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Lutter autrement contre la corruption transnationale: potentiel et défis du système de sanctions de la Banque mondiale

Published online by Cambridge University Press:  06 October 2021

Résumé

Depuis le milieu des années 1990, les principales Banques multilatérales de développement (BMD) jouent un rôle actif dans la lutte contre la corruption transnationale. La Banque mondiale (BM), suivie par les autres grandes banques régionales de développement, ont mis au point un système de sanctions appliqué aux entreprises et individus qui se livrent à des pratiques de corruption dans le cadre des projets d’investissements qu’elles financent. Les cinq grandes BMD ont récemment harmonisé leurs stratégies de lutte contre la corruption dans leurs opérations, en adoptant des définitions harmonisées des pratiques répréhensibles et des principes et directives communs pour les enquêtes. En 2010, ces dernières ont établi un système d’application mutuelle des décisions d’exclusion. Il s’agit clairement de mesures considérables prises au niveau multilatéral qui contribuent à lutter contre le problème de la corruption. Il est donc pertinent d’évaluer leur efficacité. Après avoir procédé à un examen approfondi et à une analyse critique du système de sanctions de la BM, le présent article conclut que malgré son importance, il n’est pas encore à la hauteur de ses ambitions de sanctionner et dissuader les acteurs internationaux corrompus. Par conséquent, l’article propose des solutions visant à améliorer ce système dont la nécessité n’est plus à démontrer.

Abstract

Abstract

Since the mid-1990s, the leading multilateral development banks (MDBs) have played an active role in the fight against transnational corruption. The World Bank (WB), followed by the other major regional development banks, have developed a sanctions system applied to companies and individuals who engage in corrupt practices in connection with the investment projects they finance. The five large MDBs have recently harmonized their strategies to combat corruption by adopting harmonized definitions of sanctionable practices and shared principles and guidelines for investigations. In 2010, these institutions established a system for mutual enforcement of debarment decisions. One cannot deny that these are considerable steps taken at the multilateral level that help to tackle the issue of transnational corruption. It is therefore relevant to assess their effectiveness. This article critically evaluates and analyzes the WB’s sanctions regime and concludes that, in spite of its significance, it does not yet live up to its goals of punishing and deterring corrupt international actors. The article therefore proposes solutions for improving this much needed system.

Type
Articles
Copyright
© The Canadian Yearbook of International Law/Annuaire canadien de droit international 2021

Introduction

La corruption, généralement entendue comme “l’abus du pouvoir public à des fins privées,” est un problème global qui se présente sous de nombreuses formes.Footnote 1 Lorsque les acteurs ou les effets de la corruption vont au-delà des frontières nationales, celle-ci devient transnationale. La corruption transnationale est la forme la plus complexe et la plus grave qui touche particulièrement les pays en développement qui, dans une large mesure, dépendent de l’aide et des financements extérieurs pour réaliser des projets de développement économique et social.Footnote 2 Parmi ses conséquences, la corruption transnationale, notamment sous forme de pots-de-vin, entrave l’efficacité de l’aide au développement en gonflant le coût des projets, en affectant la qualité de ceux-ci et surtout en pénalisant les plus pauvres qui devaient bénéficier de ces projets et qui devront rembourser une dette plus lourde.Footnote 3

La corruption transnationale implique des acteurs privés et publics qui utilisent des stratagèmes sophistiqués à grande échelle. Par conséquent, la lutte contre ce fléau nécessite la mobilisation et la collaboration de tous les acteurs ainsi que l’utilisation d’outils juridiques variés.Footnote 4 C’est dans cette perspective que les banques multilatérales de développement (BMD) jouent un rôle déterminant dans la lutte contre la corruption transnationale par le biais de leur système de sanctions développé pour sanctionner les entreprises qui se livrent aux pratiques de corruption dans le cadre des projets d’investissement qu’elles financent. Ces systèmes sont relativement nouveaux dans le domaine du développement. En effet, pendant longtemps, les BMD ont ignoré le problème de corruption dans les projets internationaux qu’elles financent, considérant qu’il s’agissait d’un problème de nature interne et politique ne relevant généralement pas de leur mandat.Footnote 5 D’ailleurs, les Statuts de la Banque mondiale (BM) ne prévoyaient aucune disposition expresse autorisant celle-ci à prendre des mesures contre les pratiques de corruption.Footnote 6 En outre, la corruption était considérée, autant par certains États que par les entreprises, comme un mal “nécessaire” relativement à la conduite des affaires dans les pays en développement où le risque de corruption est élevé.Footnote 7

C’est à partir des années 1990 qu’une abondante littérature consacrée à la corruption a mis en lumière l’ampleur et l’impact de celle-ci sur la croissance et le développement économique ainsi que ses effets néfastes sur la société dans son ensemble.Footnote 8 Ce réveil des consciences a contribué à la mobilisation des efforts internationaux pour lutter contre ce fléau. Cela a mené à l’adoption d’un nombre important d’instruments régionaux et internationaux dédiés à la lutte contre la corruption transnationale, telle que la Convention interaméricaine contre la corruption en 1996, la Convention sur la lutte contre la corruption d’agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales de l’Organisation de coopération et de développement économiques en 1997, et la Convention des Nations Unies contre la corruption en 2003, qui exigent des États parties l’adoption de lois criminalisant la corruption et la coopération mutuelle en matière d’enquêtes et de poursuites, entre autres.Footnote 9

En 1996, James Wolfensohn, alors président de la BM, a publiquement annoncé l’engagement de l’institution à lutter contre “the cancer of corruption” en soulignant ses effets néfastes sur le développement économique.Footnote 10 Ce discours a marqué un tournant dans l’approche de la BM, et plus généralement des institutions financières internationales (IFI), à l’égard de la corruption dans leurs opérations.Footnote 11 Ainsi, les initiatives de la BM pour lutter contre la corruption n’étaient plus seulement “acceptables,” mais elles étaient devenues nécessaires pour la réalisation de son mandat.Footnote 12 Aujourd’hui, l’institution poursuit deux grandes missions: éliminer l’extrême pauvreté et promouvoir une prospérité partagée.Footnote 13 Dans ce sens, pour justifier ses initiatives anticorruption, la BM s’est basée sur les dispositions de ses Statuts consacrant l’obligation fiduciaire de l’institution en vue de s’assurer que les fonds soient utilisés aux fins prévues.Footnote 14 En 1996, elle a révisé ses procédures de passation de marchés en y ajoutant un nouveau paragraphe en vertu duquel elle peut exclure les entités coupables de corruption dans les marchés qu’elle finance.Footnote 15 Cette révision a conduit la BM à développer un système de sanctions administratives qui, sous l’effet des réformes, a progressivement évolué vers un modèle quasi judiciaire avec des garanties procédurales ainsi que des éléments de transparence et de responsabilisation propres à l’institution.Footnote 16

S’inspirant du modèle de la BM, les autres grandes BMD se sont dotées de leur propre système pour enquêter et sanctionner les entreprises et individus responsables d’actes de corruption dans le cadre des opérations qu’elles financent.Footnote 17 Au cours des dernières années, ces institutions ont pris des mesures en vue d’harmoniser leurs politiques et procédures en matière de sanctions, en adoptant des définitions harmonisées et des principes communs pour la conduite des enquêtes. L’avancée la plus importante a été l’adoption, en avril 2010, d’un Accord d’application mutuelle des décisions d’exclusion (Accord d’exclusion croisée) entre le Groupe de la BM et les principales banques régionales de développement — le Groupe de la Banque africaine de développement (BAfD), la Banque asiatique de développement (BAD), la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD), le Groupe de la Banque interaméricaine de développement (BID) — en vertu duquel chaque partie s’est engagée à appliquer les décisions d’exclusion rendues par les autres institutions participantes.Footnote 18 Les conséquences pour une entreprise ou un individu sanctionné par une banque participante peuvent donc être considérables.

Comme le note Ware, “IFIs are now beginning to expand their authority and fill the regulatory gap that has existed in developmental financing.”Footnote 19 Les systèmes de sanctions des BMD sont une réponse à l’absence d’outils efficaces dans un contexte où les efforts nationaux en matière de corruption s’avèrent inexistants ou insuffisants.Footnote 20 En effet, malgré la prolifération de lois anticorruption au niveau national à la suite notamment de l’adoption d’instruments internationaux en matière de lutte contre la corruption, leur application reste faible, voire inexistante, dans les pays en développement.

En même temps, quelques rares pays, comme les États-Unis, appliquent de manière agressive leur loi anticorruption à des cas qui ont peu de liens avec leur population ou leur territoire,Footnote 21 ce qui n’est pas sans soulever des questions quant à leur légitimité.Footnote 22 Dans tous les cas, il s’est avéré difficile de réprimer efficacement la corruption transnationale en s’appuyant uniquement sur le droit national. Une grande partie des projets impliquant un pays en développement ou un pays en transition sont financés, ne fut-ce que partiellement, par une BMD. Ainsi, les BMD peuvent grandement contribuer aux efforts anticorruption grâce à l’étendue de leur juridiction, qui n’est pas limitée par la nationalité ou le lieu où l’entité concernée exerce ses activités.Footnote 23

En résumé, il y a lieu de considérer que le système de sanctions développé par les BMD constitue une “réponse pragmatique” aux risques de corruption, puisque ces institutions se trouvent généralement dans une situation où elles doivent fournir un financement à des pays en développement où le risque de corruption est généralement élevé et où les lois anticorruption sont soit inexistantes, soit appliquées avec laxisme.Footnote 24 Autrement dit, la contribution des BMD au développement durable des pays pauvres passe par leur capacité à protéger les fonds prêtés contre leur dilapidation sans pénaliser les populations qui doivent, au final, en bénéficier. Dans la mesure où ces institutions n’ont pas de compétence pour sanctionner les fonctionnaires des pays visés,Footnote 25 elles se contentent de discipliner les acteurs privés qui exécutent les projets dans ces pays.Footnote 26 Mais comment une organisation internationale, comme la BM, parvient-elle à amener les acteurs privés à adopter des comportements éthiques? Quel est le potentiel et les défis auxquels le système de sanctions de la BM fait face? Telles sont les questions auxquelles nous tenterons de trouver des réponses dans le présent texte. Plus spécifiquement, le présent article vise à répondre à la question de savoir si le système de la BM est suffisamment équipé pour contraindre les entreprises et les individus à changer leurs comportements répréhensibles. Étant donné que le régime de sanctions de la BM est constamment révisé, notre étude ambitionne de contribuer à la réflexion et au débat au sein de la communauté académique afin de favoriser l’adoption des mesures destinées à accroitre l’efficacité de ce système à l’avenir.

Très peu d’études en français se sont intéressées à une analyse critique des systèmes de sanctions des BMD appliqués aux entreprises et individus qui se livrent à la corruption dans le cadre des projets qu’elles financent. Dans cette recherche, nous proposons d’étudier le système de sanctions de la BM, puisque celle-ci est la plus importante source multilatérale de financement dans le domaine du développement international avec un régime de sanctions plus élaboré. Ainsi, dans la première partie, il sera question de décrire le régime actuel de sanctions de la BM en présentant ses caractéristiques principales et son fonctionnement, y compris les efforts d’harmonisation entre les BMD. La deuxième partie sera consacrée à l’analyse de la cohérence et de l’impact de l’application du système sur la conduite des entreprises et des individus qui opèrent dans le domaine de l’exécution des infrastructures de développement financés par la BM.

Caractéristiques principales et le fonctionnement du système de sanctions de la BM

fondement théorique du système de sanctions de la bm

La sanction la plus couramment imposée par le régime de sanctions de la BM est l’exclusion avec levée conditionnelle, qui est considérée comme la sanction par défaut. Cette sanction favorise la réhabilitation des entreprises et individus coupables de corruption dans le cadre des opérations financées par la BM tout en assurant la dissuasion par l’exclusion. En ce faisant, le régime actuel oblige les acteurs privés à prendre au sérieux la menace d’exclusion, qui peut mener à une exclusion croisée par les autres BMD, ce qui risque d’entraîner un manque à gagner important et des coûts énormes en termes de réputation. De plus, le système oblige les entités et individus impliqués dans les actes de corruption à adopter des mesures préventives et correctives, notamment à mettre en œuvre des programmes d’intégrité en vertu des normes et principes reconnus. À travers ces programmes d’intégrité, les entreprises s’engagent à instaurer une culture de respect des lois, règles et normes internes et externes en échange de la clémence dans la sanction. Autrement dit, la conformité renvoie à cette approche qui met de l’avant la collaboration et la persuasion, plutôt que la confrontation, entre les régulateurs et les destinataires de la régulation dans la lutte contre les irrégularités au sein des organisations. La démarche vise à favoriser l’autodiscipline des organisations et l’autodénonciation des pratiques répréhensibles en échange d’une renonciation, par les autorités publiques, à l’application des sanctions sévères qui nuiraient à leur bon fonctionnement. Ainsi, lorsque les mesures d’autodiscipline et d’autodénonciation ont été adoptées avant la commission des actes sanctionnables, l’entité visée peut échapper à toute poursuite. Cependant, lorsque les poursuites sont déjà entamées, la mise en place des mesures de conformité peut faire en sorte que la peine prononcée soit moins sévère.

Compte tenu de la complexité des stratagèmes en matière de criminalité économique, les autorités publiques ont intérêt à se chercher des alliés stratégiques les mieux placés pour détecter les sources des pratiques sanctionnables et prévenir leur survenance à l’avenir. Afin d’atteindre ces fins, les organisations sont encouragées à adopter des mécanismes internes d’alerte et de détection des irrégularités en tant que mesures prophylactiques. Ainsi, au lieu de demeurer dans une situation de cibles des mesures administratives et pénales, les organisations deviennent de partenaires importants pour les autorités de contrôle et de lutte contre la criminalité des organisations.

nature et objectifs du système de sanctions de la bm

La politique de la BM en matière de passation des marchés prévoit trois mesures qui peuvent être prises contre les entreprises et individus impliqués dans la corruption en lien avec la passation et l’exécution des projets d’investissement financés par la BM: rejeter la proposition pour l’attribution d’un contrat, annuler la fraction du prêt allouée à un contrat en cas d’attribution de celui-ci, et sanctionner, conformément aux directives pour la lutte contre la corruption et au système de sanctions de la BM.Footnote 27 Les deux premières mesures interviennent durant la phase d’attribution des marchés lorsque la BM effectue un examen préalable ou un examen a posteriori des activités de passation des marchés et n’affectent que le contrat immédiat.Footnote 28 La troisième mesure, quant à elle, vise à exclure l’entreprise ou l’individu coupable de corruption, de la participation aux soumissions visant l’obtention de futurs contrats en lien avec les projets financés par la BM.Footnote 29 Cette dernière mesure est régie par un régime spécifique qui fait l’objet d’analyse dans le présent travail.

Dans les Statuts de la BM, il est stipulé qu’elle a le devoir fiduciaire de prendre des mesures afin de s’assurer que les fonds mis à la disposition d’un projet soient utilisés exclusivement aux fins pour lesquelles ils ont été octroyés.Footnote 30 En s’acquittant de ce devoir fiduciaire envers les États membres, le système de sanctions développé par la BM pour assainir les transactions entourant les projets qu’elle financeFootnote 31 poursuit un double objectif: protéger les fonds de la BM et dissuader, à la fois, la partie accusée (dissuasion spécifique) et les autres parties intéressées par les projets financés par l’institution (dissuasion générale), de se livrer aux actes de corruption.Footnote 32 La finalité ultime du système des sanctions de la BM, et plus généralement des BMD, est de sauvegarder les objectifs de développement des projets en tenant compte des communautés desservies et en excluant les contractants qui se sont livrés à la corruption dans les projets qu’elles financent.Footnote 33 À la différence des régimes anticorruption existants au niveau national, le système de sanctions de la BM n’a pas une finalité punitive, mais vise plutôt à lutter contre les effets néfastes de la corruption dans les projets de développement à travers la prise des mesures administratives et quasi-judiciaires.Footnote 34

La compétence des la BM pour enquêter et sanctionner les entités et individus accusés de corruption dans le cadre des projets d’investissement qu’elle finance est établie contractuellement.Footnote 35 L’accord de prêt établi pour chaque projet incorpore, par référence, la politique anticorruption de la BM, telle que détaillée dans les Directives de la BM pour la lutte contre la corruption de 2006.Footnote 36 Bien que la responsabilité de l’exécution du projet appartienne au pays emprunteur, tous les marchés impliquant les fonds de la BM sont soumis à ces directives.Footnote 37 Autrement dit, les personnes physiques et entités qui exécutent les travaux relatifs au projet en vertu des accords sont liées par les termes de l’accord, y compris les directives, en tant que bénéficiaires des prêts.Footnote 38 Ainsi, même si la BM n’est pas partie aux accords que le pays emprunteur conclut avec les entrepreneurs privés, ses relations contractuelles avec le pays emprunteur lui donnent le pouvoir d’enquêter et de sanctionner les actes de corruption commis par ces derniers durant la préparation et l’exécution du contrat (en cas d’attribution de ce dernier).Footnote 39

Outre la corruption, la BM sanctionne également la fraude, la collusion, la coercition et l’obstruction (collectivement appelées “pratiques sanctionnables”) dans le cadre des projets qu’elle finance.Footnote 40 À l’origine, seules les pratiques de fraude et de corruption étaient sanctionnées, mais en 2004, le champ d’action de la BM a été élargi pour inclure les manœuvres collusives et coercitives et, depuis 2006, les manœuvres obstructives.Footnote 41 La BM prévoit une définition assez large de la pratique de corruption. Celle-ci est définie comme l’acte de “proposer, donner, recevoir ou solliciter, directement ou indirectement, un quelconque avantage dans le but d’influencer indûment les actions d’une autre partie.”Footnote 42 Par ailleurs, étant donné que les définitions des infractions mettent l’accent sur le mobile du contrevenant, elles sont en mesure de contourner les arguments de spécificités culturelles.Footnote 43 Cela veut dire qu’aucune entité ne peut s’y soustraire au motif que les pratiques locales exigent ou tolèrent la commission de l’un ou l’autre acte sanctionnable.

Le système de sanctions de la BM a évolué depuis son introduction en 1998. À l’origine, il était régi par un operational memorandum. Une unité opérant au sein du Département des audits internes enquêtait les allégations de fraude ou de corruption et il y avait un seul organe décisionnel, le Comité des sanctions, composé de cinq membres internes, qui examinait les allégations et recommandait ensuite une sanction au président de la BM.Footnote 44 En 2001, l’unité d’enquête a été remplacée par un organe autonome et indépendant au sein de l’institution appelé la vice-présidence pour l’intégrité (INT).Footnote 45

Le régime de sanctions actuel est le fruit d’un processus continu de réformes.Footnote 46 En 2002, le système a fait l’objet d’une évaluation complète par un panel présidé par Dick Thornburgh, ancien secrétaire général adjoint de l’Organisation des Nations Unies (ONU) et ancien procureur général des États-Unis, dont les résultats et les recommandations ont été publiés dans un rapport intitulé Report Concerning the Debarment Process of the World Bank. Footnote 47 Ce rapport a donné lieu à des réformes structurelles importantes du système de sanctions de la BM en 2004, notamment l’établissement d’une structure décisionnelle à deux niveaux.Footnote 48 Le premier niveau est représenté par le responsable de la suspension et de l’exclusion (suspension and debarment officer (SDO)). Le second niveau est composé du Conseil des sanctions, qui agit en quelque sorte comme une instance d’appel.Footnote 49 La composition du Conseil a évolué au travers des réformes. À l’heure actuelle, tous les membres sont externes à la BM.Footnote 50

Les réformes subséquentes ont apporté des éléments additionnels afin d’améliorer l’efficacité et l’efficience de la procédure de sanctions.Footnote 51 La BM a emprunté des outils juridiques à des traditions différentes pour développer un système de sanctions sui generis. Footnote 52 La BM décrit sa procédure de sanctions comme étant de nature administrative, notamment parce que cette dernière ne vise pas à punir ou à tenir criminellement responsable une entité ou un individu coupable de corruption dans les opérations qu’elle finance.Footnote 53 Bien qu’il reste par essence un système administratif, le système de sanctions de la BM a acquis certaines caractéristiques d’un système judiciaire de sorte que certains le décrivent comme un système “quasi juridictionnel.”Footnote 54 La section qui suit décrit le déroulement de la procédure actuelle de sanctions de la BM tel qu’énoncé dans les Procédures de sanctions de la BM en vigueur depuis janvier 2011.

les étapes du système de sanctions de la bm

L’enquête

La première étape de la procédure est l’enquête menée par l’INT. Les plaintes et les allégations sont principalement reçues des sources externes. Par exemple, parmi les enquêtes préliminaires menées au cours de l’exercice 2019, 18.5 pour cent des plaintes provenaient du personnel de la BM et 81.5 pour cent de sources externes, telles que des concurrents, des citoyens concernés, des représentants du gouvernement, des ONG ou d’autres BMD.Footnote 55

Les enquêteurs de l’INT vérifient d’abord si les allégations relèvent de la compétence de la BM (si elles impliquent une des pratiques sanctionnables et si elles ont un lien avec un projet financé par la BM) et, au deuxième niveau d’analyse, ils déterminent s’il y a lieu de mener une enquête approfondie.Footnote 56 Ils regardent notamment “la gravité des allégations, la crédibilité de la plainte, la présence de la preuve corroborante, le montant en cause, la qualité de la preuve, l’effet potentiel sur le développement, la capacité d’enquête, le risque d’enquête et le risque de réputation pour la Banque.”Footnote 57

En vertu des clauses des documents d’appels d’offres et des accords de prêt entre la BM et le pays emprunteur, les enquêteurs de l’INT peuvent mener des inspections et des audits, y compris accéder aux comptes et aux documents se rapportant au projet de l’entité ou l’individu visé par les allégations, interroger des témoins et effectuer des visites de sites.Footnote 58 En outre, comme on l’a déjà mentionné, depuis 2006, les manœuvres obstructionnistes constituent une infraction distincte, ce qui confère aux enquêteurs de l’INT un moyen de pression pour obtenir la coopération de l’entité ou l’individu faisant l’objet de l’enquête.Footnote 59 Ces manœuvres obstructionnistes comprennent toute tentative délibérée de détruire, falsifier ou cacher des éléments de preuves ou d’entraver l’enquête en cours par la BM.Footnote 60 Sur ce dernier point, il convient de préciser que l’ingérence dans l’enquête de l’INT est également décrite dans les Directives en matière de sanctions comme un facteur aggravant pouvant entraîner une augmentation de la sanction d’un an à trois ans.Footnote 61

Si, après enquête, l’INT estime qu’il existe suffisamment de preuves pour conclure qu’il est “plus probable qu’improbable” (more likely than not) qu’une entreprise ou une personne s’est livrée à la corruption ou une autre pratique sanctionnable, il soumet un Avis d’accusation et de preuve (Statement of Accusations and Evidence (SAE)) au SDO, l’organe du premier niveau.Footnote 62 Le SAE est un document qui présente les accusations de pratiques sanctionnables, la désignation de la partie accusée, un résumé des faits et les éléments de preuves.Footnote 63 À ce stade, le fardeau de la preuve incombe aux enquêteurs de l’INT.Footnote 64 Ces derniers peuvent présenter toutes preuves à l’appui d’une allégation.Footnote 65

Les enquêteurs de l’INT réfèrent régulièrement des cas aux autorités nationales lorsque l’infraction relève de leur juridiction. En effet, comme stipulé dans les procédures de sanctions, la BM peut partager des éléments d’enquêtes avec les autorités nationales chargées de l’application de la loi.Footnote 66 Ainsi, lorsqu’un fonctionnaire public est impliqué dans la pratique de corruption, les enquêteurs de l’INT réfèrent l’affaire à l’État concerné.Footnote 67 Les renvois apportent une dimension politique à la procédure en impliquant les autorités nationales qui seraient compétentes à l’égard de l’entité ou l’individu faisant l’objet de l’enquête.Footnote 68 La BM fournit les informations obtenues au cours des enquêtes sur une base volontaire, sans préjudice des privilèges et immunités dont jouissent ses institutions constitutives, ainsi que son personnel, en vertu de leurs documents constitutifs et toute autre source de droit applicable.Footnote 69 Les autorités nationales peuvent ainsi utiliser ces informations pour déclencher leur propre enquêteFootnote 70 sans que la procédure enclenchée par la BM soit compromise. Il en résulte que l’entité ou l’individu concerné pourrait être sanctionné à la fois par une BMD et par les autorités nationales compétentes pour le même fait même si la sanction appliquée dans une affaire peut être différente de celle adoptée pour l’autre affaire.Footnote 71

Par ailleurs, les réformes de 2009 ont introduit la mesure de suspension temporaire anticipée (early temporary suspension), qui peut être prise au stade de l’enquête pour empêcher la partie accusée de soumissionner pour de nouveaux contrats financés par la BM en attendant l’issue de l’enquête.Footnote 72 Comme cette dernière est susceptible de s’étendre sur plusieurs mois, la suspension temporaire constitue une “mesure de protection préliminaire.”Footnote 73 Il s’agit toutefois d’une mesure exceptionnelle, en ce sens que l’INT peut faire la demande au SDO seulement lorsqu’il y a suffisamment de preuves pour conclure à l’existence d’une pratique sanctionnable qui serait passible d’une exclusion pour une période d’au moins deux ans.Footnote 74 La durée de cette suspension temporaire peut aller jusqu’à un an.Footnote 75 La partie accusée sera informée de la suspension temporaire par notification.Footnote 76

La procédure de sanction

La procédure de sanctions comprend deux niveaux, à savoir le Bureau de la suspension et de l’exclusion (Office of Suspension and Debarment (OSD)) et le Conseil des sanctions (Sanctions Board). Le SDO examine le SAE préparé par l’INT et détermine le caractère suffisant de la preuveFootnote 77 pour conclure à l’existence d’une pratique sanctionnable.Footnote 78 Le degré de preuve requis est établi par la prépondérance des probabilités (“more likely than not”).Footnote 79 Dans l’affirmative, il émet une notification (Notice of Sanctions Proceedings) dans laquelle il recommande une sanction appropriée parmi les cinq types de sanctions prévues par la Procédure de sanctions de la BM, à savoir la lettre publique de réprimande, l’exclusion (permanente ou pour une période déterminée), l’exclusion avec levée conditionnelle, la non-exclusion conditionnelle et la réparation.Footnote 80 Il pourra y avoir un cumul de sanctions s’il est démontré que la partie en cause s’est livrée à plus d’une pratique sanctionnable dans le cadre d’un même projet ou dans un autre projet financé par la BM.Footnote 81 Enfin, la sanction recommandée par le SDO obtient force obligatoire dans les quatre-vingt-dix jours après sa notification si la partie accusée ne la conteste pas.Footnote 82

Il convient de noter que le SDO ne jouit pas d’un pouvoir discrétionnaire comme l’INT. Lorsqu’il reçoit le SAE de l’INT et qu’il détermine que les allégations sont étayées par des éléments de preuve suffisants, il n’a pas de discrétion pour décider si une exclusion est justifiée.Footnote 83 En d’autres mots, lorsque le caractère suffisant est établi, cela entraîne souvent une suspension temporaire et une exclusion.Footnote 84 Grâce à son pouvoir discrétionnaire, l’INT peut donc inciter les entreprises ou individus accusés à coopérer à l’enquête. Toute partie faisant l’objet d’une enquête a intérêt à coopérer de bonne foi avec l’INT durant cette phase, car ce dernier a un pouvoir considérable pour décider d’engager ou non un processus de sanction ou pour négocier un règlement.Footnote 85

Dans le cas où la partie accusée désire contester les allégations portées contre elle, elle peut saisir le Conseil des sanctions dans les quatre-vingt-dix jours suivant la date d’émission de la notification.Footnote 86 Le Conseil des sanctions est un tribunal administratif indépendant composé de sept juges externes et indépendants de la BM. Il est chargé de réexaminer l’affaire et, le cas échéant, de rendre une décision définitive.Footnote 87 À ce stade, le Conseil des sanctions peut, à sa discrétion ou à la demande de l’une des parties (l’INT ou la partie accusée), décider de tenir une audience.Footnote 88

Le Conseil des sanctions peut imposer une sanction plus sévère ou moins sévère que celle recommandée par le SDO. Il peut même mettre fin à la procédure s’il détermine qu’il n’y a pas de preuves suffisantes pour confirmer l’existence d’une pratique sanctionnable.Footnote 89 Lorsque le Conseil impose une sanction d’exclusion, il prend en compte la période de suspension temporaire déjà infligée à la partie accusée.Footnote 90 Par ailleurs, comme lors de l’enquête de l’INT, une organisation ou un individu peut être temporairement exclu de participer aux projets financés par la BM en attendant la résolution finale de l’affaire.Footnote 91 La suspension temporaire prend effet automatiquement lorsque le SDO recommande une sanction d’exclusion de plus de six mois.Footnote 92

Le nom de l’entité ou de l’individu sanctionné par l’autorité de sanction (le SDO dans le cas des décisions incontestées ou le Conseil des sanctions) ainsi que la sanction imposée sont divulgués sur le site web de la BM.Footnote 93 Comme nous l’avons déjà souligné, l’imposition d’une sanction rend inéligible à participer aux contrats financés par l’institution. Les pays emprunteurs sont tenus de vérifier que les entités ou individus avec qui ils veulent conclure des contrats ne figurent pas sur la liste noire de la BM, faute de quoi, cette dernière cessera son financement et pourra exercer d’autres recours.Footnote 94

Conformément aux nouvelles Procédures de sanctions de la BM, en vigueur depuis janvier 2011, les décisions du Conseil des sanctions doivent être écrites et dûment motivées, et sont publiées.Footnote 95 Quant aux décisions du SDO dans les procédures incontestées, seul un résumé est publié.Footnote 96 Il s’agit d’un grand pas vers plus de transparence et de responsabilisation du processus décisionnel.Footnote 97 La publication des décisions contribue également à l’élaboration d’une jurisprudence qui vient compléter et clarifier la procédure de sanctions, renforçant ainsi la sécurité juridique.Footnote 98 En outre, le Conseil publie et met à jour régulièrement des Law digests (recueil de jurisprudence) qui énoncent les principes de droit appliqués dans ses décisions.Footnote 99

Jusqu’à présent, la majorité des cas (66 pour cent) sont résolus au premier niveau de l’OSD alors que seulement 34 pour cent font l’objet d’un recours devant le Conseil des sanctions.Footnote 100 Conformément à l’approche de conformité, le Conseil des sanctions peut réduire significativement la période d’exclusion initialement recommandée par le SDO sur la base des facteurs atténuants comme la prise de mesures correctives, la tenue d’une enquête interne, le congédiement des employés coupables, la mise en place d’un programme de conformité et la coopération avec l’INT.Footnote 101 La procédure de sanctions prévoit des garanties procédurales, telles que la notification des allégations à la partie accusée, la possibilité de contester la suspension temporaire et la sanction recommandée par le SDO en soumettant une explication écrite ainsi que l’opportunité d’être entendue en personne ou par l’entremise d’un représentant par le Conseil des sanctions.Footnote 102 Bien que ces droits procéduraux soient moins étendus que ceux prévus dans les systèmes nationaux,Footnote 103 ils donnent une légitimité à la procédure de sanctions de la BM tout en rendant la procédure plus efficace.Footnote 104

Enfin, il convient de souligner le caractère obligatoire de l’exclusion lorsqu’il est établi qu’un acte de corruption a été commis lors des opérations impliquant la BM. En faisant une comparaison avec le système américain en matière d’exclusion, Peirone note que “[t]he World Bank’s hierarchical process, with its distinct steps and checks and balances, leaves World Bank officers without the discretion to evaluate a contractor as an individual, assessing the particular risks and opportunities a contractor may present.”Footnote 105

lexclusion comme principal instrument de sanction de la bm en matière de corruption

Étant donné que la BM et, plus généralement, les BMD sont des organisations internationales, elles n’ont pas les mêmes pouvoirs de coercition que les autorités nationales. Par conséquent, les outils disponibles pour s’attaquer à la corruption transnationale sont limités. Son ultime source de pouvoir est sa capacité à contrôler l’accès aux financements en empêchant les entités ou individus corrompus de participer aux contrats qu’elle finance.Footnote 106 Le système de sanctions de la BM utilise l’exclusion (debarment) comme principal outil pour sanctionner la corruption dans ses opérations. Ce mécanisme, également appelé “blacklisting,” est de plus en plus utilisé pour lutter contre les activités de corruption dans les systèmes de passation des marchés publics.Footnote 107

Portée et effets de l’exclusion

Non seulement l’exclusion entraîne l’inéligibilité des entités ou individus coupables de corruption à l’attribution de contrats financés par la BM, mais elle empêche aussi d’être choisi comme sous-traitant, consultant, fournisseur ou prestataire de services au profit d’une autre entreprise éligible aux contrats financés par l’institution.Footnote 108 Une décision d’exclusion n’a pas d’effet sur les contrats en cours. L’entité exclue pourra continuer d’y participer, mais sans le financement de la BM.Footnote 109 Cependant, aucun nouveau contrat ne peut être conclu suite à l’entrée en vigueur de l’exclusion avec l’entité ou l’individu sanctionné.Footnote 110

Comme nous venions de la rappeler, les procédures de sanctions prévoient cinq types de sanctions auxquelles la BM peut avoir recours en cas de violation à ses Directives en matière de lutte contre la corruption: la lettre de réprimande, l’exclusion permanente ou pour une période déterminée, la non-exclusion conditionnelle, l’exclusion avec levée conditionnelle et la restitution (réparation).Footnote 111 Selon le Guide de sanctions de la BM, l’exclusion permanente n’est généralement appropriée que dans les cas où l’on estime qu’il n’y a pas de motifs raisonnables de penser que le défendeur peut être réhabilité grâce à la mise en conformité ou à d’autres conditionnalités.

La restitution est souvent exigée comme condition de non-exclusion ou de libération d’une exclusion.Footnote 112 Cela intervient généralement dans le cadre des règlements négociés que nous aborderons en détail un peu plus loin. Jusqu’à présent cependant, la restitution n’a pas été imposée au titre de sanction séparée, en raison notamment des difficultés liées à l’évaluation monétaire du dommage causé par l’inconduite et à l’identification du bénéficiaire approprié.Footnote 113 En outre, la BM, en tant qu’organisation internationale, n’a pas le pouvoir d’imposer l’exécution de l’ordre de restitution et ne peut que compter sur la coopération et la participation de l’entité ou l’individu responsable de corruption.Footnote 114 Il pourrait être intéressant pour la BM d’exploiter la possibilité de conclure des ententes avec les pays membres afin que ses décisions de restitution puissent être exécutées par les autorités nationales.

L’exclusion avec levée conditionnelle et la non-exclusion conditionnelle ont été introduites durant les réformes de 2004.Footnote 115 La particularité de ces deux sanctions est qu’elles impliquent la mise en œuvre d’un certain nombre de conditions correctives et préventives auxquelles l’entité ou l’individu concerné doit satisfaire pour être libéré d’une exclusion ou pour éviter une exclusion.Footnote 116 Les conditions impliquent généralement l’élaboration et la mise en œuvre d’un programme de conformité, l’adoption de mesures disciplinaires contre les employés et la restitution.Footnote 117

L’application des sanctions aux groupes d’entreprises

En vertu des procédures de sanctions de la BM, les sanctions, y compris la suspension temporaire, peuvent également être appliquées aux sociétés affiliées à la partie sanctionnée en vue de prévenir les possibilités de contournement de sanctions à travers les entités affiliées ou par la modification de la forme juridique de l’entreprise.Footnote 118 La BM emploie le critère de contrôle pour déterminer si les sociétés sont affiliées l’une à l’autre.Footnote 119 Le contrôle peut découler de la détention des parts sociales dans l’entreprise filiale ou d’une entente contractuelle. Ainsi, les entreprises sont considérées comme affiliées lorsque l’une ou l’autre de ces entités contrôle l’autre ou si ces deux entités sont sous un contrôle commun.Footnote 120

En principe, les sanctions imposées à la partie sanctionnée sont automatiquement appliquées à ses filiales, sauf si la partie sanctionnée apporte la preuve que ces dernières sont dégagées de toute responsabilité pour la pratique sanctionnable, que l’imposition d’une sanction serait disproportionnée et n’est pas raisonnablement nécessaire pour éviter le contournement.Footnote 121 En revanche, il incombe à l’INT de démontrer l’implication des sociétés mères (sociétés qui contrôlent la partie sanctionnée) et des sociétés sœurs (sociétés qui sont sous contrôle commun avec la partie sanctionnée) dans la pratique sanctionnable afin que des sanctions leur soient appliquées.Footnote 122 En outre, contrairement aux filiales, ces dernières jouissent de droits procéduraux analogues à ceux de la partie sanctionnée.Footnote 123 Bref, le système de sanctions de la BM applique un régime plus sévère aux filiales en faisant peser la charge de la preuve sur la partie accusée, ce qui signifie que ces dernières sont automatiquement tenues responsables des actes posés par leurs sociétés mères.Footnote 124

S’agissant du choix de la sanction appropriée, le régime fait la distinction entre la culpabilité, qui requiert la participation aux pratiques sanctionnables, et la responsabilité, qui découle des manquements dans la supervision ou d’un aveuglement volontaire.Footnote 125 Cette distinction permet d’assurer que les sanctions appliquées aux entités et individus soient proportionnelles à leur degré de responsabilité dans la commission de l’acte sanctionnable.Footnote 126 La responsabilité aboutit généralement à une sanction de non-exclusion conditionnelle, sauf dans de cas isolés de manque de supervision qui entraînent plutôt une lettre de réprimande.Footnote 127 Dans les cas les plus graves comme ceux découlant de l’aveuglement volontaire par l’entité qui contrôle l’autre, il peut y avoir une sanction aussi sévère que celle résultant d’une culpabilité.Footnote 128 S’agissant des successeurs et des ayants droit, l’extension des sanctions à ces derniers n’est pas automatique. Toutefois, il y a une présomption réfutable selon laquelle toute sanction imposée s’applique aux successeurs et ayants droit de la partie sanctionnée. Ces derniers peuvent renverser cette présomption s’ils démontrent qu’une telle application serait déraisonnable.Footnote 129 Enfin, des sanctions partielles peuvent être appliquées lorsque la partie sanctionnée arrive à démontrer que la conduite sanctionnable a été adoptée à son insu par une unité ou une division en particulier.Footnote 130 En ce qui concerne l’attribution de la responsabilité à une personne morale, la BM s’appuie sur la doctrine de respondeat superior (la responsabilité pour le fait d’autrui). Cela veut dire qu’elle n’a pas besoin de prouver l’implication personnelle dans la commission des actes sanctionnables avant d’imposer la sanction aux organisations. Tout geste interdit commis par leurs employés ou agents est attribué à ces entités.Footnote 131

Déterminer la sanction appropriée pour les groupes d’entreprises ou en cas de restructuration des entreprises pose des difficultés dans la pratique. Le défi pour la BM est d’accroître l’efficacité des sanctions, en empêchant le contournement des celles-ci par le recours à des sociétés affiliées ou des changements de forme d’entreprise, et, en même temps, de garantir l’équité dans son traitement des groupes d’entreprises, en veillant à ce que les sanctions soient proportionnelles au degré de responsabilité.Footnote 132

La reconnaissance et l’application mutuelle des décisions d’exclusion entre les grandes banques multilatérales de développement

Les principales BMD, dont la BM, avec la participation du Fonds monétaire international et de la Banque européenne d’investissement se sont engagés dans un processus visant à harmoniser leurs politiques et procédures de sanctions avec la mise en place, en février 2006, d’un Groupe de travail des institutions financières internationales sur la lutte contre la corruption (ci-après Groupe de travail) chargé d’élaborer une approche cohérente et harmonisée pour lutter contre la corruption dans le cadre des activités qu’elles financent.Footnote 133 Les systèmes de sanctions des BMD avaient en commun un certain nombre d’éléments fondamentaux, dont un Bureau de l’intégrité pour enquêter sur les allégations de violations de leurs politiques anticorruption et le recours à l’exclusion comme modalité principale de sanction.Footnote 134 Cependant, ces politiques présentaient des différences importantes au niveau des pratiques sanctionnables, y compris leurs définitions, et au niveau des règles et procédures de sanctions applicables.Footnote 135 En effet, “these mechanisms were each developed separately, drawing on the distinct institutional cultures and political tolerances of the individual MDBs.”Footnote 136

Afin de remédier à ce problème, le Cadre uniforme de prévention et de lutte contre la fraude et la corruption (ci-après le Cadre uniforme) a été adopté à l’issue des travaux du Groupe de travail. Ce cadre prévoit des définitions uniformes des pratiques interdites (corruption, fraude, coercition et collusion) ainsi que des directives et principes communs pour la conduite des enquêtes.Footnote 137 En outre, les institutions participantes ont convenu de renforcer l’échange d’informations entre elles et de poursuivre les discussions pour mettre en œuvre un système de reconnaissance mutuelle de leurs décisions d’exclusion.Footnote 138 Il convient de noter que les manœuvres obstructionnistes ne sont pas incluses dans les pratiques prohibées, puisqu’elles ne font pas l’objet d’un consensus parmi les institutions signataires.Footnote 139

Ces discussions ont abouti à l’adoption, le 9 avril 2010, de l’Accord d’exclusion croisée Footnote 140 entre le Groupe de la BM, le Groupe de la BAfD, la BAD, la BERD et le Groupe de la BID établissant un régime d’exclusion croisée entre elles.Footnote 141 Aux termes de cet accord, les institutions participantes s’engagent à exclure, selon les mêmes modalités, les entités ou individus qui ont fait l’objet d’une exclusion par les autres institutions participantes.Footnote 142 L’exclusion croisée est automatique sous réserve de certains critères et du recours à la clause dérogatoire prévue. Les critères prévoient, entre autres, que la décision initiale d’exclusion doit être publique, que la durée d’exclusion prévue doit dépasser un an et que le comportement sanctionnable ait été adopté dans les dix ans à partir de la date de la décision de sanction.Footnote 143 En outre, c’est l’institution à l’origine de la décision de sanction qui établit la durée de l’exclusion et les conditions pour lever une exclusion, le cas échéant.Footnote 144

S’agissant de la clause dérogatoire, une institution peut décider de ne pas appliquer une mesure d’exclusion particulière si elle détermine que cette mesure est contraire à ses considérations juridiques ou institutionnelles.Footnote 145 Ainsi, la dérogation est prévue pour être utilisée dans des situations exceptionnellesFootnote 146 et jusqu’à présent, aucune institution n’a eu recours à cette clause.Footnote 147 En outre, cette clause n’affecte pas l’application de la décision d’exclusion par les autres institutions participantes. Par ailleurs, l’Accord d’exclusion croisée permet aux institutions de mener des procédures indépendantes contre une entité ou individu sanctionné par une autre BMD participante pour d’autres pratiques prohibées, ce qui peut entraîner des sanctions simultanées.Footnote 148

L’Accord d’exclusion croisée a également obligé les institutions participantes à adopter des normes uniformes. En effet, chaque institution participante devait apporter les modifications nécessaires à ses politiques et procédures de sanctions pour satisfaire aux conditions préalables à la mise en œuvre de l’Accord. Ces conditions comprennent, entre autres, l’adoption des définitions harmonisées des pratiques prohibées et l’adhésion aux principes et directives pour les enquêtes énoncées dans le Cadre uniforme, l’établissement d’une unité d’enquête et une autorité décisionnelle indépendante, le recours aux enquêtes écrites et accessibles au public et des procédures reconnaissant des droits procéduraux, l’utilisation du fardeau de preuve de la prépondérance des probabilités ou son équivalent, et l’élaboration d’un éventail de sanctions qui prennent en compte le principe de proportionnalité, y compris les facteurs atténuants et aggravants.Footnote 149 L’exécution mutuelle des décisions par les BMD participantes multiplie l’effet dissuasif d’une sanction d’exclusion en élargissant la portée et l’impact de celui-ci sur l’entité ou l’individu reconnu coupable de corruption.Footnote 150

Les BMD ont poursuivi leurs efforts d’harmonisation en adoptant, en septembre 2012, des principes et directives harmonisés visant les sanctions et le traitement des groupes d’entreprises en vue d’assurer la cohérence des sanctions entre les institutions quant à leur degré et leur portée.Footnote 151 Au niveau des sanctions, toutes les institutions participantes ont convenu d’intégrer cinq types de sanctions et de retenir l’exclusion pour une durée de trois ans (avec ou sans levée conditionnelle) comme sanction de base. Il convient de noter qu’à l’exception de la BM et de la BAfD qui fixent l’exclusion avec levée conditionnelle comme sanction de base, les autres institutions imposent une exclusion pour une durée fixe.Footnote 152 En outre, ces institutions suivent des lignes directrices communes pour réduire ou augmenter la durée de la sanction en fonction des circonstances aggravantes et atténuantes.Footnote 153 En ce qui concerne le traitement des groupes d’entreprises, il est intéressant noter que le fardeau de preuve est transféré aux BMD pour étendre la sanction d’exclusion aux entreprises contrôlant la partie qui a commis le geste sanctionnable ou qui sont sous le contrôle commun avec ce dernier.Footnote 154 Dans le cas où l’entreprise coupable de corruption est qualifiée pour une exclusion croisée, les autres BMD n’appliqueront l’exclusion croisée qu’à l’égard des entités identifiées par leur nom.Footnote 155 Enfin, en ce qui concerne les principes harmonisés pour le traitement des groupes d’entreprises, Nesti fait valoir que “[ces principes] répondent à des défis spécifiques posés par l’application différente du concept de responsabilité des sociétés pour la conduite de leur personnel dans le contexte des États-Unis ou de traditions juridiques similaires, par opposition aux traditions existant dans d’autres régions où certaines des principales BMD régionales sont basées et opèrent.”Footnote 156

Des différences existent toujours entre les procédures de sanctions de chaque BMD notamment les types d’activités pour lesquelles une entité peut être sanctionnée, l’effet d’une sanction d’exclusion sur les contrats existants avec d’autres BMD, et la réintégration des entités exclues suite à l’expiration de la période d’exclusion.Footnote 157 Compte tenu de ces différences, l’exécution mutuelle des décisions d’exclusion n’est pas contraignante.Footnote 158 Le régime d’exclusion croisée, en dépit de ses avantages, présente pourtant un inconvénient. Il réduit la discrétion du SDO dans le choix de la sanction appropriée à imposer.Footnote 159 Ce dernier pouvait, grâce à son pouvoir discrétionnaire, utiliser l’exclusion comme un outil de négociation pour obtenir la coopération de la partie accusée à l’enquête ou réclamer une restitution.Footnote 160 En outre, l’application automatique des décisions d’exclusion peut limiter l’accès à certains fournisseurs et contractants clés qui peuvent être les seuls à disposer de la qualification nécessaire pour exécuter un ouvrage donné.Footnote 161

Les tendances actuelles: exclusion avec levée conditionnelle en tant que sanction de base

Au cours de la dernière décennie, la portée du système de sanctions de la BM a été élargie, allant au-delà de la simple exclusion et inscription des entités et individus sanctionnés sur la liste noire de l’institution pour encourager leur réhabilitation. Depuis 2010, l’exclusion avec levée conditionnelle pour une période minimale de trois ans est devenue la sanction de base ou par défaut, à moins que les circonstances justifient l’imposition d’une autre sanction.Footnote 162 À cet égard, la partie faisant l’objet de poursuites est déclarée inéligible aux contrats financés par la Banque et n’est libérée, après la durée minimale d’exclusion de trois ans, que si elle remplit certaines conditions.Footnote 163 Ainsi, la BM ne se contente pas seulement d’imposer des sanctions, elle participe aussi aux changements internes des entreprises à travers l’imposition des mesures de prévention et des outils de conformité dans les opérations futures.Footnote 164 À ce sujet, la surveillance de la mise en œuvre des conditions imposées dans le cadre d’une exclusion avec levée conditionnelle et de non-exclusion conditionnelle est assurée par l’Integrity Compliance Office (ICO), une instance qui opère au sein de l’INT spécifiquement créée à cet effet.Footnote 165 Elle est chargée d’établir les conditions à remplir par la partie sanctionnée et d’évaluer le respect de celles-ci.Footnote 166 La partie sanctionnée peut être tenue, entre autres, de présenter des rapports périodiques et nommer un observateur indépendant.Footnote 167 La partie sanctionnée doit soumettre une demande dans laquelle elle démontre sa conformité aux conditions imposées pour obtenir une libération.Footnote 168 L’ICO est investi d’une large discrétion pour décider si les conditions ont été satisfaites par la partie sanctionnée; sa décision est sujette à révision seulement pour abus de pouvoir discrétionnaire.Footnote 169 Si ce dernier détermine que les conditions ne sont pas remplies, la durée de l’exclusion sera prolongée d’une année au maximum suite à laquelle la partie sanctionnée devra faire une nouvelle demande.Footnote 170 Les conditions comprennent généralement la prise de mesures correctives, telles que la restitution et des sanctions disciplinaires contre les employés impliqués dans l’inconduite, et l’adoption et la mise en œuvre d’un programme de conformité acceptable pour la BM.Footnote 171 Les programmes de conformité doivent être conformes aux principes énoncés dans les Directives du Groupe de la BM pour le respect de l’intégrité, qui reflètent les normes internationalement reconnues en la matière.Footnote 172 Cependant les ressources consacrées et les actions spécifiques pour se conformer à ces directives sont élaborées en tenant compte des circonstances individuelles de chaque entité, telles que sa taille, sa situation géographique et son secteur d’activité.Footnote 173 Par ailleurs, comme les conditions imposées dans le cadre d’une exclusion avec levée conditionnelle (et de non-exclusion conditionnelle) peuvent, dans une certaine mesure, être adaptées à la partie faisant l’objet de sanctions, il en résulte des sanctions plus “personnalisées.”Footnote 174

La raison derrière le choix de l’exclusion avec levée conditionnelle en tant que sanction de base est d’assurer la réhabilitation des entités ou individus sanctionnés avant qu’ils soient réintégrés dans le marché en les amenant à adopter des politiques et des mesures préventives pour éviter la récidive.Footnote 175 Comme le note Kevin Fandl, “[t]he goal is not to limit the field of potential contractors which can be thin, but rather to improve transparency and good governance of those entities to prepare them for future economic development work.”Footnote 176

En théorie, le SDO ou le Conseil de sanctions, selon le cas, peuvent choisir d’imposer une sanction autre que l’exclusion avec levée conditionnelle en présence de circonstances aggravantes ou atténuantes, mais, en réalité, celles-ci n’affectent que la durée minimale d’exclusion.Footnote 177 Autrement dit, en partant de la sanction de base, le SDO ou le Conseil peut accroître ou réduire la sanction en fonction des facteurs aggravants ou atténuants détaillés dans les Sanctioning Guidelines. Footnote 178 En vertu de ces directives, l’existence de sanctions antérieures imposées par une BMD ou la violation de celles-ci entraîne jusqu’à dix ans d’exclusion. S’agissant des facteurs atténuants, la prise de mesures correctives volontaires peut donner lieu à une réduction de la durée d’exclusion.Footnote 179

les procédures alternatives au système de sanctions: le voluntary disclosure program et les règlements négociés

À travers les réformes, la BM a étendu ses outils pour renforcer sa capacité à prévenir et réprimer la corruption dans ses opérations. Elle offre la possibilité aux entreprises de recourir à des procédures alternatives, soit de participer au Voluntary Disclosure Program (VDP) ou de négocier un règlement (settlement). Introduit en 2006, le VDP repose sur la collaboration avec les acteurs du secteur privé.Footnote 180 Seules les entités ne faisant pas l’objet d’une enquête sont autorisées à participer au programme.Footnote 181 Dans le cadre d’un VDP, l’entreprise s’engage à divulguer aux enquêteurs de l’INT tous les gestes sanctionnables commis lors de l’exécution des projets antérieurs financés par la Banque. En échange, cette dernière n’imposera pas d’exclusion et gardera confidentielles l’identité et les informations échangées en lien avec l’entité visée.Footnote 182 L’entreprise s’engage, en outre, à mettre en œuvre un programme de conformité robuste, supervisé par un vérificateur externe, et mener des enquêtes internes pour éviter de violations futures.Footnote 183 Le manquement aux conditions du VDP entraîne automatiquement une exclusion pour une durée de dix ans conformément à la procédure régulière et la sanction sera rendue publique.Footnote 184 Les violations des conditions imposées par l’INT comprennent l’omission de divulguer toute faute répréhensible du passé, la commission d’une nouvelle pratique sanctionnable ou la violation des dispositions matérielles du programme.Footnote 185 Grâce aux divulgations volontaires, l’INT pourrait obtenir des renseignements sur des acteurs ou des schémas particuliers, tandis que l’entreprise participante pourrait éviter une exclusion publique et garder son identité confidentielle, ce qui lui permettra d’éviter des risques pour sa réputation.Footnote 186

L’une des critiques adressées aux VDP est le fait que la sévérité de la sanction en cas de violation des conditions pourrait décourager les entreprises qui ne voudront pas prendre le risque de divulguer des pratiques sanctionnables mineures.Footnote 187 En effet, il importe que la sanction imposée pour une violation des conditions découlant d’un VDP encourage les entreprises à divulguer volontairement en comparaison à la sanction imposée dans le cadre d’une procédure régulière. En outre, le VDP ne prévoit pas le versement d’un dédommagement aux victimes des pratiques sanctionnables dévoilées.Footnote 188 Cela aurait eu comme conséquence le fait que les VDP soient très peu utilisés par les entreprises.Footnote 189

Par ailleurs, depuis septembre 2010, le système de sanctions de la BM est doté d’une procédure formelle pour les règlements négociés, détaillée dans ses Procédures de sanctions. En effet, l’INT peut, d’un commun accord avec la partie faisant l’objet d’une enquête, à n’importe quel moment avant qu’une décision finale ne soit rendue par le Conseil des sanctions, résoudre l’affaire au moyen d’un règlement négocié.Footnote 190 C’est l’ICO qui contrôle et surveille l’application des conditions de l’accord. De plus, la partie concernée doit renoncer volontairement à participer à d’autres contrats financés par la Banque durant les négociations, à défaut de quoi l’INT pourra mettre fin à ces dernières.Footnote 191

Les règlements négociés sont une “caractéristique quasi-universelle” des procédures judiciaires (civiles, pénales et administratives) de la plupart des États qui permettent d’économiser du temps et des ressources tout en offrant une certitude pour les parties quant au résultat.Footnote 192 Dans le contexte de la BM, le règlement négocié peut, soit prendre la forme d’un accord de règlement (negotiated resolution agreement), donc une sanction négociée qui vient se substituer à la procédure formelle de sanctions, soit d’un accord sur la remise des procédures (deferred prosecution agreement) qui suspend la procédure pendant une période durant laquelle l’entité accusée devra se conformer à un certain nombre de conditions.Footnote 193 L’accord différé est semblable aux accords de poursuites différées négociés entre les services de poursuites et les entreprises impliquées dans la criminalité. Ces accords ont d’abord vu le jour aux États-Unis avant d’être adoptés au Royaume-Uni, en France et au Canada.

Les enquêteurs de l’INT ont la discrétion de décider s’il convient ou non de résoudre l’affaire au moyen d’un règlement. Ils prennent en considération un certain nombre de critères, tels que la reconnaissance de culpabilité, la coopération à l’enquête, la possibilité pour la BM d’économiser des ressources considérables et la prise de mesures correctives.Footnote 194 Généralement, un règlement négocié aboutit à une sanction, souvent une exclusion avec levée conditionnelle.Footnote 195 Par conséquent, la partie en cause pourrait faire l’objet d’une exclusion croisée par d’autres BMD si la durée de l’exclusion dépasse un an.Footnote 196 De plus, le nom de la partie sanctionnée par voie de règlement sera inscrit sur la liste noire rendue publique par la BM.Footnote 197 L’avantage d’un règlement négocié est qu’il offre à la partie accusée la possibilité de négocier les conditions d’une exclusion.Footnote 198 Cette dernière pourrait accepter de prendre des mesures correctives volontaires et, en échange, obtenir une réduction de la période d’exclusion ou même une sanction alternative.Footnote 199 Autrement dit, la partie accusée subit habituellement une sanction inférieure dans le cadre d’un règlement que si l’affaire était menée conformément à la procédure régulière.Footnote 200 Par conséquent, l’entreprise poursuivie peut éviter les conséquences d’une exclusion croisée. En outre, dans un règlement négocié, la partie accusée remplit les engagements qu’elle a acceptés, tandis que dans le cadre d’une procédure régulière, les conditions d’une exclusion avec levée conditionnelle lui sont imposées par l’ICO.

En plus de la sanction, tous les accords de règlement prévoient les trois conditions suivantes: la non-contestation ou l’admission des actes sanctionnables en question, la mise en œuvre d’un programme de conformité en collaboration avec l’ICO, et l’engagement à coopérer à l’avenir avec les enquêteurs de la Banque.Footnote 201 S’agissant de la première condition, Rohan Schaap et Cecile Divino notent que l’admission de culpabilité peut aboutir à un règlement plus significatif, puisque l’entreprise ou l’individu en question a accepté de coopérer avec la BMD et a admis sa culpabilité, un facteur atténuant pouvant entraîner une réduction de la durée de l’exclusion.Footnote 202 Par ailleurs, c’est à travers les accords négociés que l’INT peut soumettre une partie accusée à des exigences de grande envergure comme elle l’a fait dans le cadre de l’accord conclu avec Siemens en 2009 qui comprend un engagement de la part de l’entreprise de verser 100 millions de dollars américains pour appuyer des initiatives internationales en matière de lutte contre la corruption en plus d’une sanction d’exclusion contre cette dernière et ses filiales.Footnote 203 En outre, c’est aussi généralement dans le cadre d’un règlement négocié qu’une obligation de restitution est imposée. À titre d’exemple, dans l’accord conclu avec Alstom en 2012, ce dernier a accepté qu’Alstom Hydro France et Alstom Network Schweiz AG (Suisse), accusées d’avoir effectué un paiement illicite de 110,000 euros dans le cadre d’un projet financé par la Banque en Zambie, soient exclues des projets de la Banque pour une période de trois ans et que ces dernières effectuent un paiement de 9,5 millions de dollars américains à titre de restitution.Footnote 204

Il n’y a pas d’harmonisation entre les BMD au niveau de la restitution, y compris la manière dont elle est calculée.Footnote 205 Certaines d’entre elles imposent un montant qui va au-delà de la simple réparation et contient un élément punitif.Footnote 206 La BM, quant à elle, ne prévoit pas de pénalités financières dans ses procédures de sanction. Cette divergence dans l’approche peut soulever une préoccupation dans le contexte du régime d’exclusion croisée: “Of particular concern is whether a debarment against an entity by one MDB may allow another MDB with an open investigation into the same entity to gain leverage from the debarment to extract maximum payment amounts if there is a settlement.”Footnote 207

Tout comme dans le cadre d’une procédure régulière, l’ICO dispose d’une large discrétion pour décider si les conditions listées dans l’accord de règlement ont été respectés. La partie concernée peut toutefois faire une demande de révision de la décision de non-respect de l’accord de règlement en cas d’abus dans l’exercice du pouvoir discrétionnaire de l’ICO.Footnote 208 En outre, l’accord de règlement doit être validé par le SDO. Ce dernier vérifie si l’accord a été conclu librement et si les termes de l’accord ne violent pas manifestement les procédures et les directives de sanctions.Footnote 209 Au niveau de la transparence des règlements négociés, bien que les termes de l’accord restent confidentiels, la BM publie sur son site Web un communiqué de presse annonçant l’entrée en vigueur de celui-ci et en fournissant certaines informations de base.Footnote 210 Toutefois, les noms des entités exclues dans le cadre d’un règlement négocié figurent sur la liste noire de la Banque.

Les deux parties, à savoir la BM et la partie accusée, profitent toutes des règlements négociés, notamment parce que ces derniers prévoient une certitude quant au résultat et permettent de réaliser des économies en temps et en ressources. Par ailleurs, une étude faite par la BM a trouvé que les entités et/ou individus qui concluent des accords avec la Banque se montrent plus engagés dans le système de sanctions et sont plus disposés à respecter les conditions de libération que dans le cadre d’une procédure régulière.Footnote 211 Le recours aux règlements négociés a augmenté de manière générale depuis leur introduction dans la procédure de sanctions de la BM. Le nombre de règlements représentaient environ 42 pour cent des sanctions durant l’exercice 2020 (vingt deux cas résolus au moyen d’un règlement négocié contre trente sanctions imposées par le SDO).Footnote 212 Ce mécanisme n’a cependant pas réduit l’importance des recours aux procédures régulières de sanctions. Certains auteurs suggèrent que, dans certaines circonstances appropriées, il serait judicieux pour la partie accusée d’opter pour la procédure régulière, car il arrive que le Conseil des sanctions mette fin à la procédure pour insuffisance de preuves.Footnote 213 Peut-être que l’existence d’une perspective raisonnable de condamnation devrait constituer l’une des conditions préalables à tout recours au règlement négocié, à l’instar de ce qui est fait en matière de mesures de rechange en droit pénal interne notamment au Canada.

Le règlement négocié est un instrument flexible qui, comme nous avons expliqué plus haut, permet d’économiser du temps et des ressources, mais surtout offre une certitude et une prévisibilité quant au résultat. Néanmoins, les enquêteurs de l’INT ne doivent pas perdre de vue que ce mécanisme pourrait favoriser les grandes multinationales.Footnote 214 Enfin, les VDP et les règlements négociés sont fondés sur une approche de conformité (compliance) comprenant l’autodénonciation (self-reporting) et la coopération, mais au détriment de la transparence à cause notamment des protections de la confidentialité accordées à la partie concernée.

Analyse de la cohérence du système de sanctions de la BM

La présente partie est consacrée à l’analyse de la cohérence du système de sanctions de la BM. Plus spécifiquement, nous évaluerons si le mécanisme d’exclusion est suffisamment dissuasif pour prévenir et décourager les comportements sanctionnables des acteurs privés impliqués dans l’exécution des projets financés par la banque.

leffet dissuasif du système de sanctions de la bm et son impact sur les entreprises et les particuliers

Même en l’absence d’études empiriques sur l’effet dissuasif des mesures d’exclusion,Footnote 215 la réalité sur le terrain prouve que les sanctions d’exclusion exercent de la pression non négligeable sur les entreprises et individus qui font affaire avec les BMD. La BM exerce une influence directe sur les entités et individus coupables de corruption dans les activités qu’elle finance par le biais de son pouvoir d’exclusion. Dans la plupart des cas, les auteurs d’une infraction, y compris leurs filiales, seront aussi temporairement empêchés de participer aux projets financés par la BM tout au long de la procédure, sauf si la sanction recommandée comprend une exclusion d’une durée inférieure ou égale à six mois.Footnote 216 De plus, comme la sanction par défaut, en l’absence de circonstances atténuantes, entraîne une exclusion pour une durée minimale de trois ans (avec libération conditionnelle après cette période minimale), les entités et individus sanctionnés sont normalement qualifiés pour une exclusion croisée par les autres BMD en vertu de l’Accord d’exclusion croisée. En 2013, la société d’ingénierie canadienne SNC-Lavalin ainsi que ses 100 filiales ont été exclues pour dix ans en vertu d’un règlement négocié avec la BM pour complot de corruption impliquant des fonctionnaires au Bangladesh.Footnote 217 Considérant sa forte présence dans les pays en développement et les multiples contrats qu’elle a signés avec les agences de développement international et les BMD au fil des années,Footnote 218 cette exclusion a eu un impact significatif sur ses revenus, sans mentionner la publicité négative qu’elle a reçue de la part des médias. Il s’agit de la plus longue période d’exclusion que la Banque a imposée dans un règlement jusqu’à maintenant.Footnote 219 Par ailleurs, SNC-Lavalin a aussi fait l’objet d’une exclusion croisée. La compagnie a finalement bénéficié de la levée des sanctions deux ans plus tôt pour avoir bien suivi les conditions imposées y compris l’intégration des mesures efficaces en matière d’intégrité.

Les BMD assurent une large part du financement des grands projets de développement international et couvrent l’ensemble des régions du monde.Footnote 220 Par conséquent, une exclusion croisée renforce considérablement l’effet dissuasif.Footnote 221 Pour les entreprises qui tirent une grande partie de leurs revenus desdits projets, l’impact économique d’une sanction d’exclusion et subséquemment d’une exclusion croisée est énorme. Une étude économique sur l’exclusion montre que cette mesure peut avoir un effet dissuasif lorsque la probabilité de détection de la corruption est assez élevée et que les soumissionnaires accordent une valeur suffisamment grande aux futurs contrats publics.Footnote 222 Par exemple, selon cette étude, l’effet d’une exclusion sera important pour les entreprises multinationales qui soumissionnent régulièrement aux contrats financés par la BM si l’exclusion croisée est perçue comme une menace réelle, de même que pour les petits fournisseurs qui dépendent des marchés financés par la BM.Footnote 223 L’exclusion croisée ferme une échappatoire utilisée par les grandes entreprises multinationales pour compenser les pertes associées à une exclusion par une BMD notamment grâce à leur capacité à obtenir des marchés dans d’autres régions où elles ne sont pas exclues.Footnote 224 Par ailleurs, les autres IFI, comme le Groupe de la Banque islamique de développement, ont récemment procédé aux réformes de leurs règles d’enquêtes et de sanctions en vue d’adhérer à l’Accord d’exclusion croisée. Footnote 225 Dans le même sens, la Banque asiatique d’investissement dans les infrastructures (BAII) a volontairement adopté la liste des entités et individus exclus en vertu de cet Accord et a indiqué son intention d’y adhérer.Footnote 226 Par conséquent, tous les entreprises et individus qui font l’objet d’une exclusion croisée sont également exclus des marchés financés par la BAII.Footnote 227 Pour les entreprises qui dépendent des contrats des BMD, une exclusion pourrait entraîner sa faillite.Footnote 228

À l’heure actuelle, il n’existe pas de système d’application croisée des sanctions adoptées par les gouvernements et les IFI. Bien qu’un tel système serait souhaitable pour renforcer les efforts anticorruption à l’échelle mondiale, il semble qu’il risquerait de soulever un certain nombre de préoccupations.Footnote 229 Pour les enquêteurs et les procureurs, une exclusion croisée automatique ôterait la discrétion et le pouvoir de négociation que leur confère la menace d’une sanction d’exclusion:

Discretionary debarment leaves officials with leeway and leverage to pressure contractors with debarment, and so to convince them to cooperate in any investigation and compensate the government for any damage caused. Anti-corruption officials are less likely to squeeze restitution and other remedies from contractors if debarment is automatic and not a flexible negotiating tool.Footnote 230

Par ailleurs, compte tenu du fait que les BMD appliquent une norme de preuve moins exigeante (soit la prépondérance des probabilités) — comparée à celle utilisée dans les poursuites criminelles où il faut démontrer, hors de tout doute raisonnable, que la partie accusée est coupable de corruption — cela augmente les chances d’exclusion.Footnote 231 Il importe de souhaiter une collaboration beaucoup plus rapprochée des deux systèmes afin de partager les informations susceptibles d’aider à l’imposition des sanctions à l’international comme à l’interne.

De plus, comme nous l’avons déjà souligné, par le biais des sanctions conditionnelles (l’exclusion avec levée conditionnelle et la non-exclusion conditionnelle), la BM oblige l’entité accusée à adopter des mesures de conformité, généralement, un programme d’intégrité conforme aux principes énoncés dans les directives de la BM. Un contrôleur de conformité indépendant est souvent engagé pour surveiller la mise en œuvre du programme.Footnote 232 Par conséquent, les sanctions seront levées ou non appliquées seulement lorsque les mesures de conformité auront été suivies à la satisfaction de l’ICO.Footnote 233 À travers le système de surveillance, le régime d’intégrité de la BM se distingue des initiatives de responsabilité sociale des entreprises reconnues généralement pour être volontaires. Comme l’a fait observer à juste titre John Hatchard:

[T]oday, the development of corporate codes of conduct and compliance programmes goes beyond moral persuasion and mere window dressing. There is now real pressure on all commercial organisations to take steps to maintain a "rigorous anti-corruption compliance programme that includes policies and procedures designed to detect and deter violations" of anti-bribery laws.Footnote 234

Autrement dit, ces programmes de conformité ne sont plus qu’une simple mesure de façade,Footnote 235 mais sont devenus un moyen d’inciter des changements des pratiques et instaurer une culture d’intégrité au sein des entreprises. À titre d’exemple, les règlements que la BM a négociés avec Alstom et SNC-Lavalin prévoient comme condition de libération d’une exclusion l’amélioration de leur programme d’intégrité pour les mettre en conformité avec les directives de la Banque en matière d’intégrité.Footnote 236 En outre, un contrôle indépendant de conformité relevant directement de la BM a été nommé pour surveiller le respect du programme.Footnote 237 Le non-respect des conditions les expose à l’exclusion par la Banque ainsi qu’à l’exclusion croisée par les autres BMD.

Par ailleurs, comme les conditions imposées peuvent, dans une certaine mesure, être “personnalisées,”Footnote 238 l’ICO peut exiger des mesures plus concrètes, tel le licenciement du ou des employé(s) ou dirigeant(s) responsables de l’inconduite, afin de permettre une bonne réhabilitation. Le fait que le système de sanctions de la BM prenne en considération le degré de responsabilité et les circonstances atténuantes permet à l’institution d’encourager un comportement positif de la part des entreprises et individus faisant l’objet d’une enquête. En effet, ces derniers sont incités à divulguer volontairement leurs actes sanctionnables et prendre des mesures correctives et préventives. Le meilleur exemple est le règlement négocié entre la BM et Siemens AG en 2009 concernant des allégations de corruption en Russie impliquant sa filiale.Footnote 239 En vertu de l’accord conclu entre les parties, la multinationale a reconnu ses pratiques sanctionnables du passé et a accepté de verser 100 millions de dollars US pour appuyer les initiatives anticorruption. En plus d’accepter une exclusion pour une durée de quatre ans pour sa filiale russe, Siemens AG s’est engagée à s’abstenir volontairement de participer aux contrats de la Banque pendant deux ans.

Sur la question de l’efficacité des règlements négociés, nous avons vu précédemment que les entités et individus peuvent toujours être sanctionnés et même faire l’objet d’une exclusion croisée. Toutefois, la coopération demeure au centre du processus. En effet, les personnes sanctionnées ont l’avantage de pouvoir négocier les conditions de leur exclusion, ce qui les encourage à coopérer à l’enquête ou à accepter d’adopter des mesures correctives. Pour les enquêteurs de l’INT, les règlements négociés ont permis de demander des restitutions et toute autre forme de dédommagement. Néanmoins, les critères utilisés pour calculer ces montants ne sont pas connus du public. Il n’a pas non plus été clarifié si ces montants incluaient la réparation et le dédommagement des victimes en plus des frais d’enquêtes et de procédures.Footnote 240

Aujourd’hui, cette forme de justice négociée est largement préférée aux poursuites classiques aux États-Unis et dans bien d’autres pays pour les infractions d’ordre économique, qui sont difficiles à détecter, étant donné qu’elle encourage l’autodénonciation et la coopération avec les autorités d’application de la loi. Dans le contexte de la BM, bien que le nombre d’affaires réglées par voie de règlements négociés ne soit pas aussi important que les sanctions imposées dans le cadre d’une procédure régulière, le rapport annuel pour l’exercice 2020 indique une tendance générale à la hausse.

La menace d’exclusion sert d’outil de dissuasion générale, puisqu’il y a une forte probabilité que les entreprises transnationales qui opèrent dans les pays en développement tombent sous la compétence des BMD. Comme le note Glenn Ware:

Now contractors need to be particularly diligent about the source of financing and about all the parties who participate in the transaction, particularly joint venture partners, local agents, and even the government officials with whom they are negotiating. The IFI that funds a contract may now have regulatory jurisdiction over the ultimate recipient of those funds, including agents and joint venture partners of the intended recipients. … Companies engaged in business in transitional or developing economies … now not only have to negotiate contracts and complete work in demanding environments, but they will increasingly be under mounting regulatory scrutiny from IFIs that fund or administer contracts.Footnote 241

De plus, l’effet dissuasif se présente également sous forme de sensibilisation à l’importance de mettre en œuvre des programmes de conformité.Footnote 242 Autrement dit, les entreprises ou individus qui sont intéressés par les contrats des BMD sont incités à réévaluer leur gouvernance et leur programme de conformité en vue d’empêcher ou d’atténuer le risque d’une sanction et d’une exclusion croisée.Footnote 243 En outre, en vertu des directives de la Banque en matière de sanctions, l’élaboration préalable d’un programme de conformité efficace pourrait potentiellement permettre à l’entité ou l’individu accusé d’obtenir une réduction jusqu’à 50 pour cent de la durée de l’exclusion.Footnote 244

La publication des décisions de sanctions fait en sorte que l’exclusion d’une entité ou d’un individu de l’exécution des marchés publics financés par la BM n’est plus un “internal, private Bank matter,” mais d’autres entités, telles que les États membres et les institutions internes et internationales, seront susceptibles d’accorder une déférence aux décisions de la Banque.Footnote 245 Toutefois, il convient de noter que la Banque asiatique de développement ne rend pas publique le nom des entités ou individus qui sont exclus pour la première fois, empêchant ainsi ces derniers de faire l’objet d’une exclusion croisée par les autres BMD.Footnote 246 Par ailleurs, si une décision d’exclusion n’a pas un impact considérable sur les revenus d’une entreprise dont les activités commerciales sont diversifiées, le fait que son nom soit inscrit sur la liste noire publiée sur le site Web de la BM peut porter atteinte à sa réputation. En effet, les acteurs du secteur privé sont généralement plus préoccupés par l’impact qu’une exclusion publique peut avoir sur la réputation et la bonne volonté que par la sanction elle-même.Footnote 247 Le “blacklisting” fait une publicité négative de l’entreprise ou l’individu sanctionné, ce qui peut nuire à sa crédibilité et à ses perspectives commerciales. Ceci peut occasionner des coûts indirects pour la partie sanctionnée qui, non seulement pourra perdre des contrats dans d’autres secteurs,Footnote 248 mais devra dépenser des sommes colossales pour mettre en œuvre des programmes de conformité conformes aux normes de la Banque et payer des observateurs externes afin de regagner sa réputation.

L’une des limites importantes à l’efficacité du mécanisme d’exclusion est l’accès de certaines entreprises transnationales à des sources alternatives de financement. En effet, les co-financeurs des projets internationaux ne sont pas tous des BMD, mais peuvent être, entre autres, des organismes ou fonds étatiques, des banques commerciales et des investisseurs privés qui ne possèdent pas un système de sanctions ou ne reconnaissent pas le régime d’exclusion croisée, ce qui peut compromettre l’effet dissuasif du système de sanctions de la BM. Il est donc important de faire en sorte que la politique d’exclusion soit acceptée au niveau international par les IFI et les autres acteurs afin d’accroître l’efficacité du système en tant qu’instrument de lutte contre la corruption.Footnote 249 À défaut d’étendre la portée du régime d’exclusion croisée aux donateurs bilatéraux et autres organismes internationaux, il a été suggéré, par exemple, d’exclure l’entité accusée de l’exécution du projet cofinancé.Footnote 250

En vertu de la politique d’exclusion de la BM, une entité ou un individu reconnu coupable de corruption en dehors du contexte des BMD, peut toujours soumissionner pour des contrats financés par la Banque. Une récente évaluation interne du système de sanctions a suggéré que la BM puisse considérer les décisions d’exclusion prises par des tiers comme base pour déclarer l’inéligibilité.Footnote 251 Pour le moment, la Banque peut uniquement s’appuyer sur la coopération et l’échange de l’information sur l’exclusion avec ces tierces institutions.Footnote 252 Enfin, il a été noté que l’institution s’appuie davantage sur les informations nationales et se dirigerait vers une politique plus large qui exclut des entreprises ou des individus coupables de corruption dans un autre contexte.Footnote 253

La mise en œuvre de la sanction d’exclusion avec levée conditionnelle semble défavoriser les petites et moyennes entreprises (PME). Un récent examen interne entrepris par la BM révèle que plus de la moitié des entités sanctionnées par l’institution sont des PME.Footnote 254 Ceci est attribué à un manque général d’engagement de la part de ces entreprises avec le système, en ce sens qu’ils n’ont pas pris des mesures nécessaires pour s’engager avec l’ICO et/ou n’ont pas satisfait aux conditions de libération.Footnote 255 En effet, l’efficacité de cette sanction dépend de l’engagement continu des entités ou individus sanctionnés avec l’ICO tout au long du processus.Footnote 256 Ce manque d’engagement peut s’expliquer par les coûts associés à la mise en œuvre d’un programme de conformité ou le manque de familiarité de ces derniers avec ces programmes.Footnote 257 Ceci peut avoir des conséquences disproportionnées pour les PME qui ne seront pas en mesure de se conformer aux conditions imposées. Par conséquent, la sanction risque de devenir une exclusion indéfinie pour ces entreprises, et éventuellement une exclusion croisée indéterminée.Footnote 258 Inversement, la situation financière des grandes multinationales leur permet d’adopter un programme robuste de conformité répondant aux exigences de la Banque et ainsi d’être libérées de l’exclusion plus rapidement.Footnote 259

les enquêtes parallèles et la coopération avec les autorités nationales

Pour évaluer l’effet dissuasif du système de sanctions de la BM, il faut le considérer dans le contexte plus large de lutte contre la corruption transnationale. L’efficacité de ce système est renforcée par la possibilité d’engager en parallèle des procédures aux niveaux national et international, ainsi que par la collaboration judiciaire. Il convient de rappeler que le système des sanctions de la BM est un régime autonome et indépendant des procédures nationales, en ce sens que le Conseil des sanctions peut rendre une décision sans devoir attendre qu’une décision définitive soit prononcée par un tribunal national, qu’il soit pénal, civil ou administratif.Footnote 260 Toutefois, la conduite d’enquêtes parallèles ou conjointes entre les BMD et avec les autorités nationales est devenue une pratique courante.Footnote 261 Comme la corruption transnationale constitue une infraction criminelle dans la majorité des États, la Banque transmet des cas aux autorités nationales compétentes permettant à ces dernières d’engager des poursuites pénales, administratives ou civiles afin d’établir s’il y a eu des violations de leurs lois et, le cas échéant, prendre les mesures prévues par leur législation.Footnote 262 Par conséquent, une entité peut être sanctionnée à la fois aux niveaux national et international pour les mêmes faits ou pour des faits différents. Au niveau national, cette dernière pourrait se voir imposer une sanction beaucoup plus sévère, telle qu’une amende et/ou un emprisonnement (pour les personnes physiques). Au Canada, en plus d’être passible d’une amende et/ou d’une peine d’emprisonnement maximale de 14 ans, une condamnation en vertu de la Loi sur la corruption d’agents publics étrangers entraîne une exclusion automatique pour dix ans des marchés publics offerts par le gouvernement fédéral en vertu du régime d’intégrité du gouvernement du Canada, avec possibilité de réduction jusqu’à cinq ans.Footnote 263

Cependant, dans une récente décision concernant une affaire de corruption transnationale impliquant une entreprise norvégienne, la Cour suprême de la Norvège a acquitté l’entreprise en se basant sur certaines constatations factuelles, y compris le fait que l’exclusion potentielle du marché local résultant d’une condamnation pénale pourrait entraîner des conséquences disproportionnées pour cette dernière considérant qu’elle avait déjà fait l’objet d’une exclusion par la BM.Footnote 264 Autrement dit, la sanction imposée à l’entreprise norvégienne par la BM a eu une conséquence sur la détermination de la culpabilité au niveau interne.Footnote 265 Cette décision n’a pas fait l’unanimité et reste donc discutable.Footnote 266 Même si le résultat fut bon pour l’entreprise, il nous semble qu’une bonne application du droit aurait été, d’abord, de condamner l’entreprise si la preuve était suffisante et, par la suite, lui appliquer une peine moins sévère comme l’absolution.

Thévenot-Werner avance que, malgré son autonomie, le régime des sanctions de la BM est, dans une certaine mesure, complémentaire aux procédures nationales.Footnote 267 Dans une perspective plus large, le système de sanctions de la Banque contribue à la mise en place d’une “structure globale de dissuasion” pour réprimer la corruptionFootnote 268 et, ce faisant, renforce les efforts anticorruption à l’échelle mondiale.Footnote 269 La BM a intérêt à considérer les poursuites et condamnations pour corruption au niveau national lorsque l’affaire concerne un projet qu’elle finance pour ouvrir une enquête, puisque ses pouvoirs d’enquête sont plus limités considérant notamment qu’elle n’a pas le pouvoir d’ordonner la production de documents.Footnote 270 À titre d’exemple, dans les affaires Lesotho et Padma Bridge, la BM s’est appuyée sur les condamnations au niveau national de Lahmeyer et SNC-Lavalin, respectivement, pour mener sa propre enquête sur ces sociétés.Footnote 271 Les enquêteurs de la BM ont aussi besoin de la coopération des autorités des pays emprunteurs pour obtenir de bons résultats dans la lutte contre la corruption. Plusieurs enquêtes parallèles ont permis de produire des preuves documentaires de pratiques sanctionnables que les enquêteurs de la Banque n’auraient pas pu obtenir autrement.Footnote 272 À l’inverse, les renseignements transmis par l’INT peuvent être une source importante d’information pour les enquêtes nationales.Footnote 273 Toutefois, si la collaboration judiciaire avec le pays du siège de l’entreprise est plus facile, celle avec les autorités du pays où le projet est exécuté est souvent compliquée.Footnote 274 Dans l’affaire de Padma Bridge, malgré les éléments de preuve fournis par l’INT aux autorités du Bangladesh attestant l’implication des fonctionnaires publics dans la corruption, le gouvernement n’a pas pris de mesures pour poursuivre et punir les individus responsables, ce qui a amené la BM à annuler le financement du projet.Footnote 275 Par contre, dans l’affaire de corruption impliquant des employés de l’entreprise d’ingénierie canadienne SNC-Lavalin, l’INT avait référé le dossier à la Gendarmerie royale du Canada (GRC) qui a initié une enquête sur de possibles violations de la Loi sur corruption d’agents publics étrangers. Grâce aux informations transmises par l’INT, la GRC a pu obtenir une autorisation d’écoute électronique qui lui a ensuite permis de recueillir des éléments de preuve sur la participation directe des employés de la compagnie dans la corruption.Footnote 276 SNC-Lavalin a tenté de contester la validité des autorisations d’écoute en demandant à la Cour supérieure de l’Ontario d’ordonner l’INT à comparaître devant les tribunaux canadiens et de communiquer les documents.Footnote 277 En d’autres mots, la compagnie contestait l’étendue des immunités dont jouit la BM en tant qu’organisation internationale. La Cour supérieure de justice de l’Ontario avait conclu que la Banque avait renoncé à ses immunités en partageant les informations avec la GRC.Footnote 278 Cette affaire est allée jusqu’en Cour suprême du Canada qui a rendu un jugement unanime en faveur de la BM dans lequel elle a confirmé les immunités du personnel du groupe de la BM.Footnote 279 La Cour a reconnu l’importance des immunités pour la collaboration entre la Banque et les autorités nationales:

[L]e fait pour le Groupe de voir son immunité levée implicitement ou par interprétation pourrait avoir un effet paralysant sur sa collaboration avec les forces de l’ordre de chaque pays ou État membre. Un tel effet serait nuisible, les banques multilatérales, dont le Groupe, étant particulièrement bien placées pour enquêter et intervenir en première ligne à l’échelle internationale dans la lutte contre la corruption.Footnote 280

Cette affaire constitue une première que les autorités canadiennes coopèrent aussi étroitement avec une BMD dans le cadre d’une enquête criminelle.Footnote 281 Il n’y a toutefois aucune garantie que les tribunaux d’autres pays reconnaissent une immunité absolue à la BM.Footnote 282

En résumé, comme le notent Fariello et Bo, “because Bank sanctions are part of a larger enforcement architecture, including the sanctions systems of other MDBs and national enforcement measures, Bank sanctions need not, in and of themselves, provide perfect deterrence.”Footnote 283 En effet, les procédures de sanctions de la BM et des BMD, associées aux procédures nationales, produisent ensemble un puissant effet dissuasif sur les entreprises et individus qui se livrent à la corruption transnationale.

les limites à lapplication du mécanisme dexclusion

L’efficacité du système de sanction de la BM est mise à l’épreuve à cause de certaines limites pratiques du régime d’exclusion, particulièrement celles liées aux structures complexes des entreprises.Footnote 284 Les principes harmonisés pour le traitement des groupes d’entreprises réservent un traitement différent pour les sociétés qui contrôlent la partie accusée ou qui sont sous un contrôle commun avec cette dernière. Une société mère ne peut être tenue responsable des actes commis par la société qu’elle contrôle à moins que son implication personnelle dans la pratique sanctionnable soit démontrée.Footnote 285 Même lorsque leur responsabilité est établie, les sociétés mère bénéficient de sanctions moins lourdes — non-exclusion conditionnelle — que les filiales en vertu des Directives en matière de sanctions. Footnote 286 L’efficacité du mécanisme d’exclusion exige d’appliquer les mêmes sanctions à l’ensemble des groupes de sociétés ou, à tout le moins, aux sociétés mère qui tirent profit des transactions illicites dans lesquelles leurs filiales sont impliquées.Footnote 287 Par ailleurs, il arrive que des sociétés mère partagent les mêmes cadres supérieurs que leurs filiales. Dès lors, lorsque ces dernières sont impliquées dans les pratiques répréhensibles, elles entraînent en même temps leurs sociétés mère. Dans tous les cas, il devrait y avoir une obligation de diligence pesant sur les sociétés mère afin qu’elles fassent en sorte que leurs filiales ne se livrent pas aux pratiques sanctionnables.

vers la souplesse du système de sanctions de la bm?

Il a été reproché au système de sanctions de la BM de ne pas être suffisamment souple en raison de son utilisation, presque exclusive, de l’exclusion comme sanction de choix.Footnote 288 La sanction d’exclusion, avec ou sans condition de libération, demeure encore aujourd’hui la sanction la plus couramment imposée par le SDO, le Conseil des sanctions et en vertu d’un règlement négocié.Footnote 289 Les critiques ont aussi relevé que le régime actuel ne prend pas suffisamment en considération les mesures correctives prises par les entités ou individus accusés après la décision de sanction.Footnote 290 En effet, comme nous l’avons vu précédemment, le régime des sanctions actuel est fondé sur une approche automatique de l’application de l’exclusion: lorsqu’il existe suffisamment de preuves qu’une entreprise ou un individu s’est livré à la corruption dans le cadre des marchés financés par la BM, il va être suspendu et exclu, quelle que soit sa conduite actuelle. L’autorité de sanctions (le SDO ou le Conseil des sanctions) applique la sanction de base qui est l’exclusion avec levée conditionnelle. Les mesures correctives et la coopération ne sont prises en considération par l’autorité de sanctions qu’au moment où elle évalue les facteurs d’atténuation pour décider s’il faut réduire ou non la durée de l’exclusion.Footnote 291 Ainsi, en vertu du régime actuel, les autorités de sanction ne disposent pas de marge de discrétion pour décider si une exclusion est justifiée ou non dans un cas donné.Footnote 292 Cette rigidité du régime pourrait dissuader les entreprises de s’autodénoncer, malgré le constat des irrégularités en leur sein. En effet, la tendance actuelle en matière de conformité exige des concessions de part et d’autre pour que les acteurs soient intéressés à coopérer.

L’Accord d’exclusion croisée a restreint encore davantage le pouvoir discrétionnaire des organes de sanctions, puisque les décisions d’exclusion prises par les autres institutions participantes sont appliquées automatiquement lorsque la période d’exclusion dépasse un an. En outre, la libération d’une exclusion est considérée seulement après la période minimale d’exclusion, qui est de trois ans par défaut (c’est-à-dire en l’absence de facteurs atténuants pouvant justifier une réduction de la durée d’exclusion ou une autre sanction). Autrement dit, les mesures de conformité prises par une entité sanctionnée après la décision d’exclusion ne sont que des facteurs permettant de décider si cette dernière peut être libérée après l’expiration de l’exclusion initiale.Footnote 293 Ainsi, s’il y a suffisamment de preuves attestant qu’une entreprise ou un individu s’est livré à la corruption dans le cadre d’un projet antérieur financé par la BM, il ne pourra pas éviter une sanction sous le régime des sanctions en vigueur peu importe son comportement actuel.Footnote 294 L’entité accusée peut bénéficier d’une période d’exclusion réduite si elle a coopéré à l’enquête ou a pris des mesures correctives volontaires, mais il est rare qu’elle soit exemptée d’une exclusion. L’exclusion avec libération conditionnelle est la sanction la plus fréquemment imposée par les organes de sanctions et dans le contexte d’un accord négocié.Footnote 295 Il n’y a donc pas de possibilité de libération anticipée. Considérant le principe de proportionnalité, une telle sanction paraît disproportionnée et inutile.Footnote 296

La possibilité d’une libération anticipée pourrait constituer un puissant incitatif pour la réhabilitation.Footnote 297 Lors des réformes de 2004, la BM avait considéré la possibilité d’intégrer la notion de present responsibility dans son système de sanctions — en vertu de laquelle une partie accusée d’avoir commis un acte sanctionnable dans le passé pouvait être éligible à l’exécution des contrats financés par de la Banque si elle démontrait qu’elle a pris des mesures appropriées pour corriger l’inconduite et prévenir des actes semblables — mais ne l’a finalement pas retenue, l’une des raisons étant qu’une telle approche aurait empêché de promouvoir la dissuasion générale par le recours aux sanctions.Footnote 298

Une telle vision a poussé certains auteurs à remettre en question la finalité administrative du système de sanctions de la BM affirmant qu’elle est plutôt punitive:

A focus on previous acts without consideration of the contractor’s current condition signals a system designed to be punitive. A system that focuses more on a contractor’s current condition than past acts alone is one that is more concerned with mitigating risk prophylactically than serving a punitive purpose. The World Bank focuses almost entirely on the past conduct of a contractor without seriously considering the present risk it poses in its current condition.Footnote 299

Or, comme nous l’avons dit dans la première partie de cet article, l’objectif principal du système de sanctions de la BM ne semble pas être la rétribution. Le système paraît viser essentiellement à faire respecter les règles du jeu de la saine concurrence en imposant aux contrevenants des sanctions de nature administrative et en appliquant les règles de procédure et le fardeau de preuve moins lourds qui favorisent la réhabilitation rapide de l’entité ou l’individu sanctionné. Évidemment, cela ne veut pas dire que ces sanctions administratives ne font pas mal aux entités visées comme le rappelle la Cour suprême de la Norvège ayant acquitté l’entreprise accusée de corruption d’agents publics en Tanzanie au motif, entre autres, que celle-ci était déjà sanctionnée par la BM et qu’une condamnation au niveau national contreviendrait au principe de proportionnalité de la peine.Footnote 300

Les critiques s’entendent sur la nécessité de reconsidérer la politique d’exclusion de la BM, notamment en adoptant une approche plus souple et proportionnelle au degré de responsabilité et à la capacité des entités sanctionnées.Footnote 301 D’ailleurs, un examen interne récent a suggéré de revoir le choix de la sanction d’exclusion avec levée conditionnelle en tant que sanction de base.Footnote 302 L’un des inconvénients d’une pratique automatique d’exclusion est qu’elle comporte le risque de provoquer des effets anticoncurrentiels, ce qui peut affecter le coût et la qualité d’un projet de développement, pénalisant ainsi les populations souvent les plus défavorisées qui devaient en bénéficier.Footnote 303 En effet, “[e]xternally imposed (global) debarment of suppliers … does not allow a government to weigh the short-term costs against the presumed long-term benefits of reduced corruption in their markets.”Footnote 304 Une approche plus souple est nécessaire non seulement pour assurer la concurrence sur le marché, mais aussi pour éviter de mettre la responsabilité seulement sur les acteurs qui exécutent le projet.Footnote 305

Par ailleurs, comme le note Hatchard, dans le cas de sociétés en groupement, le système de sanctions du groupe de la BM devrait mettre davantage l’accent sur la proportionnalité entre le tort causé ou le risque créé et la sanction:

While debarment is a significant anticorruption tool, any penalty imposed must be proportionate to the wrongdoing. For example, a major international corporation would not be automatically debarred because one of its subsidiaries paid a small bribe to a foreign public official. Thus in the Siemens case, only one of its subsidiaries was subject to World Bank debarment while in the OUP case it was two. For some corporations, being barred from a particular market might mean bankruptcy, so in certain cases a lengthy debarment period might be inappropriate.Footnote 306

Néanmoins, il faudrait bien voir si la criminalité imputée à une filiale ne constitue pas un stratagème monté par la société mère (ou tout le groupe) dans le but d’échapper aux responsabilités. Dans la récente affaire impliquant l’entreprise SNC-Lavalin devant les autorités canadiennes, nous a avons vu que cette stratégie peut payer, car un plaidoyer de culpabilité a été enregistré par une filiale qui n’était même plus en activité pour son implication dans la corruption en Libye. On comprend que les négociations sur le plaidoyer de culpabilité est un exercice gagnant-gagnant. Cependant, le public ne gagne presque rien en cas de punition d’une organisation qui n’est plus en activité et en exemptant sa société mère. Dans la mesure où les hauts responsables de l’entreprise mère, qui étaient aussi des cadres supérieurs de la filiale, étaient impliqués dans les manœuvres de corruption, la logique commande de punir toutes ces entreprises.

Il a également été suggéré de changer l’actuelle sanction de base d’exclusion pour une durée de trois ans sans possibilité de libération anticipée pour la sanction de non-exclusion conditionnelle.Footnote 307 Ainsi, la partie sanctionnée serait seulement tenue de se conformer à certaines conditions définies pour éviter une exclusion. L’accent serait davantage mis sur la responsabilité actuelle de la partie sanctionnée et les mesures correctives qu’elle a prises, tout en gardant la menace d’exclusion comme moyen de dissuasion.Footnote 308

Par ailleurs, il convient de noter qu’en raison de la complexité des stratagèmes de corruption, il est souvent difficile de prouver un acte de corruption, surtout dans le contexte de la Banque mondiale où les pouvoirs des enquêteurs sont limités.Footnote 309 D’ailleurs, seulement 20 pour cent des affaires et des règlements examinés par le SDO au cours de l’exercice 2020 impliquaient une pratique de corruption, alors que la majorité des cas, soit 86 pour cent, concernaient des pratiques frauduleuses, conformément aux tendances observées au cours des années précédentes.Footnote 310 Le nombre élevé des cas de fraudes peut s’expliquer, entre autres, par la disponibilité des preuves documentaires.Footnote 311 La collaboration des acteurs du secteur privé est donc essentielle pour pouvoir aboutir à un niveau optimal d’autodénonciation et de prévention. Les règlements négociés avec Alstom et SNC-Lavalin illustrent l’importance d’avoir des mesures d’incitation pour encourager la coopération et l’autodénonciation.

Toutefois, une approche basée uniquement sur l’incitation n’est pas suffisante en soi pour renforcer l’intégrité dans les marchés publics.Footnote 312 Cette approche doit être utilisée en tandem avec des mesures plus dissuasives et/ou interventionnistes.Footnote 313 Cela serait notamment approprié en cas de multiples violations des règles et lorsque les sanctions moins rigides n’ont pas pu empêcher ces manquements. Comme le note Davis, “[i]n any given context, the most cost-effective way to deter bribery, from the perspective of society as a whole, is likely to include a mix of self-policing, reporting, and prevention on the part of firms.”Footnote 314 À ce sujet, il sied de rappeler que dans l’affaire Alstom, le risque d’exclusion subséquente semble avoir été un facteur important pour l’autodénonciation et la conclusion d’un accord de règlement avec la BM.Footnote 315

Mais il faut garder en tête qu’une politique sévère d’exclusion pourrait empêcher certaines entreprises hautement qualifiées de soumissionner pour des contrats financés par la Banque lorsque le pays concerné est touché par une corruption systémique. En effet, les efforts de prévention n’entraînent pas nécessairement la réduction des marchés passés par les gouvernements, car ces derniers peuvent se tourner vers des entreprises moins dotées en termes de standards appliqués à l’exécution des infrastructures.Footnote 316 Dans certains domaines pointus, certaines entreprises peuvent disposer d’une expertise que les concurrentes ne possèdent pas. Si l’exécution de ce genre de travaux de développement est faite par ces concurrentes, il pourrait en résulter des infrastructures fragiles au détriment de l’intérêt public des pays visés.

De façon plus large, les critiques ont porté sur la question de savoir si la dissuasion recherchée par les sanctions et le mandat de la BM visant à promouvoir le développement sont des objectifs conciliables. En effet, certains auteurs craignent que le renforcement des efforts de l’institution pour lutter contre la corruption, plus spécifiquement l’exclusion des contractants corrompus, vienne supplanter ses objectifs de développement, puisque cela risque de réduire les investissements dans les pays en développement et ainsi pénaliser surtout les communautés les plus vulnérables. Il a alors été avancé que les mesures correctives ne devraient pas uniquement être considérées par la BM comme des facteurs atténuant la sanction mais devraient permettre aux entreprises ou individus visés de continuer à participer aux projets financés par la Banque indépendamment des actes sanctionnables commis dans le passé.Footnote 317 On a notamment proposé de recourir à d’autres moyens, comme la restitution, au lieu de l’exclusion, pour assurer la dissuasion. En effet, comme l’exclusion est le seul outil à la disposition de la Banque en tant qu’organisation internationale, elle peut être utilisée comme renfort pour assurer l’application des sanctions alternatives, comme, entre autres, la restitution.Footnote 318 Nous sommes d’accord avec Majtan qu’il est possible de concilier les impératifs d’intégrité et la saine compétition sur le marché et les objectifs de dissuasion en ayant recours à de sanctions plus souples comme l’imposition de mesures correctives et la restitution.Footnote 319

Conclusion

Tel que nous l’avons vu dans la première partie du présent travail, le système de sanctions de la BM repose largement sur le recours à l’exclusion pour réprimer les pratiques sanctionnables attribuables aux entreprises ou individus dans les activités que la banque finance. Les tendances actuelles en matière d’application de sanctions consistent à obliger les entités responsables à adopter des mesures correctives tout en maintenant l’exclusion comme sanction de base.Footnote 320

Par ailleurs, le régime valorise considérablement la mise en œuvre de programmes d’intégrité, qui sont souvent imposés comme condition pour lever une exclusion dans le cadre d’une procédure régulière ou pour empêcher une sanction dans le cadre d’un VDP. Dans les cas où les entités accusées adoptent volontairement un solide programme d’intégrité, elles peuvent obtenir une réduction de la durée de l’exclusion, voire même négocier une sanction alternative dans le cadre d’un règlement négocié. Ces programmes ne constituent plus une simple mesure de façade, puisque dans la majorité des cas, un contrôleur indépendant de la conformité est nommé pour superviser la mise en œuvre des recommandations. En outre, comme nous l’avons vu, c’est l’ICO qui décide, à sa seule discrétion, si les conditions sont satisfaites pour lever une exclusion (ou appliquer une exclusion dans le cas d’une sanction de non-exclusion conditionnelle).Footnote 321 Par conséquent, ces programmes constituent une mesure efficace pour encourager la responsabilisation et la réhabilitation des entreprises. Cependant, dans la pratique, la mise en œuvre des programmes d’intégrité, qu’elle soit imposée comme condition de libération ou de non-exclusion, semble défavoriser les PME notamment en raison des coûts qui y sont associés.Footnote 322 Plus généralement, le manque d’engagement des PME avec le système de sanctions remet en question l’approche du système de sanctions actuel de la BM.

En outre, le système de sanctions de la BM devrait reconnaître et “récompenser” les mesures correctives prises par l’entreprise après la commission de l’acte de corruption. Il devrait notamment permettre la libération anticipée des acteurs qui ont pris des mesures de conformité afin d’éviter des violations à l’avenir. Ce faisant, elle pourrait encourager les entreprises à coopérer et à divulguer volontairement les pratiques de corruption passées dans le cadre des projets financés par la BM. Une approche fondée sur l’incitation pourrait ainsi concilier l’intégrité avec la nécessité de maintenir la concurrence sur les marchés publics, qui est également un objectif important dans le processus de passation des marchés et ne devrait pas être compromise dans le but de renforcer l’intégrité.Footnote 323

Enfin, bien qu’une approche plus souple soit nécessaire concernant le recours à l’exclusion, il reste que cette dernière demeure une mesure importante pour parvenir à une dissuasion efficace, puisqu’elle peut être utilisée comme un bon moyen d’obliger une entité à adopter des mesures correctives. Elle peut également être utilisée comme un outil de négociation dans le cadre des ententes de règlement négociés pour imposer une restitution. S’agissant de l’application des sanctions financières, il y a matière à débat sur ce qui est nécessaire pour parvenir à la dissuasion, la rétribution ou l’indemnisation.Footnote 324 De plus, il existe un problème avec les sanctions financières qui réside essentiellement dans les difficultés à déterminer le lien causal entre le dommage et l’inconduite alléguée, l’évaluation monétaire de ce dommage ainsi que l’identification précise des victimes qui doivent être dédommagées.Footnote 325 Enfin, les efforts d’harmonisation et de coordination entre les BMD, y compris la mise en place d’un régime d’exclusion croisée, et la collaboration avec les autorités nationales ont entraîné une augmentation des risques juridiques, financiers et de réputation pour les entreprises opérant à l’international.Footnote 326 Par conséquent, les entreprises qui concluent des marchés financés par les IFI doivent tenir compte de ces risques et prendre des mesures proactives pour assurer l’intégrité de leurs opérations.Footnote 327

References

1 Cette définition est celle que retient la Banque mondiale (BM). BM, Helping Countries Combat Corruption: The Role of the World Bank, Washington, DC, World Bank, 1997 aux pp 8‑9 (“the abuse of public office for private gain”). Il n’existe pas de définition universellement acceptée de la corruption, voir Graham Brooks et al, “Defining Corruption” dans Graham Brooks et al, dir, Preventing Corruption: Investigation, Enforcement and Governance Crime Prevention and Security Management, London, Palgrave Macmillan, 2013, 11 à la p 11 (“corruption should therefore be viewed as a complex and multifaceted phenomenon, with a multiplicity of causes and effects, as it exhibits many different forms and functions in very diverse contexts, ranging from a single act that transgresses a law or laws, to being a way of life for an individual, group of people, and/or societal order, which is morally acceptable”).

2 Glenn T Ware et Gregory P Noone, “The Anatomy of Transnational Corruption” (2005) 14:2 Intl Aff Rev 29 à la p 30.

3 Courtney Hostetler, “Going from Bad to Good: Combating Corporate Corruption on World Bank-Funded Infrastructure Projects” (2011) 14:1 Yale Hum Rts & Dev LJ 231 aux pp 236–39.

4 Juan G Ronderos, Michelle Ratpan et Andrea Osorio Rincon, “Corruption and Development: The Need for International Investigations with a Multijurisdictional Approach Involving Multilateral Development Banks and National Authorities” (2015) 53:1 Osgoode Hall LJ 334 à la p 338.

5 Andrew Boutros, “Increasing Accountability and Reducing Corruption: the World Bank’s Anti-Corruption System” dans T Markus Funk et Andrew S Boutros, dir, From Baksheesh to Bribery: Understanding the Global Fight against Corruption and Graft, New York, Oxford University Press, 2019, 605 à la p 607.

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7 Ibrahim FI Shihata, “Corruption: A General Review with an Emphasis on the Role of the World Bank” (1997) 15:3 Dick J Intl L 451 à la p 461 (“[f]oreign business, especially in developing countries, often contributed to the spread of corruption by assuming that pay-offs and connections are inevitable facts of doing business”).

8 Frank A Fariello Jr et Conrad C Daly, “Coordinating the Fight against Corruption among MDBS: The Past, Present, and Future of Sanctions Suspension and Debarment” (2013) 45:2 Geo Wash Intl L Rev 253 à la p 256; Vinay Bhargava, “Curing the Cancer of Corruption” dans Vinay Bhargava, dir, Global Issues for Global Citizens: An Introduction to Key Development Challenges, Washington, DC, World Bank, 2006, 341 à la p 345; Sope Williams-Elegbe, “Corruption in MDB Funded Procurement” dans Public Procurement and Multilateral Development Banks: Law, Practice and Problems, Oxford, Hart Publishing, 2017, 171 à la p 173.

9 Parthapratim Chanda, “The Effectiveness of the World Bank’s Anti-Corruption Efforts: Current Legal and Structural Obstacles and Uncertainties” (2004) 32:2 Denv J Intl L & Pol’y 315 aux pp 315–16; Inter-American Convention against Corruption, 29 mars 1996, 35 ILM 724, arts II(2), VII, XIV (entrée en vigueur: 6 mars 1997); Convention sur la lutte contre la corruption d’agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales, 17 décembre 1997, 2802 RTNU 225, arts 1, 9 (entrée en vigueur: 15 février 1999); Convention des Nations Unies contre la corruption, 31 octobre 2003, 2349 RTNU 41, arts 1, 16, 43 (entrée en vigueur: 14 décembre 2005).

10 Boutros, supra note 5 aux pp 607–08.

11 Pascale Hélène Dubois et al, “The World Bank’s Sanctions System: Using Debarment to Combat Fraud and Corruption in International Development” dans Peter Quayle et Xuan Gao, dir, Good Governance and Modern International Financial Institutions, AIIB Yearbook of International Law 2018, Leiden, Brill Nijhoff, 2019, 217 aux pp 220–21.

12 Fariello et Daly, supra note 8 à la p 256.

13 Boutros, supra note 5 à la p 606.

14 Accord relatif à la Banque internationale pour la reconstruction et le développement, 27 décembre 1945, 2 RTNU 135, art III, s 5(b) (entrée en vigueur: 27 décembre 1956) [Accord BIRD]; Statuts de l'Association internationale de développement, 26 janvier 1960, 439 RTNU 249, art V, s 1(g) (entrée en vigueur: 24 septembre 1960) [Statuts AID]. Voir aussi Williams, supra note 6 aux pp 281–82.

15 Ibid à la p 280.

16 Anne-Marie Leroy et Frank Fariello, The World Bank Group Sanctions Process and Its Recent Reforms, World Bank Studies, Washington, DC, World Bank Group, 2011 à la p 28. Voir aussi Laurence Boisson de Chazournes et Edouard Fromageau, “Le mécanisme de sanction de la Banque mondiale contre la fraude et la corruption: le droit administratif global comme outil d’élaboration et de consolidation d’une procédure” dans Clémentine Bories, dir, Un droit administratif global ? / A Global Administrative Law ? Actes du colloque des 16 et 17 juin 2011, Cahiers internationaux 28, Paris, Pedone, 2012, 255 aux pp 262–66 [Boisson de Chazournes et Fromageau, “Mécanisme de sanction”].

17 Pour une présentation générale des systèmes de sanctions des principales banques multilatérales de développement et des aspects communs de ces systèmes, voir Mariangela Benedetti, “How Multilateral Development Banks Invest Corruption in Their Funded Projects” dans Jean-Bernard Auby, Emmanuel Breen et Thomas Perroud, dir, Corruption and Conflicts of Interest: A Comparative Law Approach, Cheltenham, UK, Edward Elgar, 2014, 215 aux pp 224–30.

18 Agreement for Mutual Enforcement of Debarment Decisions, 9 avril 2010, en ligne: <www.ebrd.com/downloads/integrity/Debar.pdf> [Agreement for Mutual Enforcement].

19 Ware, Glenn T, “Filling the Regulatory Gap: The Emerging Transnational Regulator” (2006) 12:2 Global Governance 135 à la p 136 CrossRefGoogle Scholar.

20 Dacian C Dragos, “Sanctions Mechanisms of the World Bank on the Matter of International Corruption” dans Mathias Audit et Stephan Schill, dir, Transnational Law of Public Contracts, Droit administratif 20, Bruxelles, Bruylant, 2016, 879 à la p 879.

21 Davis, Kevin E, Between Impunity and Imperialism: The Regulation of Transnational Bribery, New York, Oxford University Press, 2019 aux pp 195–96CrossRefGoogle Scholar.

22 Voir par ex Ellen Gutterman, “Banning Bribes Abroad: U.S. Enforcement of the Foreign Corrupt Practices Act” (2015) 53:1 Osgoode Hall LJ 31 aux pp 55–56.

23 Ware, supra note 19 à la p 136.

24 Tina Søreide, Linda Gröning et Rasmus Wandall, “An Efficient Anticorruption Sanctions Regime? The Case of the World Bank” (2016) 16:2 Chicago J Intl L 523 aux pp 529–30.

25 Laurence Boisson de Chazournes et Edouard Fromageau, “Balancing the Scales: The World Bank Sanctions Process and Access to Remedies” (2012) 23:4 Eur J Intl L 963 à la p 980 [Boisson de Chazournes et Fromageau, “Balancing the Scales”].

26 Søreide, Gröning et Wandall, supra note 24 à la p 539.

27 BM, Procurement Regulations for IPF Borrowers, Procurement in Investment Project Financing, Goods, Works, Non-Consulting and Consulting Services, Washington, DC, World Bank Group, 2016 (révisé en novembre 2020), annexe IV, art 2.2(b), (c), (d) [BM, Procurement Regulations].

28 Dragos, supra note 20 aux pp 881–82; BM, Procurement Regulations, supra note 27, arts 3.4–3.8, annexe II.

29 Dragos, supra note 20 aux pp 881–82.

30 Accord BIRD, supra note 14, art III, s 5(b); Statuts AID, supra note 14, art V, s 1(g) (entrée en vigueur: 24 septembre 1960); voir aussi BM, Procedure: Bank Procedure: Sanctions Proceedings and Settlements in Bank Financed Projects, 2016, s III(A), art 1.01(a) [BM, Procedure].

31 BM, Procedure, supra note 30, s III(A), art 1.01(a).

32 Ibid; World Bank Sanctioning Guidelines, 1er janvier 2011, en ligne: <www.worldbank.org/content/dam/documents/sanctions/other-documents/osd/World%20Bank%20Group%20Sanctioning%20Guidelines%20January%202011.pdf> [Sanctioning Guidelines].

33 Ronderos, Ratpan et Rincon, supra note 4 à la p 338.

34 Ibid aux pp 336–37. Voir aussi Leroy et Fariello, supra note 16 à la p 8.

35 Drew Harker et Nathaniel Castellano, “The World Bank Sanctions System” (2017) 17:3 Briefing Papers (2) à la p 3, en ligne: <ssrn.com/abstract=2922782>.

36 BM, Guidelines on Preventing and Combating Fraud and Corruption in Projects Financed by IBRD Loans and IDA Credits and Grants (revised as of July 1, 2016) au para 3 [BM, Anti-Corruption Guidelines].

37 Ibid aux paras 3, 9(d).

38 Kevin J Fandl, “Fighting Corruption in Latin America with Multilateral Development Assistance” (2019) 21:4 U Pa J Bus L 843 à la p 853; BM, Anti-Corruption Guidelines, supra note 36 aux paras 5, 9(d).

39 BM, Anti-Corruption Guidelines, supra note 36 aux paras 4, 5, 9(d), 10(a); Nathaniel E Castellano, “Suspensions, Debarments, and Sanctions: A Comparative Guide to United States and World Bank Exclusion Mechanisms” (2016) 45:3 Pub Cont LJ 403 à la p 418.

40 BM, Anti-Corruption Guidelines, supra note 36 au para 7. Pour une définition officielle en français des pratiques sanctionnables, voir BM, Règlement de Passation des Marchés pour les Emprunteurs sollicitant le Financement de Projets d’Investissement (FPI), 2016, annexe IV, para 2.2(a) [BM, Règlement de Passation].

41 Boisson de Chazournes et Fromageau, “Mécanisme de sanction,” supra note 16 aux pp 257–58.

42 BM, Règlement de Passation, supra note 40, annexe IV, para 2.2(a)(i). Pour une analyse détaillée des éléments constitutifs de la définition de l’acte de corruption, voir Michael S Diamant, Christopher WH Sullivan et Jason H Smith, “Sanctionable Practices at the World Bank: Interpretation and Enforcement” (2016) 18:4 U Pa J Bus L 985 aux pp 1038–48.

43 Williams, supra note 6 à la p 288.

44 Boisson de Chazournes et Fromageau, “Mécanisme de sanction,” supra note 16 à la p 259.

45 Leroy et Fariello, supra note 16 à la p 98.

46 Pour une description détaillée des réformes, voir Boisson de Chazournes et Fromageau, “Balancing the Scales,” supra note 25 aux pp 969–72; Boutros, supra note 5 aux pp 608–10.

47 Voir Dick Thornburgh, Ronald L Gainer et Cuyler H Walker, Report Concerning the Debarment Processes of the World Bank, 2002.

48 Leroy et Fariello, supra note 16 à la p 10.

49 Boisson de Chazournes et Fromageau, “Mécanisme de sanction,” supra note 16 aux pp 259–60; Søreide, Gröning et Wandall, supra note 24 à la p 537.

50 “A Diverse World Bank Sanctions Board Brings Credibility and Fairness,” 16 décembre 2020, en ligne: World Bank <www.worldbank.org/en/about/unit/sanctions-system/sanctions-board/brief/a-diverse-world-bank-sanctions-board-brings-credibility-and-fairness>.

51 Conrad C Daly et Frank A Fariello Jr, “Transforming through Transparency: Opening up the World Bank’s Sanctions Regime” (2013) 4 World Bank Legal Rev 101 à la p 113.

52 Ibid; Boisson de Chazournes et Fromageau, “Mécanisme de sanction,” supra note 16 à la p 266.

53 Leroy et Fariello, supra note 16 à la p 8.

54 Ibid à la p 28. Voir aussi Boisson de Chazournes et Fromageau, “Mécanisme de sanction,” supra note 16 aux pp 266–68.

55 BM, World Bank Group Sanctions System Annual Report FY19, Washington, DC, World Bank Group, 2019 à la p 16, en ligne: <documents1.worldbank.org/curated/en/782941570732184391/pdf/World-Bank-Group-Sanctions-System-Annual-Report-FY19.pdf> [Sanctions System Annual Report FY19].

56 Harker et Castellano, supra note 35 à la p 4.

57 Ibid.

58 BM, Procurement Regulations, supra note 27, annexe IV, art 2.2(e), n 1.

59 Diamant, Sullivan et Smith, supra note 42 à la p 997.

60 Pour une définition des pratiques obstructives, voir BM, Anti-Corruption Guidelines, supra note 36 au para 7.

61 Sanctioning Guidelines, supra note 32 au para IV(C).

62 BM, Procedure, supra note 30, ss II(u), III(A), art 3.01.

63 Ibid, s III(A), art 3.01(b)(i)–(iv).

64 Ibid, s III(A), art 8.02(b)(ii).

65 Ibid, s III(A), art 7.01.

66 Ibid, s III(A), arts 10.03–10.04.

67 BM, Sanctions System Annual Report FY19, supra note 55 à la p 16.

68 Boisson de Chazournes et Fromageau, “Balancing the Scales,” supra note 25 à la p 972.

69 Pascale Hélène Dubois, Kathleen M Peters et Roberta Berzero, “Settlements within the World Bank Group Sanctions System” dans Tina Søreide et Abiola Makinwa, dir, Negotiated Settlements in Bribery Cases: A Principled Approach, Cheltenham, Edward Elgar, 2020, 95 à la p 117.

70 Ibid.

71 Boisson de Chazournes et Fromageau, “Balancing the Scales,” supra note 25 à la p 972.

72 BM, Procedure, supra note 30, s III(A), art 2.02.

73 Leroy et Fariello, supra note 16 aux pp 12–14.

74 Ibid à la p 13; BM, Procedure, supra note 30, s III(A), art 2.01(a), (c).

75 BM, Procedure, supra note 30, s III(A), art 2.04.

76 Ibid, s III(A), art 2.01(b).

77 Pour une définition de l’expression “sufficient evidence,” voir ibid, s II(u) (“evidence sufficient to support a reasonable belief, taking into consideration all relevant factors and circumstances, that it is more likely than not that the Respondent has engaged in a Sanctionable Practice”).

78 Ibid, s III(A), art 4.01(a).

79 Ibid, s III(A), art 8.02(b)(i) (“‘more likely than not’ means that, upon consideration of all the relevant evidence, a preponderance of the evidence supports a finding that the Respondent engaged in a Sanctionable Practice”).

80 Ibid, s III(A), art 4.01(a), 9.01.

81 Sanctioning Guidelines, supra note 32 au para III.

82 BM, Procedure, supra note 30, s III(A), art 4.04.

83 Harker et Castellano, supra note 35 à la p 3.

84 Ibid.

85 Ibid.

86 BM, Procedure, supra note 30, s III(A), art 5.01(a).

87 Ibid, s III(A), art 8.03.

88 Ibid, s III(A), art 6.02.

89 Voir par ex Conseil des sanctions, Sanctions Board Decision No 64, 2014, en ligne: <www.worldbank.org/content/dam/documents/sanctions/sanctions-board/2018/nov/SanctionsBoardDecisionNo-63.pdf>.

90 Pascale Hélène Dubois, “Domestic and International Administrative Tools to Combat Fraud and Corruption: A Comparison of US Suspension and Debarment with the World Bank’s Sanctions System” (2012) 2012 U Chicago Legal F 195 à la p 229 [Dubois, “Domestic and International”].

91 BM, Procedure, supra note 30, s III, art 4.02(a).

92 Ibid. La suspension temporaire a été introduite lors des réformes de 2004 comme une mesure de protection. Elle empêche la partie accusée de conclure de nouveaux contrats financés par la BM en attendant la décision finale du Comité des sanctions, car une décision d’exclusion ultérieure n’annulera pas les contrats une fois conclus. De plus, cette mesure empêche que la partie accusée porte l’affaire devant le Comité des sanctions pour retarder la décision inévitable d’exclusion, voir Thornburgh, Gainer et Walker, supra note 47 aux pp 39–41.

93 BM, Procedure, supra note 30, s III(A), art 10.01(a). Pour consulter la liste des entreprises et individus sanctionnés, voir “Procurement: World Bank Listing of Ineligible Firms and Individuals,” en ligne: World Bank <www.worldbank.org/en/projects-operations/procurement/debarred-firms>.

94 BM, Procurement Regulations, supra note 27, annexe II, art 11.1, 11.2; annexe IV, art 2.2(f).

95 Leroy et Fariello, supra note 16 à la p 24; BM, Procedure, supra note 30, s III(A), art 8.01, para 4; art 10.01(b).

96 Boisson de Chazournes et Fromageau, “Balancing the Scales,” supra note 25 à la p 979.

97 Leroy et Fariello, supra note 16 aux pp 24–25.

98 Ibid à la p 25.

99 BM, Procedure, supra note 30, s III(A), art 10.01(c).

100 BM, The World Bank Office of Suspension and Debarment: 10-Year Update on Case Data and Metrics, 2007–2017. Addendum to the second edition, 2017 à la p 15.

101 Harker et Castellano, supra note 35 à la p 7.

102 Boisson de Chazournes et Fromageau, “Mécanisme de sanction,” supra note 16 à la p 264; BM, Procedure, supra note 30, s III(A), arts 4.02(b), 6.01, 6.02.

103 Anne-Marie Thévenot-Werner, “La qualification du système de sanctions du Groupe de la Banque mondiale” (2018) 1:1 RDIA 110 à la p 132.

104 Boisson de Chazournes et Fromageau, “Mécanisme de sanction,” supra note 16 à la p 264.

105 Franco Peirone, “The World Bank Sanction System: Moving towards a Present Responsibility Model” (2018) 13:1 European Procurement & Public Private Partnership L Rev 18 à la p 20.

106 Davis, supra note 21 à la p 232.

107 Williams, supra note 6 à la p 284.

108 BM, Anti-Corruption Guidelines, supra note 36 au para 11(a). Voir aussi BM, Procedure, supra note 30, s III(A), art 9.01(c).

109 Voir généralement Dragos, supra note 20.

110 BM, Procurement Regulations, supra note 27 au para 11.2, annexe II.

111 BM, Procedure, supra note 30, s III(A), art 9.01.

112 Ibid, s III(A), art 9.01(b), (d).

113 Eugenia A Pyntikova, “Exclusion and Rehabilitation: How Multilateral Development Banks Address Corrupt Behaviour” (2018) 9:1 Jindal Global L Rev 43 à la p 51.

114 Ibid à la p 52.

115 Leroy et Fariello, supra note 16 à la p 10.

116 BM, Procedure, supra note 30, s III(A), art 9.01(b), (d).

117 Ibid.

118 Leroy et Fariello, supra note 16 à la p 17; BM, Procedure, supra note 30, s III(A), art 9.04(b).

119 Williams, supra note 6 à la p 296.

120 Dubois, “Domestic and International,” supra note 90 aux pp 229–30; voir aussi BM, Procedure, supra note 30, s II(A).

121 Leroy et Fariello, supra note 16 à la p 17; MDB Harmonized Principles on Treatment of Corporate Groups, 10 septembre 2012, s A, para 3, en ligne: <lnadbg4.adb.org/oai001p.nsf/0/A7912C61C52A85AD48257ACC002DB7EE/$FILE/MDB%20Harmonized%20Principles%20on%20Treatment%20of%20Corporate%20Groups.pdf> [MDB Harmonized Principles].

122 MDB Harmonized Principles, supra note 121, s A, para 4.

123 BM, Procedure, supra note 30, s III(A), art 9.04(b).

124 Hans-Joachim Priess, “Questionable Assumptions: The Case for Updating the Suspension and Debarment Regimes at the Multilateral Development Banks” (2013) 45:2 Geo Wash Intl L Rev 271 à la p 287. Voir aussi Stefano Manacorda et Costantino Grasso, Fighting Fraud and Corruption at the World Bank: A Critical Analysis of the Sanctions System, Cham, Springer, 2018 à la p 85.

125 Leroy et Fariello, supra note 16 à la p 18. Voir aussi MDB Harmonized Principles, supra note 121, art A, para 4; World Bank Group Sanctions Board, World Bank Group Sanctions Board Law Digest 2019, Washington, DC, World Bank Group, 2020 à la p 58.

126 Leroy et Fariello, supra note 16 à la p 18.

127 Ibid.

128 Ibid.

129 Manacorda et Grasso, supra note 124 aux pp 86–87; MDB Harmonized Principles, supra note 121 au para 5.

130 BM, Procedure, supra note 30, s III(A), art 9.04(a).

131 Frank A Fariello Jr et Giovanni Bo, “Development-Oriented Alternatives to Debarment as an Anticorruption Accountability Tool Part VI: Anticorruption and Stolen Assets Recovery” (2015) 6 World Bank Legal Rev 415 aux pp 420–21.

132 Norbert Seiler et Jelena Madir, “Fight against Corruption: Sanctions Regimes of Multilateral Development Banks” (2012) 15:1 J Intl Econ L 5 à la p 26.

133 Groupe de travail des institutions financières internationales (IFI) sur la lutte contre la corruption, Cadre uniforme de prévention et de lutte contre la fraude et la corruption, 2006, préambule [Cadre uniforme].

134 Stephen S Zimmermann et Frank A Fariello Jr, “Coordinating the Fight against Fraud and Corruption: Agreement on Cross-Debarment among Multilateral Development Banks” (2012) 3 World Bank Legal Rev 189 à la p 191.

135 Ibid.

136 Ibid.

137 Cadre uniforme, supra note 133 aux paras 1–2.

138 Ibid aux paras 3, 5.

139 Seiler et Madir, supra note 132 aux pp 10–11.

140 Agreement for Mutual Enforcement, supra note 18.

141 Pour un résumé de l'historique et des débats qui ont mené à l’adoption de l’Accord d’exclusion croisée, voir Zimmermann et Fariello, supra note 134 aux pp 191–96.

142 Agreement for Mutual Enforcement, supra note 18, art 1.

143 Ibid, art 4.

144 Daly et Fariello, supra note 51 à la p 262; Agreement for Mutual Enforcement, supra note 18, art 5.

145 Agreement for Mutual Enforcement, supra note 18, art 4.

146 Pour des exemples de situations pouvant justifier le recours à la clause dérogatoire, voir Zimmermann et Fariello, supra note 134 aux pp 198–99.

147 Ibid.

148 Seiler et Madir, supra note 132 aux pp 12–13; Agreement for Mutual Enforcement, supra note 18 au para 6.

149 Seiler et Madir, supra note 132 à la p 12; Agreement for Mutual Enforcement, supra note 18, art 2.

150 Zimmermann et Fariello, supra note 134 à la p 195.

151 Lorenzo Nesti, “The 2010 ‘Agreement on Mutual Enforcement of Debarment Decisions’ and Its Impact for the Fight Against Fraud and Corruption in Public Procurement” (2014) 14:1 J Public Procurement 62 aux pp 70–72; MDB Harmonized Principles, supra note 121; General Principles and Guidelines for Sanctions, septembre 2012, en ligne: <lnadbg4.adb.org/oai001p.nsf/0/CE3A1AB934F345F048257ACC002D8448/$FILE/Harmonized%20Sanctioning%20Guidelines.pdf>.

152 Rohan Schaap et Cecile Divino, “The AMEDD Five Years On: Trends in Enforcement Actions and Challenges Facing the Enforcement Landscape” (2016) 57 Harv Intl LJ Online 1 aux pp 8–9, en ligne: <harvardilj.org/wp-content/uploads/sites/15/January-2016_Vol-57_Schaap-Divino.pdf>.

153 Nesti, supra note 151 à la p 70.

154 Ibid à la p 71.

155 Ibid.

156 Ibid [notre traduction].

157 Benedetti, supra note 17 à la p 233, citant Seiler et Madir, supra note 132 aux pp 22–25.

158 Ibid.

159 Christopher R Yukins, “Cross-Debarment: A Stakeholder Analysis” (2013) 45:2 Geo Wash Intl L Rev 219 à la p 232 (discute des avantages et des inconvénients de l’exclusion croisée automatique).

160 Ibid.

161 Ibid.

162 Leroy et Fariello, supra note 16 aux pp 4–5. Voir Sanctioning Guidelines, supra note 32 aux paras I–II (par ex l’exclusion permanente est le plus souvent appropriée pour les personnes physiques, les sociétés étroitement détenues par ces personnes et aux sociétés coquilles vides).

163 BM, Procedure, supra note 30, s III(A), art 9.01(d).

164 Majtan, Roman, “The Self-Cleaning Dilemma: Reconciling Competing Objectives of Procurement Processes” (2013) 45:2 Geo Wash Intl L Rev 291 à la p 326 Google Scholar.

165 BM, Procedure, supra note 30, s III(A), art 9.03(b).

166 Ibid, s III(A), art 9.03(a), (d).

167 Ibid, s III(A), art 9.03(b).

168 Ibid, s III(A), art 9.03(c).

169 Harker et Castellano, supra note 35 à la p 8; BM, Procedure, supra note 30, s III(A), art 9.03(d), (e). Voir aussi BM, The World Bank Group’s Sanctions Regime: Information Note à la p 29, en ligne: <www.worldbank.org/content/dam/documents/sanctions/other-documents/osd/The_World_Bank_Group_Sanctions_Regime.pdf> (l’abus de pouvoir discrétionnaire n’est pas une base pour contester ou remettre en question la décision de l’ICO, mais seulement pour dénoncer un comportement abusif ou autrement flagrant de sa part).

170 BM, Procedure, supra note 30, s III(A), art 9.03(d).

171 Ibid, s III(A), arts 9.01 (d), 9.03 (a).

172 Voir Résumé des Directives du Groupe de la Banque mondiale pour le respect de l’intégrité, en ligne: < thedocs.worldbank.org/en/doc/337461536766358782-0240022018/original/WBGIntegrityComplianceGuidelinesFR.pdf >.

173 Ibid.

174 Pyntikova, supra note 113 aux pp 53–54.

175 Leroy et Fariello, supra note 16 à la p 15; Sanctioning Guidelines, supra note 32, s II(A).

176 Fandl, supra note 38 à la p 863.

177 Castellano, supra note 39 à la p 423.

178 BM, Procedure, supra note 30, s III(A), art 9.02.

179 Sanctioning Guidelines, supra note 32, s IV(D).

180 Manacorda et Grasso, supra note 124 à la p 163; BM, communiqué, “World Bank Launches Voluntary Disclosure Program” (15 août 2006), en ligne: <www.worldbank.org/en/news/press-release/2006/08/15/world-bank-launches-voluntary-disclosure-program>.

181 Manacorda et Grasso, supra note 124 à la p 163.

182 Boisson de Chazournes et Fromageau, “Mécanisme de sanction,” supra note 16 à la p 260.

183 Peirone, supra note 105 à la p 26.

184 Manacorda & Grasso, supra note 124 à la p 164.

185 Ibid.

186 Ibid.

187 Ibid à la p 165.

188 Rogers, Sarah B, “The World Bank Voluntary Disclosure Program (VDP): A Distributive Justice Critique” (2008) 46:3 Colum J Transnatl L 709 à la p 724 Google Scholar.

189 Majtan, supra note 164 à la p 336.

190 BM, Procedure, supra note 30, s III(A), art 11.01, 11.02; Leroy et Fariello, supra note 16 à la p 20.

191 Dubois, Peters et Berzero, supra note 69 aux pp 105–06.

192 Leroy et Fariello, supra note 16 à la p 20.

193 BM, Procedure, supra note 30, s III(B), art 3(a), (b); Leroy et Fariello, supra note 16 à la p 20.

194 BM, World Bank Group’ Settlements: How Negotiated Resolution Agreements Fit within the World Bank Group’s Sanctions System à la p 3, en ligne: <thedocs.worldbank.org/en/doc/2188264d782e34c474156a301599cdb4-0090012021/original/Settlement-Process-Note.pdf>.

195 Leroy et Fariello, supra note 16 à la p 21.

196 Schaap et Divino, supra note 152 à la p 13 (“a sanction resulting from a settlement agreement is recognized by other participating institutions as if the sanction was decided by the decision maker’s sanctions authority”); Bart Stevens et Robert Delonis, “Leveling the Playing Field: A Race to the Top” (2014) 5 World Bank Legal Rev 399 à la p 410 (notent que les sanctions imposées par voie de règlement sont appliquées de la même manière que pour toute sanction imposée par le biais de la procédure de sanctions régulière, y compris l’application de l’exclusion croisée).

197 Stevens et Delonis, supra note 196 à la p 410.

198 Schaap et Divino, supra note 152 à la p 3.

199 Majtan, supra note 164 à la p 333.

200 Dubois, Peters et Berzero, supra note 69 aux pp 107–08.

201 Ibid à la p 112.

202 Schaap et Divino, supra note 152 à la p 19.

203 Emmanuelle Auriol et Tina Søreide, “An Economic Analysis of Debarment” (2017) 50 Intl Rev L & Econ 36 à la p 38. Voir aussi BM, communiqué, 2009/001/EXT, “Siemens to Pay $100 Million to Fight Fraud and Corruption as Part of World Bank Group Settlement” (2 juillet 2009), en ligne: <www.worldbank.org/en/news/press-release/2009/07/02/siemens-pay-million-fight-fraud-corruption-part-world-bank-group-settlement> [BM, communiqué, 2009/001/EXT].

204 BM, communiqué, 2012/282/INT, “Sanctions et responsabilité: la Banque mondiale radie Alstom Hydro France, Alstom Network Schweiz AG et leurs filiales” (22 février 2012), en ligne: <www.banquemondiale.org/fr/news/press-release/2012/02/22/enforcing-accountability-world-bank-debars-alstom-hydro-france-alstom-network-schweiz-ag-and-their-affiliates> [BM, communiqué, 2012/282/INT].

205 Schaap et Divino, supra note 152 à la p 24.

206 Ibid.

207 Ibid.

208 Leroy et Fariello, supra note 16 aux pp 20–21.

209 Ibid à la p 21.

210 Dubois, Peters et Berzero, supra note 69 à la p 107.

211 Schaap et Divino, supra note 152 à la p 21.

212 BM, World Bank Group Sanctions System Annual Report FY20, Washington, DC, World Bank Group, 2020 à la p 84 [Sanctions System Annual Report FY20].

213 Voir Lucinda A Low et al, “2013 FCPA Year in Review” (2014), en ligne: Steptoe & Johnson LLP <www.steptoe.com/images/content/1/7/v3/174129/2013-FCPA-Year-in-Review-Steptoe-and-Johnson-LLP.pdf> à la p 45 (les auteurs citent comme exemple la décision n° 59 du Conseil des sanctions du 24 juin 2013).

214 Schaap et Divino, supra note 152 à la p 26.

215 Fariello et Bo, supra note 131 à la p 420.

216 Jelena Madir, Sanctions Regimes of Multilateral Development Banks: What Process is Due, Leiden, Brill Nijhoff, 2020 à la p 200; Sanctions System Annual Report FY19, supra note 55 à la p 19.

217 BM, communiqué, 2013/337/INT, “La Banque mondiale radie SNC-Lavalin Inc. et ses filiales pour dix ans” (17 avril 2013), en ligne: <www.banquemondiale.org/fr/news/press-release/2013/04/17/world-bank-debars-snc-lavalin-inc-and-its-affiliates-for-ten-years> [BM, communiqué, 2013/337/INT].

218 Ronderos, Ratpan et Rincon, supra note 4 à la p 355.

219 BM, communiqué, 2013/337/INT, supra note 217.

220 Nesti, supra note 151 à la p 78.

221 Ibid.

222 Auriol et Søreide, supra note 203 à la p 45.

223 Ibid à la p 46.

224 Fandl, supra note 38 à la p 863.

225 Nesti, supra note 151 aux pp 72–73 (note que le Groupe de la Banque islamique de développement pourrait devenir partie à l’Agreement for Mutual Enforcement, supra note 18, puisqu’il satisfait les normes minimales requises pour adhérer à l’Accord).

226 Susan Finder, “The International Fraud and Corruption Sanctioning System: The Case of Chinese SOEs” dans Julien Chaisse, dir, China’s International Investment Strategy: Bilateral, Regional, and Global Law and Policy, Oxford, Oxford University Press, 2019, 397 aux pp 408–10.

227 La liste noire de la BAII peut être consultée à l’adresse suivante: Asian Infrastructure Investment Bank, “Debarment List,” en ligne: <www.aiib.org/en/about-aiib/who-we-are/debarment-list/index.html>.

228 John Hatchard, “Combating Corruption: ‘Persuasion’ and the Private Sector” dans Combating Corruption: Legal Approaches to Supporting Good Governance and Integrity in Africa, Cheltenham, UK, Edward Elgar, 2014, 232 à la p 265 [Hatchard, “Combating Corruption”].

229 Yukins, supra note 159 à la p 233 (l’auteur a évalué les coûts et les avantages d’une politique d’exclusion croisée entre les gouvernements et les IFI du point de vue des différentes parties prenantes, y compris les décideurs et les entreprises, et a proposé un équilibre entre les solutions extrêmes, soit l’exclusion croisée automatique ou la publication des noms des entrepreneurs figurant sur la liste noire).

230 Ibid à la p 232.

231 Søreide, Gröning et Wandall, supra note 24 à la p 537 (les auteurs notent que le recours à un niveau de preuve moins exigeante implique une faible présomption d’innocence).

232 Majtan, supra note 164 à la p 335.

233 Manacorda et Grasso, supra note 124 à la p 166.

234 John Hatchard, “Combating the Bribery of Foreign Public Officials and the ‘Art of Persuasion’: The Case of Alstom and the Energy Sector” (2016) 28 Denning LJ 109 à la p 136 [Hatchard, “Combating the Bribery”].

235 Ibid à la p 126.

236 BM, communiqué, 2012/282/INT, supra note 204; BM, communiqué, 2013/337/INT, supra note 217.

237 Hatchard, “Combating the Bribery,” supra note 234 à la p 125; SNC-Lavalin, Faits saillants d’intégrité, 2020 à la p 27, en ligne: <www.snclavalin.com/~/media/Files/S/SNC-Lavalin/documents/integrity-highlights-fr.pdf>.

238 Pyntikova, supra note 113 aux pp 53–54.

239 BM, communiqué, 2009/001/EXT, supra note 203.

240 Schaap et Divino, supra note 152 à la p 23.

241 Ware, supra note 19 aux pp 136–37.

242 Nesti, supra note 151 à la p 68.

243 Zimmermann et Fariello, supra note 134 aux pp 201–02.

244 Sanctioning Guidelines, supra note 32, s V(B)(3).

245 Canni, Todd J, “Debarment Is No Longer Private World Bank Business: An Examination of the Bank’s Distinct Debarment Procedures Used for Corporate Procurements and Financed Projects” (2010) 40:1 Pub Cont LJ 147 à la p 149 Google Scholar.

246 Coogan, John et al, “Combatting Fraud and Corruption in International Development: The Global Impact of the Multilateral Development Banks’ Sanctions Regimes” (2015) 22:2 Journal of Financial Crime 228 à la p 237 Google Scholar.

247 Fariello et Bo, supra note 131 à la p 420.

248 Williams, supra note 6 à la p 286.

249 Ibid à la p 305.

250 Groupe de la BM, Initiating Discussion Brief, Review of the World Bank Group Sanctions Regime 2011–2014: Phase I Review: Stock-Taking à la p 13, en ligne: <consultations.worldbank.org/sites/default/files/materials/consultation-template/consultation-review-world-bank-group-sanctions-systemopenconsultationtemplate/materials/sanctionsreview_initiatingdiscussionbrief.pdf> [Discussion Brief].

251 Ibid à la p 15.

252 Williams, supra note 6 à la p 305.

253 Ibid.

254 Discussion Brief, supra note 250 à la p 4.

255 Schaap et Divino, supra note 152 à la p 11; Discussion Brief, supra note 250 aux pp 11, 17.

256 Schaap et Divino, supra note 152 à la p 11.

257 Ibid.

258 Ibid à la p 12.

259 Ibid.

260 Thévenot-Werner, supra note 103 à la p 148.

261 Zimmermann et Fariello, supra note 134 à la p 203.

262 Boisson de Chazournes et Fromageau, “Balancing the Scales,” supra note 25 à la p 971.

263 Leasure, Peter, “Combatting the Global Crime of Bribery: A Report on Canadian Foreign Official Anti-bribery Policy” (2017) 24: 4 Journal of Financial Crime 496 aux pp 501–02Google Scholar; Loi sur la corruption d’agents publics étrangers, LC 1998, c 34, arts 3(1), 4(2).

264 OCDE, Implementing the OECD Anti-Bribery Convention. Phase 4 Report: Norway, 2018 aux paras 16, 119, 148–51.

265 Thévenot-Werner, supra note 103 à la p 148.

266 Ibid; Auriol et Søreide, supra note 203 à la p 39 (“[s]uch reasoning undermines the enforcement of debarment rules, as well as the aim of imposing predictable penalties upon corporate criminal liability, while at the same time, the case must be seen as a pragmatic attempt to reach a reasonable solution”).

267 Thévenot-Werner, supra note 103 à la p 150.

268 Leroy et Fariello, supra note 16 à la p 1.

269 Thévenot-Werner, supra note 103 à la p 150.

270 Williams, supra note 6 à la p 301.

271 Benedetti, supra note 17 à la p 232. Voir aussi Hostetler, supra note 3 aux pp 245–46 (suite au succès des poursuites engagées par le gouvernement du Lesotho contre Acres International et Lahmeyer International, la BM a relancé ses enquêtes sur ces sociétés).

272 BM, Integrity Vice Presidency (INT) Fiscal Year 2017: Annual Update, Washington, DC, World Bank Group, 2017 à la p 10, en ligne: <documents.worldbank.org/curated/en/129141508163808440/Integrity-Vice-Presidency-INT-fiscal-year-2017-annual-update> [INT Annual Update 2017].

273 Peter MacKay, Brian Whisler et Patrick Dennien, “The World Bank Avoids Peril in Its Efforts to Foster International Anti-Corruption Cooperation” (24 mai 2016), en ligne: Global Compliance News <globalcompliancenews.com/the-world-bank-avoids-peril-in-its-efforts-to-foster-international-anti-corruption-cooperation-20160524/>.

274 INT Annual Update 2017, supra note 272 à la p 10.

275 BM, communiqué, 2012/545/EXT, “Déclaration de la Banque mondiale concernant le pont de la Padma” (29 juin 2012), en ligne: <www.banquemondiale.org/fr/news/press-release/2012/06/29/world-bank-statement-padma-bridg>.

276 Groupe de la Banque mondiale c K Wallace et al, 2016 CSC 15 au para 102 [Wallace].

277 Galagan, Dmytro, “Supreme Court of Canada in World Bank Group v Wallace: On Production of Records, Immunities of International Organizations and the Global Fight against Corruption” (2017) 40:3 Man LJ 303 aux pp 307–08Google Scholar.

278 Ibid à la p 308.

279 Ibid à la p 309.

280 Wallace, supra note 276 au para 94.

281 Ronderos, Ratpan et Rincon, supra note 4 aux pp 356–57.

282 Harker et Castellano, supra note 35 à la p 8.

283 Fariello et Bo, supra note 131 à la p 420.

284 Amissi M Manirabona, “Évolution et diversification croissantes des moyens de lutte contre la corruption dans le commerce international” dans Viviane Beaufort, dir, Le Lamy contrats internationaux–Étude 100, Paris, Wolters Kluwer, 2018, 180.

285 MDB Harmonized Principles, supra note 121, art A, para 4.

286 Sanctioning Guidelines, supra note 32, art II(C).

287 Manirabona, supra note 284 à la p 180.

288 Voir par ex Peirone, supra note 105; Majtan, supra note 164 à la p 20; Fariello et Bo, supra note 131; Priess, supra note 124.

289 Sanctions System Annual Report FY20, supra note 212 à la p 85.

290 Voir par ex Peirone, supra note 105 à la p 26.

291 Priess, supra note 124 à la p 281.

292 Castellano, supra note 39 à la p 418.

293 Priess, supra note 124 aux pp 281–82.

294 Voir Castellano, supra note 39 aux pp 434–35.

295 Sanctions System Annual Report FY19, supra note 55 à la p 62.

296 Priess, supra note 124 à la p 282.

297 Ibid à la p 283.

298 Leroy et Fariello, supra note 16 aux pp 14–16.

299 Castellano, supra note 39 à la p 434 [notes omises]. Voir aussi Priess, supra note 124 aux pp 281–82.

300 Thévenot-Werner, supra note 103 aux pp 137–38, 148.

301 Voir par ex Fariello et Bo, supra note 131 à la p 423 (“the ambiguities surrounding debarment suggest that a more proportionate and nuanced approach to sanctions is not only possible but desirable, and the sanctions system’s current, almost exclusive, reliance on debarment as the sanction of choice deserves reconsideration”).

302 Schaap et Divino, supra note 152 à la p 12; Discussion Brief, supra note 250 à la p 11.

303 Majtan, supra note 164 à la p 339; Fariello et Bo, supra note 131 aux pp 420–21; Auriol et Søreide, supra note 203 à la p 37.

304 Søreide, Gröning et Wandall, supra note 24 à la p 542.

305 Ibid à la p 539.

306 Hatchard, “Combating Corruption,” supra note 228 à la p 265.

307 Voir Peirone, supra note 105 aux pp 27–28; BM, Procedure, supra note 30, s III(A), art 9.01(b).

308 Peirone, supra note 105 à la p 28 (“[c]onditional non-debarment will have remarkable effects both on specific deterrence — since the company sanctioned will be compelled to adopt measures within an effective compliance and ethics programmes in order to not be debarred — and general deterrence — since other firms would adopt similar measures in order to stay in the market”).

309 Benedetti, supra note 17 à la p 232.

310 Sanctions System Annual Report FY20, supra note 212 aux pp 49‑50.

311 Ibid à la p 50. Voir aussi Discussion Brief, supra note 250 à la p 8.

312 Majtan, supra note 164 à la p 300.

313 Ibid à la p 337.

314 Kevin E Davis, “Contracts Procured through Bribery of Public Officials: Zero Tolerance versus Proportional Liability” (2017) 50 NYU J Intl L & Pol 1261 aux pp 1297–98.

315 Hatchard, “Combating the Bribery,” supra note 234 à la p 136.

316 Davis, supra note 314 à la p 1296.

317 Majtan, supra note 164 aux pp 295–97.

318 Fariello et Bo, supra note 131 à la p 422.

319 Majtan, supra note 164 aux pp 339–40.

320 Ibid à la p 300.

321 Voir généralement Fariello et Bo, supra note 131 à la p 424.

322 Ibid.

323 Majtan, supra note 164 à la p 294.

324 Davis, supra note 21 à la p 233.

325 Pyntikova, supra note 113 à la p 51.

326 Ware, supra note 19 à la p 138.

327 Ibid.