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Sémantique temporelle et accord du participe passé en français parlé: une analyse variationniste1

Published online by Cambridge University Press:  17 January 2014

DAMIEN GAUCHER*
Affiliation:
University of Exeter
*
Adresse pour correspondance: University of ExeterQueen's BuildingThe Queen's Drive Exeter, Devon EX4 4QH Royaume-Uni e-mail: D.F.R.Gaucher@exeter.ac.uk
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Résumé

Dans cet article, nous analysons l'influence de la valeur aspectuo-temporelle attribuée aux formes composées sur la fréquence d’accord du participe passé (APP). On sait que l'APP est variable dans les usages de la langue parlée, notamment lorsqu’il est employé avec l'auxiliaire avoir. Partant de l'observation de corpus de langue parlée, et d’une approche variationniste, nous évaluons la fréquence d’accord des participes féminins potentiellement audibles, en fonction de l'effet de sens qui est attribué à la séquence [avoir (pres) + PP], selon qu’il est évalué comme ‘résultant’ ou ‘événementiel’ selon la terminologie de Desclés et Guentcheva (2003). Les résultats de cette analyse laissent entrevoir une influence faible mais relativement constante de ce facteur sémantique sur l'APP, et soulèvent plus avant la question de la présence d’éléments spécifiques au médium oral comme facteurs d’influence sur le marquage morphologique du genre; en d’autres termes, de l'existence d’une grammaire spontanée de l'oral (Branca-Rosoff, 2005).

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Copyright © Cambridge University Press 2014 

1 INTRODUCTION

L’étude des usages du français parlé contemporain a montré que ce mode de communication s’organise dans un rapport de tension vis-à-vis de la norme; celle-ci semble agir comme un pôle d’attraction, dont s’écartent les productions ‘non standard’, ‘informelles’, ‘non normatives’ (Gadet, Reference Gadet1997, Reference Gadet2007; Blanche-Benveniste, Reference Blanche-Benveniste2010a, Reference Blanche-Benveniste2010b). Le poids de la norme transparait aussi bien dans les discours métalinguistiques que dans la variation des productions langagières, et l'on y associe aisément autorité, prestige et instruction. L’écart que l'on peut constater entre les usages ‘informels’ et les pratiques normées de la langue parlée a soulevé, d’une part, des interrogations sur l'existence d’une acquisition en deux temps, désignée par la dichotomie entre ‘grammaire première’ et ‘grammaire seconde’ (Blanche-Benveniste, Reference Blanche-Benveniste1990); il a d’autre part contribué à stimuler le débat sociolinguistique sur la présence d’une diglossie au sein de la langue parlée (Zribi-Hertz, 2011; Coveney, Reference Coveney, Martineau and Nadasdi2011).

L’accord du participe passé (plus loin APP), dont on attribue l'implantation normative dans la langue française au poète du xvie siècle Marot (Audibert-Gibier, Reference Audibert-Gibier1992; Branca-Rosoff, Reference Branca-Rosoff, Abecassis, Ayosso and Vialleton2005), constitue un phénomène particulièrement représentatif de cette tension. Car si l'on peut considérer un accord non-réalisé comme une ‘faute qui n’en est plus une’ (Blanche-Benveniste, Reference Blanche-Benveniste2010a), on peut tout aussi facilement constater le malaise qui continue d’entourer la production ou l'omission de celui-ci. Les exemples (1) et (2) sont assez parlants dans ce sens: le locuteur (K), un humoriste enregistré pour une émission de radio, hésite ouvertement sur la forme du participe comprise, dans un premier temps avec avoir. La confusion va même prendre le pas sur le ‘naturel’ des usages, puisque l'hésitation porte ensuite sur une forme complexe avec être; l'invité va pourtant demander confirmation de la ‘règle’ à la journaliste (J), règle qui porte à l'évidence sur l'accord avec avoir:

  1. (1) J : qu’est-ce qui vous a fait // comprendre que c’était possible // de gagner votre vie en étant comédien en- en faisant de la scène en tout cas // et puis en écrivant

    K : en fait y a une chose que j’ai compri::se comprise une chose que j’ai comprise ça s’accorde une chose que j’ai vue que j’ai écoutée comprise enfin que j’ai comprise

    J : ouais / le C.O.D. est avant

    K : ouais une chose que j’ai comprise

  2. (2) K : y a - y a un truc qui est important dans l'humour c’est l'inconscient collectif / c’est de faire une blague et d’être sûr en citant une référence qu’elle va être / comprise // nan je crois qu’il s’accorde là comprise // (rires) tu galères comme moi à l'accorder comprise // c’est quoi la règle /

    J : euh // quand le complément d’objet direct est avant le verbe avoir ça s’accorde

    K : d’accordFootnote 2

Dans le cadre de l'acquisition des finales de participes passés à l'écrit, Brissaud et Cogis (Reference Brissaud and Cogis2008) considèrent que l'APP avec avoir représente une surcharge cognitive. Or celle-ci est encore plus marquante dans l'oral spontané, pour diverses raisons:

  • - le mode de communication oral ‘[rend] plus difficile le retour métalinguistique sur les productions langagières’ (Branca-Rosoff, Reference Branca-Rosoff, Abecassis, Ayosso and Vialleton2005 : 61);

  • - la construction du discours oral s’inscrit dans une dimension d’engagement et de coopération (Gadet, Reference Gadet2007), ce qui permet notamment la résolution en direct de références ambiguës. Le pouvoir de résolution sémantique attribuable à l'accord (Smith, Reference Smith1996), déjà mis à mal par la rareté de ses apparitions, en est fortement diminué, au point d’être considéré comme caduc: ‘Que l'on dise la décision que j’ai pris ou bien la décision que j’ai prise, le même sens est transmis’ (Branca-Rosoff, Reference Branca-Rosoff, Abecassis, Ayosso and Vialleton2005 : 61).

Aussi, la simple connaissance ou l'application des règles grammaticales ne suffisent pas à évaluer le taux de production de l'APP à l'oral: d’autres éléments entrent en compte, que seule l'analyse des corpus de français parlé permet de délimiter. Certains de ces éléments favorisent l'hypothèse d’une réorganisation naturelle et inconsciente du système morphosyntaxique, construite à partir des pratiques normées, conditionnée par le mode de communication oral, et adaptée aux propriétés qui lui sont spécifiques; en d’autres termes, d’une grammaire spontanée (Branca-Rosoff, Reference Branca-Rosoff, Abecassis, Ayosso and Vialleton2005). Les travaux d’Audibert-Gibier (Reference Audibert-Gibier1992) ont par exemple fait ressortir le facteur désormais incontournable de ‘zone postverbale’, relatif à la saillance du participe dans la chaîne prosodique: ainsi, (3) et (4) illustrent respectivement une zone postverbale vide et une zone postverbale pleine.

  1. (3) TV : Ah vous vous êtes fait prendre en photo par un passant qui passait

    EV : C’est euh une dame sur la terrasse qui nous a pris [PFC, 50aev1lg]Footnote 3

  2. (4) celles-là / c’est Marie hier / # qui me les a portées de Géant Casino la Valentine // elle les a ach [/] # pris là-bas [C-ORAL-ROM, ffamdl23]

Branca-Rosoff (Reference Branca-Rosoff, Abecassis, Ayosso and Vialleton2005 : 70) a émis l'éventualité d’une influence lexicale sur l'accord, dans le contexte stylistique bien défini de la prise de parole publique: ainsi, une phrase comme ‘les décisions que j’ai prises’ relèverait au moins autant d’une utilisation formulaïque que d’une réelle maîtrise de l'accord. Il serait intéressant, par ailleurs, d’en évaluer la répercussion chez les locuteurs non-spécialistes de la parole publique.

Dans la perspective variationniste qui constitue le socle de la présente étude, l'influence de ces divers facteurs sur l'APP, ainsi que leur interdépendance, est évaluée à l'aide d’outils statistiques, en comparaison avec d’autres variables linguistiques, comme la nature de l'antécédent (Audibert-Gibier, Reference Audibert-Gibier1992; Smith, Reference Smith1996)Footnote 4 ou le phénomène d’homonymie (Blanche-Benveniste, Reference Blanche-Benveniste, Guillot, Heiden and Prévost2006); certaines variables sociales ont également été prises en compte: notamment l'âge et le niveau d’éducation des informateurs (Audibert-Gibier, Reference Audibert-Gibier1992).

Or, parmi les divers facteurs qui suggèrent la présence d’une grammaire spontanée, Blanche-Benveniste (Reference Blanche-Benveniste, Guillot, Heiden and Prévost2006, Reference Blanche-Benveniste2010b) a souligné l'influence, certes modeste, mais présente, de la valeur sémantique du participe sur l'accord, caractérisée par une dichotomie entre aspect et temps:

Il semble que les accords se font plus naturellement lorsque le participe passé exprime un état atteint par ce que représente le complément. Quand les locuteurs disent la faute qu’on avait faite, « la faute » est considérée comme ayant atteint l'état de « faute faite » (…): la faute qu’on avait faite on la recopiait (Blanche-Benveniste, Reference Blanche-Benveniste2010b : 150)

Nous reprendrons en trois points l'hypothèse que pose ici Blanche-Benveniste, pour les développer au cours de la prochaine section, et arriver aux questions de recherche qui nous intéressent:

  1. a) Le participe passé est une forme polysémique, qui évolue entre la représentation d’un état atteint (valeur résultante) et celle d’un procès révolu (valeur d’accompli).

  2. b) Cette polysémie existe, dans une certaine proportion, au sein de certaines séquences composées, notamment [avoir + PP].

  3. c) L’accord ‘naturel’ du participe passé est influencé par l'une ou l'autre des variantes sémantiques de cette séquence.

2 DE LA NATURE DOUBLE DU PARTICIPE PASSÉ

2.1 Le participe passé est une forme polysémique, qui évolue entre la représentation d’un état atteint (valeur résultante) et celle d’un procès révolu (valeur d’accompli)

‘Résultat de l'adjectivation du verbe’ (Arrivé et al., Reference Arrivé, Gadet and Galmiche1986 : 471), le participe passé conserve les propriétés sémantiques du procès qu’il laisse envisager comme accompli (Riegel et al., Reference Riegel, Pellat and Rioul2004). Il permet néanmoins, le cas échéant, d’exprimer une propriété sur le support nominal auquel il se réfère (Wilmet, Reference Wilmet1999); à l'instar d’un adjectif, il agit comme modificateur notionnel, et s’accorde en genre et en nombre avec ce support.

On reconnaît ainsi une double valeur du participe, verbale et adjectivale; pouvant exprimer à la fois l'accompli et le résultant. Les emplois du participe se développent le long de cette opposition entre les deux valeurs, en fonction notamment de la séquence au sein de laquelle ce participe apparaît (Riegel et al., Reference Riegel, Pellat and Rioul2004). Ainsi, les séquences employées avec avoir, de même que les séquences pronominales [s’être + PP], sont perçues comme verbales;Footnote 5 d’après les observations de Buchard et Carlier (Reference Buchard and Carlier2008), l'ensemble des structures possibles avec la séquence [être + PP] s’inscrit en revanche à cheval sur les deux catégories. Enfin, l'absence d’auxiliaire classe systématiquement le participe comme adjectif (Riegel et al., Reference Riegel, Pellat and Rioul2004), même si la qualification du nom se crée par une relation autre qu’attributive (Wilmet, Reference Wilmet1999 : 336).

Le tableau 1, qui est représentatif des corpus utilisés dans cette étude et détaillés dans la section 2, résume cette classification; il montre également les fréquences d’accords rencontrées dans ces diverses catégories.Footnote 6 On y constate une corrélation entre, d’une part, le taux d’accord relatif observé, et d’autre part, les critères formels qui caractérisent chacune de ces séquences: on voit notamment à quel point la séquence [avoir + PP] se détache des autres constructions, et constitue un phénomène bien particulier de l'APP; c’est la raison pour laquelle cet article se focalisera uniquement sur cette construction. Par ailleurs, ces chiffres reflètent une classification assez générale: il serait nécessaire d’observer les autres séquences en fonction de la structure argumentale qui les caractérise, ainsi que de l'effet de sens qu’elles véhiculent (Buchard et Carlier, Reference Buchard and Carlier2008).

Tableau 1. Fréquence d’accord en fonction du type de séquence employé.

Pour les besoins de cette étude, nous prendrons comme point de référence les séquences [avoir (pres) + PP], qui représentent le tiroir verbal ‘passé composé’. Le choix de ce temps grammatical est motivé par des raisons pratiques: il est d’une part très représentatif de la dichotomie entre aspect et temps, et d’autre part, il constitue une grande majorité des occurrences dans notre corpus (265 occurrences sur 318).

2.2 Cette polysémie existe, dans une certaine proportion, au sein de certaines séquences composées, notamment [avoir + PP]

La polysémie sur laquelle repose cette hypothèse ne dépend pas, à la différence des emplois mentionnés plus haut, de critères syntaxiques. Par ailleurs, ce n’est pas tant la valeur du participe qui est évaluée, qu’un effet de sens qui lui est attribué par le contexte (Gosselin, Reference Gosselin1996): le participe dans les séquences [avoir + PP] reste principalement verbal, à valeur d’accompli (Riegel et al., Reference Riegel, Pellat and Rioul2004; Creissels, Reference Creissels2000). Néanmoins, cette forme composée se distingue par une propension à supporter divers effets de sens, qui ont été décrits à de nombreuses reprises, notamment en raison des diverses implications théoriques et applications pratiques que cette ambiguïté sémantique suppose: description fonctionnelle de la forme polysémique (Benveniste, Reference Benveniste1966; Gosselin, Reference Gosselin1996; Wilmet, Reference Wilmet1999; Barceló et Bres, Reference Barceló and Bres2006); analyse diachronique (Wilmet, Reference Wilmet1992; Mellet, Reference Mellet2000); application à la traduction (Vet, Reference Vet1992), à l'acquisition (Labelle, Reference Labelle1994), ou au traitement automatique des langues (Desclés et Guentcheva, Reference Desclés and Guentcheva2003); définition théorique du contexte de résolution des ambiguïtés (Sthioul, Reference Sthioul, Vogeleer, Borillo, Vetters and Vuillaume1998). De ces diverses analyses, on peut faire ressortir les deux grands effets de sens décrits ci-dessous. Du reste, notons que du grand nombre d’études découle un grand nombre d’emplois terminologiques: pour la description qui suit, nous adopterons la terminologie employée par Desclés et Guentcheva (Reference Desclés and Guentcheva2003).

Le premier effet de sens (ES) est celui d’état résultant. Cette interprétation reste la plus proche de celle véhiculée par le parfait latin (Wilmet, Reference Wilmet1992; Riegel et al., Reference Riegel, Pellat and Rioul2004); sémantiquement, elle se caractérise par la présence d’un ‘état contigu à l'événement qui lui a donné naissance’ (Desclés et Guentcheva, Reference Desclés and Guentcheva2003: 49), état qui a une incidence sur le moment de l'énonciation. Rappelons que la séquence en question, [avoir + PP], est une forme verbale grammaticalisée (Posner, Reference Posner1997), que l'on ne saurait appréhender comme un ensemble d’éléments lexicaux. Il n’en reste pas moins que cet emploi permet une relative marge d’interprétation analytique. On peut ainsi replacer le lien d’attribution entre l'objet et le participe en contexte (car seul le contexte permet de déterminer une interprétation de la forme composée), notamment au moyen d’une glose au passif (Blanche-Benveniste, 1996), comme dans l'exemple (5.a), reformulé à partir de (5).

  1. (5) j’émets mes idées et puis euh deux jours plus tard je peux reprendre les phrases que j’ai écrites les retransformer les arranger [Valibel, 1991, ilrMD1r]

    1. (5.a) je peux reprendre les phrases qui sont écrites

On notera une limite à cette glose, en raison du glissement sémantique qui résulte de l'opération même de passivation (omission de l'agent sémantique). Par ailleurs, si cette reformulation s’applique sans problème majeur à certains prédicats (écrire des phrases), d’autres paraissent moins naturels: c’est le cas de l'exemple (6), où la glose il y a tout un tas d’expressions qui sont mises / qui sont prises à son compte semblerait à tout le moins maladroite.

  1. (6) i-y-a tout un tas de / d’expressions comme ça qu’elle met à et qu’elle a mises hein et qu’elle a même prises à son compte [Valibel, 1988, accTJ1r]

Face à cet effet de sens d’état résultant, on trouve celui d’événement. Dans les usages de la langue parlée, l'emploi du temps grammatical passé composé s’est progressivement substitué à l'utilisation du passé simple pour l'expression de procès révolus (Riegel et al., Reference Riegel, Pellat and Rioul2004; Wilmet, Reference Wilmet1992); si les tenants et aboutissants de cette substitution forment matière à débat (Benveniste, Reference Benveniste1966; Wilmet, Reference Wilmet1992; Lamiroy, Reference Lamiroy2011), il n’en subsiste pas moins une ligne de démarcation assez claire entre les deux effets de sens: avec un ES d’événement, le résultat de l'accomplissement du procès, et le lien d’attribution entre l'objet et le participe qui en résulte, ne sont pas perçus comme ayant une incidence sur le moment de l'énonciation. Il en ressort une interprétation de cette forme davantage synthétique, et les gloses permettant de retracer le lien d’attribution laissent au mieux entrevoir une situation temporelle différente (une construction passive au présent, ou un présent de narration, plutôt qu’un résultat), au pire un énoncé irrecevable. Nous avons modifié l'exemple (5) de façon à lui ajouter un repère temporel défini (5.b) et à procéder au même test de glose en (5.c), pour constater l'incompatibilité de ces deux effets de sens.

  1. (5.b) je peux reprendre les phrases que j’ai écrites il y a deux jours

  2. (5.c) ? je peux reprendre les phrases qui sont écrites il y a deux jours

On remarque alors que c’est bien en contexte que se traduit la compatibilité de la glose. Dans cet exemple, le remplacement d’il y a par le connecteur depuis, qui inclut implicitement le moment de l'énonciation (Riegel, Reference Riegel, Pellat and Rioul2004: 300), nous permet de retrouver une compatibilité aspectuelle:

  1. (5.d) je peux reprendre les phrases qui sont écrites depuis deux jours

À partir de ce trait polysémique de la forme composée, on peut envisager l'éventualité d’un traitement différent du participe, selon qu’il dénote ou non un état résultant saillant par rapport au moment de référence. La marque de l'accord du participe à l'oral serait alors l'un des outils qui permettraient de mesurer une telle différence de traitement; faisant suite à l'hypothèse de Blanche-Benveniste (Reference Blanche-Benveniste2010a), nous émettrons les questions de recherche suivantes:

  • - Peut-on discerner une différence dans la fréquence d’accord du participe passé, entre les ES résultants et les ES événementiels?

  • - Cette éventuelle différence est-elle dépendante d’autres variables, comme par exemple la zone postverbale?

2.3 L’accord ‘naturel’ du participe passé est influencé par l'une ou l'autre des variantes sémantiques de cette séquence

Au-delà de l'observation des fréquences, il s’agira de comprendre dans quelle mesure les usages de la langue manifestent la différence entre les deux types de participes étudiés plus haut. Pour faire court: l'accord étant plus ‘naturel’ dans les occurrences d’ES résultants, selon Blanche-Benveniste, y est-il également plus courant? Et permet-il de considérer que les participes des ES résultants sont plus adjectivaux que ceux des ES événementiels? D’autre part, dans quelle mesure l'interaction de cette variable avec la ZPV nous permet-elle de considérer qu’à l'oral, l'APP suit un ensemble de règles ‘totalement différentes de celles de l'écrit’ (Blanche-Benveniste, Reference Blanche-Benveniste1990)?

3 MÉTHODOLOGIE

Les observations présentées dans cet article sont le fruit d’une analyse quantitative, inspirée des méthodes de la linguistique de corpus et de la sociolinguistique variationniste (Labov, Reference Labov1976; Cappeau et Gadet, Reference Gadet2007). Cette dernière approche suggère qu’il existe, pour des formes sémantiquement équivalentes, une variation conditionnée par un certain nombre de facteurs linguistiques, stylistiques et sociaux, dont il revient à l'enquêteur d’évaluer l'importance, par une observation systématique des fréquences d’emploi au sein du corpus analysé.

Dans cette optique, l'accord du participe passé a été considéré comme une réelle variable sociolinguistique (Branca-Rosoff, Reference Branca-Rosoff, Abecassis, Ayosso and Vialleton2005). Par ailleurs, si la présence d’une éventuelle corrélation entre l'APP et l'effet de sens de la forme composée venait à être avérée, celle-ci ne saurait être analysée que de façon unilatérale: le contexte, qui entoure le participe et favorise potentiellement l'interprétation d’un effet de sens, peut également influencer l'accord. En revanche, l'accord seul ne peut favoriser l'une ou l'autre interprétation (Blanche-Benveniste, Reference Blanche-Benveniste, Guillot, Heiden and Prévost2006). Cependant, pour éviter toute influence méthodologique, et tout risque que la présence de l'accord n’influence l'analyste d’une manière ou d’une autre, toutes les occurrences ont été analysées ‘masquées’, c’est-à-dire sans que la marque d’accord n’apparaisse sur le participe en question.Footnote 7

L’étude s’écarte en revanche des schémas canoniques d’enquêtes sociolinguistiques, dont l'objectif principal est l'étude de la ‘communauté sociale sous son aspect linguistique’ (Calvet, Reference Calvet1994 : 116), et le domaine motivé par la recherche d’une unité de cette communauté comme point de repère du changement linguistique: unité géographique, chronologique, structurelle, etc.

Or, l'APP est une variable rare, notamment dans le sens où elle apparaît de manière très sporadique dans les situations de communication liées au format des enquêtes sociolinguistiques. Et quand bien même une série d’entretiens sociolinguistiques veillant à provoquer la production de formes composées serait réalisée, format conseillé dans le cas des variables peu fréquentes (Coveney, Reference Coveney2007; Cappeau et Gadet, Reference Gadet2007; Carruthers, Reference Carruthers1999), rien n’indique qu’on y trouverait des cas d’antéposition d’un objet de genre féminin avec un participe à finale audible.

Aussi, dans le cadre d’une analyse quantitative, il a fallu trouver un compromis entre cette question de la détermination de la communauté sociale et la question très pragmatique du nombre d’occurrences. La ‘communauté’ a donc été élargie à l'espace francophone européen, et l'analyse réalisée à partir de corpus existants et disponibles, de façon à obtenir une quantité suffisante d’occurrences sur un ensemble géographique et chronologique relativement homogène.Footnote 8

Le tableau 2 récapitule la nature de chaque corpus, ainsi que la proportion qu’il occupe dans l'ensemble des données exploitées, en nombre de mots et en nombre d’occurrences de la variable [avoir + PP]. Cette banque de données regroupe ainsi le corpus mis à disposition par l'équipe ValibelFootnote 9 (Dister et al., Reference Dister, Francard, Hambye and Simon2007); celui compilé pour le projet Phonologie du français contemporain (Durand et al., Reference Durand, Laks, Lyche, Pusch and Raible2002, Reference Durand, Laks, Lyche, Durand, Laks and Lyche2009); le Corpus de Français Parlé Parisien des années 2000 (Branca-Rosoff et al., Reference Branca-Rosoff, Fleury, Lefeuvre and Pires2009), et le projet C-ORAL-ROM, dont les corpus de langue française ont été recueillis par l'équipe DELIC (Cresti et Moneglia, 2005).

Tableau 2. Répartition des données de corpus par projet.

Les quelque six millions de mots que ce corpus représente ont ainsi permis de récolter un total de 318 séquences [avoir + PP] avec une finale audible. Dans 265 de ces séquences, l'auxiliaire avoir est au présent. On y trouve un certain équilibre dans la proportion d’accord, puisque 129 formes sur 265 sont accordées (49 %) contre 136 formes non accordées (51 %).

La classification de ces formes a été effectuée en fonction de l'effet de sens attribuable à la forme composée, et véhiculé par le contexte linguistique. Les caractéristiques déterminées pour cette organisation ont été choisies suite aux recommandations fournies par Desclés et Guentcheva (2003) sur les méthodes de filtrage des valeurs aspectuo-temporelles du passé composé.

Ainsi, ont été classifiées comme effets de sens résultants les séquences qui constituent un cas d’antériorité entre deux procès, comme dans l'exemple (5); celles qui, par un principe de reformulation, se situent sur un axe paradigmatique analogue à une forme simple au présent (6). Nous avons également inclus les séquences qui entrent en interaction avec un élément déictique impliquant le moment de l'énonciation (Palmer, Reference Palmer1974), comme dans l'exemple (7), et plus largement, nous avons considéré comme ES résultants les cas d’interaction d’un passé composé avec des formes au temps grammatical présent (8).

  1. (5) là j’écris euh / là j’émets mes idées et puis euh deux jours plus tard je peux reprendre les phrases que j’ai écrites les retransformer les arranger [Valibel, 1991, ilrMD1r]

  2. (6) i-y-a tout un tas de / d’expressions comme ça qu’elle met à et qu’elle a mises hein et qu’elle a même prises à son compte [Valibel, 1988, accTJ1r]

  3. (7) vos façons euh le marché maintenant les fruits exotiques sont: très très / sont très présents euh / est-ce que vous diriez que: // il y a des choses que vous avez découvert plus ou moins récemment [CFPP, Beysson_19_7]

  4. (8) tous les succès que j’ai toutes les toutes les convictions que j’ai emportées ou que j’ai transmises viennent effectivement de: / de mon expression ou de la manière dont je dont je parlais [Valibel, 1995, ilpML2r]

Parmi les éléments qui permettent de déduire un effet de sens événementiel, on peut inclure la présence, en contexte, de marqueurs de repérage temporels indiquant une rupture avec la situation d’énonciation, à l'image des exemples (10) et (11), où l’année passée et lorsque vous étiez petite fille manifestent cette rupture. Notons que ces indices ont un caractère rédhibitoire: ils annulent toute interprétation résultante, à l'instar de l'anglais standard, où une phrase comme « *They’ve come last Monday » est considérée irrecevable (Palmer, Reference Palmer1974). Une interprétation événementielle peut également être prise en compte lorsque les formes sont présentées dans une logique de récit, comme en (12), où les connecteurs et puis et après favorisent l'interprétation du passé composé comme faisant partie d’une consécution d’événements; la présence d’une séquence au plus-que-parfait permet également de saisir la logique temporelle de l'énoncé.

  1. (10) c’est une jupE: que j’ai fait euh l'année passée / c’est / il y a plusieurs euh c’est repris c’est repris ici [Valibel, 1991, ilrPS1r]

  2. (11) oui et lorsque vous étiez petite fille est-ce qu’on vous a repris beaucoup si vous faisiez des fautes [PFC, 75cab1lg]

  3. (12) parce que je me suis mariée tôt hein je m’étais mariée à dix-neuf ans, donc j’avais arrêté, mes études et puis je les ai repris après. [PFC, blavm1gg]

Notons que ces indices, s’ils sont nécessaires, ne sont pas toujours pour autant suffisants, et que la classification faite ci-dessus ne peut que difficilement se faire sans une appréhension globale du contexte, appréhension qui dépasse parfois le co-texte. Ainsi, dans l'exemple (13), le principe d’incidence sur le moment de l'énonciation dépend de critères qui impliquent la connaissance du réel, en l'occurrence l'âge du locuteur, qui fournit des indications sur la nature de la relation entre l'état résultant (les chansons sont apprises) et l'action qui a engendré cet état. Il est ainsi probable que la locution à l'école soit d’actualité, si l'informateur qui a produit l'exemple (13) est en cours de scolarité; en revanche, si ce dernier a terminé sa scolarité (ce qui est le cas de cet exemple), à l'école dénote aussi bien un lieu qu’une époque, ce qui nous permet d’interpréter la séquence comme révolue, donc événementielle (quand bien même les chansons seraient toujours dans l'état apprises).

  1. (13) – est-ce que tu sais parler patois ?

    – euh, des chansons

    tu les as appris à l'école ?

    – euh, oui, des euh des chants comme l'hymne à la joie

    [PFC, 81aaa1gg]

Parmi les formes analysées, il en est par ailleurs resté quelques-unes dont l'interprétation s’est avérée insoluble, à l'image de (14): le contexte qui entoure la forme composée donne d’une part certains indices qui laissent entrevoir un effet de sens résultant, une pertinence sur le moment de l'énonciation (vous êtes en train de vous préparer), et d’autre part, des indices qui inscrivent le procès dans une logique temporelle (présence d’un plus-que-parfait, consécution de procès). Une enquête auprès de locuteurs anglophones a permis de confirmer cette ambiguïté: la forme composée (‘present perfect’) et la forme simple (‘preterit’) de l'anglais semblent toutes deux être possibles pour traduire la forme.

  1. (14) – cette année-ci aussi vers le mois de mars

    – c’est pas encore passé

    – non / ils l'avaient mis un mercredi mais commE: / on a rouspété parce-qu’ on n’ avait pas toute la journée / i -z- ont changé ils l'ont mis un vendredi

    – vous êtes en train de vous préparer

    – pas encore puisqu’on sait pas la date (silence)

    [Valibel, 1991, ilrWN1r]

Ce système de classification a permis d’organiser les 265 formes comme suit: 134 ES résultants, 120 ES événementiels, 11 formes indéterminées. La section suivante détaille l'ensemble des tests quantitatifs et statistiques réalisés sur ces formes classées.

4 RÉSULTATS

Le premier de ces résultats, affiché dans le tableau 3, répond à l'hypothèse principale de cette étude:

Tableau 3. Fréquence d’accord en fonction de l'effet de sens (ES) attribué à la séquence [avoir (pres) + participe passé]. La lettre a correspond au nombre de formes accordées; la lettre n, au nombre total de formes relevées.

H1: La valeur sémantique du passé composé a une influence (favorisante ou inhibante) sur le taux d’accord.

Parmi les 134 formes considérées comme états résultants, 73 portent la marque phonétique de l'accord, ce qui représente un taux d’accord d’un peu plus de 54 %; parmi les formes classifiées comme événementielles on en compte 52, soit environ 43 %, d’accordées. On constate donc un écart entre les deux fréquences relatives, écart qui correspond à l'hypothèse suggérée par Blanche-Benveniste (Reference Blanche-Benveniste, Guillot, Heiden and Prévost2006, Reference Blanche-Benveniste2010a). Toutefois, on ne peut pas confirmer statistiquement cette hypothèse, dans la mesure où la probabilité que cet écart corresponde à la réalité des usages dépasse de peu le seuil de signification statistique (test χ2, p = 0.09937). Du reste, même si cette variable d’influence venait à être démontrée, elle resterait relativement faible (environ 11 %), par comparaison à d’autres facteurs linguistiques, notamment la zone postverbale, variable pour laquelle l'écart est beaucoup plus important (autour de 30 %). La série d’histogrammes représentée en figure 1 indique le taux d’écart entre formes accordées et formes non accordées, en fonction de trois facteurs observés pour ce même échantillon d’occurrences; ces graphiques sont classés par ordre d’écart.

Figure 1. Fréquences comparées d’APP en fonction de diverses variables indépendantes. Légende: ZPV = zone postverbale; rés. = Effet de sens résultant; évén = Effet de sens événementiel.

Outre l'importante démarcation de la zone postverbale, on remarque un écart analogue entre les effets de sens d’une part, et la nature de l'antécédent d’autre part: les deux facteurs semblent influencer l'accord dans des proportions similaires. En outre, les analyses croisées qui ont été effectuées révèlent que cette tendance semble relativement stable à travers les catégories, comme le montrent les tableaux 4 et 5. On retrouve ainsi ce même écart dans trois des catégories observées: dans les occurrences où la zone postverbale est vide (environ 11 % d’écart), dans les constructions relatives (env. 9 %), et dans les constructions clitiques (env. 8 %). Seule la catégorie zone postverbale pleine déroge à cette stabilité, puisque l'écart y est inversé (-3,1 %).

Tableau 4. Fréquence d’accord en fonction de la zone postverbale (ZPV) et de l'effet de sens (ES).

Tableau 5. Fréquence d’accord en fonction de la nature de l'antécédent et de l'effet de sens (ES).

Ces résultats attirent l'attention sur des phénomènes périphériques à l'effet de sens. D’une part, on remarque que la probabilité de produire l'accord du participe lorsque la ZPV est vide, en moyenne déjà élevée, l'est encore davantage lorsque la séquence est interprétable comme exprimant un état résultant. Ce taux d’accord élevé (presque 65 %) nous appelle à évaluer le rôle de la saillance dans la production de l'oral spontané. Qu’elle soit de nature prosodique ou sémantique, cette saillance favorise une hypothèse cognitive, fondée sur le principe que l'accord avec avoir est un phénomène mal intégré dans le discours des locuteurs: dans la construction du discours en temps réel, et au vu de la charge métalinguistique que l'APP requiert, les éléments saillants peuvent-ils agir comme un rappel à l'ordre de la norme?

Cependant, une deuxième hypothèse prend le contrepied de cette supposition, sans pour autant être incompatible avec celle-ci. On remarque en effet que la ZPV pleine tend à annuler (voire inverser) l'écart entre la fréquence d’accord attribuée aux ES résultants, et celle attribuée aux ES événementiels. Cette tendance nous invite alors à considérer la ZPV comme un facteur inhibant plutôt que comme un facteur favorisant. Ainsi, ce n’est pas tant l'hypothèse d’un espace suffisant à la gestion de la surcharge cognitive de l'accord qui est évalué, que celle d’une économie relative à la production de l'APP en discours, d’autant plus pertinente en français que la marque de l'accord, à l'inverse de plusieurs autres langues romanes, relève d’une dichotomie de type ‘consonne audible’ contre ‘consonne inaudible’, et non pas ‘voyelle 1’ contre ‘voyelle 2’. Cette hypothèse, ainsi formulée, se distingue de la première, en ceci qu’elle prend comme point de départ l'accord comme une notion intégrée dans la langue des locuteurs, et contrainte seulement par les conditions de la production orale spontanée. Néanmoins, on notera que cette hypothèse est bien moins plausible que la précédente, notamment au vu des études réalisées sur les difficultés que rencontrent les locuteurs francophones lors de l'acquisition de cet accord (Brissaud et Cogis, 2008), qui semblent contredire cette idée d’une flexion intégrée mais bridée.

5 DISCUSSION

Le participe passé est une forme qu’il est difficile de concevoir dans une optique de catégorisation, en raison de la variété de ses emplois; la dualité qui caractérise cette forme se retrouve à divers niveaux d’analyse. Aussi, comme en écho à la distinction entre les verbes d’action concrets et les verbes d’action abstraits mise en évidence dans l'étude de l'acquisition du lexique verbal en L1 (Bassano, Reference Bassano2010), certains travaux ont permis de voir que les participes apparaissent d’abord dans leur emploi résultant, en vertu de la pertinence ostentatoire du résultat au moment de l'énonciation, avant d’évoluer vers des emplois plus abstraits et plus verbaux (Israel et al., Reference Israel, Johnson and Brooks2006). Sémantiquement, le participe semble donc se construire à partir des propriétés fonctionnelles qu’on lui confère, c’est-à-dire comme modifieur du nom.

À un niveau plus tardif de l'acquisition, la distinction subsiste, et ressortit au niveau morphologique: Blanche-Benveniste (Reference Blanche-Benveniste2010a : 76) rappelle que les enfants francophones tendent à distinguer deux valeurs du participe, utilisant par exemple ‘elle a mouru’ pour un emploi verbal, mais ‘elle est morte’ dans une interprétation adjectivale. On la retrouve également dans l'alternance entre les auxiliaires pour un certain nombre de formes. Cette alternance n’a pas le même statut selon le participe employé: on trouve ainsi des formes où la distinction entre aspect et temps est acceptée par la norme (p.ex. changer); d’autres formes sont en revanche perçues comme non normatives, bien qu’elles soient toujours en usage dans certains sociolectes et régiolectes (c’est par exemple le cas de tomber et sortir). La différence aspectuelle y est cependant moins clairement établie, des études sociolinguistiques ayant démontré qu’il existait une part d’arbitraire dans le choix de l'auxiliaire (Sankoff et Thibault, Reference Sankoff and Thibault1977). Enfin, la confusion se rencontre également au niveau graphique: l'étude des commentaires métagraphiques chez des apprenants de L1, réalisée par Brissaud et Cogis (2008), montre une tendance à concevoir le participe dans son emploi verbal, et à accorder celui-ci avec le sujet, ‘sur la base d’un rapprochement entre deux éléments’ (2008 : 419).

Cette tension entre valeur verbale et valeur adjectivale se retrouve de manière assez subtile à des niveaux très spécifiques de l'interprétation des séquences composées. Nous avons vu que les divers effets de sens que l'on peut attribuer à la séquence [avoir (pres) + PP] semblent influencer, de manière certes faible mais stable, l'accord du participe passé. Cette tendance soutient d’une part l'hypothèse d’une différence dans l'interprétation de la valeur du participe au sein des formes composées; et d’autre part, celle de l'existence d’une grammaire spontanée, c’est-à-dire de pratiques grammaticales spécifiques à l'oral, et coexistant avec les pratiques normées.

Rappelons cependant que cette éventuelle influence sémantique est un facteur parmi d’autres, un facteur favorisant ou inhibant de l'APP. Car les formes composées avec avoir sont avant tout soumises aux diverses contraintes syntaxiques ou sémantiques imposées par la norme: on n’envisagerait pas que des variables comme la zone postverbale ou la saillance sémantique puissent influencer l'accord en amont de ces règles d’usage, au point, par exemple, que tous les participes produits dans un contexte faisant ressortir un effet de sens résultant soient accordés, et ce, quelle que soit la position syntaxique de l'antécédent. S’il y a une réorganisation linguistique, une grammaire de l'oral spontané, elle reste tributaire des usages normatifs.

Ces réflexions nous conduisent à réévaluer la question soulevée par Blanche-Benveniste (Reference Blanche-Benveniste1990), et réitérée par Branca-Rosoff (Reference Branca-Rosoff, Abecassis, Ayosso and Vialleton2005): dans quelle mesure peut-on considérer que l'APP avec avoir à l'oral s’inscrit dans la ‘grammaire seconde’ des locuteurs? Cette notion, qui a fait l'objet de diverses interprétations, reste encore à définir (Elalouf, Reference Elalouf2012); nous retiendrons pour notre part la définition proposée par Blanche-Benveniste (Reference Blanche-Benveniste1990): ‘Je crois utile de […] réserver [la notion de grammaire seconde] aux cas où on peut montrer que la tradition grammaticale a imposé une tournure qui s’est partiellement installée dans les usages, sans jamais avoir été vraiment “productive”’ (1990 : 71). Blanche-Benveniste illustre cette notion par l'exemple du pronom clitique en dans les énoncés du type je n’en ai pas vu la couleur, une structure qui apparaît régulièrement dans les ouvrages grammaticaux, mais dont la production orale est assez limitée, voire figée.

L’appartenance de l'APP avec avoir aux éléments de la grammaire seconde est en revanche réfutée par Blanche-Benveniste: prenant pour exemple les occurrences fournies par Audibert-Gibier (Reference Audibert-Gibier1992), elle estime que cet accord a une ‘existence attestée’ dans les productions orales (1990 : 70). L’analyse de ces exemples permet également de voir que l'accord est produit chez un enfant de 7 ans, qui a priori n’a donc pas reçu l'instruction scolaire explicite relative à l'APP;Footnote 10 mais on remarque que la production de l'accord chez les enfants est également variable: et l'on pourrait avancer l'hypothèse que cette variabilité est conforme à celle trouvée chez les adultes. En cela, c’est l'APP comme phénomène sujet à variation, et soumis à des règles d’usages complémentaires à l'antéposition de l'antécédent, que l'on pourrait alors considérer comme une ‘seconde nature’ (1990 : 52), et que l'on pourrait exclure du cadre de la grammaire seconde.

Mais encore faudrait-il pour cela évaluer le caractère homogène de l'acquisition de l'APP, notamment en fonction de l'environnement acquisitionnel; en d’autres termes, ce qui est une seconde nature chez un individu ne l'est peut-être pas chez un autre. On ne peut pour le moment ni infirmer, ni confirmer que l'acquisition de l'accord est un phénomène systématique et naturel, mais on sait en revanche que sa production chez les adultes est conditionnée, non seulement par les facteurs linguistiques que nous avons mentionnés plus haut, mais également par des facteurs sociaux et stylistiques. On n’exclurait donc pas l'hypothèse que l'acquisition de l'APP dans les usages de la langue parlée relève également de ces derniers facteurs, et que les frontières de la grammaire seconde varient selon le contexte social.

Par ailleurs, l'accord de certains participes a été décrit comme non naturel (Blanche-Benveniste, Reference Blanche-Benveniste, Guillot, Heiden and Prévost2006), en raison notamment d’une relation d’homonymie avec un substantif; c’est le cas, notamment, des participes plainte ou conduite. Réaliser cet accord relèverait ainsi d’une forme de résistance contre une pratique naturelle, d’un usage dicté par la seule norme. Il y aurait par conséquent deux types de participes: d’une part, ceux dont l'accord est plus ou moins naturel; d’autre part, les participes pour lesquels l'accord n’a jamais vraiment été ‘productif’, pour reprendre les termes de Blanche-Benveniste et al. (Reference Blanche-Benveniste, Mertens and Willems1990); la réalisation de l'accord sur ce dernier type de participes s’inscrirait alors dans ce qu’elle définit comme la grammaire seconde.

Ces diverses hypothèses appellent à définir plus précisément ce qui devrait constituer la grammaire seconde: la limite entre les tournures prescrites mais rarement employées devrait-elle être déterminée par l'intuition naturelle des locuteurs, ou par la fréquence d’emploi? En tout état de cause, il semble que l'APP peut s’inscrire dans cette dichotomie acquisitionnelle, que ce soit partiellement (dans le cas des participes homonymes), ou plus globalement, en tant que tournure employée malgré tout assez sporadiquement, et socialement marquée (Audibert-Gibier, Reference Audibert-Gibier1992; Branca-Rosoff, 2006; Gaucher, Reference Gaucher, Coveney, Van Peteghem, Lawers, Tobback, Demol et and De Wilde2012).

6 CONCLUSION

À travers l'analyse des usages recueillis dans les corpus de langue parlée spontanée, nous avons pu constater que cet accord du participe, que Blanche-Benveniste (Reference Blanche-Benveniste2010a) considère comme plus ‘naturel’ lorsque la forme composée est employée dans un contexte favorisant une interprétation résultante, est également employé plus fréquemment dans ce même contexte. Nous avons cependant vu que l'écart entre la fréquence d’accord dans les interprétations résultantes d’une part, et les interprétations événementielles d’autre part, est relativement faible, mais également assez constant (environ 10 %), et que ces résultats doivent être mis en perspective à la lumière des tests statistiques. Pour pouvoir analyser plus en détail, et avec plus de certitude, les comportements des usagers quant à l'APP, et comparer les multiples facettes de l'accord des formes composées (en particulier l'emploi des formes pronominales), il faut donc continuer à exploiter les ressources disponibles, c’est-à-dire les banques de données orales. Notons qu’en vue de l'analyse d’une variable rare, il y a un besoin criant de données, ressources nécessaires pour une étude approfondie des phénomènes d’interaction entre les variables, et pour la réalisation de tests statistiques plus précis (unidirectionnels), qui permettraient par exemple de déterminer si la saillance sémantique ou la saillance prosodique sont à considérer comme des facteurs favorisants.

En termes de méthodologie, et en ce qui concerne la détermination des valeurs du passé composé, il serait par ailleurs utile de faire valider les diverses interprétations par un système d’enquêtes auprès de spécialistes, mais également auprès d’un échantillon de non-spécialistes, afin de déterminer dans quelle mesure l'interprétation des valeurs temporelles peut être considérée comme un facteur homogène. Enfin, il serait intéressant de procéder à des exercices de nature psycholinguistique, dans la lignée des tests établis dans le cadre de l'accord des adjectifs (Acuña-Fariña, Reference Acuña-Fariña2009), afin de mieux comprendre les mécanismes qui sous-tendent la réalisation de l'APP à l'oral, et, plus particulièrement, distinguer ce qui relève réellement d’une grammaire de l'oral.

Footnotes

1

Je tiens à remercier les relecteurs anonymes du JFLS pour les précieuses remarques et suggestions qu’ils ont apportées à ce travail. Toute erreur restante m’est bien entendu imputable.

2 Émission de France Inter Eklectik du 27/05/2012. Les critères de transcription, adaptés des travaux du GARS (Blanche-Benveniste, Reference Blanche-Benveniste1990), se résument comme suit : [/] pause brève ; [//] pause longue ; [i::] allongement de la voyelle; [(rires)] indications non-verbales. On notera qu’il s’agit d’une émission de radio enregistrée: il n’est pas impossible que les séquences aient été montées, et ne reflètent pas l'intégralité de l'entretien pour ce qui concerne l'ordre des séquences discursives.

3 Cette étude repose sur un ensemble de quatre corpus, dont les détails sont donnés dans la section 2. Si les conventions de transcription convergent sur de nombreux points (par ex. la marche à suivre vis-à-vis des accords non audibles, à l'image du participe de l'exemple (4) portées), il subsiste quelques points de divergence, notamment dans la notation des aspects paraverbaux et des symboles temporels. Nous avons souhaité rester fidèles aux travaux de chaque équipe ; il résulte de ce choix méthodologique une certaine hétérogénéité dans la transcription des exemples.

4 Dans les discours du français parlé spontané, on oppose principalement deux types de constructions : l'une où l'antécédent est un pronom relatif (La pomme que j’ai mangée), l'autre où il est un pronom clitique (La pomme, je l'ai mangée). Le type de construction, comme la zone postverbale, nous permettront infra d’offrir une analyse comparée de la fréquence d’APP.

5 On notera cependant que l'étude de la séquence pronominale se doit d’englober un certain nombre de paramètres, notamment la nature du pronom (réfléchi ou réciproque) ou la nature de l'antécédent (sujet ou objet). Par ailleurs, on remarquera que malgré la catégorisation verbale, certaines de ces séquences acceptent l'emploi de très, adverbe d’habitude réservé aux emplois adjectivaux (Buchard et Carlier, 2008) : il s’est très investi / il s’est beaucoup investi.

6 Notons qu’il s’agit d’accords ‘corrects’ selon la norme. Les cas d’hypercorrection, relativement rares dans nos corpus, ont été supprimés de cette étude.

7 Techniquement, la méthode se résume à copier puis coller la colonne du concordancier où se trouve le participe, éliminer toutes les marques d’accord de cette nouvelle colonne, et masquer la colonne d’origine.

8 On notera cependant que pour cette étude, l'importance de l'écart est moins cruciale, puisqu’on ne tient pas compte des informations sociales concernant les locuteurs.

9 Université catholique de Louvain, Louvain-la-Neuve; http://www.uclouvain.be/valibel

10 Dans le cadre du programme de l'Education Nationale, l'acquisition de l'accord écrit fait partie du programme CE2 - CM2. (http://www.education.gouv.fr/bo/2008/hs3/default.htm)

References

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Figure 0

Tableau 1. Fréquence d’accord en fonction du type de séquence employé.

Figure 1

Tableau 2. Répartition des données de corpus par projet.

Figure 2

Tableau 3. Fréquence d’accord en fonction de l'effet de sens (ES) attribué à la séquence [avoir (pres) + participe passé]. La lettre a correspond au nombre de formes accordées; la lettre n, au nombre total de formes relevées.

Figure 3

Figure 1. Fréquences comparées d’APP en fonction de diverses variables indépendantes. Légende: ZPV = zone postverbale; rés. = Effet de sens résultant; évén = Effet de sens événementiel.

Figure 4

Tableau 4. Fréquence d’accord en fonction de la zone postverbale (ZPV) et de l'effet de sens (ES).

Figure 5

Tableau 5. Fréquence d’accord en fonction de la nature de l'antécédent et de l'effet de sens (ES).