Introduction
Au sein de l’Organisation des États américains,Footnote 1 la Commission et la Cour interaméricaines des Droits de l’Homme [respectivement la Commission et la Cour ou le Tribunal] sont les deux principaux organes chargés de veiller à la protection des droits de la personne dans les Amériques.Footnote 2 Ces instances sont habilitées à instruire des recours individuels intentés contre des États membres et portant sur des allégations de violations de la Convention américaine relative aux Droits de l’Homme (CADH)Footnote 3 et d’autres instruments interaméricains applicables.Footnote 4 La présente chronique portera sur certaines décisions rendues par la Cour pendant l’année 2018.
Dans le cadre de cette période, la Cour a émis un avis consultatif, vingt-et-un jugements sur le fond,Footnote 5 sept décisions sur l’interprétation de jugements antérieurs, trente-six résolutions sur le suivi des mesures de réparation de même que vingt-deux résolutions concernant des mesures provisoires.Footnote 6 La Commission, pour sa part, a adopté cent-dix-huit résolutions relatives à la recevabilité d’affaires, quinze relatives à l’irrecevabilité, six décisions entérinant une solution à l’amiable, quatre décisions sur le fond publiées et cent-vingt octroyant des mesures conservatoires.Footnote 7
Les deux instances ont abordé plusieurs thèmes d’actualité et d’importance particulière pour les Amériques, entre autres en ce qui a trait au droit d’asile, aux droits économiques, sociaux et culturels, aux disparitions forcées et aux exécutions extrajudiciaires, à la protection des femmes contre la violence, aux processus de justice transitionnelle, aux droits territoriaux des peuples autochtones, à la protection des défenseures des droits humains et des journalistes contre les actes de violence, de même qu’à l’adoption internationale.
L’institution de l’asile et sa reconnaissance comme droit humain dans le système interaméricain de protection (2018), Avis consultatif OC-25/18, Cour IDH (Sér A) no 25
Cet avis consultatif concernant le droit de rechercher et de recevoir l’asile en territoire étranger, demandé par l’Équateur, traite de la nature et la portée de cette institution à la lumière de l’article 22.7 CADH et du droit à l’égalité et à la non-discrimination. La Cour se prononça aussi sur le principe de non-refoulement et sa relation avec le droit à l’intégrité de la personne. Compte tenu de l’arrestation en avril 2019 de Julian Assange, qui vivait dans l’ambassade équatorienne à Londres depuis 2012, il est difficile de ne pas faire le lien entre cette demande de l’Équateur et sa décision récente de retirer l’asile diplomatique accordé au fondateur de WikiLeaks.Footnote 8
La Cour affirma d’abord qu’à ses yeux, l’asile est la figure directrice qui inclut toutes les institutions liées à la protection internationale des personnes contraintes de fuir leur pays de nationalité ou de résidence habituelle, ce qui comprend diverses modalités telles l’asile territorial, le statut de réfugié et l’asile diplomatique (i.e. extraterritorial) (para. 65). Le Tribunal aborda ensuite les origines de la “tradition latino-américaine de l’asile” (paras. 72–111) jusqu’à sa cristallisation dans les instruments internationaux (paras. 112–23) et son incorporation en droit interne (paras. 124–30).
Puis, la Cour aborda la nature et la portée du droit de rechercher et recevoir l’asile, prévu aux articles 22.7 CADH et XXVII de la Déclaration américaine des droits et des devoirs de l’Homme. Elle conclut que seul l’asile territorial bénéficie d’une protection à titre individuel. Pour le Tribunal, l’expression “en territoire étranger”, contenu dans ces dispositions, exclut l’asile diplomatique. Selon lui, l’asile diplomatique ne constitue pas, à ce jour, une norme coutumière régionale de droit interaméricain. La Cour rappela néanmoins que, bien que dans le cadre de l’expression de leur souveraineté, les États aient la faculté d’octroyer l’asile diplomatique, celui-ci doit être régi par des conventions interétatiques (paras. 144–63).
La Cour réaffirma que le principe de non-refoulement constitue une composante intégrale du droit de recherche et de recevoir l’asile, qui ne découle pas exclusivement du droit international des réfugiés, mais aussi du droit international des droits humains (paras. 179–81). La Cour indiqua que ce principe tire également sa source de l’article 13 de la Convention pour la prévention et la répression de la torture Footnote 9 et de l’article 22.8 CADH (paras. 182–88).
Le Tribunal interaméricain conclut que le non-refoulement est exigible par toute personne étrangère, y compris celle qui demande une protection internationale, qu’elle se trouve sur le territoire terrestre, fluvial, maritime ou aérien de l’État ou sous l’autorité ou le contrôle effectif (même extraterritorial) de l’État (para. 192). Il rappela enfin que les obligations découlant de l’article 22.8 CADH comportent des dimensions à la fois négatives et positives (paras. 194–98).Footnote 10
Affaire Ramirez Escobar et al. (Guatemala) (2018), Cour IDH (Sér C) no 351
Cette affaire traite de la triste réalité des adoptions internationales au Guatemala durant les années 1990 et début 2000, alors que le pays était le quatrième plus important pays “exportateur d’enfants.” Durant cette période, 95 pour cent des adoptions au pays étaient internationales, la plupart réalisées de façon extrajudiciaire, et constituaient un “commerce hautement lucratif” (paras. 61–71). En l’espèce, deux frères avaient fait l’objet d’une adoption internationale, au sein de familles différentes, malgré les contestations des parents et de membres de leurs familles dès leur prise en charge par l’État, jusqu’à quelques années après leur adoption respective. Une dénonciation téléphonique anonyme avait été à l’origine du placement des enfants dans une institution d’hébergement où ils restèrent durant 17 mois, sans contact avec leur famille avant d’être mis en adoption, puis adoptés aux États-Unis (paras. 79–136). Bien qu’il s’agissait de deux enfants, la présente affaire ne concerne que l’un d’entre eux.
Prenant compte du contexte de la faiblesse institutionnelle et normative qui régnait à l’époque des faits quant aux procédures d’adoptions d’enfants, la Cour indiqua que cette situation constituait un terreau fertile pour la formation de réseaux et structures criminels organisés dédiés au lucratif commerce de l’adoption internationale. Selon la Cour, la dimension quantitative et qualitative des irrégularités commises dans les procédures internationales et tolérées par les autorités publiques ayant le devoir de les contrôler et les superviser révèle une pratique criminelle systémique réalisée avec la participation ou l’acquiescence des agents de l’État. La Cour constata également que l’État guatémaltèque avait tardé plus d’une décennie, soit jusqu’en 2007, avant d’adopter des mesures spécifiques pour résoudre le problème des réseaux illégaux d’adoption internationale, alors qu’il était au fait de cette réalité dès 1996 (paras. 145–47).
Le Tribunal conclut à de nombreuses violations des droits de l’enfant et des parents en l’espèce. Il considéra que la séparation de la famille fut effectuée sans enquête suffisante, suivant une procédure ne respectant ni le droit interne, ni les standards internationaux, et sans motifs suffisants permettant de conclure que cette séparation était une mesure nécessaire à la lumière de l’intérêt supérieur de l’enfant. Par conséquent, la Cour conclut que la déclaration d’abandon de l’enfant avait constitué une violation des droits aux garanties judiciaires (art. 8.1 CADH) de même que des droits à la vie de famille sans ingérence arbitraire, à la protection de la famille et de l’enfant (articles 11.2, 17.1 et 19 CADH).
À l’égard de la procédure d’adoption, elle constata qu’aucune des exigences normativesFootnote 11 n’avait été remplie en l’espèce. Ainsi, la Cour déclara l’État responsable pour les violations aux droits d’être entendu, à la vie familiale, à la protection de la famille et de l’enfant (articles 8.1, 11.2, 17.1 et 19.1 CADH). Ici, le Tribunal nota que les adoptions internationales au Guatemala ne répondaient en rien à l’intérêt supérieur de l’enfant et suivaient plutôt les intérêts économiques des centres d’hébergements, notaires et autorités judiciaires impliqués. Par ailleurs, il ajouta que les réseaux d’adoption illégale profitaient à la fois de la corruption, de même que de la faiblesse institutionnelle et de la situation de vulnérabilité des mères et des familles vivant en situation de pauvreté. La Cour conclut également que les procédures de déclaration d’abandon et d’adoption extrajudiciaire n’étaient pas conformes aux standards interaméricains, constituant donc une violation de l’article 2 CADH.
Par ailleurs, le Tribunal identifia trois motifs de discrimination ayant, en l’espèce, influencé la décision de séparer les enfants de leur famille, soit la pauvreté des parents, les stéréotypes de genre relatifs aux rôles des parents, et l’orientation sexuelle de la grand-mère qui souhaitait prendre l’enfant en charge (paras. 278–303). À cet égard, la Cour spécifia que la mère avait fait l’objet de discrimination intersectionelle, étant une femme monoparentale en situation de pauvreté, et était, par conséquent, à plus grand risque d’être victime d’une séparation illégale ou arbitraire de ses enfants (para. 304).
Enfin, la Cour conclut à une violation du droit à la liberté de l’enfant qui fut séparé de sa famille et placé en centre d’hébergement en l’absence de mesures adéquates de supervision et de contrôle par l’État pour assurer que ce placement était conforme aux droits de l’enfant (violations des articles 7.1, 11.2, 17.1 et 19 en relation avec 1.1 et 2 CADH).
Affaire des femmes victimes de torture sexuelle à Atenco (Mexique) (2018), Cour IDH (Sér C) no 350
Cette décision de la Cour porte sur l’arrestation, la détention et la torture de nature sexuelle infligée en mai 2006 à onze femmes qui furent capturées dans le cadre d’interventions policières lors de manifestations près de San Salvador de Atenco et de Texcoco au Mexique. Ces sévices furent commis lors de la détention et du transfert des victimes à un centre de réadaptation sociale. Certaines démarches furent initiées dans le cadre d’une enquête criminelle, mais un seul policier fit l’objet d’une condamnation. Il convient de noter que l’État mexicain reconnut partiellement sa responsabilité pour certaines violations subies par les victimes.
Bien que la Cour considérât que l’arrestation et la détention préventive des victimes de même que l’usage de la force lors de l’intervention policière n’étaient pas nécessaires, étaient excessives, abusives, arbitraires et contraires aux articles 5, 7 et 11 de la Convention (paras. 228–62), il va sans dire que l’essentiel de ce jugement a traité de la violence sexuelle subie par les onze femmes.
Notons, dans un premier temps que la Cour considéra que ces actes, comprenant de nombreux viols, constituèrent de la torture en raison de l’intensité des souffrances commises de façon intentionnelle à l’endroit des victimes par des agents de l’État, dans le but de les humilier et de les sanctionner (paras. 181–99). Le Tribunal indiqua que ces actes de torture furent accompagnés de menaces et de violence verbale et psychologique stéréotypées et discriminatoires (para. 197), instrumentalisées pour exercer une forme de contrôle social répressif (paras. 200–04). Il considéra de plus que les actions du personnel médical carcéral avait accentué le caractère cruel et dégradant des violations subies par les victimes (paras. 205–07).
Ce faisant, la Cour a précisé que les propos des agents de l’État, particulièrement violents, grossiers, machistes et discriminatoires, avaient comme objectif de sanctionner les femmes pour avoir manifesté et voulu documenter les évènements de San Salvador de Atenco et de Texcoco (paras. 200–04, 211–19). Ces propos auraient visé à réaffirmer les préjugés confinant les femmes à des fonctions sexuelles et domestiques (para. 216). La Cour réitéra que cette torture sexuelle faisait partie d’une stratégie de contrôle social et d’instrumentalisation des corps des femmes, pour transmettre un message de condamnation et de répression des manifestations, dans le but de court-circuiter la contestation sociale dans la région (para. 216). Cette tactique était d’autant plus apparente du fait qu’après les abus commis par les policiers et le personnel médical, le gouverneur et plusieurs autres fonctionnaires de haut rang avaient attaqué publiquement la crédibilité des victimes en les qualifiant de “guerilleras” (para. 219). Selon la Cour, l’ensemble de ces actions ont non seulement enfreint l’article 5 CADH, mais également l’article 7 de la Convention Belem Do Para contre la violence faite aux femmes, ratifiée par le Mexique.
Par ailleurs, notons que la Cour condamna également le Mexique pour avoir failli à mener une enquête en suivant un perspective de genre, tel qu’exigé par la Convention Belem Do Para (paras. 310 et seq). Au contraire, l’enquête fut caractérisée par des stéréotypes sexistes, avait revictimisé les femmes et est contrevenue à l’obligation de l’État d’assurer le droit de celles-ci à l’égalité et à la non-discrimination (paras. 311, 316). Cette affaire s’ajoute aux nombreuses autres décisions de la Cour relatives au problème de la violence faite aux femmes au Mexique, à l’inefficacité des enquêtes s’y rapportant et à la discrimination qui en résulte.Footnote 12
Il s’agit de l’un des rares jugements relatifs au droit de réunion pacifique.Footnote 13 Réitérant les principes qu’elle avait énoncés dans l’Affaire Lopez Lone,Footnote 14 y compris en ce qui a trait aux restrictions acceptables de ce droit, la Cour indiqua que, bien qu’en l’espèce certains avaient fait usage de violence, l’État ne pouvait considérer que les manifestants, dans leur ensemble, constituaient un danger justifiant l’emploi de la force. Les autorités avaient l’obligation de distinguer les manifestants violents des manifestants pacifiques. Dans les circonstances, la Cour conclut que sept des victimes furent victimes d’une force excessive de la part des autorités policières pendant les manifestations, en contravention de leur droit de réunion pacifique (art. 15 CADH) (paras. 171–76).
Affaire V.R.P., V.P.C. et al. (Nicaragua) (2018), Cour IDH (Sér C) no 371
Cette affaire se rapporte à l’enquête criminelle et aux processus judiciaires qui s’en suivirent, relativement au viol d’une enfant de huit ans par un acteur non-étatique, présumément le père de la victime. La Cour eût l’occasion de développer des standards précis quant aux obligations de diligence dues des autorités lors d’enquêtes et de procès se rapportant à des crimes de nature sexuelle contre des victimes mineures, en particulier des filles. Ce faisant, le Tribunal a su compléter les critères établis dans sa jurisprudence relativement aux standards similaires applicables aux enquêtes et procès pour crimes, y compris pour crimes sexuels, commis à l’encontre des femmes,Footnote 15 repris entre autres dans l’Affaire des femmes victimes de torture sexuelle à Atenco commentée précédemment.
Encore une fois, la Cour interpréta la CADH à la lumière de la Convention des Nations Unies sur les droits des enfants Footnote 16 et de la Convention Belem Do Para (paras. 155–57) et considéra que les États ont l’obligation d’adopter des mesures de protection spéciales pour assurer la participation effective des victimes dans les processus judiciaires les concernant,Footnote 17 tout en évitant qu’elles soient revictimisées (paras. 158–69). Ainsi, les autorités doivent minimalement assurer un accès aux informations pertinentes relatives aux processus judiciaires, fournir une aide juridique gratuite aux victimes pour qu’elles puissent participer à ces processus et protéger leurs droits, incluant le droit d’être entendu dans un délai raisonnable. De plus, l’État doit veiller à ce que les victimes ne soient l’objet d’entrevue que si nécessaire et, le cas échéant, par un personnel compétent et formé, dans le respect des droits des victimes à la sécurité et à la vie privée. Finalement, les autorités doivent assurer aux victimes une aide psychologique et médicale immédiate fournie par des professionnels spécialisés et en conformité avec la perspective de genre et les besoins des mineurs.
La Cour traita de façon plus spécifique des conditions relatives aux examens physiques menés par les autorités sur des mineures victimes de crimes sexuels (paras. 169–71). Ainsi, ce type de procédure devrait être mené après avoir obtenu le consentement du représentant de la victime, lequel devrait être autorisé à choisir le sexe du ou de la professionnelle spécialisée en gynécologie infanto-juvénile qui mènera l’intervention. Celle-ci devra être menée de sorte à éviter ou minimiser les traumatismes additionnels et la revictimisation de l’enfant, se dérouler dans un endroit adéquat et dans le respect du droit à la vie privée de la victime, de même qu’en présence d’une accompagnateur/trice si demandée.
En l’espèce, la Cour considéra que l’examen ordonné par la cour nicaraguayenne n’était pas nécessaire puisque deux examens avaient déjà été menés par la victime et sa mère (paras. 172–83). De plus, elle constata que l’État n’avait pas pu prouver que la victime et sa mère avaient pleinement été informées de la nature et de la portée de cet examen, qu’elles avaient eu l’opportunité de choisir le sexe du professionnel qui mena l’intervention (ici un homme) et que celui-ci avait les qualifications nécessaires. Au contraire, la victime fut contrainte de subir l’examen à la suite des menaces des autorités (de la part du juge et du médecin) et l’intervention fut menée en présence de plusieurs personnes, dans un endroit inadéquat. Ainsi, l’intervention traumatisa la victime et la revictimisa. La Cour considéra ainsi que l’État avait non seulement failli à son obligation d’adopter des mesures spéciales de protection à l’endroit de l’enfant victime, mais qu’il avait aussi agi comme deuxième agresseur (para. 297).
Affaire López Soto et al. (Venezuela) (2018), Cour IDH (Sér C) no 362
Ici, la Cour eut à aborder de très graves allégations de violations dans un contexte d’esclavage sexuel commis par un particulier à l’encontre d’une jeune femme séquestrée au domicile de ce dernier et abusée pendant plusieurs mois. La Cour eut donc à développer son approche quant à la responsabilité incombant à l’État dans le contexte d’actes de violence faite aux femmes par des personnes privées.Footnote 18 Rappelons en effet que la Convention Belem Do Para prévoit l’obligation étatique d’adopter avec diligence due des mesures pour prévenir, enquêter et sanctionner ces violations. La Cour avait déjà indiquéFootnote 19 que pour évaluer tout manquement à ce type d’obligation, il convient: (1) d’établir que les autorités étatiques connaissaient ou auraient dû connaitre le risque réel et immédiat que la violation se produise et (2) qu’elles n’ont pas adopté les mesures raisonnables pour éviter que ce risque se matérialise (para. 140). Rappelons qu’en contexte de disparitions ou de violence faite aux femmes, la Cour a considéré que l’État devait faire preuve d’une diligence due de niveau accrue.Footnote 20
En l’espèce, elle indiqua que les autorités connaissaient ou auraient dû connaître le risque de violations subies par la victime se matérialisent, minimalement à partir du moment où les proches de celles-ci ont alerté les autorités de sa disparition (para. 157). Enfin, en plus de l’inadéquation de la législation pertinente à l’époque,Footnote 21 la Cour considéra que les autorités étatiques n’avaient pas adopté les mesures raisonnablement nécessaires dans les circonstances pour éviter que ce risque se matérialise. Par exemple, les autorités policières ignorèrent et n’enregistrèrent pas formellement les dénonciations faites par les proches de la victime à au moins six reprises. De plus, alors qu’elles connaissaient l’identité de l’agresseur présumé, elles se contentèrent de tenter de le contacter par téléphone, sans vérifier son identité ou localiser son domicile à l’aide de données à leur disposition (registres publics, comptes téléphoniques, etc.) (paras. 166–71).
Le Tribunal considéra que l’esclavage sexuel, définit comme la combinaison de l’exercice des attributs de propriété sur une personne avec l’existence d’actes de nature sexuelle qui restreignent ou annulent l’autonomie sexuelle d’une personne contrevient à l’article 6 CADH (interdiction de la servitude ou de l’esclavage) (para. 178).Footnote 22 Ici, la Cour conclut que l’auteur de la séquestration et des violences sexuelles avait exercé les attributs du droit de propriété sur la victime contrôlant non seulement ses mouvements, mais tous les aspects de sa vie. De plus, l’acharnement et la violence des actes sexuels imposés ont, selon la Cour, annulé l’autonomie de la victime (para 180). Pour le Tribunal, ces actes d’esclavage sexuel ont été rendus possible en raison des omissions de l’État abordées précédemment (para. 182), engageant sa responsabilité internationale pour des violations aux droits à l’intégrité, à la liberté à la dignité et à la personnalité juridique de la victime, de même que de l’interdiction de l’esclavage et de la discrimination (arts. 5, 7, 11, 3, 6 et 1.1 CADH).
Autre contribution importante, la Cour accepta de qualifier les sévices subis par la victime d’actes de torture au sens de la Convention, nonobstant le fait que ceux-ci avaient été commis par une personne privée et non directement par un agent de l’État — une condition traditionnellement requise par le droit international pour que des actes cruels, inhumains et dégradants puissent constituer de la torture stricto sensu. En effet, pour le Tribunal, il suffisait en l’espèce de considérer que les actes commis étaient intentionnels, menés dans un objectif précis et étaient d’un degré de gravité et d’intensité assez sévère (paras. 187–88). Pour ce faire, la Cour constata que, contrairement à la définition contenue dans d’autres instruments internationaux, l’article 5.2 CADH n’exige pas que les actes soient commis par un ou des agents de l’État (para. 189).Footnote 23 Faisant appel aux travaux préparatoires de la Convention, elle indiqua que ce type de violation peut également résulter de l’instigation, du consentement, de l’acquiescence ou d’une omission des autorités étatiques (para. 192).
Il est intéressant de constater que, ce faisant, la Cour voulut interpréter l’article 5.2 CADH d’une façon évolutive, à la lumière de l’article 29 CADH qui empêche l’interprétation d’une disposition de la Convention comme “[a]utorisant un État partie … à supprimer la jouissance et l’exercice des droits et libertés reconnus dans la … Convention ou à les restreindre plus qu’il n’est prévu dans ladite Convention” ou “restreignant la jouissance et l’exercice de tout droit ou de toute liberté reconnus par la législation d’un État partie ou dans une convention à laquelle cet État est partie” (paras. 193–96). Ainsi, pour la Cour, la Convention Belem Do Para, ratifiée par le Venezuela, exige une telle interprétation plus ouverte du concept de torture, en raison de l’obligation stricte qu’elle impose aux États de prévenir et sanctionner la violence contre les femmes, y compris dans la sphère privée, lorsque ces actes ont été tolérés ou autorisés par les autorités étatiques, comme ce fut le cas en l’espèce (paras. 197–99).Footnote 24
Ce développement jurisprudentiel majeur sur la question de la responsabilité étatique pour des actions d’acteurs privés sera très pertinent pour le Canada alors que viennent de s’achever les travaux de la Commission nationale d’enquête sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées.
Affaire Herzog et al. (Brésil) (2018), Cour IDH (Sér C) no 353
Cette affaire très attendue traite de la détention, la torture et l’assassinat de M. Vladimir Herzog en octobre 1975 en pleine dictature militaire au Brésil. Rappelons que la victime était alors un auteur, dramaturge et journaliste très prisé, membre du parti communiste brésilien, qui fut contraint de se livrer aux autorités militaires pour être interrogé. Des témoins avaient rapporté avoir vu et entendu la victime pendant sa détention, y compris pendant des séances de torture orchestrées par les services de renseignement militaires. Le lendemain de son arrestation, l’armé brésilienne avait déclaré que Herzog s’était suicidé en détention (paras. 121–25). Plusieurs recours judiciaires furent entamés, mais rapidement classée en raison de l’application d’une loi d’amnistie, de la prescription et du principe de la chose jugée (paras. 126–67).
Tout comme elle l’avait fait par exemple dans l’Affaire Almonacid,Footnote 25 la Cour indiqua qu’au moment des faits, il existait une norme jus cogens de droit international coutumier interdisant la torture et qualifiant cette pratique de crime contre l’humanité lorsque perpétrée dans le cadre d’une attaque généralisée contre la population civile (paras. 211–21). Elle considéra, en l’espèce, que les violations subies par la victime s’inscrivaient dans le cadre d’une telle attaque, menée par l’armée et le pouvoir exécutif, dans le cadre de l’“Opération Radar,” contre les opposants de la dictature, y compris les journalistes et les membres du parti communiste brésilien (paras. 116–20, 234–43). Notons que, tout comme dans Almonacid, la Cour fit une telle qualification de faits antérieurs à la date de reconnaissance de la compétence obligatoire de la Cour (le 10 décembre 1998) uniquement dans le but d’évaluer la portée de l’obligation de l’État d’enquêter ce crime (paras. 232, 243 et seq., 251).Footnote 26
Ainsi, le Tribunal put conclure que la loi d’amnistie adoptée en 1979 ne pouvait pas s’appliquer à ce type de crime et ne pouvait donc pas justifier le classement des enquêtes criminelles (paras. 277 et seq.). Rappelons qu’au printemps 2010, dans le cadre d’une décision très controversée, le Tribunal fédéral suprême du Brésil avait déclaré que cette loi était conforme à la Constitution brésilienne. La Cour interaméricaine avait par la suite rendu son arrêt dans l’Affaire Gomez Lund Footnote 27 à l’automne 2010 déclarant cette loi contraire à la CADH, une décision très contestée dans certains secteurs de la population brésilienne. La présente affaire a donc permis à la Cour de réitérer sa position sur l’illégalité de cette loi et de conclure que l’État avait failli à son obligation de mener des enquêtes diligentes quant aux crimes subis par M. Herzog.
Cette qualification permit également à la Cour de rejeter la justification de prescription, les crimes contre l’humanité étant imprescriptibles (paras. 261 et seq.). Enfin, comme elle l’avait fait dans l’Affaire Bámaca Velásquez, elle considéra que le principe de non bis in idem ne pouvait s’appliquer lorsque les procès antérieurs invoqués comme chose jugée avaient été décidés en contravention du droit international des droits humainsFootnote 28 (en l’espèce un accusé qui avait reconnu avoir participé à l’interrogatoire de Herzog avait été disculpé en application de la loi d’amnistie) (paras. 270 et seq). Enfin, en plus de conclure à la violation du droit aux garanties judiciaires et à la protection judiciaire de la victime et de ses proches (paras. 311–12), la Cour reconnu que l’État brésilien avait violé leur droit à la vérité, entre autres parce que les autorités leur avaient refusé l’accès aux archives militaires pertinentes et parce que l’armée avait diffusé une fausse version des faits en annonçant le suicide de Herzog (paras. 328–39).
Il va sans dire que cet arrêt est d’une actualité étonnante, alors que le Président brésilien propose de commémorer le coup d’État mené par l’armée en avril 1964 et que le Ministère de l’éducation a envisagé de réécrire les programmes scolaires pour “réviser” le rôle de l’armée dans les atrocités commises pendant la dictature.Footnote 29
Affaire Ordenes Guerra et al. (Chili) (2018), Cour IDH (Sér C) no 372
Cette décision porte sur sept recours civils en lien avec des crimes commis durant la dictature de Pinochet dont les réclamations pour dommages avaient été rejetées pour prescription entre 1999 et 2003. Ici, l’État accepta les faits et reconnut sa pleine responsabilité pour les violations aux droits relatifs à l’accès à la justice (arts. 8.1 et 25.1 CADH). Il est pertinent de rappeler que dans l’Affaire Almonacid,Footnote 30 la Cour avait qualifié de crimes contre l’humanité les exécutions sommaires, la torture et autres attaques généralisées ou systématiques commises par le régime de Pinochet contre certains secteurs de la population civile.
La Cour conclut qu’en l’espèce la violation du droit à l’accès à la justice résultait d’une interprétation judiciaire contraire à la CADH, soit l’application de la prescription à des crimes contre l’humanité. Par conséquent, la Cour estima que les victimes furent empêchées de faire valoir leur droit de réclamer et éventuellement recevoir compensation pour les préjudices moraux allégués (paras. 76 et seq). Ainsi, elle affirma le devoir de l’État de leur garantir un accès rapide et efficace à un nouveau recours judiciaire pour corriger cette situation ou à un mécanisme alternatif répondant à ce besoin. De plus, s’appuyant sur le principe de complémentarité, la Cour considéra opportun de définir, à partir des critères raisonnables et prudents issus de la jurisprudence récente de la Cour suprême de justice du Chili, les montants d’indemnités compensatoires à octroyer en l’espèce pour les dommages causés par ce déni d’accès à la justice (paras. 116–22).
Affaire Escaleras Mejia et al. (Honduras) (2018), Cour IDH (Sér C) no 361
La présente affaire porte sur la mort du défenseur des droits environnementaux, Carlos Escaleras Mejia, en octobre 1997 et sur l’impunité partielle qui en résulta. La responsabilité internationale de l’État hondurien fut retenue pour les violations du droit à la vie, à la liberté d’association et aux droits politiques (arts. 4, 16 et 23 CADH) de la victime et du droit à l’accès à la justice (arts. 8.1 et 25.1 CADH) et au droit à l’intégrité de la personne (art. 5 CADH) des membres de sa famille en raison du défaut de l’État de répondre au meurtre par l’adoption de mesures judiciaires conformes aux normes interaméricaines.
Il est opportun de rappeler ici que, dans l’Affaire Kawas Fernández,Footnote 31 la Cour avait reconnu le contexte de violence exacerbée contre les défenseurs des droits environnementaux durant la décennie de 1995 à 2005 au Honduras. Qui plus est, la Cour nota l’existence d’une situation particulièrement risquée pour les défenseurs des droits environnementaux dans l’Affaire Luna López,Footnote 32 laquelle portait sur le meurtre d’un militant écologiste survenu quelques mois à peine après la mort de Carlos Escaleras Mejia. La présente affaire contribue ainsi à apporter un éclairage supplémentaire sur la situation des défenseurs des droits environnementaux au Honduras. Celle-ci est d’autant plus pertinente compte tenu de la condamnation par un tribunal hondurien en novembre 2018 de sept personnes pour le meurtre de Berta Cáceres, militante écologiste et défenseure des droits des peuples autochtones, survenu en mars 2016.Footnote 33
Affaire Carvajal Carvajal et al. (Colombie) (2018), Cour IDH (Sér C) no 352
Dans cette affaire, un journaliste, dont le travail portait sur des sujets d’intérêt public, fut assassiné par deux hommes en moto en avril 1998. Par la suite, plusieurs membres de sa famille subirent des menaces et de l’intimation, forçant certains d’entre eux à quitter le pays. Vingt ans après les faits, l’enquête criminelle n’est toujours pas résolue. Ce cas s’inscrit dans une longue série d’interventions du système interaméricain quant à la situation des journalistes en Colombie.Footnote 34 Le Tribunal prit d’abord compte du contexte généralisé d’impunité pour les violences contre les journalistes qui existait en Colombie au moment des faits.Footnote 35 Puis, il conclut que le meurtre du journaliste constituait non seulement une violation du droit à la vie, mais également au droit à la liberté d’expression (arts. 4.1 et 13.1 CADH),Footnote 36 alors que les manquements relatifs à l’enquête, dans un tel contexte d’impunité, constituait une violation des droits aux garanties judiciaires et à la protection judiciaire (arts. 8 et 25 CADH). Cette affaire est malheureusement encore d’actualité en Colombie où l’impunité relative aux meurtres de journalistes est parmi les plus importantes au monde.Footnote 37
Affaire Villamizar Durán et al. (Colombie) (2018), Cour IDH (Sér C) no 364
Cette affaire est particulièrement intéressante en ce qu’il s’agit de la première décision de la Cour concernant le phénomène des “falsos positivos” durant le conflit armé interne colombien. Les faits en l’espèce se déroulèrent entre 1992 et 1997 et regroupent en fait quatre pétitions distinctes que la Commission décida de joindre en une seule affaire. Dans chacun des cas, les victimes, des civils, moururent entre les mains d’agents étatiques. À la lumière de la preuve contextuelle, la Cour décrivit le modus operandi des forces étatiques comme se caractérisant par des actions intentionnelles visant à camoufler des exécutions extrajudiciaires de civils en prétendant que les victimes étaient des membres de groupes armées non-étatiques morts au combat. La Cour nota le recours à différents mécanismes de distorsion des scènes de crime de même que diverses tactiques pour déformer les circonstances des décès (para. 125). Elle blâma également l’État pour la conduite des enquêtes qui étaient volontairement orientées de façon à occulter les faits. Selon la Cour, cette pratique porta atteinte au droit à la vérité des familles et de l’ensemble de la société (para. 190). Rappelons que le Tribunal avait condamné le Brésil d’une façon similaire pour avoir fourni une fausse version des faits entourant la mort de M. Herzog abordée précédemment.
Affaire Omeara Carrascal et al. (Colombie) (2018), Cour IDH (Sér C) no 368
Au lendemain de cette décision, la Cour se prononça à nouveau sur des faits survenus durant la décennie 1990 dans le contexte du conflit armé interne colombien. Cette fois, la Cour trancha sur trois cas d’homicides attribués à des actions de groupes paramilitaires de connivence avec les forces de sécurité étatiques, pour lesquels l’État reconnut partiellement sa responsabilité internationale. Une controverse demeurait néanmoins concernant les allégations de torture durant la disparition forcée d’une des victimes.
Ici, la Cour estima que la preuve était insuffisante pour tenir l’État responsable pour les actes de torture allégés (paras. 192–200). Elle conclut cependant que le défaut d’investiguer la disparation forcée avec diligence durant près de vingt-quatre ans contrevint au droit à la vérité, lequel découle du droit à l’accès à la justice des membres de la famille de la victime (paras. 256–57).
De plus, la Cour retenu la responsabilité internationale de l’État pour les violations alléguées relatives aux droits aux garanties judiciaires et à la protection judiciaire des victimes et des membres de leurs familles (arts. 8.1 et 25.1 CADH). Elle ajouta que les mesures prises depuis 2016 dans le cadre du processus “Justicia y Paz” constituaient un développement favorable, mais ne permettaient pas d’exonérer l’État colombien pour les vingt-quatre années de manque de diligence dans la conduite des enquêtes et pour l’effet préjudiciable sur les enquêtes de son défaut de protéger les membres des familles des victimes malgré les menaces et l’intimidation (paras. 228–55).
Finalement, la Cour nota que les évènements au cœur de la présente affaire entrainèrent le déplacement forcé de plusieurs membres des familles des victimes, dont trois mineurs, qui durent trouver refuge ailleurs dans le pays en raison des menaces et de l’intimidation. Après analyse de la preuve, la Cour considéra que ces déplacements forcés étaient dus aux actions de l’État, notamment en raison de trois facteurs: (1) la connivence entre les agents de l’État et les groupes paramilitaires; (2) les manquements relatifs à la conduite diligente des enquêtes; et (3) le défaut de l’État de prendre des mesures adéquates pour protéger les familles des victimes, bien qu’il eût connaissance du risque. Par conséquent, la Cour conclut à des violations au droit à la libre circulation et résidence, à l’intégrité de la personne, à la protection de la famille et à la protection de l’enfant (arts. 22.1, 5, 17 et 19 CADH).
Affaire Isaza Uribe et al. (Colombie) (2018), Cour IDH (Sér C) no 363
Cette affaire de disparition forcée est particulière en ce qu’elle porte sur l’enlèvement d’un leader syndical colombien alors qu’il était emprisonné conformément à un mandat émis par un juge (paras. 55 et seq). Bien qu’il fût impossible d’établir avec certitude l’identité des ravisseurs, la Cour conclut néanmoins à une disparition forcée en se basant sur les preuves circonstancielles permettant de présumer que la capture avait été menée par des unités paramilitaires opérant notoirement dans la région avec la collaboration ou l’acquiescence des forces armées colombiennes (paras. 42–54 et 112 et seq.). La Cour précisa à ce sujet que la disparition forcée avait débuté à partir du moment de l’enlèvement par les membres présumés des forces paramilitaires (para. 86).
Par ailleurs, la Cour nota que, puisque la victime était sous le contrôle des autorités étatiques au moment de sa capture par les ravisseurs, et considérant l’ensemble des preuves circonstancielles, l’État était présumé responsable des violations subies. En effet, dans de telles circonstances, conformément à la jurisprudence constante de la Cour, l’État engage sa responsabilité pour les violations subies à moins de renverser le fardeau de la preuve et de fournir une explication satisfaisante quant au sort de la victime (paras. 88 et seq). Notons que la Cour avait adopté une approche similaire quelques mois auparavant dans l’Affaire Munárriz Escobar Footnote 38 relative à la disparition forcée de la victime lors de sa détention dans un commissariat de police.Footnote 39
Après avoir établi qu’à l’époque l’État avait adopté la doctrine contre-insurrectionnelle de “l’ennemi interne” et considérait les syndicats comme des éléments subversifs (paras 127 et seq.), la Cour conclut que la disparition forcée avait comme objectif de miner l’exercice du droit à la liberté d’association de victime et de l’empêcher d’œuvrer au sein de son organisation syndicale (paras 145 et seq.).Footnote 40
Affaire Alvarado Espinoza et al. (Mexique) (2018), Cour IDH (Sér C) no 370
Pour une première fois, la Cour a abordé le phénomène des disparitions forcées ayant lieu dans le contexte de la lutte au narcotrafic. En l’espèce, les trois victimes furent capturées en décembre 2006 par une dizaine d’hommes en uniformes militaires dans une petite ville de l’état de Chihuahua, à la frontière nord du Mexique (paras. 68 et seq, 76 et seq.). Plusieurs plaintes furent présentées aux autorités, qui menèrent sans succès diverses procédures, y compris au sein du système de justice militaire (paras. 110 et seq.). Au contraire, les proches des victimes furent l’objet de menaces et durent s’enfuir pour se protéger, ce qui valut l’émission d’ordonnances de mesures provisoires par la Cour interaméricaine en 2010, 2011, 2012, 2015, 2017 et 2018 (paras. 143 et seq.).Footnote 41
En plus d’apprécier les témoignages et autres preuves circonstancielles entourant les disparitions, le Cour tint compte du contexte particulier de la politique de militarisation de la lutte contre le narcotrafic (paras. 54 et seq.). Elle constata que, bien que l’État ait l’obligation d’assurer la sécurité et maintenir l’ordre public face au fléau de la violence issue du crime organisé et du trafic de la drogues, toute mesure adoptée doit être compatible avec le respect des droits humains. Selon le Tribunal, les mesures de sécurité adoptées doivent être mises en œuvre par les forces policières civiles et l’État ne devrait avoir recours aux forces militaires que suivant certaines conditions strictes: (1) ce recours doit être extraordinaire, justifié, temporaire et restreint aux nécessités de la situation; (2) les forces armées doivent être subordonnées et complémentaires aux effectifs civils et ne doivent pas exercer les fonctions judiciaires des autorités civiles; (3) le recours aux forces armées doit être règlementé et assujetti à des mécanismes de contrôle; et (4) il doit également être supervisé par des pouvoirs civils compétents et indépendants (para. 182).Footnote 42 Par ailleurs, toute violation des droits humains commise par les forces armées doit faire l’objet d’enquêtes diligentes par les autorités judiciaires civiles et non militaires (para. 183).
Dans les circonstances, la Cour constata que la lutte contre le narcotrafic avait été progressivement confiée aux forces armées à partir de 2006, sans que les conditions mentionnées plus haut, en particulier quant au caractère nécessaire, extraordinaire et temporaire du recours aux forces armées, ne soient respectées (paras. 175 et seq.). Ce faisant, le Tribunal prit en considération les conclusions du Groupe de Travail sur les Disparitions Forcées ou Involontaires de l’ONU (GTDFI), après la visite effectuée par celui-ci au Mexique en 2011, à l’effet que l’adoption de cette politique de militarisation de la lutte contre le narcotrafic avait été accompagnée par une augmentation des disparitions forcées au pays (paras. 61, 63).Footnote 43 Par ailleurs, la Cour nota que ces opérations n’étaient pas assujetties à des contrôles civils et que la justice militaire avait été chargée de certaines des enquêtes relatives aux violations des droits humains alléguées (paras. 110 et seq.). Elle conclut donc que ces disparitions forcées avaient occasionné une série de violations de la Convention (arts. 3, 4, 5, 7, 8, 25) de même que de la Convention interaméricaine sur la disparition forcée des personnes, instrument ratifié par le Mexique (paras. 204–05).
Il est intéressant de constater qu’en 2018, le Mexique a adopté une loi contre les disparitions forcées saluée par plusieurs.Footnote 44 De plus, notons que, depuis l’élection du président Andrés Manuel López Obrador, le gouvernement mexicain a proposé d’établir une nouvelle milice civile, proposition qui est présentement révisée par les autorités nationales, suites aux critiques de nombreux acteurs, y compris de la part de la Cour Suprême du Mexique et du GTDFI.Footnote 45
Affaire Terrones Silva et al. (Pérou) (2018), Cour IDH (Sér C) no 360
D’une façon similaire, la Cour eut à traiter d’une série de disparitions forcées d’une professeure de sciences sociales et de deux étudiants universitaires dans le cadre de la lutte armée contre l’organisation du Sentier Lumineux. Encore une fois, pour considérer que les victimes avaient bel et bien fait l’objet de disparitions forcées, la Cour prit note de l’ensemble de la preuve circonstancielle entourant la capture des victimes (paras. 136–38). En l’espèce, la Cour conclut qu’il existait une constante de persécutions, violences et disparition forcées contre les professeurs et étudiants de certaines universités, associés au parti communiste péruvien et au Sentier Lumineux entre 1980 et 1995, dans le cadre de sa stratégie contre-insurrectionnelle des autorités (paras. 148, 154). Le Tribunal prit note de preuves testimoniales de la détention des victimes, et de l’absence d’explication plausible par l’État. Cette affaire n’est pas sans rappeler la célèbre Affaire de l’Université Cantuta,Footnote 46 dans le cadre de laquelle le groupe Colina des services de renseignements de l’armée péruvienne s’était établi sur le campus universitaire et y avait commis de nombreux abus, entre autres en enlevant et faisant disparaître des étudiants et un professeur.
Affaire Coc Max et al. (Massacre de Xamán) (Guatemala) (2018), Cour IDH (Sér C) no 356
Cette affaire est la plus récente dans la série de décisions rendues par la Cour concernant le conflit armé interne qui sévit au Guatemala entre 1962 et 1996. En l’espèce, il était question d’un massacre commis par les forces armées nationales en octobre 1995 dans un village autochtone. Les victimes et leurs familles s’étaient établies à la “finca Xamán” un an plus tôt après avoir été déplacées de force en raison du conflit armé interne. Elles avaient survécu à des exactions survenues dans leurs villages d’origine en 1982.Footnote 47 Onze personnes, incluant trois enfants, furent tuées durant le massacre et 29 personnes subirent des blessures graves.
La Cour reprit ses conclusions factuelles quant à la violence disproportionnée dont a été victime le peuple Maya durant le conflit armé interne au Guatemala (paras. 28–34). À cet égard, il est pertinent de rappeler que la Cour a toujours refusé de qualifier cette violence de “génocide” au sens du droit international, invoquant soit l’absence de compétence matérielleFootnote 48 ou celle de compétence temporelle.Footnote 49 Le contraste est notoire ici avec la jurisprudence portant sur le régime Pinochet au Chili, alors que la Cour n’hésita pas à qualifier les actes du régime dictatorial de “crimes contre l’humanité,” comme en témoigne encore cette année l’Affaire Ordenes Guerra Footnote 50 discutée précédemment.
Ici, ni la Commission ni les représentants des victimes n’allégèrent que les exécutions forcées et les autres violations au cœur du litige constituaient des actes de “génocide.” Toutefois, ils allégèrent une violation de la part de l’État de l’obligation de non-discrimination prévu à l’article 1.1 CADH en lien avec les violations aux droits à la vie et à l’intégrité de la personne (art. 4 et 5 CADH) de même qu’au devoir de protection des enfants (art. 19 CADH). La Cour leur donna raison, concluant que les actions des forces militaires en l’espèce découlaient certes d’une conception discriminatoire des peuples autochtones (para. 119). Cependant, la Cour rejeta l’argument selon lequel l’État était également responsable d’une violation du droit à l’égalité devant la loi (art. 24 CADH) en raison de la “dépriorisation” des enquêtes, laquelle constituait, selon la Commission, une expression de discrimination raciale. En l’espèce, à l’instar de l’Affaire Chichupac,Footnote 51 la Cour estima que la preuve ne permettait pas d’élucider des faits concrets de discrimination dans la tenue des enquêtes.
Affaire San Miguel Sosa et al. (Venezuela) (2018), Cour IDH (Sér C) no 348
Cette décision se rapporte à la crise politique et institutionnelle de 2002 au Venezuela quand des parties politiques et des membres de la société civile tentèrent d’initier un référendum consultatif portant sur le deuxième mandat du président de l’époque, Hugo Chávez. Entre le 28 novembre et le 1 décembre 2003, les trois plaignantes, alors fonctionnaires au Conseil National des Frontières, apposèrent leur signature sur une demande de référendum révocatoire du mandat présidentiel. Quelques mois plus tard, ces trois fonctionnaires furent congédiées sans motif apparent. Cette affaire porte ainsi sur diverses violations allégées entourant leur congédiement, que la Commission présenta comme des représailles pour leur participation au plébiscite.
Tout d’abord, il est nécessaire de signaler que, malgré la dénonciation de la CADH par l’État vénézuélien (effective depuis le 10 septembre 2013), la Cour était compétente pour entendre la présente affaire, puisque celle-ci se rapportait à des faits antérieurs à la dénonciation (art. 78.2 CADH). Quant au fond, la Cour considéra d’abord le contexte d’instabilité, polarisation politique et intolérance envers la dissidence qui régnait au moment des faits, lequel a encouragé des comportements discriminatoires envers ceux et celles étant perçus comme des opposantes politiques (para. 148). Par conséquent, la Cour conclut que le congédiement des trois fonctionnaires était un détournement de pouvoir dont la véritable nature était des représailles pour l’exercice légitime d’un droit à caractère politique, prévu par la Constitution vénézuélienne (para. 150). Elle tint ainsi l’État responsable pour les violations aux droits à la participation politiques et à la liberté d’expression (arts. 23.1b), 23.1c) et 13.1 CADH) ainsi qu’au principe de non-discrimination énoncé à l’article 1.1 CADH.Footnote 52
Finalement, quant aux allégations relatives au droit travail, la Cour invoqua le principe de iura novit curia afin de se déclarer compétente pour analyser les violations alléguées au droit au travail. Il est opportun de noter ici qu’un tel droit n’apparait pas explicitement dans la Convention et qu’il est plutôt inféré de l’article 26 CADH portant sur les droits économiques, sociaux et culturels. Qui plus est, le Tribunal réitéra l’idée que le droit au travail inclut une obligation de l’État de garantir les droits à l’accès à la justice et à la protection judiciaire effective, autant dans la sphère publique que dans la sphère privée des relations de travail (para. 221).Footnote 53 Ainsi, à la lumière de ce qui précède, la Cour conclut que le congédiement des trois fonctionnaires était arbitraire et avait pour but de décourager la dissidence politique, ce qui constitue une enfreinte au droit au travail en relation avec les droits à la participation politique, à la liberté d’expression et à l’accès à la justice de même qu’avec le principe de non-discrimination (arts. 26, 23.1, 13.1, 8.1, 25.1 et 1.1 CADH).
La présente affaire n’est pas sans rappeler la décision importante de la Cour dans l’Affaire Lagos del Campo,Footnote 54 citée abondamment en l’espèce, dans laquelle la Cour avait conclu notamment que le congédiement du plaignant à la suite de déclarations politiques dans un journal local enfreignait son “droit à la stabilité d’emploi”Footnote 55 et, par conséquent, constituait une violation de l’article 26 CADH, lequel garantit la réalisation progressive des droits économiques, sociaux et culturels. Ce faisait la Cour semblait avoir renversé sa position antérieure quant à la non-justiciabilité de ce type de droits.Footnote 56 Le cas d’espèce et les deux affaires qui suivent suggèrent une confirmation de ce renversement de position.Footnote 57
Affaire Poblete Vilches et al. (Chili) (2018), Cour IDH (Sér C) no 349
Pour la première fois, la Cour adopta une décision portant sur le droit à la santé en tant que droit autonome, intégré aux droits économiques, sociaux et culturels (DESC), protégés par l’article 26 de la CADH.Footnote 58 L’affaire concerne les soins inadéquats offerts à la victime -un homme alors âgé de 71 ans- puis le décès de celui-ci, lors de sa deuxième admission dans un hôpital public en périphérie de Santiago au Chili.
En l’espèce, il fut démontré que la victime avait été l’objet de négligence médicale lors de sa première hospitalisation (octroi de soins inadéquats et inappropriés, falsification de documents, désinformation des membres de la famille, etc.). Une fois son congé accordé, la famille de la victime dût avoir recours à une ambulance privée pour le reconduire, faute d’ambulance disponible à l’hôpital public. Après avoir constaté son état de santé déplorable, ses proches durent le reconduire une deuxième fois à l’hôpital public où les autorités ne purent le mettre sous respirateur artificiel, faute d’instruments disponibles. La victime ne reçut pas de soins adéquats et mourut. Les autorités médicales fournirent aux proches de la victime diverses versions contradictoires des causes du décès (paras. 41–58).
Après avoir réitéré sa position relativement à la justiciabilité des DESC protégés par l’article 26Footnote 59 et commenté les sources du droit à la santé dans le corpus iuris du droit international (paras. 100–17), la Cour a indiqua que les personnes âgées constituent un groupe placé en situation de vulnérabilité faisant souvent l’objet de discrimination et en faveur desquelles les États ont l’obligation d’adopter des mesures particulières de protection dans le domaine de la santé, pour assurer leur autonomie et leur indépendance en leur octroyant des soins efficaces et continus sans discrimination (paras. 130–32).
Ainsi, reprenant les critères relatifs aux soins de santés abordés dans l’Affaire Gonzales Lluy,Footnote 60 se référant à la qualité, l’accessibilité, l’acceptabilité et l’adaptabilité des soins (para. 121), la Cour considéra que l’État avait failli à son obligation de fournir de façon immédiate des soins répondant à ces critères, tenant compte du contexte d’urgence et de la vulnérabilité particulière de la victime (paras. 118 et seq., 125 et seq.). Elle considéra que ce traitement était discriminatoire et que, sur la balance des probabilités, ces omissions avaient probablement causé des souffrances et la mort de la victime, en violation de ses droits à la vie, à l’intégrité physique et morale, à la santé et à l’égalité (arts. 4, 5, 26 et 1.1 CADH).
Il est intéressant de constater que la Cour considéra également que les actes de falsification et la négligence des autorités médicales relativement à leur obligation d’obtenir le consentement libre et éclairé des représentants de la victime constituaient non seulement une violation du droit à la santé, mais aussi du droit à l’accès à l’informations, à la liberté et à la dignité (arts. 26, 13, 7 et 11 CADH) (paras. 157–73).
Affaire Cuscul Pivaral et al. (Guatemala) (2018), Cour IDH (Sér C) no 359
Dans le cadre de cette affaire, la Cour aborda la situation de quarante-neuf personnes infectées par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) qui n’avaient pas reçu les soins nécessaires des autorités médicales guatémaltèques depuis 1992. Il est intéressant de constater que, bien qu’elle l’ait fait quelques mois plus tôt dans l’Affaire Poblete Vilches commentée précédemment, la Cour interaméricaine a réitéré in extenso sa position quant à la justiciabilité du droit à la santé garanti par l’article 26 de la CADH (paras. 72–107). Rappelons cependant que la Commission, dans son rapport sur la recevabilité de la pétition, avait considéré que les faits allégués ne pouvaient constituer une violation de l’article 26 de la CADH, en raison de la décision de la Cour dans l’Affaire des cinq retraités. Footnote 61
Ce fut par ailleurs l’occasion pour la Cour d’approfondir les standards interaméricains applicables plus spécifiquement aux personnes vivant avec le VIH,Footnote 62 un groupe marginalisé en conditions de vulnérabilité. Ainsi, celles-là doivent avoir accès à des informations, soins et ressources de qualité pour assurer la prévention et le traitement de l’infection, dont des examens fréquents et la thérapie antirétrovirale. L’État doit également assurer les soins visant à prévenir et guérir les maladies découlant du VIH et les mesures psychosociales de suivi (para 108–17).
En l’espèce, la Cour considéra que, de 1992 à 2004, les victimes ne reçurent aucun soin et qu’après 2004 les soins reçus par certaines victimes étaient irréguliers ou inadéquats. Les patients ne reçurent pas l’information périodique nécessaire quant à leur état de santé et ne purent avoir accès à des mesures d’ordre psychosociales (paras. 118–27). La Cour conclut donc que l’État avait failli à son obligation de garantir des soins de santé en conformité avec les critères d’accessibilité et de qualité requis, en contravention de l’article 26 CADH. Ces omissions occasionnèrent également des atteintes au droit à l’intégrité morale et physique des victimes et au droit à la vie des quinze personnes décédées (paras. 154 et seq.).
Notons également que le Tribunal conclut que les victimes avaient fait l’objet de discrimination. Plus particulièrement, certaines subirent une ou plusieurs formes de discrimination intersectionnelle, en raison de leurs conditions socioéconomiques, leur isolement, leur genre, de leur statut de femme enceinte, et de personne porteuse du VIH (paras. 128–38).
Affaire Peuple autochtone Xucuru et ses membres (Brésil) (2018), Cour IDH (Sér C) no 346
Cette décision est la plus récente dans la lignée jurisprudentielle de la Cour sur les droits de propriété collectifs des peuples autochtones.Footnote 63 Dans la présente affaire, il est question du processus de reconnaissance, de délimitation, de démarcation et d’émission de titres de même que l’assainissementFootnote 64 du territoire ancestral du peuple Xucuru au Brésil. Dans un premier temps, la Cour offrit un résumé clair et concis de l’état de la jurisprudence relative aux droits de propriété collectifs des peuples autochtones (paras. 115–19). Elle traita ensuite les deux enjeux au cœur du litige, soit les obligations internationales de l’État quant au processus administratif de reconnaissance du territoire traditionnel du peuple Xucuru et les mesures prises pour garantir la sécurité juridique de l’usage et de la jouissance du droit de propriété collectif des plaignants.
Elle ajouta que le retard de quatre ans entre l’homologation et l’enregistrement des terres, de même que le délai de 20 ans et qui court toujours pour indemniser et expulser tous les tiers de bonne foi n’étaient imputables qu’à l’État. Par conséquent, la Cour conclut à une violation du droit à la garantie judiciaire d’un délai raisonnable (art. 8.1 CADH).
La Cour estima également que l’État n’a pas rempli ses obligations positives de garantir les droits de propriété collectifs du peuple Xucuru, en raison notamment de la situation d’insécurité juridique qui perdure et qui compromet le droit des membres de ce peuple à l’usage et à la jouissance pacifique de leur territoire traditionnel. Tout d’abord, la Cour considéra que le processus administratif de démarcation, de titularisation et d’assainissement du territoire était partiellement inefficace, puisque le peuple Xucuru ne jouit toujours pas pleinement de ses droits sur son territoire, bien que celui-ci bénéficie d’une reconnaissance formelle de propriété collective depuis novembre 2005. Ensuite, le Tribunal nota que le retard excessif dans la résolution des actions judiciaires intentées par des tiers allochtones contrevient au droit à la sécurité juridique du peuple Xucuru. Par conséquent, elle conclut à une violation des droits à la protection judiciaire et à la propriété collective des plaignants (arts. 25 et 21 CADH).
Conclusion
Une fois de plus, les décisions de la Cour interaméricaine ont contribué au développement de standards détaillés relatifs à la protection des droits humains dans les Amériques cette année, notamment quant à la protection des droits des femmes, particulièrement en ce qui concerne les violences de nature sexuelle. La Cour a par ailleurs consolidé sa position sur la justiciabilité des droits économiques, sociaux et culturels. Concernant la protection des groupes en situation de vulnérabilité, la Cour a rendu cette année des décisions importantes sur les adoptions internationales d’enfants, sur l’accès aux soins de santé des personnes atteintes du VIH et des personnes âgées, sur la protection des défenseures des droits humains et des journalismes, de même que sur la défense des droits territoriaux des peuples autochtones.
Qui plus est, l’Avis consultatif de la Cour sur l’institution d’asile est indéniablement important dans le contexte de la crise migratoire qui sévit à travers les Amériques et des mesures prises par certains gouvernements à l’égard des migrants. La jurisprudence du Tribunal interaméricain à venir s’annonce tout aussi intéressante avec des décisions portant sur d’importants thèmes, tels que le droit à la sécurité sociale, la liberté d’association et l’exercice des droits politiques, la protection des enfants et le droit au travail, l’accès aux soins de santé et les droits territoriaux des peuples autochtones.