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La communication politique
Published online by Cambridge University Press: 15 March 2006
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La communication politique, Jacques Gerstlé, Paris : Éditions Dalloz/Armand Colin, 2004, (coll. Compact civis), 297 pages.
Le domaine de la communication politique évolue très rapidement sur le plan de la pratique comme de la recherche. À cet égard, l'ouvrage de Jacques Gerstlé brosse un tableau de synthèse exhaustif et actuel des fondements théoriques, des techniques et des pratiques en communication politique. Il s'appuie sur des recherches et des exemples récents provenant surtout de France et des États-Unis, ce qui peut être pertinent du point de vue comparatif, mais risque de réduire l'intérêt des chercheurs canadiens pour l'ouvrage. De nombreux tableaux, figures et statistiques témoignent de la place accordée à l'analyse empirique et quantitative. Il s'agit à notre avis d'un livre excellent dont le point fort réside dans la diversité des connaissances exposées, la systématicité de la présentation et l'actualité des exemples. Il sera utile aux politologues et, plus généralement, aux chercheurs en sciences sociales ou en communication et journalisme, de même qu'aux praticiens et aux étudiants désireux de saisir les multiples approches et phénomènes de la communication politique.
- Type
- BOOK REVIEWS
- Information
- Canadian Journal of Political Science/Revue canadienne de science politique , Volume 39 , Issue 1 , March 2006 , pp. 191 - 193
- Copyright
- © 2006 Cambridge University Press
Le domaine de la communication politique évolue très rapidement sur le plan de la pratique comme de la recherche. À cet égard, l'ouvrage de Jacques Gerstlé brosse un tableau de synthèse exhaustif et actuel des fondements théoriques, des techniques et des pratiques en communication politique. Il s'appuie sur des recherches et des exemples récents provenant surtout de France et des États-Unis, ce qui peut être pertinent du point de vue comparatif, mais risque de réduire l'intérêt des chercheurs canadiens pour l'ouvrage. De nombreux tableaux, figures et statistiques témoignent de la place accordée à l'analyse empirique et quantitative. Il s'agit à notre avis d'un livre excellent dont le point fort réside dans la diversité des connaissances exposées, la systématicité de la présentation et l'actualité des exemples. Il sera utile aux politologues et, plus généralement, aux chercheurs en sciences sociales ou en communication et journalisme, de même qu'aux praticiens et aux étudiants désireux de saisir les multiples approches et phénomènes de la communication politique.
L'ouvrage comporte deux volets principaux. Le premier expose les fondements théoriques des analyses, aborde la question de la modernisation de l'espace public et introduit une réflexion sur les effets de la communication persuasive. Le second volet traite des usages de la communication politique.
Pour commencer, l'auteur donne les principales définitions de cet “ objet flou ” qu'est la communication politique. Il présente les conceptions instrumentale, œcuménique, compétitive et délibérative de la communication politique et compare les principaux paradigmes issus de la science politique ou des sciences sociales qui permettent de les penser. Trois dimensions du processus de communication, dont l'importance et la pertinence varient selon les approches théoriques, sont étudiées : la dimension pragmatique, la dimension symbolique et la dimension structurelle. Suite à cet examen, l'auteur se prononce en faveur d'une conception de la communication politique alliant le symbolique et le stratégique. Il explicite ensuite quatre approches sous-tendant les rivalités théoriques, soit les approches comportementaliste, structuro-fonctionnaliste, interactionniste et dialogique.
Gerstlé traite dans un deuxième temps des transformations relatives à la modernisation de l'espace public. Il aborde les enjeux liés à la médiatisation de l'espace public, qui existent tant de façon anticipatoire, avec le “ mythe de la société informationnelle ”, que dans la réalité, avec les innovations effectives ou les impacts du processus publicitaire moderne. Il examine les techniques de rationalisation de la compétition politique, y compris le marketing politique, les sondages d'opinion et les études qualitatives. Indice de l'abondance de la littérature et des ressources sur le sujet, cette section comporte plusieurs exemples, tableaux et figures. L'auteur propose enfin une réflexion sur la publicité politique et sur la menace de dérive vers la marchandisation de la communication politique.
Dans un troisième temps, Gerstlé se penche sur les effets de la communication persuasive. Il décrit quatre mécanismes pouvant influencer les préférences politiques, soit la persuasion directe, les effets d'agenda, le cadrage (framing) et l'amorçage (priming), puis précise leurs conditions d'utilisation et leurs impacts. L'observation des effets “ macropolitiques ” des transformations de l'espace public l'amène à discuter de deux constats opposés. Le premier fait état d'un “ média-malaise ” et d'une démocratie à deux vitesses, tandis que le second, optimiste, décrit un accroissement des compétences civiques et de l'engagement citoyen dans l'espace public.
Le second volet de l'ouvrage rend compte des pratiques de communication en fonction de différentes positions de pouvoir ou situations politiques. Structurée selon la distinction classique entre conquête du pouvoir et exercice du pouvoir, cette partie couvre tout d'abord les élections, puis l'exercice du pouvoir comme tel, pour ensuite se pencher sur la participation citoyenne sous ses diverses formes, traditionnelles ou non. Tirant profit d'une littérature et d'études tout aussi diversifiées qu'imposantes, le chapitre consacré à la communication électorale est particulièrement exhaustif quant aux aspects traités et aux exemples utilisés. Celui qui traite de l'exercice du pouvoir se limite par contre presque exclusivement au cas de la France, en étudiant les problématiques concernant le président, le gouvernement et leur popularité. Le lecteur pourra malgré tout y puiser l'information pertinente à la création de parallèles et en tirer des pistes de réflexion ou d'études. La participation politique des citoyens est abordée à travers les comportements d'information à la fois médiatiques et interpersonnels, l'adhérence aux organisations politiques, les mobilisations ou manifestations ponctuelles, la formation de l'agenda public et les stratégies de visibilité. Enfin, le processus de démocratisation de la communication politique amène l'auteur à discuter des promesses de la démocratie électronique, des ambiguïtés de la démocratie locale et des défis de la démocratie délibérative.
L'effort de l'auteur pour s'extirper des lieux traditionnels de l'exercice du pouvoir afin d'intégrer des éléments d'analyse et de réflexion sur de nouveaux enjeux et phénomènes mérite d'être salué. Par contre, ses propos se limitent à l'ordre politique interne des États. Les stratégies communicationnelles en temps de crise ou de guerre, l'appropriation des nouvelles technologies de communication par des groupes sociaux ou politiques marginalisés ou illégaux, ou les répercussions de la mondialisation et des relations internationales sur la communication politique ne sont que peu ou pas abordés. Résultat d'un choix judicieux, la question du rôle des médias, de leur impact et des dynamiques qu'ils génèrent, se pose tout au long de l'ouvrage plutôt que d'être confinée à une section particulière.
La rigueur de la démarche, l'étendue des aspects abordés et l'objectivité de l'exposé font de l'ouvrage de Jacques Gerstlé une lecture extrêmement pertinente pour qui s'intéresse à la communication politique. La présentation, limpide malgré le nombre et la diversité des sujets couverts, compense les nombreuses coquilles et les lacunes du travail d'édition. La bibliographie plus que respectable et l'index détaillé sont, quant à eux, très appréciés. À titre d'ouvrage de synthèse, il s'agit d'une référence pratique et relativement complète qui suggère de nombreuses pistes de réflexion et d'études pour des recherches plus poussées.