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Jean-Claude Anscombre, María Luisa Donaire et Pierre Patrick Haillet (dir.), Opérateurs discursifs du français, 2 : Éléments de description sémantique et pragmatique. (Sciences pour la communication, 123.) Berne : Peter Lang, 2018, 539 pp. 978 3 0343 3285 9 (broché), 978 3 0343 3286 6 (PDF), 978 3 0343 3287 3 (EPUB)

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Jean-Claude Anscombre, María Luisa Donaire et Pierre Patrick Haillet (dir.), Opérateurs discursifs du français, 2 : Éléments de description sémantique et pragmatique. (Sciences pour la communication, 123.) Berne : Peter Lang, 2018, 539 pp. 978 3 0343 3285 9 (broché), 978 3 0343 3286 6 (PDF), 978 3 0343 3287 3 (EPUB)

Published online by Cambridge University Press:  20 May 2019

Monique Monville-Burston*
Affiliation:
Language Centre Cyprus University of Technology 30, Archbishop Kyprianos Ave. 3036 Limassol Cyprusmonique.burston@cut.ac.cy
Rights & Permissions [Opens in a new window]

Abstract

Type
Book Review
Copyright
© The Author(s), 2020. Published by Cambridge University Press

Depuis le début du siècle les travaux sur les marqueurs de discours se sont multipliés, et ce dans des approches théoriques diverses. Opérateurs discursifs du français, 2 se situe dans ce courant, le cadre théorique de l’ouvrage étant une version remaniée de la théorie de l’Argumentation dans la Langue. Ce volume collectif fait suite au premier volume du même titre, publié par les mêmes chercheurs en 2013. Les auteurs des trente articles sont les directeurs de publication eux-mêmes ainsi que les autres membres du groupe franco-espagnol de recherche OPERAS (Jesús Vázquez Molina, Sandrine Deloor, Juliette Delahaie, Adelaida Hermoso Mellado-Damas, Camino Álvarez Castro, Emma Álvarez Prendes, Flor Ma Bango de la Campa). Leur objectif est de produire, pour les marqueurs discursifs, des descriptions lexicographiques qui compensent les carences des dictionnaires conventionnels.

La Partie I (Notions de base), due à Jean-Claude Anscombre, sert de cadre théorique et méthodologique à la Partie II (Les opérateurs). Anscombre y revient sur les positions fondamentales partagées par les approches polyphoniques (standard ou orientées vers la médiativité) : adhésion à l’hétérogénéité énonciative (tout énoncé fait intervenir plusieurs voix) et rejet de la thèse référentialiste (les contenus ne réfèrent qu’à des discours et non pas à des objets du monde réel). Il rappelle que les approches polyphoniques reconnaissent trois niveaux d’acteurs linguistiques qui contribuent à la construction et au sens de l’énoncé : a) le niveau de la production empirique de l’énoncé, avec l’être réel qu’est le sujet parlant ; b) le niveau de la responsabilité de l’énoncé, celle-ci revenant au locuteur, l’être discursif que l’énoncé présente comme auteur de sa production (dans la structure de surface) ; c) le niveau des sources des points de vue (pdv), le locuteur s’identifiant à ces pdv, s’en distanciant, ou les rejetant. Les pdv, situés dans la structure profonde, sont les entités abstraites qui correspondent aux rôles discursifs, attribués aux personnages du discours par le locuteur.

Anscombre discute ensuite les éléments qui entrent dans la constitution de la structure profonde d’un énoncé : les pdv et l’organisation des sources, la hiérarchie de celles-ci, la relation (assertive ou monstrative) entre source et contenu et la médiativité quand le dire d’un autre est relaté. Il rappelle aussi que les principes utilisés dans les analyses des items discursifs du volume se fondent sur des critères formels : enchaînements, paraphrases et commutations permis ou non dans un contexte donné.

Par souci de rigueur, une notation graphique est utilisée pour représenter les analyses polyphoniques. Cependant, celle-ci pouvant être complexe, il n’en est fait qu’un usage limité dans la Partie II, constituée du dictionnaire lui-même, dont María Luisa Donaire décrit l’organisation dans l’introduction au volume. La préférence pour le terme opérateur plutôt que connecteur ou marqueur de discours est réaffirmée (cf. Anscombre et al., Reference Anscombre, Donaire and Haillet2013). Les opérateurs sont présentés par ordre alphabétique (nonobstant ce qui est dit à la page 14). Le lecteur peut s’interroger sur les raisons qui ont guidé le choix des trente entités lexicales étudiées, lesquelles semblent avoir assez peu en commun (par exemple à peine, étrangement, genre, je dirais, par contre, voyons), si ce n’est d’instruire des opérations sémantico-pragmatiques. Donaire fait valoir que le choix qui a été fait a l’avantage d’offrir une vue d’ensemble des stratégies discursives possibles et un éventail des propriétés syntaxiques et sémantiques des opérateurs.

Toutes les entrées du dictionnaire ont une structure identique, ce qui donne une heureuse cohérence à la présentation. Vient d’abord un mini-corpus qui comprend des données, écrites mais aussi orales, recueillies sur une période de presque soixante ans (1960 à 2017) dans Frantext et autres bases de données, dans des textes de presse et sur internet. Le mini-corpus permet d’établir les unités sémantiques (les variantes sémantiques) de l’unité lexicale (l’opérateur). Ces variantes sont ensuite glosées en langage naturel. Puis les propriétés linguistiques (syntaxiques, sémantico-pragmatiques) de l’unité sont listées et sa modélisation polyphonique formulée (à savoir, la stratégie discursive en jeu, la nature des pdv et les relations qu’ils entretiennent). Les entrées se terminent par une courte bibliographie et comportent parfois une notice diachronique. Celle-ci se trouve dans une section finale rédigée par F. Ma Bango de la Campa, lorsque l’auteur de l’article n’a pas traité l’évolution de l’emploi de l’expression considérée. En fin d’ouvrage des tableaux synoptiques résument les caractéristiques des opérateurs et mettent en parallèle les propriétés de leurs variantes sémantiques.

Les lecteurs intéressés par les recherches en analyse du discours et en pragmatique, mais aussi en lexicographie, et qui connaissent déjà le volume 1, ne seront pas déçus par la suite qui lui a été donnée. Les analyses sont fines, détaillées, minutieuses -- une entrée peut atteindre une vingtaine de pages -- et méthodologiquement bien adaptées à la spécificité des items linguistiques traités. Elles sont en pleine conformité avec la théorie qui les sous-tend. Il est certain que même si, comme le déclare Anscombre, la théorie polyphonique dans sa présente version est encore imparfaite, son application dans des études empiriques ne peut qu’aider à l’affiner et à l’enrichir.

References

RÉFÉRENCE

Anscombre, J. C., Donaire, M. L. et Haillet, P. P. (dir.) (2013). Opérateurs discursifs du français : Éléments de description sémantique et pragmatique. Berne : Peter Lang.10.3726/978-3-0351-0573-5CrossRefGoogle Scholar