juin 1987) [Convention contre la torture].

66 Dans l’affaire sur les Questions concernant l’obligation de poursuivre ou d’extrader (Belgique c Sénégal), [2012] CIJ Rec 422 à la p 451, para 75 [Questions concernant l’obligation de poursuivre], la CIJ a considéré que “[l]’obligation de l’État d’incriminer la torture et d’établir sa compétence pour en connaître…doit être mise en œuvre par l’État concerné dès qu’il est lié par la convention.” Dans cette circonstance, l’absence d’une la loi incriminant la torture ou habilitant les tribunaux à exercer les poursuites judiciaires emportera violation de la Convention contre la torture, supra note 65.

67 Voir Le Procureur c Antonio Furundžija, IT-95-17/1-T, jugement (10 décembre 1998) au para 149 (TPIY, Chambre de première instance).

68 Voir notamment Convention internationale pour la répression des attentats terroristes à l’explosif, 15 décembre 1997, 2149 RTNU 296 (entrée en vigueur: 23 mai 2001), arts 4 et 6; Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme, 9 décembre 1999, 2178 RTNU 245 (entrée en vigueur: 10 avril 2002), arts 4–7.

69 Raspail, supra note 2 aux pp 201–03, 264-68.

70 Ibid aux pp 194–96. Voir aussi Prince et Semhat, supra note 2 aux pp 920–21.

71 Convention américaine relative aux droits de l’homme, 22 novembre 1969, 1144 RTNU 182 (entrée en vigueur: 18 juillet 1978).

72 Case of the Kaliña and Lokono Peoples (Suriname) (2015), Inter-Am Ct HR (sér C) n° 309 aux paras 237–38 [Kaliña].

73 Ibid aux paras 249, 268; Case of Cuya Lavy et al (Peru) (2021), Inter-Am Ct HR (sér C) n° 438 aux paras 182–83 [Lavy].

74 Case of Flor Freire (Ecuador) (2016), Inter-Am Ct HR (sér C) n° 315 aux paras 208–11.

75 Convention européenne des droits de l’homme, supra note 8, art 13.

76 Religionsgemeinschaft der Zeugen Jehovas and Others v Austria, n° 40825/98 (31 juillet 2008) au para 122. Voir aussi Abdulaziz, Cabales et Balkandali c Royaume-Uni, n° 9214/80 et autres (28 mai 1985) aux paras 92–93 [italiques ajoutés].

77 Voir ci-dessus l’intitulé “Des inconséquences révélées par la structure de l’obligation internationale.”

78 Sur l’emploi du concept de catalyse en matière de fait internationalement illicite, voir Ago, “Le délit,” supra note 12 aux pp 475–76; Roberto Ago, “Quatrième rapport sur la responsabilité des États. Le fait internationalement illicite de l’État, source de responsabilité internationale (suite)” (Doc NU A/CN.4/264 et Add 1) dans Annuaire de la Commission du droit international 1972, tome 2, partie 2, Doc NU A/CN.4/SER.A/1972/Add.l, 77 aux pp 105–07, paras 65, 67; Georges Berlia, “De la responsabilité internationale de l’État” dans La technique et les principes du droit public. Études en l’honneur de Georges Scelle, tome 2, Paris, LGDJ, 1950, 875 à la p 883; Gilles Cottereau, “Système juridique et notion de responsabilité” dans Société française pour le droit international, La responsabilité dans le système international, Paris, Pedone, 1991, 3 aux pp 24, 56; Louis Delbez, “La responsabilité internationale pour crimes commis sur le territoire d’un État et dirigés contre la sûreté d’un État étranger” (1930) 37 RGDIP 461 à la p 470.

79 Voir notamment George Berlia, “La guerre civile et la responsabilité internationale de l’État” (1937) 44 RGDIP 51 aux pp 58–59.

80 On se contentera de renvoyer à quelques espèces arbitrales; voir Cotesworth & Powell, supra note 64 à la p 187; Montijo (États-Unis d’Amérique c Colombie) dans Lafontaine, supra note 64, 210 à la p 216 (Arbitres: Mariano Tanco, Bendix Koppel, Robert Bunch); Laura M. B. Janes et al (United States of America) v United Mexican States, [1925] 4 RSA 82 à la p 87 (Commission générale des réclamations Mexique/États-Unis d’Amérique) (Commissaire: Fred K. Nielsen); F. R. West (United States of America) v United Mexican States, [1927] 4 RSA 270 à la p 271(Commission générale des réclamations Mexique/États-Unis d’Amérique) (Commissaires: Van Vollenhoven, Fred K. Nielsen, Fernandez MacGregor); Bovallins and Hedlund Cases, [1903] 10 RSA 768 aux pp 768–69 (Commission Suède-Venezuela) (Arbitre: Gaytan de Ayala).

81 Marguš c Croatie [GC], n° 4455/10, [2014] III CEDH 87 à la p 150, paras 139–41; Case of the Massacres of El Mozote and Nearby Places (El Salvador) (2012), Inter-Am Ct HR (sér C) n° 252 au para 296. Voir aussi Momtaz, supra note 2 à la p 355; Jacques Dumas, “La responsabilité internationale des États à raison des crimes et délits commis sur leur territoire au préjudice d’étrangers” (1931) 36:2 RCADI 187 à la p 258.

82 Lohé Issa Konaté c Burkina Faso, n° 004/2013 (5 décembre 2014) au para 176 [Konaté].

83 Moniteur belge du 13 septembre 1993 à la p 20105 (entrée en vigueur: 1er janvier 1992).

84 Commission européenne c Belgique, C-60/21 (10 mars 2022) aux points 32–36. Voir aussi Commission européenne c Portugal, C-169/20 (2 septembre 2021) aux points 40–41; Commission européenne c Hongrie, supra note 63 au point 108.

85 Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, 25 mars 1957, [2016] JO, C 202/47 (entrée en vigueur: 1er janvier 1958).

86 Accord sur l’Espace économique européen, 2 mai 1992, [1994] JO, L 1/3 (entrée en vigueur: 1er janvier 1994).

87 Voir The Alabama Claims (Grande-Bretagne/États-Unis) (1872) dans Lafontaine, supra note 64, 141 à la p 142 (Arbitres: Sir Alexander James Edmund Cockburn, Charles Francis Adams, Comte Frederick Sclopis de Salerano, Jacques Stampfli, Marcos Antonio d’Araujo).

88 Voir Léo Strisower, “Responsabilité internationale des États à raison des dommages causés sur leur territoire à la personne ou aux biens des étrangers” dans Annuaire de l’Institut de droit international, Session de Lausanne, 1927, 81 aux pp 90, 120–21; Luigi Condorelli, “L’imputation à l’État d’un fait internationalement illicite: solutions classiques et nouvelles tendances” (1984) 189 RCADI 9 aux pp 33, 36; Hildebrando Accioly, “Principes généraux de la responsabilité internationale d’après la doctrine et la jurisprudence” (1959) 96 RCADI 349 à la p 384.

89 Questions concernant l’obligation de poursuivre, supra note 66 aux pp 451–52, paras 76–77.

90 Ibid à la p 454, para 88 [italiques ajoutés].

91 Voir aussi Case of Muelle Flores (Peru) (2019), Inter-Am Ct HR (sér C) n° 375 au para 139 [Flores].

92 Magyar Kétfarkú Kutya Párt c Hongrie [GC], n° 201/17 (20 janvier 2020) aux paras 117–18; Beghal c Royaume-Uni, n° 4755/16 (28 février 2019) aux paras 109–10; Bayev et autres c Russie, n° 67667/09 (20 juin 2017) aux paras 83–84 [Bayev]; De Tommaso c Italie [GC], n° 43395/09 (23 février 2017) aux paras 118–19, 124–26; Ahmet Yıldırım c Turquie, n° 3111/10,[2012] VI CEDH 465 aux pp 488, 490, paras 60, 67–69. Pour la CIADH, Case of Manuela et al (El Salvador) (2021), Inter-Am Ct HR (sér C) n° 441 au para 216 [Manuela]; Case of Villarroel Merino et al. (Ecuador) (2021), Inter-Am Ct HR (sér C) n° 430 aux paras 141–43 [Merino]; Case of Fernández Prieto and Tumbeiro (Argentina) (2020), Inter-Am Ct HR (sér C) n° 411 aux paras 101, 108, 110 [Prieto and Tumbeiro]; Urrego, supra note 55 aux paras 135–38; Laubreaux, supra note 55 aux paras 133–35.

93 Kaliña, supra note 72 au para 114; Kurić et autres c Slovénie [GC], n° 26828/06, [2012] IV CEDH 93 aux pp 157, 160–61, paras 344, 357–59.

94 Grzęda c Pologne [GC], n° 43572/18 (15 mars 2022) aux paras 349–50; Beuze c Belgique [GC], n° 71409/10 (9 novembre 2018) aux paras 156, 160; Mehmet Şentürk et Bekir Şentürk c Turquie, n° 13423/09, [2013] II CEDH 329 aux pp 356–58, paras 96–97, 105–06; Zorica Jovanović c Serbie, n° 21794/08, [2013] II CEDH 175 à la p 198, paras 72–75; X c Finlande, n° 34806/04, [2012] IV CEDH 241 aux pp 284–85, 290, paras 168–71, 220–22; Sejdovic c Italie [GC], n° 56581/00, [2006] II CEDH 201 à la p 235, para 121; Makaratzis c Grèce [GC], n° 50385/99, [2004] XI CEDH 247 à la p 285, para 70; X et Y c Pays-Bas, n° 8978/80 (26 mars 1985) aux paras 27–28, 30. Pour la CIADH, Case of Barbosa de Souza et al (Brazil) (2021), Inter-Am Ct HR (sér C) n° 435 au para 121 [de Souza]; Merino, supra note 92 au para 100; Case of Guachalá Chimbo et al (Ecuador) (2021), Inter-Am Ct HR (sér C) n° 423 au para 138 [Chimbo]; Manuela, supra note 92 aux paras 110, 112; Case of Martínez Esquivia (Colombia) (2020), Inter-Am Ct HR (sér C) n° 412 au para 119 [Esquivia]; Case of Casa Nina (Peru) (2020), Inter-Am Ct HR (sér C) n° 419 au para 101 [Nina]; Case of Roche Azaña et al (Nicaragua) (2020), Inter-Am Ct HR (sér C) n° 403 au para 72; Case of Valle Ambrosio et al (Argentina) (2020), Inter-Am Ct HR (sér C) n° 408 aux paras 52–54; Case of López Soto et al (Venezuela) (2018), Inter-Am Ct HR (sér C) n° 362 aux paras 225–26, 251–56. Pour la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP), voir Mariko, supra note 62 aux paras 62–66, 85–87.

95 X et autres c Autriche [GC], n° 19010/07, [2013] II CEDH 73 aux pp 122–23, 130, paras 125–27, 152–53.

96 Fabris c France [GC], n° 16574/08, [2013] I CEDH 381 aux pp 405, 408, paras 63, 73–74. Pour la CIADH, voir Manuela, supra note 92 aux paras 170–72. Pour la CADHP, voir Konaté, supra note 82 aux paras 163–66.

97 Voir notamment Commission européenne c Espagne, C-788/19 (27 janvier 2022), aux points 39–41, 54, 60–62; Commission européenne c Hongrie, supra note 63 aux points 72, 110, 144.

98 Convention de Vienne sur les relations consulaires, 24 avril 1963, 596 RTNU 261 (entrée en vigueur: 19 mars 1967).

99 [2001] CIJ Rec 466 à la p 497, para 90.

100 [2004] CIJ Rec 12 aux pp 56–57, para 112. Voir aussi Alain Pellet, “Remarques sur la jurisprudence récente de la C.I.J. dans le domaine de la responsabilité internationale” dans Marcelo Kohen, Robert Kolb et Djacoba Liva Tehindrazanarivelo, dir, Perspectives of International Law in the 21st Century / Perspectives du droit international au 21e siècle, Liber Amicorum Professor Christian Dominicé in Honour of his 80th Birthday, Leiden, Martinus Nijhoff, 2012, 321 à la p 325.

101 Molla Sali c Grèce [GC], n° 20452/14 (19 décembre 2018) au para 86.

102 Ibid au para 142.

103 Ibid aux paras 161–62; Convention européenne des droits de l’homme, supra note 8, art 14; Protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 20 mars 1952, 213 RTNU 262 (entrée en vigueur: 18 mai 1954).

104 Dudgeon c Royaume-Uni, n° 7525/76 (22 octobre 1981) au para 41.

105 Norris c Irlande, n° 8225/78 (26 octobre 1988) au para 31; Convention européenne des droits de l’homme, supra note 8, art 34.

106 Voir notamment Modinos c Chypre, n° 15070/89 (23 avril 1993) au para 24; Nikolova c Bulgarie [GC], n° 31195/96, [1999] II CEDH 241 à la p 259, para 60; Michaud c France, n° 12323/11, [2012] VI-1 CEDH 39 aux pp 62–63, paras 51–53; Bayev, supra note 92 au para 62.

107 Ioane Teitiota c Nouvelle-Zélande, Communication n° 2728/2016, 127e sess, Doc NU CCPR/C/127/D/2728/2016 (24 octobre 2019) au para 84. Voir aussi Nicole Beydon c France, Communication n° 1400/2005, 85e sess, Doc NU CCPR/C/85/D/1400/2005 (31 octobre 2005) aux paras 4.3–4.4.

108 Harakchiev et Tolumov c Bulgarie, n° 15018/11, [2014] III CEDH 449 à la p 500, para 245.

109 Ibid au para 246.

110 Klass et autres c Allemagne, n°5029/71 (6 septembre 1978) au para 34.

111 Kennedy c Royaume-Uni, n° 26839/05 (18 mai 2010) au para 124 [Kennedy]. Il est ainsi reconnu que “[l]’approche définie dans l’arrêt Kennedy offre donc à la Cour la souplesse nécessaire pour traiter tous les types de situations qui peuvent se présenter en matière de surveillance secrète eu égard aux spécificités des ordres juridiques des États membres, c’est-à-dire les recours existants, ainsi qu’à la situation personnelle de chaque requérant.” Roman Zakharov c Russie [GC], n° 47143/06 (4 décembre 2015) au para 172 [Zakharov].

112 Zakharov, supra note 111 au para 170.

113 Ibid au para 171.

114 Ibid.

115 Voir notamment en ce sens ibid aux paras 235–36, 302–05; Kennedy, supra note 111 aux paras 151, 169–70; Centrum för rättvisa c Suède [GC], n° 35252/08 (25 mai 2021) aux paras 369–74; Big Brother Watch et autres c Royaume-Uni [GC], n° 58170/13 (25 mai 2021) aux paras 425–27. Convention européenne des droits de l’homme, supra note 8.

116 Voir par ex la position du Comité des droits de l’homme, Observation générale n° 31 sur la nature de l’obligation juridique générale imposée aux États parties au pacte, 80e sess, 2187e séance, Doc NU CCPR/C/21/Rev. 1/Add. 13 (26 mai 2004) au para 17 (“il serait contraire aux fins visées par le Pacte de ne pas reconnaître qu’il existe une obligation inhérente à l’article 2 de prendre des mesures pour prévenir la répétition d’une violation du Pacte”).

117 Convention américaine relative aux droits de l’homme, supra note 71, art 7.

118 Voir notamment Merino, supra note 92 au para 84; Manuela, supra note 92 au para 97; Case of Palacio Urrutia et al (Ecuador) (2021), Inter-Am Ct HR (sér C) n° 446 au para 130 [Urrutia]; Prieto and Tumbeiro, supra note 92 au para 65; Case of Acosta Martínez et al (Argentina) (2020), Inter-Am Ct HR (sér C) n° 410 au para 76 [Martínez].

119 En réalité, dès lors qu’un instrument juridique international consacre une obligation générale engageant les États à aménager convenablement leur droit interne, une corrélation de ce genre peut être mise en évidence avec les obligations spécifiques qui imposent ou impliquent de prendre des mesures législatives ou réglementaires particulières. S’agissant de dispositions consacrant des obligations générales en relation avec la prise des mesures législatives ou réglementaires (en dehors des exemples directement mobilisés dans l’analyse), voir notamment Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, 16 décembre 1966, 993 RTNU 3 (entrée en vigueur: 3 janvier 1976), art 2, para 1; Convention contre la torture, supra note 65, art 2, para 1; Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, 9 décembre 1948, 78 RTNU 277 (entrée en vigueur: 12 janvier 1951), art 5.

120 Voir Accord instituant l’Organisation mondiale du commerce, 15 avril 1994, 1867 RTNU 3 (entrée en vigueur: 1er janvier 1995), annexe 1A: Accord sur la mise en œuvre de l’article VI de l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994, art 18.4, annexe 1A: Accord sur les subventions et les mesures compensatoires, art 32.5.

121 États-UnisLoi antidumping de 1916 (Plainte des Communautés européennes) (2000), OMC Doc WT/DS136/R à la p 186, para 6.222 (Rapport du Groupe spécial).

122 Voir notamment Union européenne – Mesures antidumping visant certaines chaussures en provenance de Chine (Plainte de la Chine) (2011), OMC Doc WT/DS405/R à la p 91, para 7.112 (Rapport du Groupe spécial); Communautés européennes – Mesures antidumping définitives visant certains éléments de fixation en fer ou en acier (Plainte de la Chine) (2010), OMC Doc WT/DS397/R à la p 89, para 7.137 (Rapport du Groupe spécial); États-Unis – Mesures compensatoires, supra note 56 à la p 111, para 7.158 (Rapport du Groupe spécial); États-Unis – Loi de 2000 sur la compensation pour continuation du dumping et maintien de la subvention (Plainte de l’Australie et al.) (2003), OMC Doc WT/DS217/AB/R et WT/DS234/AB/R à la p 110, para 302 (Rapport de l’Organe d’appel).

123 Union européenne – Mesures antidumping visant le biodiesel (Plainte de l’Argentine) (2016), OMC Doc WT/DS473/R à la p 71, para 7.175 (Rapport du Groupe spécial); États-UnisDirectives sur les cautionnements en douane pour les marchandises assujetties à des droits antidumping/compensateurs (Plainte de l’Inde) (2008), OMC Doc WT/DS345/R à la p 95, para 7.271 (Rapport du Groupe spécial); États-UnisRéexamen à l’extinction des droits antidumping appliqués aux produits plats en acier au carbon traité contre la corrosion (Plainte du Japon) (2003), OMC Doc WT/DS244/AB/R à la p 84, para 211 (Rapport de l’Organe d’appel).

124 Peut-être le système européen constitute-t-il l’exception en la matière. En effet, l’article 1er de la Convention européenne des droits de l’homme, supra note 8, ne statue que sur l’obligation de respecter les droits de l’homme qu’elle consacre, aucune disposition n’engage explicitement les États à prendre les mesures normatives d’un point de vue général visant à leur respect. On a affirmé que l’existence d’un principe relatif à la compatibilité du droit interne reposerait ici sur l’économie générale de la convention (Raspail, supra note 2 à la p 260). On doit se rappeler que dans sa défense dans l’affaire Irlande c Royaume-Uni, en indexant l’incompatibilité des lois en vigueur dans les six comtés de l’Irlande du Nord au regard des articles 3, 5, 6 et 14 de la convention, le Gouvernement d’Irlande inférait de cela que le “Royaume-Uni aurait manqué de la sorte, pour chacun de ces articles, à un engagement interétatique distinct de ses obligations envers les particuliers et découlant de l’article 1 (art. 1).Irlande c Royaume-Uni, n° 5310/71 (18 janvier 1978) au para 236 [italiques ajoutés]. Or, la cour, en accord avec les positions exprimées par la Commission et le Royaume-Uni, a repoussé l’idée d’une “infraction séparée” que suggérerait l’interprétation de l’article 1 (ibid), et ramené la question de la (non)compatibilité du droit anglais tout entier sur le terrain procédural des requêtes interétatiques (ibid aux paras 238, 240–41).

125 Case of Baena-Ricardo et al (Panama) (2001), Inter-Am Ct HR (sér C) n° 72 au para 182; Convention américaine relative aux droits de l’homme, supra note 71, art 2.

126 Urrutia, supra note 118 aux paras 127, 163; Chimbo, supra note 94 aux paras 138–39, 180; de Souza, supra note 94 aux paras 123, 151; Case of the Maya Kaqchikel Indigenous Peoples of Sumpango et al (Guatemala) (2021), Inter-Am Ct HR (sér C) n° 440 au para 156; Case of the Miskito Divers (Lemoth Morris et al) (Honduras) (2021), Inter-Am Ct HR (sér C) n° 432 aux paras 60, 78; Lavy, supra note 73 aux paras 150, 183; Manuela, supra note 92 aux paras 110, 112, 172, 229; Esquivia, supra note 94 au para 120; Prieto and Tumbeiro, supra note 92 aux paras 101, 108; Laubreaux, supra note 55 aux paras 139–41; Case of Vera Rojas et al (Chile) (2021), Inter-Am Ct HR (sér C) n° 439 aux paras 135, 148; Martínez, supra note 118 au para 53; Nina, supra note 94 au para 102; Urrego, supra note 55 aux paras 117, 135–38; Flores, supra note 91 au para 139; Caso Cantoral Benavides (Peru) (2000), Inter-Am Ct HR (sér C) n° 69 au para 178; Case of Barrios Altos (Peru) (2001), Inter-Am Ct HR (sér C) n° 75 au para 43; Case of Suárez-Rosero (Ecuador) (1997), Inter-Am Ct HR (sér C) n° 35 aux paras 98–99; Case of Hilaire, Constantine and Benjamin et al (Trinidad and Tobago) (2002), Inter-Am Ct HR (sér C) n° 94 au para 116; Case of “The Last Temptation of Christ” (Olmedo-Bustos et al) (Chile) (2001), Inter-Am Ct HR (sér C) n° 73 au para 88.

127 Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, 27 juin 1981, 1520 RTNU 217 (entrée en vigueur: 21 octobre 1986).

128 Alex Thomas c République-Unie de Tanzanie, n° 005/2013 (20 novembre 2015) aux paras 135, 137. Dans le même sens, Kennedy Owino Onyachi et Charles John Njoka Mwanini c République-Unie de Tanzanie, n° 003/2015 (28 septembre 2017) aux paras 159–60. Pareille déduction est également tirée à l’examen d’autres instruments juridiques en matière de protection des droits de l’homme; voir notamment Association pour le progrès et la défense des droits des femmes maliennes (APDF) et Institute for Human Rights and Development in Africa (IHRDA) c Mali, n° 04612016 (11 mai 2018) aux paras 120–25.

129 Voir notamment Comité des droits de l’homme, Pavel Levinov v Belarus, Communication n° 2235/2013, 123e sess, Doc NU CCPR/C/123/D/2235/2013 (19 juillet 2018) au para 8.

130 Comité des droits de l’homme, Vasily Poliakov v Belarus, Communication n° 2030/2011, 111e sess, Doc NU CCPR/C/111/D/2030/2011 (17 juillet 2014) au para 7.4 [Poliakov].

131 D’ordinaire, le Comité “rappelle que les dispositions de l’article 2 (par. 2) du Pacte énoncent une obligation générale à l’intention des États parties qui ne peut être invoquée isolément dans une communication.” Arab Millis c Algérie, Communication n° 2398/2014, 122e sess, Doc NU CCPR/C/122/D/2398/2014 (6 avril 2018) au para 6.5; Aïcha Habouchi v Algeria, Communication n° 2819/2016, 128e sess, Doc NU CCPR/C/128/D/2819/2016 (27 mars 2020) au para 7.5; Nell Toussaint c Canada, Communication n° 2348/2014, 123e sess, Doc NU CCPR/C/123/D/2348/2014 (24 juillet 2018) au para 10.12; Rafael Rodríguez Castañeda c Mexique, Communication no 2202/2012, 108e sess, Doc NU CCPR/C/108/D/2202/2012 (18 juillet 2013) au para 6.8; Juan Peirano Basso v Uruguay, Communication n° 1887/2009, 100e sess, Doc NU CCPR/C/100/D/1887/2009 (19 octobre 2010) au para 9.4; M. Andrew Rogerson c Australie, Communication n° 802/1998, 74e sess, Doc NU CCPR/C/74/D/802/1998 (3 avril 2002) au para 7.9.

132 Voir notamment Poliakov, supra note 130 au para 7.4 (“[t]he Committee notes, however, that the author has already alleged a violation of his rights under article 21, resulting from the interpretation and application of the existing laws of the State party, and the Committee does not consider that examination of whether the State party also violated its general obligations under article 2, paragraph 2, of the Covenant, read in conjunction with article 21, to be distinct from examination of the violation of the author’s rights under article 21 of the Covenant. The Committee therefore considers that the author’s claims in this regard are incompatible with article 2 of the Covenant, and inadmissible under article 3 of the Optional Protocol”).

133 Case of the National Association of Discharged and Retired employees of the National Tax Administration Superintendence (ANCEJUB-SUNAT) (Peru) (2019), Inter-Am Ct HR (sér C) n° 362 au para 204. Voir aussi Laubreaux, supra note 55 au para 125.

134 États-UnisMesures relatives à la réduction à zéro et aux réexamens à l’extinction (Plainte du Japon) (2006), OMC Doc WT/DS322/R à la p 206, para 7.171 (Rapport du Groupe spécial) [États-UnisMesures relatives à la réduction à zéro].

135 États-Unis – Mesures antidumping visant les produits tubulaires pour champs pétrolifères (Plainte du Mexique) (2005), OMC Doc WT/DS282/R à la p 72, para 7.187 (Rapport du Groupe spécial).

136 Ibid au para 7.189.

137 Voir notamment États-Unis – Mesures compensatoires visant certains produits plats en acier au carbone laminés à chaud (Plainte de l’Inde) (2014), OMC Doc WT/DS436/R à la p 189, para 7.537 (Rapport du Groupe spécial); États-UnisMesures relatives à la réduction à zéro, supra note 134 à la p 207, para 7.174; États-UnisLois, réglementations et méthode de calcul des marges de dumping (“réduction à zéro”) (Plainte des Communautés européennes) (2006), OMC Doc WT/DS294/AB/R à la p 77, para 172 (Rapport de l’Organe d’appel); États-Unis – Réexamens à l’extinction des mesures antidumping visant les produits tubulaires pour champs pétrolifères (Plainte de l’Argentine) (2004), OMC Doc WT/DS268/R à la p 93, para 7.342 (Rapport du Groupe spécial).

138 Voir par ex Hélène Raspail, supra note 2 à la p 276 (qui considère le fait illicite résultant de la violation de l’obligation générale comme “platonique”).

139 On convoquera la pertinente remarque de Pierre-Marie Dupuy: “La commission d’un fait illicite constitue en effet généralement une double atteinte: à la règle de droit, d’une part, à un intérêt juridiquement protégé, d’autre part. Or [sic: Ou ?], si l’on préfère, le fait illicite équivaut à la fois à une méconnaissance du Droit et d’un droit.” Voir Pierre-Marie Dupuy, “Le fait générateur de la responsabilité internationale des États” (1984) 188 RCADI 9 à la p 94.

140 CDI, “Projet d’articles sur la responsabilité des États pour fait internationalement illicite” dans “Rapport de la cinquante-troisième session,” supra note 10 à la p 26, para 76.

141 Convention contre la torture, supra note 65.

142 Questions concernant l’obligation de poursuivre, supra note 66 à la p 451, para 75 [italiques ajoutés].

143 Ibid au para 74 [italiques ajoutés].

144 Ibid aux pp 451–52 [italiques ajoutés]. La cour conclut, sous cette implication, à la violation des deux dispositions indexées. Ibid à la p 454, paras 86–88; pp 460–61, paras 114–17.

145 Actions pour la protection des droits de l’homme (APDH) c République de Côte d’Ivoire, n° 001/2014 (18 novembre 2016) aux paras 3, 20 [APDH]. Les instruments en question sont les suivants: Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, supra note 127, arts 3, 13(1), (2); Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance, 30 janvier 2007, en ligne: <www.refworld.org/cgi-bin/texis/vtx/rwmain?docid=493fe2b62> (entrée en vigueur:15 février 2012), arts 10(3) et 17(1); Déclaration universelle des droits de l’Homme, Rés AG 217 A (III), Doc off AG NU, 3e sess, supp n° 13, Doc NU A/810 (1948) 71, art 1er; PIDCP, supra note 36 à la p 195, art 26.

146 APDH, supra note 145 aux paras 135–36 [italiques ajoutés].

147 Sur l’analyse de cette décision, voir aussi Alain Didier Olinga, “La promotion de la démocratie et d’un ordre constitutionnel de qualité par le système africain des droits fondamentaux: entre acquis et défis” (2017) Ann Africain droits de l’homme 221 aux pp 242–43.

148 Kelsen, “Les rapports de système,” supra note 1 à la p 317; Christian Dominicé, “Observations sur les droits de l’État victime d’un fait internationalement illicite” dans Christian Dominicé, dir, L’ordre juridique international entre tradition et innovation, Genève, Graduate Institute Publications, 1997 au para 23, en ligne: <books.openedition.org/iheid/1351>; Virally, “Sur un pont aux ânes,” supra note 1 aux pp 500, 505.

149 Triepel, supra note 1 aux pp 103–04; Anzilotti, Cours de droit international, supra note 1 aux pp 57–58.

150 Santulli, supra note 2 aux pp 31–32.

151 Récemment développée par Jacques Dehaussy. Voir Dehaussy, supra note 1 aux pp 483 et 510–34.

152 Triepel, supra note 1 aux pp 104–05; Anzilotti, Cours de droit international, supra note 1 aux pp 51, 57; Walz, supra note 1 aux pp 433–34; Nicolas-Socrate Politis, “Le problème des limitations de la souveraineté et la théorie de l’abus des droits dans les rapports internationaux” (1925) 6 RCADI 1 aux pp 37–38; Virally, “Sur un pont aux ânes,” supra note 1 aux pp 496–97. Voir aussi Hostert, supra note 58 à la p 117.