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Les développements en droit interaméricain pour l’année 2020

Published online by Cambridge University Press:  27 October 2021

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Au sein de l’Organisation des États américains (OÉA), la Commission interaméricaine des Droits de l’Homme (CIDH) et la Cour interaméricaine des Droits de l’Homme sont les deux principaux organes chargés de veiller à la protection des droits de la personne dans les Amériques. Ces instances sont habilitées à instruire des recours individuels intentés contre des États membres et portant sur des allégations de violations de la Convention américaine relative aux Droits de l’Homme (CADH) et d’autres instruments interaméricains applicables. La présente chronique portera sur certaines décisions rendues par la Cour pendant l’année 2020.

Type
Chronique de droit interaméricain en 2020/Digest of Inter-American Law in 2020
Copyright
© The Canadian Yearbook of International Law/Annuaire canadien de droit international 2021

Introduction

Au sein de l’Organisation des États américains (OÉA),Footnote 1 la Commission interaméricaine des Droits de l’Homme (CIDH) et la Cour interaméricaine des Droits de l’Homme sont les deux principaux organes chargés de veiller à la protection des droits de la personne dans les Amériques.Footnote 2 Ces instances sont habilitées à instruire des recours individuels intentés contre des États membres et portant sur des allégations de violations de la Convention américaine relative aux Droits de l’Homme (CADH)Footnote 3 et d’autres instruments interaméricains applicables.Footnote 4 La présente chronique portera sur certaines décisions rendues par la Cour pendant l’année 2020.

Dans le cadre de cette période, la Cour interaméricaine des Droits de l’Homme a émis dix-neuf jugements sur le fond, dix-neuf décisions sur l’interprétation de jugements antérieurs, trente-huit décisions sur le suivi des mesures de réparations, de même que quatorze décisions relatives à des mesures provisoires et un avis consultatif portant sur les conséquences de la dénonciation de la CADH et la Charte de l’Organisation des États américains. Footnote 5 La CIDH a, pour sa part, adopté 246 résolutions relatives à la recevabilité d’affaires, quarante-quatre relatives à l’irrecevabilité, quarante-trois décisions entérinant des règlements à l’amiable, soixante-trois décisions sur le fond et quatre-vingt-dix-sept décisions portant sur des mesures conservatoires.Footnote 6

En 2020, les deux instances ont abordé plusieurs thèmes d’actualité et d’importance particulière pour les Amériques, entre autres en ce qui a trait aux droits des peuples autochtones, aux droits des personnes lesbienne, gay, bisexuelle, trans, queer et intersexe (LGBTQI), aux droits des migrants, aux droits des afro-descendants, aux droits des femmes et des enfants, aux droits des détenus, de même que relativement à la liberté d’expression, aux disparitions forcées et aux garanties judiciaires des officiers de l’appareil judiciaire et municipal.

Affaire Communautés Autochtones Membres de l’Association Lhaka Honhat (Nuestra Tierra) c Argentine , Jugement du 6 février 2020, Série C, N o 400

Cette décision de la Cour, attendue depuis longtemps,Footnote 7 porte sur les revendications territoriales menées depuis 1991 par cent trente-deux communautés des peuples autochtones Wichí (Mataco), Iyjwaja (Chorote), Komlek (Toba), Niwackle (Chulupí) et Tapy’y (Tapiete) de la province argentine de Salta, à la frontière du Paraguay et de la Bolivie. L’existence du titre de propriété collective détenu par ces communautés n’étant pas objet du litige, le jugement traita plus précisément de l’obligation de l’État de garantir les droits à la terre des communautés, de même que des conséquences indirectes de manquements à cette obligation, le cas échéant.

Rappelant sa jurisprudence constante sur la question,Footnote 8 la Cour rappela d’abord qu’en vertu de l’article 21 de la CADH, les États ont l’obligation de reconnaître, délimiter et garantir les droits collectifs des peuples autochtones sur les terres qu’ils ont possédées traditionnellement (paras. 115–16). Elle constata qu’en l’espèce, bien que ces droits avaient été reconnus partiellement par l’entremise de décrets adoptés en 2007 et 2014, après près de trente ans, l’État n’avait pas adéquatement établi l’intégralité des titres de propriété collective des communautés, assuré leur sécurité juridique, délimité l’étendue du territoire, ni garanti les droits des communautés face à des tiers qui occupaient ces terres ou en exploitaient les ressources (paras. 123–50).Footnote 9

Ces omissions, de même que l’absence de norme interne permettant la protection effective des droits fonciers des communautés eurent pour effet de violer les articles 1, 2, 8, 21 et 25 de la CADH (paras. 151–68). Il est intéressant de constater que la Cour conclut également que la construction d’un pont international sur ces terres sans consultation préalable et adéquate contrevenait au droit à la propriété des communautés, à leur droit aux garanties judiciaires et à la protection judiciaire (arts. 8 et 25 de la CADH). De même la Cour jugea que l’absence de consultation préalable constituait également une violation de leur droit à la participation à la vie politique garanti par l’article 23 de la CADH (paras. 173–85), ce qui s’inscrit dans l’approche développée par le tribunal interaméricain dans l’Affaire des peuples Kaliña et Lokono (Suriname) Footnote 10 et l’Avis consultatif no 23 portant sur l’environnement et les droits humains.Footnote 11

Notons également que, sans développer in extenso son raisonnement sur la causalité des violations, la Cour considéra que les autorités étatiques étaient bien au fait des empiètements et de l’exploitation des ressources menés par des tiers sur les terres des communautés, et omit de les prévenir ou d’y remédier, ce qui affecta les bien environnementaux des communautés,Footnote 12 leur droit à la participation à la vie culturelle, leur modes d’alimentation traditionnels, de même que leur accès à l’eauFootnote 13 en contravention de l’article 26 de la CADH (paras. 194–289).Footnote 14 Notons qu’il s’agit d’une première affaire contentieuse où la Cour analyse de façon aussi détaillée les droits environnementauxFootnote 15 sous l’angle de l’article 26 portant sur les droits économiques, sociaux et culturels.Footnote 16

Mentionnons, au passage, que le tribunal n’eut pas à se prononcer sur des allégations de discrimination ou de traitement discriminatoire, et qu’il considéra que l’État argentin n’était pas responsable des violations alléguées quant au droit à la personnalité juridique (art. 3), à la liberté d’expression (art. 13), d’association (art. 16) et de mouvement (art. 22). Cette affaire pourrait s’avérer pertinente pour les lectrices/teurs canadiens/nes qui suivent, par exemple, le dossier du gazoduc Coastal GasLink traversant le territoire traditionnel du peuple Wet’suwet’en en Colombie Britannique et qui oppose ce dernier aux autorités fédérales et provinciales.Footnote 17

Affaire Acosta Martínez et al c Argentine , Jugement du 31 août 2020, Série C, N o 410

Dans une autre affaire argentine, le tribunal interaméricain eut à se prononcer sur des allégations de profilage racial ayant mené à l’arrestation, la détention et la mort de leaders d’une organisation de migrants afro-descendants.Footnote 18 En l’espèce, la victime et d’autres afrodescendants avaient été interceptés devant un bar par les autorités policières de Buenos Aires, sous prétexte que celles-ci avaient reçu un appel anonyme les alertant de la présence d’individus armés à proximité. Après avoir constaté que les victimes n’étaient pas armées et qu’aucun mandat d’arrestation ne les concernait, les autorités policières procédèrent tout de même à l’arrestation de la victime, prétextant qu’elle était en état d’ébriété et sous l’influence de drogues. Au commissariat où elle fut amenée, le médecin de service ordonna le transfert de la victime vers un centre hospitalier et celle-ci succomba à un arrêt cardiorespiratoire lors du trajet d’ambulance. Alors que le registre de détention indiqua que le détenu était en état d’ébriété et sous l’influence de drogues, le rapport d’autopsie menée sur la dépouille releva, sans les expliquer, des lésions sur le corps de la victime et ne révéla aucune présence d’alcool ou de drogue chez celle-ci. Les enquêtes portant sur les circonstances du décès furent classées (paras. 41–65).

Encore une fois, en raison de la reconnaissance partielle de responsabilité par l’Argentine, la Cour restreint l’essentiel de son jugement à la légalité de la capture et de la détention des victimes, de même qu’aux allégations de profilage racial ayant motivé celles-là. Plus précisément, le tribunal interaméricain considéra que l’Édit sur l’Ébriété et Autres Intoxications invoqué par les autorités policières pour justifier l’arrestation et la détention de la victime ne respecte pas l’article 7.2 de la CADH qui prévoit que “[n]ul ne peut être privé de sa liberté, si ce n’est pour des motifs et dans des conditions déterminées à l’avance par les constitutions des États parties ou par les lois promulguées conformément à celles-ci.” En effet, l’édit sanctionnant le fait “d’être en état avancé d’ébriété” constitue, selon le tribunal, une norme de droit criminel ambiguë qui laisse une marge excessive de discrétion aux autorités policières.Footnote 19 Pour la Cour, puisque l’édit ne renvoie qu’à l’enivrement d’une personne sans faire référence aux dangers que cette conduite peut occasionner à l’accusé ou pour des tiers, ce type de législation outrepasse la prérogative étatique de sanctionner des comportements, en contravention des articles 1, 2, 7.1 et 7.2 de la CADH (paras. 75–77).

Par ailleurs, la Cour conclut que l’arrestation et la détention de la victime furent le résultat de profilage racial et d’actes discriminatoires de la part des autorités policières, en contravention des articles 1.1, 7.3., et 24 de la CADH. Elle expliqua qu’en effet, les seules personnes interpelées devant le bar ce soir-là étaient des personnes afrodescendantes et que, malgré le fait qu’elles n’étaient pas armées ni ne faisaient l’objet de mandats d’arrêt, elles furent formellement arrêtées et amenées au commissariat de police. Selon la Cour, ces arrestations, que les autorités tentèrent de justifier par la suite en vertu de l’édit contesté, ne pouvaient donc avoir été menées qu’en vertu d’un critère discriminatoire de sélection des suspects basé sur la race (paras. 91–101).Footnote 20

Les lecteur/trices canadien/nes intéressés par les récentes allégations de profilage racial dont certaines autorités policières ont fait l’objet au CanadaFootnote 21 voudront sans doute consulter les moyens de réparation ordonnés par la Cour, surtout en ce qui a trait aux garanties de non répétition qui portent, entre autres, sur les programmes de formation devant être mis en place par l’État argentin pour lutter contre ces pratiques au sein de forces de l’ordre (paras. 118, 121, 128, 131).

Affaire Roche Azaña et al c Nicaragua , Jugement du 3 juin 2020, Série C, N o 403

Malheureusement, la Cour eut à se pencher une fois de plus sur des allégations d’usage excessif de la force mortelle par les autorités à l’encontre de migrants en déplacement.Footnote 22 En 1996, une fourgonnette transportant un groupe de migrants faisant route de Managua vers la frontière hondurienne croisa successivement trois barrages routiers sans s’arrêter. Les autorités policières ouvrirent le feu lors des deux derniers passages, blessant gravement six personnes, dont une qui mourut des suites de ses blessures. Une enquête semée d’embûches s’en suivit, puis un procès devant jury acquitta les policiers.

D’une façon similaire à son approche dans l’affaire presqu’identique de Dorzema et al. c République Dominicaine,Footnote 23 la Cour évalua si l’usage de la force par les autorités se conformait aux principes de légalité, d’objectif légitime, de nécessité absolue et de proportionnalité.Footnote 24 Elle constata, dans un premier temps, qu’il n’existait alors aucune réglementation suffisamment précise portant sur l’usage de la force par les autorités dans ce type de situation (paras. 54–58). En ce qui a trait au deuxième principe, la preuve révéla qu’en ouvrant le feu, les agents de l’État tentaient délibérément d’occasionner des dommages aux véhicules et aux personnes, ce qui ne pouvait constituer un objectif légitime en l’espèce (para. 60). Le tribunal conclut ensuite que l’État n’avait pas réussit à démontrer que l’usage d’armes à feu était absolument nécessaire dans les faits et qu’il n’y avait pas de moyens alternatifs permettant de forcer le véhicule à s’immobiliser (paras. 61–62). Enfin, la Cour considéra que les autorités auraient dû tenir compte du contexte, et plus particulièrement du fait que l’intervention eut lieu sur une route à proximité d’une frontière internationale, avant d’avoir recours à la force mortelle, considérant le risque réel que la fourgonnette transportât des personnes (paras. 63–69). Elle déclara donc que l’ensemble de ces violations contrevenait aux articles 1, 2, 4 et 5 de CADH. Enfin, comme dans l’Affaire Dorzema précitée, les victimes, dans une situation particulière de vulnérabilité, n’eurent pas accès à la justice en toute égalité, contrairement aux articles 1, 8 et 25 de la CADH. Footnote 25

Affaire Azul Rojas Marín et al c Pérou , Jugement du 12 mars 2020, Série C, N o 402

La Cour eut également l’occasion de traiter de la question de la discrimination et des actes de violence commis à l’endroit de membres de la communauté lesbienne, gay, bisexuelle, trans et intersexe (LGBTI)Footnote 26 au Pérou.Footnote 27 Rappelons que la Cour s’était déjà penchée sur ces enjeux dans diverses décisions récentes.Footnote 28 En l’espèce la victime, aujourd’hui s’identifiant comme femme, mais à l’époque des faits comme homme gay, fut interceptée et harcelée par des agents de police alors qu’elle marchait seule dans la rue la nuit. Ceux-ci la frappèrent et l’emmenèrent au commissariat à bord de leur véhicule, tout en l’insultant en raison de son orientation sexuelle. Une fois en détention, elle fut dévêtue, battue et violée par les policiers à l’aide d’une matraque. Elle fut par la suite relâchée sans que sa détention ne soit enregistrée formellement. Bien qu’une enquête fût initiée contre le personnel du commissariat, entre autres pour le crime de torture, le dossier fut bloqué à de nombreuses reprises, puis classé.

Dans un premier temps, la Cour interaméricaine rappela que les membres de la communauté LGBTQI ont historiquement fait l’objet de discrimination structurelle, de stigmatisation et de violence, dont l’objectif était de pérenniser leur exclusion et subordination (paras. 86–95). En l’espèce, le tribunal conclut que la détention de la victime, sans motif apparent, était contraire au droit péruvien et à la CADH (art. 7) puis que ce traitement devait être présumé discriminatoire et basé sur des motifs liés à l’orientation sexuelle puisque l’État n’avait pas fourni de justification à cet égard (paras. 100–35). La Cour considéra, par ailleurs, que le traitement imposé à la victime, accompagné de propos dérogatoires, y compris le viol, constituaient des actes de torture au sens du droit international (paras. 139–67), contraires au droit à l’intégrité et à la vie privée (arts. 5–11 de la CADH) et en contravention de la Convention interaméricaine pour la prévention et la répression de la torture (arts. 1–6).Footnote 29

En ce qui a trait au droit aux garanties judiciaires et à la protection judiciaire, la Cour conclut que les diverses dépositions réclamées à la victime avaient revictimisé celle-ci (paras. 182–86). Sur le plan technique, l’examen médical de la victime, mené en retard, ne put conclure que les lésions apparentes étaient liées au récit de l’agression relatée par celle-ci (paras. 187–93). De même, les vêtements de la victime et la matraque utilisée lors du viol ne furent pas assujettis à des expertises (paras. 194–97). Par ailleurs, les enquêteurs ont fait souvent preuve de stéréotypes discriminatoires minant l’objectivité de leurs travaux (paras. 198–204).Footnote 30

Le tribunal indiqua que ces pratiques d’enquêtes étaient non seulement contraires aux exigences de la CADH et de la Convention interaméricaine pour la prévention et la répression de la torture, mais aussi au Manuel pour enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (Protocole d’Istanbul)Footnote 31 et au Guide de l’Organisation mondiale de la Santé pour le traitement médico-légal des victimes d’actes de violence sexuelle (paras. 140–219).Footnote 32

Affaire Olivares Muñoz et al c Venezuela , Jugement du 10 novembre 2020, Série C, N o 415

La présente affaire porte sur le tristement célèbre massacre de Vista Hermosa qui eut lieu au Venezuela en 2003. En l’espèce, des agents de la garde nationale, une unité militaire, étaient intervenus dans le pénitencier Internado Judicial de Ciudad Bolivar lors d’une opération qui visait supposément à mater une mutinerie et qui fit sept morts et vingt-sept blessés. Bien que l’État eût reconnu partiellement sa responsabilité internationale, le tribunal interaméricain traita tout de même de la question de l’usage de la force dans le cadre de telles opérations.Footnote 33

Tout comme elle l’avait fait dans l’Affaire Roche Azaña et al. c Nicaragua abordée plus haut, la Cour considéra d’abord que l’usage de la force par les autorités ne se conformait pas aux principes de légalité, d’objectif légitime et de nécessité absolue, puisque l’État n’avait fourni aucune preuve quant au cadre législatif interne applicable à l’usage de la force lors de ce type d’opération, ni quant à l’objectif et la nécessité de celui-ci (paras. 96–97). De plus, l’État ne fournit aucun argument ou élément de preuve permettant de déterminer si les membres de la garde nationale avaient agi en légitime défense ou pour protéger la vie ou l’intégrité de tiers. La Cour conclut ainsi que le recours à la force était arbitraire puisqu’il n’y avait aucun indice au dossier à l’effet que les détenus aient résisté à l’intervention des forces de l’ordre (paras. 98–100).

Par ailleurs, la Cour réitéra que les fonctions de maintien de l’ordre, de garde et de surveillances de détenus doivent être assurées par des autorités civiles et non par les forces armées (paras. 101–11).Footnote 34 Ainsi, toute intervention militaire dans un établissement pénitencier devrait être exceptionnelle, temporaire et rendue strictement nécessaire par le contexte (para. 107). Toute intervention militaire devrait être supervisée par les autorités pénitentiaires, faire l’objet d’une réglementation stricte et être assujettie à un contrôle des autorités civiles compétentes (paras. 107–08). L’ensemble de ces conditions n’ayant pas été remplies en l’espèce, le tribunal considéra que le Venezuela devait être tenu responsable des violations du droit à la vie (art. 4) et à l’intégrité (art. 5) des victimes.

Affaire Mota Abarullo et al c Venezuela , Jugement du 18 novembre 2020, Série C, N o 417

Huit jours après la publication de son jugement dans l’Affaire Olivares Muñoz, commentée à l’instant, la Cour condamna à nouveau le Venezuela dans le cadre d’une autre affaire relative aux droits des détenus, ici portant plus particulièrement sur les conséquences de la gestion défaillante d’un établissement de détention pour adolescents qui fit l’objet d’un incendie mortel lors d’une mutinerie. Les faits remontent à 2005, alors que le Centro de Tratamiento y Diagnostico “Monseñor Juan Jose Bernal” faisait face à plusieurs problèmes majeurs, dont un manque important de personnel et d’espace, des mesures de sécurité défaillantes, l’absence d’un plan d’évacuation en cas d’urgence et de plan de prévention des incendies. De plus, certains mineurs y étaient détenus avec des adultes et les programmes éducatifs des enfants avaient été suspendus. Une mutinerie éclata suite à une querelle entre détenus, et quelques uns de ceux-ci mirent feu à l’établissement. Les services d’incendie qui intervinrent ne purent éteindre le feu à temps, faute d’équipement adéquat et les cinq victimes périrent dans l’incendie.

Bien que l’État du Venezuela ait reconnu en partie sa responsabilité, la Cour traita tout de même de certains aspects des violations des droits à la vie et à l’intégrité des victimes. Ce faisant, elle reprit plusieurs principes qu’elle avait elle-même établis dans la célèbre Affaire du Centre de rééducation pour mineurs c Paraguay décidée en 1999 et qui portait, malheureusement, sur des faits très similaires.Footnote 35 Dans un premier temps, elle rappela l’obligation fondamentale de séparer les mineurs des adultes, conformément à l’article 5.5 de la CADH, au principe du meilleur intérêt de l’enfant, à la Convention relative aux droits de l’enfant Footnote 36 et aux interprétations qu’en a fait le Comité de l’Organisation des Nations Unies sur les droits des enfants (paras. 82–84, 96). Ceci étant dit, elle indiqua que, dans certaines circonstances exceptionnelles les personnes atteignant la majorité alors qu’elles sont en détention peuvent être maintenues un certain temps dans un établissement pour mineurs, dans l’objectif d’assurer leur réadaptation effective (paras. 85–86).

Le tribunal considéra aussi que le drame avait été causé par les nombreuses défaillances dans la gestion de l’établissement et parce que l’État avait toléré une situation de risque prévisible qui, malheureusement, se matérialisa.Footnote 37 La Cour considéra que le Venezuela aurait facilement pu prévenir la tragédie en attribuant des ressources humaines et matérielles adéquates à l’établissement, en prévoyant des protocoles de prévention et de gestion des conflits entre les détenus, de même que des plans d’évacuation en cas d’urgence et des plans de prévention et de traitement des incendies (paras. 96–101).

Affaire Guzmán Albarracín et al c Équateur , Jugement du 24 juin 2020, Série C, N o 405

Dans le cadre le cette affaire équatorienne,Footnote 38 la Cour eut à traiter de la violence sexuelle à l’endroit des fillettesFootnote 39 et du droit à l’éducation.Footnote 40 Une enfant de seize ans subissait depuis des années des actes de harcèlement et d’abus sexuels de même que des viols de la part du directeur adjoint de son école, qui lui permettait par la suite de réussir des matières scolaires avec lesquelles elle avait des difficultés. Cette situation abusive était connue du personnel de l’école qui n’avait pris aucune mesure pour la protéger et avait plutôt tenté de camoufler la situation. Alors qu’elle était à l’école et avant de se présenter à une convocation des autorités de son établissement, la victime a consommé des médicaments en quantités dangereuses, laissant des lettres annonçant son suicide et dénonçant son abuseur. Bien au fait de cette situation et des risques que cela comportait, les autorités scolaires ont forcé la fillette à aller prier et n’ont convoqué la mère de celle-ci que plusieurs heures plus tard. La victime est décédée peu après, après avoir été ultimement conduite dans un établissement médical. Par la suite, les proches de la fillette ont tenté d’obtenir justice, en vain. En effet, alors que le directeur adjoint fut accusé, il ne fut jamais capturé, l’enquête criminelle a blâmé la victime à bien des égards et l’action pénale a finalement été prescrite.

Bien que l’État équatorien ait reconnu partiellement sa responsabilité, la Cour interaméricaine condamna l’Équateur à plusieurs égards. Elle considéra qu’en plus des abus et des viols, le harcèlement constituait une forme de violence contrevenant à la Convention interaméricaine pour la prévention, la sanction et l’élimination de la violence contre la femme (Convention Belém do Pará) (paras. 111, 132–33, 142–43) et que ces actes constituaient une forme de discrimination (paras. 113, 141–42).Footnote 41 Elle indiqua que les droits à l’intégrité personnelle et à la vie privée renvoient implicitement au droit à la liberté sexuelle et au contrôle de son propre corps (para. 109). Ces libertés peuvent être exercées sainement par les adolescents, dans la mesure où ils développent la capacité et la maturité pour ce faire, et reçoivent une éducation sexuelle adéquate abordant des concepts tels que le consentement préalable aux rapports sexuels et tels que l’abus d’autorité et les rapports d’autorité qui peuvent entraver ce consentement (paras. 129–40). Par ailleurs, elle rappela que l’État a l’obligation de prévenir les abus et les violences sexuelles en milieux scolaires, en supervisant les établissements d’éducation et en prévoyant des mécanismes simples et accessibles permettant aux victimes de porter plainte (paras. 117–20).

La Cour considéra que les autorités scolaires avaient non seulement failli à leur obligation de prévention et de protection, mais avaient également eu recours à des stéréotypes sexistes à l’endroit de la victime et l’avaient culpabilisée et revictimisée (paras. 188–95). Par ailleurs, en plus de conclure à des violations de la Convention Belém do Pará (art. 7) et aux droits à la vie (art. 4), à l’intégrité physique et morale (art. 5), à la vie privée (art. 11), à l’égalité (arts. 1, 24), aux garanties et à la protection judiciaires (arts. 8, 25), de même qu’aux garanties spéciales de protection à l’endroit des enfants (art. 19), prévus par la CADH, la Cour considéra que l’Équateur avait également contrevenu au Protocole additionnel à la Convention américaine relative aux Droits de l’Homme, traitant des droits économiques, sociaux et culturels (Protocole de San Salvador), qui garantit le droit à l’éducation (arts. 13, 19).Footnote 42 Cette décision intéressera entre autres les lecteurs/trices canadiens/nes qui se penchent sur les politiques de prévention du harcèlement et des abus sexuels applicables en milieux académiques, un enjeu d’actualité au Québec et ailleurs au Canada.Footnote 43

Affaire des employées de la fabrique de feux dartifice de Santo Antônio de Jesus c Brésil , Jugement du 15 juillet 2020, Série C, N o 407

En décembre 1998, une usine de feux d’artifice a explosé dans l’état de Bahia, au Brésil, tuant soixante employés et en blessant six autres. La majorité d’entre elles étaient des femmes et des enfants d’ascendance africaine, en situation de pauvreté et de faible niveau d’instruction. Les installations et les conditions de travail étaient particulièrement précaires et les victimes gagnaient un très faible salaire. Suite à l’incident, les survivantes n’ont pas reçu de soins médicaux adéquats. De plus, en date du jugement, les procédures judiciaires locales (en droit criminel, droit civil ou droit du travail), étaient toujours en cours, sans que les victimes aient pu obtenir justice et réparation.

Ici, bien que les dommages aux victimes fussent causés par les installations d’une personne privée, la Cour considéra tout de même responsable l’État brésilien du fait que ce dernier aurait dû réglementer et superviser ce type d’activité économique dangereuse. Nonobstant le fait que l’entreprise avait obtenu les permis nécessaires à ce type de production, la réglementation applicable exigeait la tenue d’inspections périodiques qui n’avaient jamais eu lieu en l’espèce. La Cour conclut donc que les omissions des agents étatiques avaient causé la mort et les blessures graves des victimes, en contravention de l’obligation de garantir le droit à la vie (art. 4), à l’intégrité physique et morale (art. 5) et celle d’adopter des mesures spéciales pour assurer la protection des enfants (art. 19; paras. 115–39).

Par ailleurs, le tribunal interaméricain considéra que l’État avait failli à son obligation d’assurer des conditions de travail satisfaisantes aux victimes, en particulier dans le cadre de ce type d’activité économique dangereuse. Ici, la Cour prit en compte non seulement les conditions précaires et insalubres auxquelles les victimes étaient exposées, mais également l’absence de mesures préventives et d’inspections de la part des agents étatiques (paras. 175–76). De même, elle constata les multiples violations à la réglementation brésilienne applicable qui interdit le travail infantile nocturne, dangereux ou insalubre.Footnote 44 La Cour conclut donc à une violation de l’article 26, qui oblige les États à adopter des mesures pour garantir les droits économiques, sociaux et culturels, qu’elle interpréta comme comprenant implicitement l’obligation d’assurer des conditions équitables et satisfaisantes pour garantir le droit à la santé, l’hygiène et à la sécurité des travailleuses (paras. 148–74).Footnote 45

Enfin, notons que les juges interaméricains considérèrent que les victimes avaient également fait l’objet de discrimination intersectionnelle et structurelle,Footnote 46 étant exposées à une situation de pauvreté particulière résultant de leur genre et de leurs origines africaines, de même que, dans certains cas, de leur situation de femmes enceintes, toutes sans alternatives d’emploi, qui les exposèrent à une vulnérabilité particulière (paras. 182–203).Footnote 47

Affaire Spoltore c Argentine , Jugement du 9 juin 2020, Série C, N o 404

De la même manière, la Cour eut à se prononcer sur une autre affaire portant sur des allégations de violations dans un contexte de droit du travail. En l’espèce, la victime, un employé d’une entreprise privée, avait fait deux infarctus qui l’avaient laissé fortement diminué. Après avoir pris sa retraite et recevant une pension, il présenta un recours contre son ancien employeur devant le Tribunal du travail, alléguant que les deux infarctus avaient été dus à son emploi. Sa demande fut rejetée neuf ans plus tard, et son recours à la Cour suprême fut également débouté.

Comme elle l’avait fait par le passé, et bien que le demandeur n’y avait pas fait référence initialement à la CIDH, la Cour aborda l’obligation de l’État de garantir le droit à des conditions de travail adéquates et à la santé et sécurité au travail non seulement sous l’angle du droit aux garanties judiciaires et à la protection judiciaire (arts. 1, 8, 25), mais également sous celui de l’article 26 qui porte sur l’obligation qu’ont les États d’adopter des mesures progressives pour assurer la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels. Rappelons que, dans l’Affaire Lagos del Campo c Pérou, l’Affaire des travailleurs de Petroperú et autres c Pérou et l’Affaire San Miguel Sosa et al c Venezuela, la Cour avait considéré que l’article 26 devait être interprété comme assurant le droit à la sécurité dans l’emploi.Footnote 48

Bien que l’État argentin reconnut sa responsabilité quant à la violation du droit à la protection et aux garanties judiciaires de la victime (en raison du délai excessif dans l’adoption de la décision du Tribunal du travail), la Cour réitéra à ce sujet l’existence et la reconnaissance du droit au travail et détermina que celui-ci inclut comme composantes importantes le droit à des conditions de travail adéquates et à la santé et sécurité au travail, ainsi que le droit à l’accès à la justice tel qu’abordé dans l’affaire précédente (paras. 82–102).Footnote 49 Elle indiqua cependant que, puisque les recours initiés par la victime visaient l’octroi d’une indemnisation et ne constituait ni un recours pénal, ni un recours administratif de caractère punitif ou pouvant résulter en la privation de liberté, les garanties prévues à l’article 8.2 de la CADH ne pouvaient être applicables en l’espèce. Le tribunal interaméricain refusa ainsi de considérer l’Argentine responsable d’une violation du “droit d’interjeter appel du jugement devant un tribunal supérieur” (art. 8.2.h) (paras. 104–05).Footnote 50 Cette approche semble cependant difficilement réconciliable avec certaines décisions antérieures à l’effet que les garanties judiciaires prévues à l’article 8.2 de la CADH ne se limitent pas aux seules procédures pénales mais s’appliquent également, dans la mesure du possible, à tout processus de nature administrative ou judiciaire susceptible d’affecter la réalisation des droits de la personne en faisant l’objet.Footnote 51

Il est intéressant de noter que la Cour indiqua que l’article 26 de la CADH doit être interprété comme garantissant le droit à des conditions de travail adéquates et à la santé et sécurité au travail,Footnote 52 ce qui inclut l’obligation de prévenir les accidents et les maladies professionnelles prévisibles (para. 99) et de garantir des recours effectifs aux victimes de ceux-ci (paras. 97, 102). Ainsi, elle conclut que les retards excessifs dans la résolution du recours présenté par la victime au Tribunal du travail constituaient également une violation de l’article 26. Probablement pour éviter d’agir comme une quatrième instance,Footnote 53 la Cour n’expliqua pas cependant si elle considérait que l’État aurait dû reconnaître ce type de problème de santé (les deux infarctus) comme un accident ou une maladie professionnelle prévisible qui aurait dû faire l’objet de mesures correctives ou préventives, ce qui semble être une détermination complexe à mener.

Rappelons qu’au Québec, “[l]a jurisprudence reconnaît généralement que des efforts accomplis au travail peuvent, dans certaines circonstances, être à l’origine d’une lésion cardiaque ou précipiter une condition personnelle préexistante et constituer un accident du travail. Les efforts doivent être excessifs, importants, inhabituels, intenses, exceptionnels, soutenus, anormaux ou particuliers. Il est aussi reconnu que des éléments tels un stress important et des températures extrêmes peuvent être à l’origine d’un infarctus ou d’un syndrome coronarien aigu.”Footnote 54

Affaire Petro Urrego c Colombie , Jugement du 8 juillet 2020, Série C, N o 406

Ce jugement porte sur la très controversée destitution de l’ancien maire de Bogota, Petro Urrego. La victime, un ex-guerillero devenu politicien très populaire, remporta les élections municipales de Bogota en octobre 2011 et devint maire de la capitale colombienne. Dans le cadre d’une polémique entourant l’octroi à une entreprise publique de contrats portant sur la collecte des ordures dans la métropole, le bureau procureur (Procuraduria) de la ColombieFootnote 55 adopta, en décembre 2013, une mesure disciplinaire qui destituait la victime, invoquant divers motifs dont la mauvaise gestion de fonds publics et des dommages à l’environnement. Il ordonna également l’inéligibilité de Urrego pour toute fonction publique pour une durée de quinze ans. En janvier 2014, la salle disciplinaire du bureau du procureur rejeta les divers recours entamés par la victime et confirma la destitution de celle-ci.

En mars 2014, la CIDH adopta des mesures conservatoires demandant à la Colombie de suspendre la destitution, considérant que celle-ci constituait une violation prima facie des droits politiques de la victime et rendrait sans objet la pétition P-1742-13 en cours d’instruction par la CIDH.Footnote 56 Au lendemain de l’adoption de ces mesures, le Président Juan Manuel Santos passa un décret présidentiel confirmant la destitution de la victime et nommant le ministre du travail de l’époque comme maire intérimaire. Quelques semaines plus tard, le tribunal des contentieux administratifs du Conseil d’État ordonna néanmoins la suspension de la destitution. En novembre 2017, ce dernier déclara nulles les sanctions disciplinaires ordonnées par le procureur, exigea le paiement rétroactif des salaires non perçus par la victime et encouragea le gouvernement, le congrès et le bureau procureur à réformer les compétences de ce dernier en matière de sanction des élus. Urrego, quant à lui, put ainsi terminer son mandat de maire.Footnote 57

Dans son jugement, la Cour interaméricaine réitéra que les sanctions administratives restreignant l’exercice des droits politiques d’un fonctionnaire public élu démocratiquement sont incompatibles avec l’article 23 de la CADH (paras. 96–98, 111–15, 135).Footnote 58 Elle considéra que la décision de novembre 2017 ne permettait pas de remédier entièrement aux préjudices subis par la victime, notamment en ce qui a trait à la période pendant laquelle la suspension fut effective (paras. 108–35). De plus, le tribunal jugea que la suspension d’Urrego avait également affecté les droits des personnes qui avaient voté pour lui (paras. 92, 96, 100, 108, 116, 135).Footnote 59 Il constata enfin que les lois, codes et réglementations colombiennes qui avaient permis ce type de sanction étaient encore applicables et que le procureur disposait des mêmes facultés disciplinaires à l’endroit des élus, en contravention des articles 2 et 23 de la CADH (paras. 115–17, 136).

De façon similaire, la Cour considéra que les procédures disciplinaires à l’endroit de la victime étaient contraires au droit aux garanties judiciaires de la victime. Plus particulièrement, le tribunal interaméricain considéra le processus disciplinaire contraire au principe d’impartialité, puisqu’une même entité administrative, le bureau du procureur, est chargé simultanément des fonctions d’enquête, d’adjudication et de sanction (paras. 129–30, 137). La Cour interaméricaine jugea que la sanction violait également le droit au juge naturel, puisque la sanction et la révision de celle-ci avaient été menées par une autorité administrative et non par un juge compétent (paras. 132–37).Footnote 60

Il sera très intéressant de suivre la mise en œuvre de ce jugement et de voir si et comment l’État colombien réformera le fonctionnement du bureau du procureur. Cette décision s’inscrit dans une série d’affaires où la Cour fut amenée à se prononcer sur la “conventionalité” de mesures administratives, législatives ou judiciaires qui ont marqué les processus électoraux et l’ordre démocratique de certains pays de l’hémisphère.Footnote 61 Rappelons à ce sujet que la CIDH a été saisie, de façon similaire, d’une affaire portant sur la destitution de l’ancienne présidente du Brésil, Dilma Rousseff, qui eut lieu à la fin août 2016.Footnote 62

Affaire Urrutia Laubreaux c Chili , Jugement du 27 août 2020, Série C, N o 409

En 2004, le juge chilien Urrutia Laubreaux compléta un diplôme portant sur la protection des droits humains et les processus de démocratisation, lors duquel il avait signé un essai suggérant que le pouvoir judiciaire chilien devait adopter une série de mesures de réparation en réponse au rôle joué par celui-ci dans le cadre de certaines violations commises sous le régime Pinochet. La même année, la Cour d’appel de La Serena adopta à son encontre une mesure disciplinaire de censure en vertu du Code organique des tribunaux, considérant que l’essai du juge constituait une critique excessive des actions de ses supérieurs hiérarchiques. La victime fit appel à la Cour suprême du Chili qui, en 2005, confirma la réprimande, mais en réduit la sanction à un avertissement de nature privée. Elle ordonna cependant que celle-ci apparaisse définitivement au curriculum vitae de la victime. Finalement, conformément aux recommandations de la CIDH dans son rapport sur le fond de la présente affaire,Footnote 63 la Cour suprême annula la sanction à l’endroit de la victime en 2018.

Dans son jugement, la Cour interaméricaine considéra d’abord que les sanctions imposées au juge Urrutia Laubreaux violaient son droit à la liberté d’expression. Elle indiqua que l’exercice de ce droit par les juges peut être assujetti à certaines restrictions, en fonction du message exprimé et des circonstances de chaque affaire, devant être analysées au cas par cas (paras. 75–82). Rappelons que le tribunal avait déjà traité de ce sujet dans l’affaire Lopez Lone c Honduras. Footnote 64 En l’espèce, la Cour jugea que la sanction imposée à la victime était inadéquate puisqu’elle portait sur un travail académique de nature générale et non pas sur une affaire contentieuse en particulier (para. 89). Par ailleurs, bien que le tribunal interaméricain considérât que la Cour suprême chilienne avait judicieusement appliqué le contrôle de conventionalité en suspendant la sanction en 2018, il conclut néanmoins que celle-ci viola les droits de la victime les treize années qui précédèrent, en contravention de l’article 13 de la CADH (paras. 94, 95).

La Cour interaméricaine considéra également que, puisque la victime n’avait jamais été préalablement notifiée de l’initiation des procédures disciplinaires à son endroit et qu’elle n’avait pas eu l’occasion de présenter une défense à cet égard, l’État avait violé son droit aux garanties judiciairesFootnote 65 (arts. 8.2.b, 8.2.c) (paras. 115, 117). De même, pour le tribunal interaméricain, la participation active de certains ministres chiliens dans le processus avait été telle qu’elle portait atteinte à l’impartialité du contrôle judiciaire effectué quant au processus disciplinaire (art. 8.1) par les autorités judiciaires (paras. 120–24). Enfin, il jugea que les dispositions du Code organique des tribunaux appliquées en l’espèce ne respectaient pas le principe de légalité (art. 9). En effet, l’interdiction d’“attaquer sous toute forme que ce soit” la conduite d’autres juges ou magistrats, constituait une norme trop vague, accordant trop de discrétion aux autorités disciplinaires et laissant place à de possibles appréciations arbitraires (paras. 134–38).Footnote 66 Notons que cette affaire est représentative des pressions exercées sur le juge Urrutia Laubreaux à divers niveaux, en raison de sa posture ouvertement favorable à la protection des droits humains, entre autres dans le contexte de la contestation sociale qui divise la société chilienne depuis plusieurs mois déjà.Footnote 67

Les Affaires des procureurs provisoires ou délégués (laffaire Martínez Esquivia c Colombie , Jugement du 6 octobre 2020, Série C, N o 412; laffaire Casa Nina c Pérou , Jugement du 24 novembre 2020, Série C, N o 419)

En 2020, la Cour interaméricaine eut à se pencher à deux reprises sur la question de la stabilité des mandats de magistrats au sein de l’appareil judiciaire, plus particulièrement quant au mandat de procureur délégué en Colombie et de procureur provisoire au Pérou.Footnote 68 Dans le premier cas, la victime avait été nommée à titre de procureure déléguée, un poste sans stabilité d’emploi, pendant une période de douze ans avant que le Procureur général de Colombie adopte une résolution abolissant, sans fournir de motif, la nomination de la magistrate. Dans le deuxième cas, le Procureur général du Pérou avait mis fin au mandat de la victime en raison des besoins de la magistrature et du caractère temporaire des nominations de procureur provisoire. La Cour interaméricaine put ainsi réitérer les principes qu’elle avait établis dans les Affaires du Tribunal Constitutionnel et l’Affaire de la Cour Suprême de Justice d’Équateur relativement à l’importance du principe de la stabilité des mandats des juges et des magistrats pour assurer l’indépendance de leur fonction (respectivement aux paras. 94–99 et aux paras. 69, 78–82).

Dans l’affaire colombienne, le tribunal interaméricain indiqua que ce principe exige que (1) la terminaison du mandat résulte de l’atteinte de la durée maximale du mandat tel que prévu par la loi ou obéisse à des conditions fixées préalablement et suivant une procédure conforme aux garanties judiciaires; (2) les magistrats ne puissent être révoqués que pour incompétence ou manquement grave à la discipline et (3) toutes les procédures contre les magistrats soient résolues par procédures justes, objectives et impartiales conformément à la Constitution ou à la loi. En effet, toute forme de révocation discrétionnaire des magistrats laisse présager un risque réel et objectif quant à l’exercice des fonctions judiciaires sans crainte de représailles (paras. 72, 80, 95). En l’espèce, le caractère provisoire de la nomination de la victime comme magistrate n’était assujetti à aucune condition prévisible ou délai maximal, ne permettait aucune stabilité du mandat de la magistrate et avait été mené sans que des motifs soient rendus, en contravention du principe d’indépendance du pouvoir judiciaire (art. 8.1) (paras. 84–96).

Dans l’affaire péruvienne, le Procureur de la nation avait mis fin au mandat du magistrat provisoire sans que ce soit en vertu d’un processus disciplinaire ou de sanction ou en vertu du remplacement du magistrat provisoire par un magistrat permanent ou ayant une priorité d’emploi (paras. 101–03). Encore une fois, la Cour interaméricaine considéra que le Procureur de la nation avait agit de façon arbitraire en contravention du principe d’indépendance du pouvoir judiciaire (art. 8.1; paras. 104–17).

Avis Consultatif no 26 portant sur la dénonciation de la Convention américaine relative aux Droits de l’Homme et de la Charte de l’Organisation des États américains et ses effets sur les obligations étatiques en matière de protection des droits humains , 9 novembre 2020, Série A, N o 26

En réponse à une demande d’avis consultatif présentée par la Colombie, la Cour interaméricaine se prononça sur trois questions relatives à la dénonciation de la CADH et de la Charte de l’OÉA. En ce qui a trait à la première, portant sur l’étendue des “obligations internationales en matière de droits humains d’un État membre de l’Organisation des États américains qui a dénoncé la Convention américaine des droits de l’homme,” la Cour rappela les conditions procédurales à une telle dénonciation, à savoir (1) que l’État concerné ait été partie au traité pendant au moins cinq ans et (2) qu’il notifie le Secrétaire général de l’OÉA un an avant d’effectuer celle-ci (art. 78).Footnote 69 Par ailleurs, l’intention de dénoncer la Convention ne peut être présumée ou inférée, mais doit, au contraire, être expresse et faite de façon formelle, conformément à la procédure prévue à l’article 78 (paras. 60–61).

Le tribunal indiqua que, bien que la CADH ne prévoie aucune procédure de droit interne préalable à la dénonciation, la législation de la plupart des parties exige que cela soit approuvée antérieurement par le pouvoir législatif. À ce sujet, il rappela que, considérant l’importance des conséquences d’une telle mesure, la démarche devrait minimalement faire l’objet d’un débat public, pluraliste et transparent, et pourrait suivre une procédure juridique interne semblable à celle préalable à l’adhésion ou à la ratification de la convention (para. 64).

Il est intéressant de noter que, selon la Cour, une attention particulière devraient être portée aux dénonciations menées dans “des situations ou circonstances particulièrement graves, qui pourraient porter atteinte à la stabilité démocratique, à la sécurité et à la paix dans l’hémisphère, ou qui pourraient entraîner une atteinte généralisée aux droits humains, telles que: (1) un désaccord avec une décision prise par un organisme de protection et motivé par une intention manifeste de violer les obligations qui y sont prévues; (2) une situation où des droits ont été suspendus indéfiniment ou qui menace des droits non susceptibles de dérogation; (3) un contexte de violations graves, massives ou systématiques; (4) un contexte d’érosion progressive des institutions démocratiques; (5) une situation de troubles ou de rupture inconstitutionnelle de l’ordre démocratique; et/ou (6) en cas de conflit armé” (paras. 73, 113).

Enfin, le tribunal indiqua que, lorsqu’un État dénonce la CADH, plusieurs de ses obligations internationales en matière de protection des droits humains persistent. Ainsi (1) ses obligations conventionnelles persistent pendant la période de transition d’un an prévue à l’article 78; (2) la dénonciation définitive de la convention ne produit aucun effet rétroactif; (3) les obligations établies par la ratification d’autres traités interaméricains demeurent effectives; (4) la dénonciation définitive de la convention n’invalide pas l’effectivité nationale des principes dérivés des préceptes conventionnels interprétés comme normes destinées à la prévention des violations des droits humains; (5) les obligations associées au seuil minimum de protection par la Charte de l’OÉA et la Déclaration américaine des Droits et Devoirs de l’Homme restent assujetties à la supervision de la CIDH;Footnote 70 et (6) les normes coutumières, celles dérivées des principes généraux de droit international et celles relevant du jus cogens persistent en vertu du droit international général (paras. 66–110, 115).

En ce qui a trait à la seconde question portant sur “les obligations d’un État Membre de l’OÉA qui n’est pas partie à la Convention américaine et qui dénonce la Charte de l’Organisation,” la Cour rappela, une fois de plus, la procédure de dénonciation applicable, telle que dictée par l’article 143 de l’instrument constitutif qui exige que la dénonciation soit notifiée au Secrétaire général de l’OÉA deux ans avant celle-ci. De plus cette disposition précise qu’au terme de cette période, les effets “de la Charte prendront fin pour l’État qui l’aura dénoncée et celui-ci cessera d’être lié à l’Organisation après avoir rempli toutes les obligations découlant de la présente Charte.”

Ainsi, pour le tribunal interaméricain, (1) les obligations en matière de droits humains découlant de la Charte de l’OÉA restent inchangées pendant la période de transition de deux ans; (2) la dénonciation définitive de la Charte de l’OÉA ne produit aucun effet rétroactif; (3) l’État dénonciateur doit encore se conformer aux obligations découlant des décisions des organes de protection du système interaméricain qui restent en vigueur jusqu’à leur mise en œuvre définitive; (4) l’État dénonciateur doit également respecter les traités interaméricains ratifiés et non dénoncés; et (5) l’État continue d’être lié par les normes coutumières, celles découlant des principes généraux du droit et celles relatives au jus cogens et, en outre, il doit respecter les obligations inhérentes à la Charte des Nations Unies (paras. 147–57, 161).

Enfin, en ce qui a trait à la troisième question posée, portant sur “les obligations que des États membres de l’OÉA ont à l’égard des États des Amériques qui ont dénoncé la Convention relative aux droits de l’homme et la Charte,” la Cour précisa que ceux-là doivent dans un premier temps présenter leurs observations ou objections relatives à la dénonciation en temps opportun. Ils doivent aussi s’assurer que l’État dénonciateur ne se considère pas affranchi de ses obligations qui persistent après la dénonciation. Ils doivent également coopérer entre eux non seulement pour encourager l’État dénonciateur à se joindre à nouveau à l’OÉA, mais aussi pour lutter contre l’impunité en enquêtant et en poursuivant les violations graves des droits humains et en respectant les droits des demandeurs d’asile en provenance de l’État dénonciateur en plein respect du principe de non-refoulement (paras. 162–74).

Il est particulièrement intéressant de noter qu’au passage, la Cour indiqua que, lorsqu’en vertu de sa compétence de supervision de la mise en œuvre de ses arrêts et des mesures provisoires ordonnées, elle informe l’Assemblée générale de l’OÉA des cas de non-respect de ses décisions, conformément à l’article 65 de la CADH,Footnote 71 et donc qu’un mécanisme ou système devrait être mis en branle par les États parties à la CADH pour promouvoir le plein respect des ordonnances de la Cour, notamment en matière de réparations en faveur des victimes (paras. 167–68). Ce message à peine voilé, envoyé aux États parties, semble proposer l’établissement d’une procédure plus stricte de supervision de la mise en œuvre des jugements de la Cour, comme c’est le cas de la procédure existant au Comité des Ministres du Conseil de l’Europe au sein du Système européen de protection des droits humains.Footnote 72

Cet avis est d’une importance capitale pour le Système interaméricain, puisque la question de la dénonciation de la CADH ou de la Charte de l’OÉA, ou la menace de ce faire, est un enjeu récurrent à l’OÉA.Footnote 73 Rappelons, en effet, la dénonciation de la convention par Trinité et Tobago en 1998, suite à une série de critiques interaméricaines à son encontre relativement à sa tolérance de la peine de mort.Footnote 74 Mentionnons également la tentative de dénonciation de la compétence obligatoire de la Cour par le président péruvien Alberto Fujimori, en 1999, suite à une série de décisions de la Cour très critiques à l’endroit de son gouvernement.Footnote 75 Pensons enfin aux menaces de dénonciation formulées par la République Dominicaine, l’Équateur, la Bolivie ou le Nicaragua, suite à des jugements de la Cour critiques à leur endroit. Ceci étant dit, il va sans dire que cet avis traite, en filigrane, de la dénonciation de la convention faite en 2012 par leVenezuela,Footnote 76 rival idéologique régional de la Colombie qui—rappelons-le—en a présenté la demande d’avis consultatif au tribunal interaméricain. En effet, le Venezuela menace de quitter l’OÉA depuis plusieurs années.Footnote 77

Conclusion

En plus des décisions abordées précédemment, rappelons qu’en 2020, la Cour adopta également une série de jugements portant plus généralement sur le droit aux garanties judiciaires,Footnote 78 sur les réparations pour disparitions forcées,Footnote 79 de même que sur les enquêtes criminelles menées au sein des forces arméesFootnote 80 et que nous n’aborderons pas ici.

Il convient de remarquer qu’en 2020, un nombre croissant d’affaires contentieuses ont fait l’objet d’une reconnaissance totale ou partielle de responsabilité internationale de la part d’États défendeurs, ce qui semble indiquer une nouvelle tendance de la Cour visant à solutionner les litiges à l’amiable et de gérer ceux-ci avec plus d’efficacité, en concentrant les efforts du tribunal sur des enjeux de fonds plutôt que sur des déterminations factuelles. Notons enfin que plusieurs jugements, entre autres portant sur l’adjudication d’allégations de violations de droits économiques, sociaux, culturels et environnementaux, ont fait l’objet d’importantes dissidences et ont divisé le banc, ce qui pourrait suggérer que la doctrine proposée par la majorité de la Cour reste encore à consolider.

Des décisions des plus importantes et intéressantes sont prévues pour 2021, dont l’Affaire Vicky Hernández et al. c Honduras,Footnote 81 portant sur les droits des personnes trans, et l’Affaire Guachalá Chimbo et al. c Équateur Footnote 82 portant sur le droit à la santé dans le domaine psychiatrique. Rappelons enfin que la Cour pourrait également rendre son avis consultatif très attendu portant sur “L’étendue des obligations des États, en vertu du système interaméricain, sur les garanties de la liberté syndicale, leur relation avec d’autres droits et leur application dans une perspective de genre.”

References

1 L’Organisation des États Américains (OÉA) est une organisation internationale régionale au sens de l’art 52 de la Charte des Nations Unies, 26 juin 1945, 1 RTNU 16, 59 Stat 1031, TS 993, 3 Bevans 1153 (entrée en vigueur: 24 octobre 1945), qui regroupe les États suivants: Antigua-et-Barbuda, Argentine, Les Bahamas, Barbade, Belize, Bolivie, Brésil, Canada, Chili, Colombie, Costa Rica, Cuba, Dominique, Équateur, El Salvador, États-Unis, Grenade, Guatemala, Guyana, Haïti, Honduras, Jamaïque, Mexique, Nicaragua, Panama, Paraguay, Pérou, République dominicaine, Saint-Kitts-et-Nevis, Saint-Vincent-et-les-Grenadines, Sainte-Lucie, Suriname, Trinité-et-Tobago, Uruguay, Venezuela.

2 Cavallaro, Voir James L et al, Doctrine, Practice, and Advocacy in the Inter-American Human Rights System, New York, Oxford University Press, 2019 Google Scholar.

3 Convention américaine relative aux Droits de l’Homme, 22 novembre 1969, 1144 RTNU 123, OASTS n˚ 36 [CADH].

4 Voir par ex Charte de l’Organisation des États Américains, 30 avril 1948, 119 RTNU 3, modifiée par 721 RTNU 324, OASTS n˚ 1-A, par OASTS n˚ 66, 25 ILM 527, para 1-E Rev Doc off OEA/Ser.A/2 Add. 3 (SEPF), 33 ILM 1005 et para 1-F Rev Doc off OEA/Ser.A/2 Add.4 (SEPF), 33 ILM 1009 [Charte OÉA]; Déclaration américaine des Droits et Devoirs de l’Homme, 1948, Res XXX, Final Act, Ninth International Conference of American States, Doc off OEA/ Ser.L/V/II.23/Doc.21, rev 6 (1979) [Déclaration américaine]; Protocole additionnel à la Convention américaine relative aux Droits de l’Homme traitant des droits économiques, sociaux et culturels, 17 novembre 1988, OASTS n˚ 69 [Protocole de San Salvador]; Convention interaméricaine pour la prévention et la répression de la torture, 9 décembre 1985, OASTS n˚ 67 [Convention de la torture]; Convention interaméricaine sur la disparition forcée des personnes, 9 juin 1994, 33 ILM 1429.

5 OÉA, Cour interaméricaine des Droits de l’Homme, Annual Report of the Inter-American Court of Human Rights (2020) à la p 32, en ligne: <www.corteidh.or.cr/docs/informe2020/ingles.pdf>.

6 OÉA, Commission interaméricaine des Droits de l’Homme (CIDH), Annual Report of the Inter-American Commission on Human Rights 2020 aux pp 232–34, en ligne: <www.oas.org/en/iachr/docs/annual/2020/FB/Default.html#p=22>.

7 Sur les antécédents de cette affaire, voir Bernard Duhaime et Ariel E Dulitzky, “Chronique de la jurisprudence du Système Interaméricain des Droits de l’Homme” (2006) 19:2 RQDI 331 aux pp 334 et s.

8 Voir à ce sujet Bernard Duhaime et Éloïse Ouellet-Décoste, “De Genève à San José: Les normes de l’OIT et le Système interaméricain de protection des droits humains” (2020) 159:4 Intl Labour Rev 585 aux pp 594 et s.

9 Sur cette question spécifique, voir aussi Affaire de la communauté autochtone Sawhoyamaxa c Paraguay (2006), Cour IDH (Sér C) no 146 [Affaire Sawhoyamaxa].

10 Affaire des peuples Kaliña et Lokono (Suriname) (2015), Cour IDH (Sér C) no 309. Voir aussi Bernard Duhaime et Elise Hansbury, “Les développements en droit interaméricain pour l’année 2015” (2015) 53 ACDI 328 aux pp 347 et s.

11 Obligations de l’État en relation avec l’environnement dans le contexte de la protection et de la garantie des droits à la vie et à l’intégrité personnelle – interprétation et portée des articles 4(1) et 5(1) de la Convention américaine des Droits de l’Homme, Avis consultatif OC-23/17 (2017), Cour IDH (Sér A) no 23 [Obligations de l’État]. Sur la question plus générale du droit à de la consultation préalable, voir Affaire du peuple Saramaka c Suriname (2007), Cour IDH (Sér C) no 172; Affaire de la communauté autochtone Kichwa de Sarayaku c Équateur (2012), Cour IDH (Sér C) no 245; Affaire Communauté Garifuna de Punta Piedra c Honduras (2015), Cour IDH (Sér C) no 304; Affaire Communauté Garifuna Triunfo de la Cruz c Honduras (2015), Cour IDH (Sér C) no 305. Voir aussi Cour IDH, Cuadernillo de Jurisprudencia de la Corte Interamericana de Derechos Humanos N° 11: Pueblos Indígenas y Tribales, San José, 2018 aux pp 135 et s.

12 Voir aussi à ce sujet Obligations de l’État, supra note 11.

13 Sur le droit à l’eau voir aussi CIDH, Rapport Annuel, ch IV.A, “Accès à l’eau dans les Amériques: Une introduction au droit à l’eau au sein du système inter-américain de droits humains”, 2015, en ligne: <www.oas.org/en/iachr/docs/annual/2015/doc-en/InformeAnual2015-cap4A-agua-EN.pdf>; Affaire de la communauté autochtone Yakye Axa c Paraguay (2005), Cour IDH (Sér C) no 125 aux paras 137, 161–162, 167, 175; Affaire Sawhoyamaxa, supra note 9 aux paras 73, 178; Affaire de la communauté Xákmok Kásek c Paraguay (2010), Cour IDH (Sér C) no 214 aux paras 187, 194–217.

14 Voir aussi Affaire des communautés afro-colombiennes déplacées du bassin de la rivière Cacarica (Colombie) (Affaire de l’opération Genesis) (2013), Cour IDH (Sér C) no 270 aux paras 323 et s; Affaire Sawhoyamaxa, supra note 9 au para 155.

15 Voir à ce sujet Obligations de l’État, supra note 11. Rappelons à ce sujet que le Protocole de San Salvador, supra note 4, ne prévoit pas expressément le droit à l’eau.

16 Sur la contribution de cette décision au droit international de l’environnement, voir Juan Jorge Faundes Peñafiel, Cristobal Carmona Caldera et Pedro Pablo Silva Sánchez, “The Inter-American Court of Human Rights: Environmental, Cultural Identity and Consultation Law Hermeneutics in Light of the Case ‘Lhaka Honhat (Nuestra Tierra) vs. Argentina (2020)’” (2020) 5:2 Brazilian J Public Policy 330; Osvaldo de la Fuente, “Comentario a la sentencia de la Corte Interamericana de Derechos Humanos en el caso Comunidades Indígenas Miembros de la Asociación Lhaka Honhat (Nuestra Tierra) vs Argentina” (2020) 25:2 Revista Discusiones 147; Claudio Iglesias Darriba, “Derecho a un ambiente sano: Corte IDH: Caso Comunidades Indígenas Miembros de la Asociación Lhaka Honhat (Nuestra Tierra) vs Argentina. Fondo, Reparaciones y Costas. Sentencia de 6 de febrero de 2020. Serie C no 400” (2020) 4 Revista Debates sobre Derechos Humanos 179; Eugenia D’Angelo et Lucas Mantelli, “Avances en materia de DESCA en relación con los pueblos originarios: Comentarios a la sentencia ‘Lhaka Honhat vs Argentina’ de la Corte Interamericana de Derechos Humanos” (2019) 5:14 Cuaderno Jurídico y Político 77; Ana Maria d’Èvila Lopes, “The Protection of the Right to the Environment in the Nuestra Tierra vs Argentina: The Activism of the Inter-American Court of Human Rights” (2020) 34:3 Revista Justiça Direito 35; Liliana Ronconi et María Barraco, “The Consolidation of the Economic, Social and Cultural Rights in the Inter-American Court of Human Rights: Considerations in Light of the Case Lhaka Honhat vs. Argentina” (2021) 50 Revista de la Facultad de Derecho 1; Margret Carstens, “‘Lhaka Honhat Association v. Argentina’: Landmark Decision on Direct Justiciability of Article 26 ACHR and the Autonomous Right to a Healthy Environment” (2021) 53:4 VRÜ Verfassung und Recht in Übersee 492.

17 Voir à ce sujet Timothé Matte-Bergeron, “Coastal GasLink: tensions encore vives en territoire wet’suwet’en,” Radio-Canada, 5 février 2021, en ligne: <ici.radio-canada.ca/recit-numerique/1675/wetsuweten-coastal-gaslink-gazoduc-conflit-chefs-hereditaires-autochtones-grc>.

18 Voir également à ce sujet Klever Humberto Morales Bravo et Jorge Luis Lara Farfán, “Caso 12.854. Corte interamericana de derechos humanos, Caso Acosta Martínez y otros vs. Argentina:-Análisis de los derechos a la vida (art. 4.1), integridad personal (art. 5.1), libertad personal (art. 7.2), igualdad y no discriminación (art. 24) de la Convención Americana sobre Derechos Humanos,” Licence en droit, Universidad San Gregorio de Portoviejo, 2021.

19 La Cour a également abordé brièvement, au para 83, la question de l’ambigüité de la norme de droit criminel sous l’angle du principe de légalité, garanti par l’article 9 de la CADH, supra note 3. Voir à ce sujet Affaire Baena Ricardo et al (Panama) (2001), Cour IDH (Sér C) no 72 [Affaire Baena Ricardo]. Voir aussi Habeas Corpus in Emergency Situations, Avis consultatif OC-8/87 (1987), Cour IDH (Sér A) nº 8.

20 Voir à ce sujet CIDH, Report n° 66/06, Case 12.001, Simone André Diniz (Brazil), López-Álvarez c Honduras (Sér C) nº 141. Voir plus généralement Bernard Duhaime, “Vers une Amérique plus égalitaire? L’interdiction de la discrimination et le système interaméricain de protection des droits de la personne” dans Ludovic Hennebel et Hélène Tigroudja, dir, Le particularisme interaméricain des droits de l’homme, Paris, Pedone, 2009, 151.

21 Voir par exemple Joan Bryden, “Inuk MP’s Account of Racial Profiling in Commons ‘Unacceptable’: Miller,” National Observer (16 juin 2021), en ligne: <www.nationalobserver.com/2021/06/16/news/inuk-mp-racial-profiling-commons-miller-Nunavut-NDP>. Voir aussi Romain Schué, “Les Noirs, les Autochtones et les Arabes fortement discriminés par le SPVM,” Radio-Canada (31 mai 2000), en ligne: <ici.radio-canada.ca/nouvelle/1334763/montreal-police-spvm-profilage-discrimination-rapport>.

22 Voir à ce sujet Bernard Duhaime et Catherine Lafontaine, “Migrations et droits humains dans les Amériques: réflexions entourant l’Affaire Dorzema et al c République Dominicaine” dans Droits de la personne: La circulation des idées, des personnes, des biens et des capitaux, Actes des Journées strasbourgeoises 2012, Yvon Blais, Cowansville, 2013, 217.

23 Nadege Dorzema et al (République dominicaine) (2012), Cour IDH (Sér C) no 251 [Affaire Nadege Dorzema]. Pour une analyse de cette décision voir entre autres Bernard Duhaime et Christopher Campbell-Duruflé, dir, “Defending the Human Rights of Migrants in the Americas: The Nadège Dorzema et al v Dominican Republic Case,” RQDI hors-série (2013).

24 Notons que la Cour s’est référée ici au critère d’objectif (ou finalité) légitime, ce qu’elle n’avait pas fait dans l’Affaire Nadege Dorzema, supra note 23. D’une même manière, dans l’Affaire des Frères Landaeta Mejías et al c Venezuela (2014), Cour IDH (Sér C) no 281, la Cour n’a pas fait référence au critère de légalité.

25 Voir à ce sujet Silvia Serrano Guzmán, “La adjudicación de casos de igualdad y no discriminación por la Corte IDH Avances y retos pendientes” dans Ana María Ibarra Olguín, dir, Discriminación: piezas para armar, Mexico, Suprema Corte de Justicia de la Nación, 271. Sur la question de l’accès à la justice pour les migrants et leurs proches victimes de violations graves de leurs droits dans un pays de transit ou de destination, voir par exemple Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, Rapport au sujet des disparitions forcées dans le contexte des migrations, Doc NU A/HRC/36/39/Add.2 (2017), en ligne: <ap.ohchr.org/documents/dpage_e.aspx?si=A/HRC/36/39/Add.2>.

26 La CIDH et la Cour interaméricaine font référence à l’abréviation LGBTI. Sur la question de la terminologie employée, voir <www.oas.org/en/iachr/jsForm/?File=/en/IACHR/r/DLGBTI/precisiones.asp>. Voir aussi Office of the United Nations High Commissioner for Human Rights, Born Free and Equal, 2nd ed, Doc NU HR/PUB/12/06/Rev.1 (2019). Notons que d’autres abréviations sont parfois utilisées dans la littérature, dont, par exemple, l’abréviation 2ELGBTQQIA (bispirituel, lesbienne, gai, bisexuel, transgenre, queer, en questionnement, intersexe et asexuel) utilisée au Canada par l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées. Voir le Rapport final de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, en ligne: <www.mmiwg-ffada.ca/fr>. Voir plus généralement Commission internationale de juristes et le Service international pour les droits de l’homme, Principes sur l’application de la législation internationale des droits humains en matière d’orientation sexuelle et d’identité de genre, mars 2007, en ligne: Les Principes Jogjakarta <www.yogyakartaprinciples.org/wp/wp-content/uploads/2016/08/principles_fr.pdf>.

27 Voir aussi Chris Esdaile, Alejandra Vicente et Clara Sandoval, “Tortura: Discriminación a personas LGBTI: Corte IDH: Caso Azul Rojas Marín y otra Vs. Perú. Excepciones Preliminares, Fondo, Reparaciones y Costas. Sentencia de 12 de marzo de 2020. Serie C no 402” (2020) 4 Revista Debates sobre Derechos Humanos 191; Chiara Cardinali, “Azul Rojas Marín y otra vs Perú: The First Inter-American Court of Human Rights Case on Torture and Discrimination against the LGBTI Community” (2020) 43:2 DPCE Online 2967.

28 Voir par exemple Avis consultatif relatif à l’identité de genre ainsi qu’à l’égalité et la non-discrimination des couples de même sexe, Avis consultatif OC-24/17 (2017), Cour IDH (Sér A) no 24; Affaire Duque (Colombie) (2016), Cour IDH (Sér C) no 310; Affaire Atala Riffo et filles (Chili) (2012), Cour IDH (Sér C) no 239.

29 Voir à cet égard Affaire des femmes victimes de torture sexuelle à Atenco (Mexique) (2018), Cour IDH (Ser C) no 350 aux paras 197 et s [Affaire des femmes victimes]. Convention de la torture, supra note 4.

30 Affaire des femmes victimes, supra note 29 aux paras 311, 316.

31 Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Manuel pour enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, Doc NU HR/P/PT/8/Rev.1 (1999).

32 Organisation mondiale de la Santé, Guidelines for Medico-legal Care of Victims of Sexual Violence, 2003.

33 Rappelons qu’il s’était penché sur une opération semblable dans le cadre de l’Affaire Prison Miguel Castro Castro (Pérou) (2006), Cour IDH (Sér C) no 160 [Affaire Prison].

34 Cette affaire n’est pas sans rappeler l’Affaire du Caracaso où la Cour avait également condamné le Venezuela pour avoir eu recours aux forces armées pour intervenir dans le cadre de manifestations de masse dans la capitale, Caracas. Voir Affaire du Caracaso c Venezuela (2002), Cour IDH (Sér C) no 58.

35 Affaire du Centre de rééducation pour mineurs (Paraguay) (1999), Cour IDH (Sér C) no 112.

36 Convention relative aux droits de l’enfant, Rés AG NU 44/25, Doc off AG NU, 44e sess, supp no 49, Doc NU A/44/49 (1989). Voir aussi Les droits et la condition juridique des enfants, Avis consultatif OC-17/02 (2002), Cour IDH (Sér A) no 17 au para 24; Affaire des enfants de la rue (Villagrán Morales et al) (Guatemala) (1999), Cour IDH (Sér C) no 63 au para 194.

37 Sur cette approche basée sur la tolérance d’un risque prévisible, voir entre autres Affaire du massacre de Pueblo Bello c Colombie (2006), Cour IDH (Sér C) no 140; Affaire Sawhoyamaxa, supra note 9. Voir de façon plus générale Bernard Duhaime et Élise Hansbury, “Les DESC et le Système interaméricain: deus ex machina au dernier acte” (2020) 61:2 C de D 539 aux pp 557 et s.

38 Voir par ailleurs Catalina Martínez Coral et Carmen Cecilia Martínez, “Sexual Violence against Girls in Schools as a Public Health Issue: A Commentary on the Case Paola Guzmán Albarracín v. Ecuador” (2021) 29:1 Sexual & Reproductive Health Matters 1; Cecilia Palomo Caudillo, “El caso de Paola Guzmán Albarracín, violencia sexual infantil en el ámbito educativo en Ecuador” (2021) 9 Revista de Estudios Socioeducativos 246; David Villarroel et Jeniffer Benítez, “Responsabilidad penal individual de los Directores de Instituciones Educativas ante Delitos de violación: Caso: Paola Guzmán Albarracín vs. Ecuador” (2020) 1:10 Revista jurídica-Investigación en Ciencias Jurídicas y Sociales 13.

39 Voir aussi à ce sujet CIDH, X et Y c Argentine, Rapport nº 38/96, Affaire nº 10.506, OEA/Ser.L/V/II.95 Doc 7 rev. (1997).

40 Voir aussi à ce sujet Affaire Gonzales Lluy (Équateur) (2015), Cour IDH (Sér C) no 298 [Affaire Gonzales Lluy]; Duhaime et Hansbury, supra note 10 aux pp 342 et s.

41 Convention interaméricaine pour la prévention, la sanction et l’élimination de la violence contre la femme, 9 juin 1994 (entrée en vigueur: 3 février 1995), en ligne: <www.oas.org/en/mesecvi/docs/BelemDoPara-FRANCAIS.pdf>. Voir plus généralement Affaire Prison, supra note 33 au para 303; Affaire González et al (“Champ de coton”) c Mexique (2009), Cour IDH (Sér C) no 205 au para 395; Affaire Fernández Ortega c Mexique (2010), Cour IDH (Sér C) no 215 aux paras 118–30 [Affaire Fernández Ortega]; Espinoza González c Pérou (2014), Cour IDH (Sér C) no 289 aux paras 62 et s, 225–29.

42 Il est intéressant de constater à cet égard que la Cour ne traita pas des arguments relatifs à des allégations de violations de l’article 26 de la CADH, supra note 3, portant plus généralement sur les droits économiques, sociaux et culturels. Voir à ce sujet les propos du juge Grossi dissident dans Affaire Lagos del Campo (Pérou) (2017), Cour IDH (Sér C) no 340 aux pp 8, 9, vote de Eduardo Vio Grossi [Affaire Lagos del Campo]; Protocole de San Salvador, supra note 4.

43 Sarah R Champagne, “La loi pour contrer les violences sexuelles sur les campus va-t-elle assez loin?,” Le Devoir, 23 mars 2018, en ligne: <www.ledevoir.com/societe/523513/la-loi-pour-contrer-les-violences-sexuelles-sur-les-campus-va-t-elle-assez-loin>. Cet article traite du cadre législatif québécois applicable en la matière: Loi visant à prévenir et à combattre les violences à caractère sexuel dans les établissements d’enseignement supérieur, RLRQ c P-22.1.

44 La Cour aborda, entre autres, Les principes directeurs relatifs aux entreprises et aux Droits de l’Homme de l’Organisation des Nations Unies (ONU), Doc NU HR/PUB/11/4 (2011), et le cadre normatif international applicable au travail des enfants, dont la Convention des Nations Unies sur les droits des enfants, Rés AG 44/25, Doc off AG NU, 44e sess, supp no 49, Doc NU A/44/49 (1989) aux paras 150 et s, 177 et s.

45 Rappelons que, depuis l’Affaire Lagos del Campo, supra note 42, la Cour interaméricaine considère que l’article 26 est directement “justiciable,” en particulier dans le domaine du droit du travail et de la santé. Voir aussi Bernard Duhaime et Élise Hansbury, “Les développements en droit interaméricain pour l’année 2017” (2017) 55 ACDI 368 aux pp 378 et s; de même que Duhaime et Hansbury, supra note 37 aux pp 558 et s.

46 En ce qui a trait à la discrimination structurelle, la Cour indiqua, entre autres, que “le fait qu’une activité économique particulièrement risquée se soit installée dans la zone était lié à la pauvreté et à la marginalisation de la population qui y résidait et y réside. Pour ces habitants l’emploi dans cette industrie était le principal si non le seul qui leur était accessible, puisqu’il s’agissait de personnes très peu scolarisées et alphabétisées” (aux paras 188–89, se référant aux Principes directeurs sur l’extrême pauvreté et les droits de l’homme de l’ONU, Doc NU A/HRC/21/39 (2012)). En ce qui a trait à la discrimination intersectionnelle, elle constata que “la situation de pauvreté des victimes présumées, de même que les facteurs intersectionnels de discrimination déjà mentionnés, qui aggravaient la condition de vulnérabilité, (i) ont facilité l’installation et l’exploitation d’une usine dédiée à une activité particulièrement dangereuse, sans surveillance ni de l’activité dangereuse, ni des conditions d’hygiène et de la sécurité au travail par l’État; et (ii) ont conduit les victimes présumées à accepter un travail mettant en danger leur vie et leur intégrité ainsi que celles de leurs enfants mineurs. Par ailleurs, (iii) l’État n’a pas adopté de mesures visant à garantir l’égalité matérielle du droit au travail à l’égard d’un groupe de femmes en situation de marginalisation et de discrimination. Cette situation implique que, en l’espèce, le droit à des conditions de travail justes et satisfaisantes n’était pas garanti” (au para 203). Sur la question de la discrimination intersectionnelle, voir plus généralement Affaire IV et autres c Bolivie (2016), Cour IDH (Sér C) no 329 aux paras 288 et s, 319; de même que Affaire Gonzales Lluy, supra note 40; Affaire Fernández Ortega, supra note 41.

47 Voir par ailleurs, Felipe Caetano da Cunha et al, “The Case of the Firework Factory in Santo Antônio de Jesus As a Violation of Rights and the Convention on the Rights of the Child” (2021) 4:6 Laborare 194; Isabel Barbosa, Belén Ríos et Ariadna Tovar Ramírez, “State Obligations in the Context of Unhealthy Diets: Paving the Way within the InterAmerican Human Rights System” (2021) 11:1 Revista Internacional de Derechos Humanos 43 aux pp 59 et s.

48 Affaire Lagos del Campo, supra note 40; Affaire des travailleurs de Petroperú et autres (Pérou) (2017), Cour IDH (Sér C) no 344 [Affaire des travailleurs de Petroperú]; Affaire San Miguel Sosa et al (Venezuela) (2018), Cour IDH (Sér C) no 348 [Affaire San Miguel Sosa]. Voir à ce sujet Duhaime et Hansbury, supra note 37 aux pp 558–61.

49 Voir, de façon similaire, Affaire San Miguel Sosa, supra note 48 au para 221; Affaire des travailleurs de Petroperú, supra note 48 au para 193.

50 Mais voir a contrario la décision de la Commission interaméricaine dans l’Affaire Mortlock c les Etats-Unis, Rapport no 63/08, Cas 12.534, en ce qui a trait au droit d’en appeler d’une décision administrative en matière migratoire.

51 Voir notamment Affaire Maldonado Ordoñez (Guatemala) (2016), Cour IDH (Sér C) no 311 aux paras 71–74. Voir aussi Affaire du Tribunal constitutionnel (Pérou) (2001), Cour IDH (Sér C) no 71; Affaire Baena Ricardo, supra note 19; Affaire Ivcher Bronstein (Pérou) (2001), Cour IDH (Sér C) no 74; Affaire du Tribunal constitutionnel (Camba Campos) (Équateur) (2013), Cour IDH (Sér C) no 268 [Affaire Camba Campos]. Voir aussi Affaire Valle Ambrosio et al c Argentine (2020), Cour IDH (Sér C) no 408 au para 42 [Affaire Valle Ambrosio]; Affaire Ruiz Fuentes et al c Guatemala (2019), Cour IDH (Sér C) no 385 au para 157; Affaire Gorigoitía c Argentine (2019), Cour IDH (Sér C) no 382 au para 47; Affaire Valenzuela Ávila c Guatemala (2019), Cour IDH (Sér C) no 386 au para 120; Affaire Girón et al c Guatemala (2019), Cour IDH (Sér C) no 390 au para 114; Affaire Rodríguez Revolorio et al c Guatemala (2019), Cour IDH (Sér C) no 387 au para 126; Affaire Norín Catrimán et al c Chili (2014), Cour IDH (Sér C) no 279 au para 269; Affaire Liakat Ali Alibux c Suriname (2014), Cour IDH (Sér C) no 276 au para 85; Affaire Mendoza et al c Argentine (2013), Cour IDH (Sér C) no 260 au para 242; Affaire Mohamed c Argentine (2012), Cour IDH (Sér C) no 255 au para 91; Affaire Vélez Loor c Panama (2010), Cour IDH (Sér C) no 218 au para 178; Affaire Herrera Ulloa c Costa Rica (2004), Cour IDH (Sér C) no 107 aux paras 158–61.

52 “Condiciones de trabajo equitativas y satisfactorias que aseguren la salud del trabajador.”

53 Voir à ce sujet Bernard Duhaime, “Standard of Review in the Practice of the Inter-American Human Rights Institutions: Subsidiarity and the Struggle against Impunity in the Americas: What Room Is There for Deference in the Inter-American System?” dans Lukasz Gruszczynski et Werner Wouter, dir, International Law between Constitutionalization and Fragmentation: The Role of Law in the Post-National Constellation, Oxford, Oxford University Press, 2014, 289.

54 Nancy Fortin, “Quand le travail est à l’origine d’un infarctus massif du myocarde causant la mort,” Le Blogue SOQUIJ, 20 novembre 2018, en ligne: <blogue.soquij.qc.ca/2018/11/20/quand-le-travail-est-a-lorigine-dun-infarctus-du-myocarde-causant-la-mort/>, se référant à Desroches et Entreprises forestières T & W Seale inc, 2018 QCTAT 4093; Valcourt (Succession de) et Pourvoirie Rivière aux Feuilles inc, 2016 QCTAT 5503; Rolland Grenier Construction ltée et Sergerie (Succession de), 2017 QCTAT 3156.

55 Cette entité, propre au système politique colombien, est chargée d’enquêter, de sanctionner et de prévenir les irrégularités commises par des représentants du gouvernement, des agents publics, et des personnes exerçant des fonctions publiques. Voir Constitution de la Colombie de 1991, Gaceta Constitucional no 114 del jueves 4 de julio de 1991, arts 275–84.

56 CIDH, Résolution 5/2014, 18 mars 2014.

57 Il est intéressant de rappeler qu’en 2018, Urrego se classa deuxième à l’élection présidentielle de Colombie, derrière l’actuel président Iván Duque Márquez.

58 Voir à ce sujet Affaire López Méndoza (Venezuela) (2011), Cour IDH (Sér C) no 233; Affaire Castañeda Gutman (Mexique) (2008), Cour IDH (Sér C) no 184 [Affaire Castañeda Gutman]; Affaire Yatama (Nicaragua) (2005), Cour IDH (Sér C) no 127. Rappelons cependant que l’article 23 de la CADH, supra note 3, permet que l’État aménage les conditions d’exercice des droits politiques, incluant notamment des limites en certaines circonstances, du moment que ces limites soient prévues par la loi, qu’elles poursuivent un objectif prévu par la CADH et qu’elles satisfassent les critères de proportionnalité et de nécessité. Voir Affaire Argüelles et al (Argentine) (2014), Cour IDH (Sér C) no 288 aux paras 221–31.

59 Notons cependant que la Cour se garda bien de considérer que les droits des électeurs avaient été violés à proprement parler et de les considérer également comme victimes en l’espèce. Voir, d’une façon similaire, Affaire Chitay Nech et al (Guatemala) (2010), Cour IDH (Sér C) no 212, où ce même type de violation avait été plaidé sans succès par l’auteur, en représentation des victimes.

60 Voir par ailleurs Rafael Barrios Mendivil, “Procesos de destitución: Garantías y debido proceso: Corte IDH: Caso Petro Urrego vs Colombia. Excepciones Preliminares, Fondo, Reparaciones y Costas. Sentencia de 8 de julio de 2020. Serie C no 406” (2020) 4 Revista Debates sobre Derechos Humanos 199.

61 En plus de l’Affaire Castañeda Gutman, supra note 58, portant sur les élections présidentielles de 2006 au Mexique, pensons à l’Affaire Ricardo Canese (Paraguay) (2004), Cour IDH (Sér C) nº 111, portant sur les élections présidentielles de 1993 au Paraguay.

62 CIDH, Communiqué de presse no 126/16, “IACHR Expresses Concern over Impeachment of President of Brazil” (2 septembre 2016), en ligne: <www.oas.org/en/iachr/media_center/PReleases/2016/126.asp>.

63 CIDH, Affaire 12.955, Rapport 21/18.

64 Affaire Lopez Lone et al (Honduras) (2015), Cour IDH (Sér C) no 302 aux paras 173 et s.

65 À ce sujet, voir plus largement Affaire Camba Campos, supra note 51; Affaire de la Cour suprême de Justice (Quintana Coello et al) (Équateur) (2013), Cour IDH (Sér C) no 266 [Affaire de la Cour suprême de Justice].

66 Voir à ce sujet Affaire Kimel (Argentine) (2008), Cour IDH (Sér C) no 177 aux paras 66–67, 128. Voir aussi Affaire Castillo Petruzzi et al (Pérou) (1999), Cour IDH (Sér C) no 52 aux paras 117 et s; CIDH, Report on Terrorism and Human Rights, Doc OEA/Ser.L/V/II.116/Doc. 5, rev 1 corr (2002) au para 225.

67 En effet, une autre affaire disciplinaire a été initiée en janvier 2020 contre Urrutia Laubreaux à la Cour d’appel de Santiago, après que celui-ci ait convoqué le maire de la région métropolitaine de Santiago, en lien avec une série de cas de détention arbitraire lors d’une manifestation. Peu de temps après, la Cour d’appel de Santiago a accepté une autre plainte disciplinaire contre le juge, en rapport avec des interviews qu’il avait accordées à certains médias. Voir à ce sujet “Harassment and Smear Campaign against Human Rights Defender Daniel Urrutia Laubreaux,” Frontline Defenders (17 janvier 2020), en ligne: <www.frontlinedefenders.org/en/case/harassment-and-smear-campaign-against-human-rights-defender-daniel-urrutia-laubreaux>.

68 Sur la stabilité des mandats de juges, voir Affaire Camba Campos, supra note 51 aux paras 89–195; Affaire de la Cour suprême de Justice, supra note 65 aux paras 145–62.

69 CADH, supra note 3, art 78 (“1. Les États parties peuvent dénoncer la présente Convention à l’expiration d’un délai de cinq ans à partir de la date de son entrée en vigueur, moyennant un préavis d’un an, adressé au Secrétaire général de l’Organisation, qui doit en informer les autres États parties. 2. Cette dénonciation ne déliera pas l’État partie intéressé des obligations énoncées dans la présente Convention en ce qui concerne tout fait pouvant constituer une violation de ces obligations qui aurait été commis par ledit État antérieurement à la date de la prise d’effet de la dénonciation”).

70 Déclaration américaine, supra note 4.

71 Voir à ce sujet Baena Ricardo et al (Panama) (2003), Cour IDH (Sér C) no 104.

72 Voir l’article 46 de la Convention européenne des Droits de l’Homme, 4 novembre 1950, 213 UNTS 222 (entrée en vigueur: 3 septembre 1953), telle qu’amendée par les Protocoles no 11 et 14, complétée par le Protocole additionnel et les Protocoles nos 4, 6, 7, 12, 13 et 16. Voir à ce sujet Alexandra Huneeus, “Courts Resisting Courts: Lessons from the Inter-American Court’s Struggle to Enforce Human Rights” (2011) 44 Cornell Intl LJ 493.

73 Voir à ce sujet Ximena Soley et Silvia Steininger, “Parting Ways or Lashing Back? Withdrawals, Backlash and the Inter-American Court of Human Rights” (2018) 14:2 Intl J L Context 237. Voir aussi Silvia Haydeé Sánchez Gómez, Los Estados y la denuncia a la Convención Americana de Derechos Humanos: Los casos de Trinidad y Tobago, Perú y Venezuela, Maîtrise en Droit Publique, Université Carlos III, 2015, en ligne: <core.ac.uk/download/pdf/44310705.pdf>.

74 Voir à ce sujet Christina M Cerna, “Denunciation of the American Convention on Human Rights: The Trinidad and Tobago Death Penalty Cases,” en ligne: <www.corteidh.or.cr/tablas/r31601.pdf>.

75 Voir à ce sujet Sánchez Gómez, supra note 73. La dénonciation ne devint jamais effective, puisqu’annulée, après la chute de Fujimori, par le président Toledo. Voir à ce sujet, Human Rights Watch, Annual Report (2002), en ligne: <www.hrw.org/legacy/wr2k2/americas9.html>.

76 Voir OÉA, CIDH, “IACHR Deeply Concerned over Result of Venezuela’s Denunciation of the American Convention”, Communiqué no 64/13 (10 septembre 2013), en ligne: <www.oas.org/en/iachr/media_center/PReleases/2013/064.asp>. Voir aussi Carlos Ayala Cora, “Inconstitucionalidad de la denuncia de la Convención Americana Sobre Derechos Humanos por Venezuela” (2012) 10:2 Estudios constitucionales 643. Notons par ailleurs que les affaires vénézuéliennes abordées précédemment, traitant de faits antérieurs à l’effectivité de la dénonciation, relevaient encore de la compétence de la Cour interaméricaine.

77 “Venezuela Threatens to Withdraw from OAS Regional Body,” Deutsche Welle (26 avril 2017), en ligne: <www.dw.com/en/venezuela-threatens-to-withdraw-from-oas-regional-body/a-38590857#:~:text=Venezuela%20has%20threatened%20to%20pull,planned%20in%20the%20coming%20days>.

78 Affaire Montesinos Mejía c Équateur (2020), Cour IDH (Sér C) no 398; Affaire Carranza Alaracón c Équateur (2020), Cour IDH (Sér C) no 399; Affaire Valle Ambrosio, supra note 51; Affaire Fernández Prieto et Tumbeiro c Argentine (2020), Cour IDH (Sér C) no 411.

79 Affaire Almeida c Argentine (2020), Cour IDH (Sér C) no 416.

80 Affaire Noguera et al c Paraguay (2020) Cour IDH (Sér C) no 401.

81 Affaire Vicky Hernández et al c Honduras (2021) Cour IDH (Sér C) no 422.

82 Affaire Guachalá Chimbo et al c Équateur (2021) Cour IDH (Sér C) no 423.