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La liaison à Orléans, corpus et changement linguistique: une première étude exploratoire

Published online by Cambridge University Press:  31 January 2017

CÉLINE DUGUA*
Affiliation:
Université d'Orléans
OLIVIER BAUDE
Affiliation:
Université Paris-Ouest Nanterre
*
Adresse pour correspondance: e-mail: celine.dugua@univ-orleans.fr
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Résumé

Le corpus des Enquêtes sociolinguistiques à Orléans (ESLO), composé de deux périodes de recueils (1968–1974 et depuis 2006) et comprenant une grande diversité de situations (entretiens, paroles publiques, conversations lors de repas, réunions de travail) nous offre des données uniques pour étudier le changement linguistique sur la base des usages de la liaison en français parlé. A partir d'un sous-corpus comprenant 7 locuteurs enregistrés à 40 ans d'intervalle, nous proposons une méthode de repérage et codage des liaisons et nous ouvrons différentes pistes d'analyse qui reposent nécessairement sur une exploration fine du corpus, dans le respect d'une démarche résolument variationniste.

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Copyright © Cambridge University Press 2017 

1. INTRODUCTION

L'usage de la liaison par des adultes et des enfants est aujourd'hui documenté par des données issues de méthodologies diverses : des données expérimentales (Chevrot et al., Reference Chevrot, Dugua and Fayol2009), des tâches chronométriques (Siccardi, Reference Siccardi2015 ; Spinelli et Meunier, Reference Spinelli and Meunier2005), des études de corpus, sur de petits (Chevrot et al., Reference Chevrot, Chabanal and Dugua2007 ; Liégeois, Reference Liégeois2014) et de larges échantillons (Encrevé (Reference Encrevé1988) ; Durand et al. (Reference Durand, Laks, Calderone and Tchobanov2011) pour le corpus PFC ; De Jong (Reference De Jong and Lyche1994) pour celui d'Orléans ; Ågren (Reference Ågren1973) sur des enregistrements radiophoniques). Sans vouloir revenir de manière exhaustive sur l'ensemble de ces travaux, nous pouvons souligner la nécessité de disposer de données contextualisées et de diversifier les points de vue pour cerner un phénomène complexe. Toutefois, si les travaux à partir de données apportent une contribution significative et indéniable aux analyses et théories sur la liaison, il convient néanmoins de porter un regard réflexif systématique et prudent sur l'usage de corpus. Ainsi, conjointement à la production et à la gestion d'un très grand corpus oral (ESLO1 et ESLO2), nos travaux sur la liaison visent à imbriquer les niveaux méthodologiques et théoriques afin de lier, d'une manière dynamique, les opérations de constitution et de traitement avec les analyses (Baude, Reference Baude2015 ; Baude et Dugua, Reference Baude and Dugua2016, Reference Baude and Dugua2011, Reference Baude, Dugua, Dostie and Herdermann2015). L’étude présentée ici se veut illustratrice de ces principes.

Nous nous appuyons sur un sous-corpus d'ESLO, le module « diachronie », qui est composé d'enregistrements de locuteurs réalisés à deux reprises à 40 années d'intervalle dans les années 1970 et 2010. Il s'agit d'une étude exploratoire – jusque-là, la liaison n'a pas été observée de façon systématique dans ce corpus (nous disposons de quelques données présentées dans Baude et Dugua, Reference Baude, Dugua, Dostie and Herdermann2015) – qui nous permet de tester une méthodologie et de disposer de premiers résultats sur l’évolution de l'usage de la liaison sur quarante ans.

Nous devions donc, au préalable, trouver et tester une méthode de repérage et de codage de la liaison, qui pourrait par la suite être utilisée à plus grande échelle. A partir des premiers résultats obtenus, nous pourrons apporter des éléments de réponse quant à l'idée d'une baisse de l'usage de la liaison dans le temps (Léon, Reference Léon2007). Ces résultats préliminaires seront également observés et analysés avec l'objectif de fournir des repères pour l'ensemble des opérations de traitement du corpus ESLO, de la définition de son architecture à l'outillage des procédures de codage, d'annotation et d'exploration.

Nous commencerons par présenter quelques particularités du corpus ESLO, puis la méthodologie que nous avons mise en place pour coder la liaison dans ce corpus. Viendront enfin les résultats de ce travail et les perspectives que celles-ci ouvrent pour la suite du projet des ESLO.

1.1. Liaison et corpus

Comme évoqué rapidement en introduction, liaisons et corpus sont intimement liés. Depuis le début des années 1970 avec Ågren (Reference Ågren1973) et l’étude d'enregistrements radiophoniques, jusqu'au travail récent proposé par Meinschaeffer et al. (Reference Meinschaffer, Bonifer and Frisch2015), on compte un nombre conséquent de recherches spécialement orientées sur ce phénomène dans des corpus (Encrevé, Reference Encrevé1988 ; Durand et al., Reference Durand, Laks, Calderone and Tchobanov2011 ; Durand et al., Reference Durand, Laks and Lyche2002, Liégeois, Reference Liégeois2014 ; Laks, Reference Laks, Baronian and Martineau2007).

Evidemment, d'autres corpus de français parlé sont disponibles – citons par exemple CFPP2000,Footnote 1 Valibel,Footnote 2 CFPQ,Footnote 3 OFROM,Footnote 4 Clapi,Footnote 5 CoLaJE,Footnote 6 TCOF,Footnote 7 ESLO – et constituent des bases de données exploitables pour étudier la liaison. En revanche, ces derniers ne fournissent pas d'outil de repérage et d'exportation des contextes de liaison. Nous nous proposons ici, après avoir présenté quelques caractéristiques du corpus ESLO et de ce que l'on sait déjà de la liaison dans ce corpus, d'expliciter notre méthodologie afin de contribuer à une dimension comparative des études de la liaison sur corpus.

1.2. Liaison et ESLO

Le corpus ESLO s'est construit en deux grandes étapes. Une première, à la fin des années 1960 par une équipe d'enseignants anglais, soucieux de proposer des documents authentiques pour l'enseignement du FLE. La grande originalité pour l’époque et le parti pris très fort choisi par l’équipe ont été de définir les pratiques linguistiques communes non pas par les productions de locuteurs types mais par l'hétérogénéité des pratiques linguistiques entendues dans la ville. On parle alors de « communauté d'auditeurs », comme le soulignent Blanc et Biggs « C'est une communauté d'auditeurs qui est construite, autant qu'une communauté de locuteurs, à notre connaissance pour la première fois en France [. . .] On ne cherche pas “cet individu mythique, l'orléanais moyen” » (Blanc et Biggs, Reference Blanc and Biggs1971, p. 23). De plus, déjà à cette époque, les auteurs ont apporté un soin particulier au catalogage des enregistrements, dans le but d'en assurer une meilleure diffusion.

Ces deux choix théoriques et méthodologiques majeurs des chercheurs d'ESLO1 ont été déterminants dans le projet de constitution d'un nouveau corpus 40 ans après : ESLO2. Construit selon une approche variationniste, l’élaboration du corpus ESLO2 a débuté en 2005, à partir du matériel d'ESLO1 récupéré sous forme de dossiers papiers et de bandes magnétiques (Abouda et Baude, Reference Abouda and Baude2009 ; Baude et Dugua, Reference Baude and Dugua2016, Reference Baude and Dugua2011, Reference Baude, Dugua, Dostie and Herdermann2015). Aujourd'hui, le corpus ESLO,Footnote 8 constitué d'ESLO1 et d'ESLO2, comprend environ 182 heures d'enregistrements transcrits et disponibles, soit quelque 3 millions de mots.

La plus importante étude linguistique ayant utilisé le corpus ESLO1 portait sur la liaison (De Jong, Reference De Jong1988, Reference De Jong and Lyche1994). Le sous-corpus utilisé comprenait 45 entretiens qui fournissaient 16 000 contextes de liaison. L'approche de De Jong, qui consistait à souligner l'importance des formes lexicales et de leur fréquence dans l'usage de la liaison, était novatrice pour l’époque, grâce notamment à l'accès à un corpus de français parlé. Les témoins du sous-corpus de De Jong ont été répartis selon leur sexe, selon 3 groupes d’âge (18–29 ans, 30–49 ans et 50 ans et plus) et 5 catégories socio-économiques (entre A et E). Ces catégories ont été élaborées à partir du travail d'Alix Mullineaux (Mullineaux et Blanc, Reference Mullineaux and Blanc1982) sur la création d'une échelle (échelle AM, A étant le plus haut niveau et E le plus bas) prenant en compte la profession et le niveau scolaire des témoins. A partir de ces trois critères de classification sociologique, De Jong propose des analyses sur ses données de liaison. Il trouve, par exemple, que sur les séquences est + X (la forme du verbe être la plus fréquente de son sous-corpus), la catégorie sociale d'appartenance du locuteur (échelle AM), le sexe et l’âge ont tout trois un effet significatif sur la réalisation de la liaison (la liaison est plus souvent réalisée par les locuteurs appartenant à des CSP élevées, par les femmes et par les locuteurs plus âgés) (De Jong, Reference De Jong and Lyche1994).

Le corpus ESLO tel qu'il existe aujourd'hui va nous permettre de revisiter ces résultats et notamment de voir dans quelle mesure on retrouve ces mêmes grandes tendances.

1.3. Corpus variationniste et changement linguistique

Les études variationnistes à partir des notions de changement en temps réel et temps apparent, notamment Sankoff et Blondeau (Reference Sankoff and Blondeau2007) mais aussi Ashby (Reference Ashby2001, Reference Ashby2003), Armstrong (Reference Armstrong2001) et Armstrong et Smith (Reference Armstrong and Smith2002) ont démontré la pertinence de rechercher en synchronie, dans un espace socialement structuré, l’évolution diachronique d'un système linguistique.

Dans cette perspective, l'architecture des deux corpus ESLO offre un point de vue unique en apportant une variété des locuteurs et des usages au sein d'une même ville et à deux époques distinctes. Elle fournit également un sous-corpus composé de locuteurs enregistrés à 40 années d'intervalle.

Le changement linguistique peut donc être appréhendé en temps réel, y compris à partir des mêmes locuteurs, mais aussi en temps apparent et enfin en croisant ces deux approches dans une perspective réellement variationniste.

2. MÉTHODOLOGIE

2.1. Méthodologie de repérage et de codage de la liaison dans ESLO

Il s'agit, dans cette première phase, d'utiliser une méthodologie à partir de technologies génériques qui, nous l'espérons, pourront permettre le développement d'un outil dédié au codage suffisamment automatisé pour traiter un grand corpus, tout en conservant une finesse d'analyse pour l'instant relevant de l'appréciation de codeurs humains.

Une interfaceFootnote 9 nous permet d'extraire tous les contextes Mot1–Mot2 correspondant à une définition graphique de la liaison, à savoir : deux mots consécutifs dont le premier se termine par une consonne et le second commence par une voyelle ou un « h ». Ce passage par un repérage automatique est indispensable pour s'assurer que tous les contextes potentiels de liaison seront balisés. Evidemment, à partir de cette simple définition graphique, on récupère de nombreux contextes qui ne seront pas des contextes de liaison, notamment les cas d'enchainement.

Le codage s'opère ensuite en deux temps : un premier temps sur une simple base graphique et un deuxième temps à l’écoute des enregistrements.

Ainsi, à partir du tableau d'extraction brute que nous obtenons, un premier tri a été opéré en repérant les contextes qui, sur une base graphique, peuvent être éliminés des analyses de liaison :

  • (1) Les cas d'enchainement : le Mot1 se termine par une consonne graphique prononcée en isolation ou devant mot à initiale consonantique.

  • (2) Deux contextes de liaison impossibles : après un nom au singulier et après un nom propre.

  • (3) Avant les Mots2 oui et ouais devant lesquels la liaison est impossible.

Dans un deuxième temps, à l’écoute, de nouveaux cas ont dû être éliminés, qui ne pouvaient l’être sur une simple base graphique :

  • (4) Si le Mot1 appartient à un groupe syntaxique et le Mot2 à un autre ou si le Mot1 appartient à un mot phonologique et le Mot2 à un autre.Footnote 10 Dans ce cas, la liaison est considérée comme impossible : par exemple, après pas dans on ne sait pas on manque d'information [QB100, ESLO1_DIA_017], après grand dans un éventail plus grand il nous était offert [YT387, ESLO1_DIA_150].

  • (5) Si le Mot1 est prononcé par un locuteur, et le Mot2 par un autre (l'interface ne permettant pas pour l'instant de prendre en compte ce critère), ex : après êtes dans vous avez dit vous êtes alors en tant que [JSM et RF211, ESLO1_DIA_121].

  • (6) S'il y a une pause entre les deux mots, ex : après est dans le comité il est (pause longue) à l'intérieur de [CF4, ESLO1_DIA_048], après soient dans normal qu'ils soient (pause) au même niveau qu'eux [CF4, ESLO1_DIA_048]. Cependant, dans certains cas de pause, nous avons relevé des réalisations de liaison.

A l’écoute également nous pouvions repérer des réalisations ou des non-réalisations surprenantes que nous mentionnions sous forme de commentaires. Etant donné la plateforme ESLO permet un retour systématique sur l'intégralité des données et donc sur l'ensemble des contextes, nous sommes toujours à même de relever des cas de réalisation qui, par exemple, correspondraient à des contextes de liaisons interdites dans les classifications traditionnelles. En effet, dans un souci de neutralité par rapport aux approches théoriques de la liaison et aux différents classements proposés, nous n'avons pas codé a priori les caractères obligatoires, facultatifs et interdits des contextes de liaison.

Dans le but de tester puis d'adapter notre méthodologie de codage par différents annotateurs, nous avons fait intervenir des étudiants de master Sciences du langageFootnote 11 qui ont codé une première fois des passages du sous-corpus de notre étude. Nous avons ensuite, nous-mêmes, vérifié et corrigé tous ces codages. Cette façon de procéder nous a permis d'affiner notre protocole de codage, mais aussi de nous assurer que chaque contexte a été traité par deux annotateurs.Footnote 12 Par la suite, une annotatriceFootnote 13 formée au protocole a codé l'ensemble du sous-corpus.

2.2. Un sous-corpus d’étude : le module Diachronie

Le sous-corpus sur lequel nous nous appuyons dans cette première étude comprend 7 locuteurs, enregistrés à deux reprises : une première fois dans les années 1970 dans le cadre du projet ESLO1, puis une deuxième fois dans les années 2007 par Vaslin-Chesneau (Reference Vaslin-Chesneau2008) pour le compte du projet ESLO2. Il s'agit donc d'un sous-corpus original dans lequel nous pourrons observer d’éventuels effets de variation diachronique.

Plus précisément, le tableau ci-dessous reprend les informations sociodémographiques dont nous disposons sur les 7 locuteurs de ce sous-corpus. Chaque locuteur est représenté par un code. Les colonnes “Age”, “Profession” et “Echelle AM” comprennent deux lignes : la première pour les informations correspondant à la période d'ESLO1 et la seconde pour celles d'ESLO2.

Pour chacune des enquêtes, les locuteurs ont participé à des entretiens semi-directifs autour de thématiques de la famille, du travail, des activités dans la ville et des pratiques sociales et culturelles. La trame d'entretien utilisée pour ESLO2 a été élaborée pour permettre une comparaison précise ; elle calque en l'ajustant le questionnaire d'ESLO1.

Ce sous-corpus comprend 14 enregistrements d'une durée totale d'environ 17 heures (10 heures pour ESLO1 et 7 heures pour ESLO2).

2.3. Description de l’échantillon

Dans le cadre de cette étude exploratoire, où l'un de nos objectifs était de tester une méthodologie, nous avons travaillé sur les 10 premières et les 10 dernières minutes des 14 enregistrements. Cet échantillon fournit 2669Footnote 14 contextes de liaisons potentielles.

Un premier résultat fait apparaitre que 46,42% des liaisons potentielles sont réalisées (n = 1 239). Cette première valeur, très générale, se situe 3 points au-dessus (43,4% de liaisons réalisées, n = 23 953 cas de liaisons réalisées) de ce que relèvent Durand et al. (Reference Durand, Laks, Calderone and Tchobanov2011) dans la situation de conversation du corpus PFC. Cette différence est toutefois peu importante.

3. USAGE DE LA LIAISON : UN CHANGEMENT LINGUISTIQUE ?

Qu'en est-il de l’évolution de l'usage de la liaison entre ESLO1 et ESLO2 ? Observe-t-on la baisse à laquelle on pourrait s'attendre et qui est mise en avant notamment par Léon : « [. . .] dans les milieux jeunes [. . .] c'est peut-être sous l'influence d'accents secondaires, souvent expressifs, que la liaison se perd » (Léon, Reference Léon2007, p. 232) ? Là aussi nos résultats préliminaires peuvent surprendre et nous amènent à répondre par la négative.

Tableau 1: Informations concernant les locuteurs du module Diachronie

Entre les deux périodes, si on globalise nos 7 témoins, on relève 44,8% de liaisons réalisées dans ESLO1 et 47,9% dans ESLO2, cette différence n'est pas significative (t = 0,237, p = 0,812). En bref, cette stabilité statistique dénote que s'il y a un changement linguistique dans l'usage de la liaison il n'est pas repérable par une analyse de la variation diachronique dans un corpus global.

Cette stabilité, qui ne correspond pas aux représentations véhiculés dans les discours sur l’évolution du français parlé, n’était pointée que par Laks dans son étude sur la parole publique : « contrairement à une multitude d’études impressionnistes la liaison se maintient en français contemporain à un haut niveau en étant toujours réalisée dans la parole politique dans presque 6 sites possibles sur 10, et dans la parole ordinaire dans 5 sur 10 » (Laks, Reference Laks, Durand, Gjeerts and Laks2014, p. 351).

Elle est en revanche contraire aux analyses d’Ashby (Reference Ashby2003) qui constatait, en étudiant deux corpus constitués à 20 ans d’écart dans la ville de Tours, une baisse du taux de liaisons facultatives entre 1976 et 1995. L'absence d'information sur les corpus et sur leur condition de production ne permet cependant pas de discuter l'analyse présentée.

Pour ESLO, derrière ce premier résultat, se profile une exigence d'exploration du corpus. Le constat du maintien d'un fort taux de liaison dans la parole privée alors que la valeur de l’écrit normé a considérablement diminué pendant la période concernée, annihile toute explication en termes de simple co-variation. Il faut, à coup sûr, appréhender la variation de la liaison selon des critères d'usages beaucoup plus fins et variés pour en proposer une analyse du changement linguistique.

Notre sous-corpus comprenant les mêmes locuteurs enregistrés à 40 années d'intervalle, il nous permet d'observer si tous les locuteurs intègrent ce profil de stabilité entre les deux périodes d'enregistrement. Dans la figure suivante, nous représentons les évolutions entre les deux périodes pour chaque témoin.

Figure 1. Evolution des taux de liaisons réalisées chez les 7 locuteurs du sous-corpus

Les taux de liaisons réalisées s'appuient sur 2 669 contextes de liaisons potentielles, avec une moyenne de 430 contextes par locuteurs (les deux périodes globalisées), répartis de manière homogène (seul le locuteur CF4 se distingue avec seulement 100 contextes de liaisons). L'observation de cette figure suggère que derrière une stabilité globale de l'usage des liaisons, se cachent des évolutions individuelles différentes. En effet, chez deux locuteurs (CF4 et YR399), on relève une hausse d'environ 12 points entre ESLO1 et ESLO2, une baisse de 4,5 points pour DJ39 et une relative stabilité pour les quatre autres (QB100, YT387, RF211 et PY94).

Il nous semble donc important de remarquer qu'au-delà des grandes tendances, il convient d'analyser les variations les plus fines. Dans ce cas, une stabilité à un niveau macro n'est pas contradictoire avec un changement linguistique avéré ou en cours. En effet comme nous l'avions déjà évoqué à partir de premiers tests sur des données diachroniques et diaphasiques (Baude et Dugua, Reference Baude and Dugua2011), pour peu que le corpus permette une véritable analyse (multi)variationniste, on perçoit en synchronie la structure d'une variation diachronique. Ainsi, notre étude du sous-corpus diachronie se doit d’être complétée par une étude diaphasique qui est en cours de réalisation.

4. QUELQUES DONNÉES SUR LES CARACTÉRISTIQUES DE LA LIAISON

4.1 Catégorisation des liaisons en liaisons obligatoires et facultatives

Sur la base du travail de De Jong (Reference De Jong and Lyche1994), confirmé par les recherches sur PFC (Durand et al., Reference Durand, Laks, Calderone and Tchobanov2011), nous avons catégorisé, a posteriori, les contextes de liaisons, en considérant comme liaisons obligatoires (LO), les quatre contextes suivants :

  • déterminant + X (adjectif ou nom)

  • clitique + verbe ou clitique + clitique

  • verbe + clitique

  • expressions figéesFootnote 15

Nos données confirment le caractère systématique des liaisons dans ce contexte puisqu'on relève 100% de liaisons réalisées (n = 850Footnote 16 ). Dans les contextes de liaisons facultatives (LF), le taux de liaisons réalisées atteint 21,39% (n = 389).

On constate aussi que la part de contextes de liaisons facultatives est plus importante (environ 68% des contextes de liaisons potentielles) que celles des liaisons obligatoires parmi l'ensemble des contextes (1 819 contextes de LF et 850 contextes de LO).Footnote 17

Certainement en lien avec cette remarque, la diversité des Mots1 est beaucoup plus importante en LF qu'en LO. Plus précisément, on a 619 Mots1 différents en LF contre 34 en LO (18 fois moins). Mais parmi les 619 Mots1 en LF, seuls 72 entrainent la réalisation d'au moins une liaison, et seuls 8 Mots1 font liaison au moins 10 fois (est, dans, quand, en, plus, très, tout, chez). Autrement dit, la grande majorité (88%) des Mots1 qui se situent dans un contexte de liaison facultative n'entraine pas de réalisation, et l'essentiel des réalisations est portée par 8 Mots1 différents.

Figure 2. Représentation des taux de liaisons facultatives réalisées en fonction du Mot1

En LO, les 34 Mots1 différents relevés font tous liaison au moins une fois, et 11 d'entre eux au moins 10 fois (on, les, des, en, un, ils, vous, nous, mon, trois, deux).Footnote 18 Ainsi, en LO comme en LF, peu de Mots1 différents portent les réalisations des liaisons. Cette configuration illustre, dans ce cas particulier de la liaison, les conclusions de Zipf (Reference Zipf1935, Reference Zipf1949) sur des données linguistiques, à savoir « [qu’]un très petit nombre d'occurrences très fréquentes assume l’écrasante majorité des cas possibles » (Durand et al., Reference Durand, Laks, Calderone and Tchobanov2011, p. 121).

4.2. Nature de la consonne de liaison

La question de la nature de la consonne de liaison (CL) est souvent soulevée dans les études sur la liaison, à la fois par les théories phonologiques qui formalisent son statut, et aussi dans les études qui permettent de rendre compte de leurs usages et de leur fréquence.

L'ordre de fréquence décroissante des CL obtenu dans notre sous-corpus est le suivant : /z/ (606) < /n/ (429) < /t/ (192) < /ʁ/ (2). Il est tout à fait comparable à ce que Durand et al. (Reference Durand, Laks, Calderone and Tchobanov2011) observent dans le corpus PFC. La liaison en /z/ est bien, tous corpus confondus, la plus fréquente. Toutefois, il est ici intéressant de distinguer les types de contextes, car si on retrouve bien cet ordre pour les LO (hormis le fait qu'on n'a que les trois premières : /z/ (448) < /n/ (385) < /t/ (10)), en LF, il en est autrement. La consonne de liaison la plus fréquente est le /t/, l'ordre est donc /t/ (182) < /z/ (158) < /n/ (43) < /ʁ/ (2). Cette prégnance du /t/ s'explique par l'ordre de fréquence des Mots1, parmi les trois Mots1 qui font le plus souvent liaison, deux sont des mots qui déclenchent une liaison en /t/ : “est” et “quand”.

4.3. Types de liaisons et évolution diachronique

Suivant les propos de Laks (Reference Laks, Durand, Gjeerts and Laks2014) :

Je conclus donc à la stabilité d'ensemble de la liaison sur le siècle passé et à la nécessité de l'analyser en deux phénomènes nettement distincts : la liaison obligatoire qui ne bouge pas dans son principe et la liaison facultative en décroissance lente qui appelle une analyse de sa variabilité, le changement diachronique d'ensemble portant comme on le verra sur le passage de tel contexte morphosyntaxique et/ou lexical de la première catégorie à la seconde. (Laks, Reference Laks, Durand, Gjeerts and Laks2014: p. 352).

Nous observons les évolutions diachroniques conjointes des liaisons obligatoires et facultatives. Les premières sont stables avec 100% de réalisation dans chacune des deux périodes ; les secondes sont stables également avec 22,34% pour ESLO1 et 20,38% pour ESLO2 (la différence n'est pas significative : t = 1,341, p = 0,180). Soulignons toutefois que les taux de réalisation des LF varient entre 3,7% et 37,1% dans ESLO1 et entre 11,8% et 23,7% dans ESLO2. La moindre variabilité dans ESLO2 pourrait être interprétée comme une plus grande convergence des usages. D'une manière générale si le taux de LF est stable, la différence entre l’écart type d'ESLO1 (10.81) et celui d'ESLO2 (4.11) suggère que derrière cette stabilité il y a bien une évolution des usages qui se manifeste ici par un aplanissement des variables. Par ailleurs, comme évoqué plus haut, parmi l'ensemble des contextes de liaisons potentielles, la part que prennent les LF varie fortement d'un locuteur à l'autre : entre 56% (pour CF4) et 75% (pour DJ39).Footnote 19 Il est donc crucial de prendre en compte cette donne ; le taux de liaisons potentielles présenté plus haut étant fortement dépendant de cette variation. Par exemple, CF4 et RF211 ont un taux de liaison potentielle réalisée très proche dans ESLO2 (respectivement 43,5% et 45,5%), mais la part des LF du premier est de 58,7% et celle de RF211 71,1%. Ainsi, si CF4 réalise un tel taux de liaisons potentielles c'est essentiellement en raison de la réalisation des LO. La mise en évidence de cette variabilité interindividuelle mérite notre intérêt et devra être approfondie dans de prochaines études.

Comment la stabilité globale des liaisons facultatives se décline-t-elle chez chaque locuteur ?

Figure 3. Evolution des taux de liaisons facultatives réalisées chez les 7 locuteurs du sous-corpus

Il s'avère que deux locuteurs présentent une stabilité (moins de 4 points de variation) : RF211 (A–A) et QB100 (B–A), trois locuteurs une baisse entre ESLO1 et ESLO2 (DJ39 (A–A), YT387 (C–C) et PY94 (D–C) ; et les deux autres une augmentation : CF4 (C–C) et YR399 (D–C). Au regard de la catégorisation en échelle AM que nous proposons (nous avons appliqué les critères définis par Alix Mullineaux (Mullineaux et Blanc, Reference Mullineaux and Blanc1982) aux témoins en prenant en compte la suite de leur parcours social et professionnel), nous constatons que ceux dont l'usage de la LF augmente appartiennent à des catégories basses, l'un d'entre eux présente une trajectoire “sociale” ascendante, puisqu’ il a changé de catégorie, passant de D à C. Les trois locuteurs dont l'usage baisse appartiennent à des catégories différentes (A et C), deux d'entre eux sont restés dans la même catégorie. Et enfin, ceux dont l'usage est stable, appartiennent à des catégories hautes.

Ces résultats démontrent que, s'il est très intéressant de partir d'une comparaison diachronique, il serait erroné de cantonner les différences pointées à un type de variation, fut-il diachronique. La liaison est un phénomène complexe, intrinsèquement soumis à une combinaison de facteurs de la variation linguistique qui, in fine, produit et accompagne un changement linguistique.

5. CONCLUSION

Cette étude exploratoire, qui est la première à rendre compte de l'usage de la liaison en diachronie chez des locuteurs non professionnels de la parole publique, fait apparaitre un résultat préliminaire important : l'usage de la liaison facultative n'a pas baissé entre la période de la fin des années 1960 et les années 2010, pour l'ensemble des usages perçus par une communauté d'auditeurs et captés lors d'entretiens semi-directifs. Cette tendance de stabilité ne doit pas être interprétée comme une absence de variation. Ici la linguistique de corpus ne doit pas favoriser une lecture trop rapide de données quantitatives mais au contraire permettre une exploration fine d'un grand corpus complexe. Ainsi, il convient d’étudier la dynamique de la liaison au regard de trajectoires sociales individuelles et collectives et au regard de pratiques hétérogènes dont le corpus et sa méthodologie d'exploration doit donner l'accès. Cela nécessite de concevoir la variation linguistique comme unifiée au sein d'un système qui comprend également et simultanément des variations diachroniques, diastratiques, et diaphasiques et des régularités phonologiques, morphologiques et syntaxiques.

Ces premiers résultats, locuteur par locuteur dans une comparaison à 40 années d'intervalle, démontrent que la description et l'analyse de cette dynamique, souvent appréhendable en termes de changement linguistique, est à portée de main.

Footnotes

8 Corpus accessible à l'adresse : http://eslo.huma-num.fr/

9 Interface programmée en Python par F. Badin, ingénieure d’étude au Laboratoire Ligérien de Linguistique, et utilisant le logiciel TXM. Le programme sera rendu disponible sur le site.

10 Ces questions sont largement débattues dans la littérature (voir Durand et al. (Reference Durand, Laks, Calderone and Tchobanov2011) pour une synthèse). Notre propos ici n'est pas de contribuer à ce débat. Pour cette étude nous nous sommes fiés à notre intuition de locuteur, intuition qui prend en compte une correspondance entre les caractéristiques syntaxiques et phonologiques d'une suite de mots.

11 Qu'ils en soient ici remerciés à hauteur de leur investissement permanent dans les travaux du laboratoire.

12 Cette procédure permet aussi de faire une comparaison inter-annotateurs, très intéressante, que nous ne présentons pas dans cet article. C'est enfin utile pour porter un regard réflexif fin sur cette partie du traitement des données.

13 Nous remercions Jennifer Ganaye pour son travail. Conformément à la charte adoptée, les métadonnées identifient toutes les personnes qui ont contribué au corpus, son nom apparaitra donc sous cette forme.

14 Nous présentons ici uniquement les données concernant les locuteurs interviewés, et non les enquêteurs.

15 Nous en avons repéré 7 dans notre sous-corpus : « plus ou moins », « de plus en plus », « de temps en temps », « tout à fait », « tout à l'heure », « tout un » (ex : tout un ensemble), « Longues Allées » (nom d'une clinique orléanaise toujours prononcée avec liaison).

16 Précisons que sur les 850 contextes de LO, on relève 6 productions qui ne correspondent pas à la consonne de liaison attendue. Ces 6 occurrences sont produites par un même locuteur (YT87), à la fois dans ESLO1 et ESLO2, et toujours dans le même contexte clitique + verbe : ils [l] ont (x4), ils [l] apprennent, ils [l] avaient.

17 Nous revenons sur cette caractéristique dans la section suivante.

18 On retrouve le Mot1 en dans les deux catégories, nous l'avons catégorisé en LO uniquement quand il est clitique.

19 Rappelons qu'en moyenne la part des LF est de 67% des liaisons potentielles.

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Figure 0

Tableau 1: Informations concernant les locuteurs du module Diachronie

Figure 1

Figure 1. Evolution des taux de liaisons réalisées chez les 7 locuteurs du sous-corpus

Figure 2

Figure 2. Représentation des taux de liaisons facultatives réalisées en fonction du Mot1

Figure 3

Figure 3. Evolution des taux de liaisons facultatives réalisées chez les 7 locuteurs du sous-corpus